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Après la fin de Cyrlight



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Informations

» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 17/07/2017 à 00:19
» Dernière mise à jour le 17/07/2017 à 00:22

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Chapitre 16 : Tears in heaven
« Time can bring you down, time can bend your knees
Time can break your heart, have you begging please »


Tears in heaven - Eric Clapton



Aphrodite frissonna. Elle n'aimait pas du tout l'atmosphère oppressante qui flottait dans cet endroit. Elle se sentait mal à l'aise, comme si tout l'univers qui l'entourait tendait à lui faire comprendre qu'elle n'y était pas la bienvenue. L'espace d'un instant, elle songea à tourner les talons.

Elle était une déesse guerrière, son courage n'était plus à démontrer. Malgré cela, elle hésitait. Devait-elle poursuivre ou renoncer ? Elle avait ravalé sa fierté pour venir jusqu'ici, mais elle en prendrait tout de même un coup si tout ceci ne la menait pas à ce qu'elle désirait obtenir.

Un cri assourdissant lui vrilla les tympans. Ils avaient perçu son approche et ils étaient désormais au courant de sa présence en ces lieux. Aphrodite se mit à courir, mais ses gestes étaient lents, incontrôlés, à cause de la gravité particulière à laquelle cette dimension était soumise. Elle n'eut le temps de parcourir qu'une poignée de mètres avant qu'il n'apparaisse.

Giratina se dressait devant elle, menaçant, sous sa forme originelle. Sa face repoussante était défigurée par la colère de voir quelqu'un pénétrer dans son royaume sans y avoir été invité, en particulier lorsque le quelqu'un en question était une ancienne partisane d'Arceus et de la Confrérie originelle.

Il grogna férocement dans sa direction. Aphrodite ne cilla pas, en dépit de la réserve qu'elle éprouvait. Elle n'avait jamais eu peur, ni de lui ni de Lilith, mais elle était vulnérable. Elle était venue seule, sans Sulfura, et surtout sans intention de se battre. Elle désirait simplement parler.

- Ce ne sont pas des sentiments négatifs qui m'ont conduite ici, affirma-t-elle en espérant que cela suffirait à le convaincre. Vois. Je n'ai ni arme, ni escorte. Je sais que vous êtes plus nombreux que moi. Je ne suis pas une menace, Giratina.
- Que nous veux-tu, dans ce cas ?
- Je souhaite m'entretenir avec ta femme.
- Ma femme ? Crois-tu vraiment qu'elle va accepter de t'adresser la parole ? Nous autres Renégats, nous respectons la paix instaurée par Athéna, mais cela ne change rien. Jamais nous ne pardonnerons à aucun d'entre vous.
- Ce n'est pas son pardon que je suis venue chercher, mais des conseils. Elle seule peut me les donner.
- Pourquoi cela ?
- Parce qu'elle fait partie de la nouvelle Confrérie.

Giratina demeura silencieux. Il observait Aphrodite avec insistance, plongeant ses yeux au plus profond des siens dans l'espoir d'y déceler une indication sur ses véritables motivations. Elle paraissait sincère, même s'il s'interrogeait. Qu'elle veuille parler à Lilith était étonnant en soi, mais ce n'était rien à côté de l'intérêt nouveau qu'elle semblait porter au groupe d'humains.

- Très bien, s'inclina-t-il. Va. Je te préviens, toutefois, que c'est à tes risques et périls. Je suis intimement convaincu qu'elle ne va pas apprécier de voir quelqu'un comme toi souiller la pureté de notre antre.

Aphrodite courba la tête en signe de remerciement, puis tenta de se mouvoir. Son corps assimila rapidement comment il convenait de se déplacer dans cette dimension. Bientôt, elle parvint à faire des bonds démesurés entre les différentes plateformes, dispersées dans le Monde Inversé.

Des éclats de voix finirent par atteindre ses oreilles. Elle n'était plus très loin de son objectif. Elle exécuta un dernier saut, mélange de grâce et de souplesse, pour atterrir élégamment sur l'un des plateaux. Aussitôt, trois paires d'yeux la fusillèrent. Elle serait morte sur-le-champ s'ils avaient eu le pouvoir de la tuer.

- Qu'est-ce que tu fais ici, sale garce ?

La question avait été posée par une femme aux cheveux roux, noués derrière sa nuque par un ruban vert, assorti à la couleur de ses yeux pétillants. Son teint avait l'apparence de la porcelaine et sa silhouette était musculeuse. Des jambes épaisses, des bras solides et des épaules carrées se découpaient sous des vêtements confortables. Un plastron en cuir recouvrait une chemise blanche et un pantalon en peau disparaissait dans des bottes noires.

Scathach n'attendit pas la réponse et bondit sur ses pieds en dégainant ses nunchakus. Elle les fit tournoyer sur eux-mêmes avec dextérité, avant de se placer en position d'assaut. Une autre rousse, dont la chevelure formait une auréole autour de son corps et descendait jusqu'à ses cuisses, l'imita. Les lèvres de Lilith étaient retroussés et ses prunelles marron lançaient des éclairs.

Une jeune femme blonde, à la peau si pâle qu'elle paraissait presque blanche et à la blondeur tirant vers des nuances platine, fut la première à se mettre debout. Ses iris bleu indigo ne lâchèrent pas Aphrodite tandis qu'elle saisissait une pokéball. Celle-ci était un peu particulière, car elle n'était ni en métal, ni rouge et noir, mais semblait constituée de cristal. Les doigts de Yohanna se crispèrent dessus.

Seuls les deux hommes présents n'avaient pas bougé, conservant une attitude neutre. Crios était l'un d'eux. Huit ans après son face à face avec Cronos, il était presque redevenu celui qu'il avait été autrefois, grâce aux bons soins de Yohanna. Ses yeux gris ne paraissaient plus aussi vides, même s'ils donnaient toujours l'air d'avoir connu le pire, ce qui était le cas, et il avait réussi à retrouver l'usage de la parole depuis quelques mois.

L'autre était Satan. Assis avec nonchalance, il n'en conservait pas moins sa grâce et son élégance naturels. Pendant des siècles, Aphrodite avait été sous le charme de ses boucles ténébreuses, de la noirceur profonde se son regard, de sa peau halé et du sourire éclatant qui ornait un visage androgyne, avant de se résoudre à accepter le fait qu'il ne l'aimerait jamais, tout accaparé qu'il était par son amour secret pour Lilith.

- Sors de chez moi ! cracha cette dernière.

Un sifflement strident retentit lorsque son Séviper jaillit de nulle part pour se poster à ses côtés, les crochets scintillants. Il suffirait d'un mot ou d'un geste de sa maîtresse pour qu'il fonde sur Aphrodite et tente de lui arracher la gorge.

- Pas avant que tu m'aies écoutée. J'ai besoin de ton aide.

Lilith et Scathach s'esclaffèrent en même temps, hilares. La Première recouvra rapidement son sérieux, cependant, et la Guerrière raffermit sa prise sur ses armes, cherchant à intimider sa rivale de toujours. Elles n'étaient pas réellement sur leurs gardes : elles attendaient simplement d'avoir un prétexte pour l'attaquer. Leur volonté de lui faire du mal se lisait sur leur visage.

- De mon aide ? Comme c'est amusant. Sais-tu quel prix ont payé mes amis pour m'avoir aidée ? Ça a coûté la vie à deux d'entre elles, et un millénaire de persécution à tous les autres. Quant à toi, tu comptais parmi leurs bourreaux, il me semble.
- C'est le passé. À présent...
- Le passé ? aboya Lilith. Crois-tu qu'il suffise d'une ordonnance de Némésis pour que j'oublie ce que vous nous avez fait ? Tout le monde n'est pas Athéna. Moi, je ne pardonne pas.
- Ce n'est pas ce que je suis venue te demander. Lilith... Ton sort aurait également dû être le mien. J'ai péché, moi aussi. J'ai trahi l'Alpha, ses valeurs et la Confrérie originelle.
- Peu m'importe. Je me moque complètement de tes actes ou de ceux d'Arceus. Découvrir l'existence de Pandore, puis la voir mourir sous ses yeux ensuite ne m'a apporté aucune satisfaction. La vengeance est jouissive, certes, mais uniquement au moment où on l'assouvit. Après, il n'en reste plus rien, car contrairement à ce que l'on a cru, elle ne répare pas les torts.
- Je sais que nous t'avons fait du mal, bien qu'il m'ait fallu des siècles pour réaliser que tu ne le méritais pas. Tu ne peux pas vivre éternellement dans la rancoeur, Lilith.
- Non seulement je le peux, mais surtout je le fais. Arceus m'a arrachée à mon mari, il m'a volé ma capacité à enfanter, il a tué mes amies... Il m'a privée de tout ce qui me revenait de droit. Tu pourras te prosterner à mes pieds tout le temps que tu voudras, ça ne changera rien. Personne ne me rendra ces mille années que j'ai perdues, les enfants que j'aurais pu avoir et Artémis et Circé.

La Première lui jeta un regard méprisant, face auquel Aphrodite resta de marbre. Elle avait déjà un plan. Elle connaissait l'orgueil démesuré de son interlocutrice, mais également la rage que pouvait provoquer en elle certains sujets. Elle n'avait pas le choix, elle allait devoir appuyer là où la souffrance était déjà à vif :

- Finalement, tu as raison. Tu n'es pas la mieux placée pour m'apporter ton soutien. Il aurait fallu que tu saches ce que cela faisait d'être une mère, or comme tu viens toi-même de le souligner, c'est quelque chose que tu ne connaîtras jamais.

Scathach n'eut pas le temps d'esquisser un geste que Lilith se jetait déjà sur Aphrodite. Elle lui asséna un coup puissant qui la projeta vers l'arrière. La gravité ralentit légèrement sa chute, ce qui ne l'empêcha pas de s'écraser sur le sol dans un bruit sourd. Sans lui laisser le temps de se redresser, la Première plaqua son avant-bras sur sa gorge, prête à l'étouffer.

- C'est toi qui ignores tout de ce dont tu parles. J'ai eu une fille... en quelque sorte. Et Arceus l'a détruite, comme tout ceux qui ont eu le malheur de m'approcher au cours de ma longue existence.
- Tu veux parler... du dragon ?

Aphrodite avait du mal à s'exprimer à cause du poids qui comprimait ses cordes vocales. Lilith desserra son emprise sur elle pour la frapper si violemment au visage qu'elle lui en fit saigner la lèvre. Elle se releva ensuite pour dominer la Beauté de toute sa hauteur.

- Oui, le dragon. C'est moi qui l'ai guidée. C'est moi qui l'ai façonnée. Et c'est moi qui l'ai menée à sa perte. J'ai tenté de faire d'elle une Succube, l'instrument de ma vengeance, au lieu de quoi je l'ai tuée. Je l'ai sacrifiée, dans l'unique but de prendre enfin ma revanche sur Arceus.

Un sanglot retentit derrière elle. Si Yohanna avait appris à vivre avec sa tristesse et à faire son deuil, le fait d'entendre mentionner la mort de Cassy était particulièrement difficile pour elle. À tâtons, elle chercha la main de Crios dans son dos, qui entrelaça avec ses doigts avec les siens pour les presser doucement.

- Que les choses soient claires, Aphrodite, poursuivit Lilith. Si tu es encore en vie, c'est uniquement grâce à Némésis et Athéna. Parce qu'elles sont nos épées de Damoclès. C'est la seule chose qui nous empêche, Scathach et moi, de vous découper en lamelles, toi et ton cher ami Apollon.
- Apollon n'est pas mon ami. Je ne l'ai en tout cas jamais considéré comme tel.

Le regard d'Aphrodite se posa sur Satan et elle vit qu'il l'observait aussi. Bien qu'elle l'ait aimé pendant longtemps, il ne subsistait rien de l'amour qu'elle avait autrefois éprouvé pour lui. Il s'était estompé le jour où elle avait fait la connaissance de cet humain, au Mont Braise, dont elle s'était éprise.

- Pars, ordonna Lilith. Pars et ne t'avise jamais de revenir ici ici.

Elle tourna les talons d'un geste méprisant et invita les autres à en faire de même. Ils s'éloignaient tous ensemble le long de la plateforme, marchant de front, lorsque Aphrodite, restée seule en retrait, lâcha :

- Moi aussi, j'ai une fille.

L'effet fut immédiat. Ils s'immobilisèrent pour ramener leur attention sur elle. Crios, Satan et Yohanna affichaient une expression de stupeur, Lilith et Scathach de méfiance. Elles l'observèrent avec circonspection pendant qu'Aphrodite développait :

- J'ai dit que je n'étais pas venue me faire pardonner, parce que votre pardon ne m'intéresse pas. C'est le sien que je veux.
- Qui... commença la Première, avant de s'interrompre.
- Tu la connais. Tu la connais sûrement même mieux que moi. Elle fait partie de ta Confrérie. Elle porte le glyphe feu et elle s'appelle Emily.

Lilith s'efforça de garder un visage hermétique, ce qui ne fut pas le cas de Yohanna. La bouche de la jeune femme s'ouvrit en grand, sous l'effet de la surprise. Elle n'arrivait pas à croire ce qu'elle entendait. Leur amie, leur alliée, était en réalité la fille de leur ennemie. Elle fut soulagée d'être dans le Monde Inversé, car l'espace d'un instant, elle se serait sans doute demandé si la Terre tournait encore rond.