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Bleuet fané de M@xime1086



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» Auteur : M@xime1086 - Voir le profil
» Créé le 23/10/2016 à 11:07
» Dernière mise à jour le 23/10/2016 à 11:07

» Mots-clés :   Drame   Kanto   Présence de personnages de l'animé   Romance   Slice of life

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30.— SE REMÉMORER DE VIEUX DÉMONS D'HIVER
Le grand jour vint enfin. Il fut difficile autant pour Ondine que pour Gary de se lever. Ils avaient passé la soirée de la veille séparés l'un de l'autre. Daisy avait emmené sa soeur cadette en boîte pour son enterrement de vie de jeune fille. Cette appellation la vieillissait. La rouquine eut l'impression d'avoir prit vingt ans en une soirée. Comme si sa jeunesse s'en était allée en une nuit...
Elle n'avait pas accroché à l'ambiance. Les boîtes de nuit, Ondine ne les aimait pas. Trop de bruit, trop d'alcool, trop de séducteurs. C'était le lieu de chasse privilégié pour Violette, pas le sien.

Si Gary l'avait accompagné, il n'aurait sûrement pas apprécié que d'autres hommes viennent aborder sa fiancée. Ils puaient l'alcool, dansaient comme des marionnettes dont les fils avaient lâché.
La championne aurait préféré cent fois dîner en amoureux mais cette stupide tradition en voulait autrement...

Lui avait passé une soirée sous le signe des retrouvailles. Le témoin qu'il avait choisit pour le mariage était un ami d'enfance : Narcisse. Le membre du conseil 4 de Kalos.
Ils avaient grandi ensemble, avaient fait le lycée, puis le dresseur d'élite avait déménagé à Kalos. Ils s'étaient perdus de vu mais Gary suivait de près l'actualité relatant les grandes victoires de son ami sur des challengers prestigieux ou lambdas.

Les deux hommes se retrouvèrent au restaurant dans lequel Gary travaillait. Le brun attendit un moment au comptoir, papotant avec son patron, un homme au premier abord bourru mais au bon fond.

Narcisse le rejoignit. Le dresseur d'élite, dès son entrée, fit se retourner de nombreuses têtes. Certains le reconnurent, médusés qu'une telle célébrité se trouve dans un restaurant banal. Des femmes qui dînaient avec leurs époux l'examinaient avec des sourires en coin, faisaient grommeler leurs maris qui se retrouvaient éclipsés par une beauté raffinée. De magnifiques boucles blondes filaient sur son front comme les vagues sur le sable fin d'une plage. Sa posture aisée, mais non pas orgueilleuse, lui conférait une autorité et une virilité qui en imposait.

Son regard glaçait, était capable de trancher tant il était aiguisé à la manière des couteaux qu'il utilisait en cuisine ; il pouvait aussi bien réchauffer les cœurs. Il portait ses yeux azurs comme deux saphirs au milieu d'une blancheur perlée. Tout cela était rehaussé par une tenue élégante mêlée de multiples teintes de bleus et de blancs. Le choix de ces couleurs n'était pas sans rappeler son goût pour la mer. Il aimait les costumes avec de hauts cols qui dissimulaient son cou et son menton.

Les deux amis d'enfance se prirent dans les bras de longues secondes, enthousiasmés par ces retrouvailles. Ils s'assirent à une table à l'écart puis commandèrent.

« Alors, comment avance ta carrière de dresseur ? demanda d'entrée de jeu son ami blond.
- J'ai quatre badges. Mais j'ai arrêté de voyager pour m'installer avec Ondine. »

Narcisse, qui avait commandé un verre de vin, le souleva et y plongea un regard rêveur. Il avala une gorgée.

« Très bon. J'ai appris que ta fiancée était une championne d'arène qui aimait les Pokémon eaux. Tu as fait le bon choix. Ceux qui aiment la mer sont les plus sages. »

Maintenant qu'il le lui faisait remarquer, Gary n'avait pas fait attention à ce point commun indéniable avec Ondine. Ils s'entendraient à merveille. Après tout, Narcisse était lui aussi un spécialiste des Pokémon aquatiques.

« Ta collection de tableaux a-t-elle avancé ? demanda le brun en se servant un verre d'eau.
- Pas trop mal. Mais tu sais, je n'ai plus guère le temps avec la cuisine... »

Narcisse était un chef reconnu dans toute la région de Kalos. Il commençait doucement à se faire un nom ailleurs que là-bas. C'était lui qui avait enseigné à Gary la cuisine rudimentaire. Il lui avait fait découvrir le wok, instrument culinaire dont il se servait très souvent.
Le goût de cuisiner n'était pas la seule chose que le dresseur d'élite lui avait transmis. L'attrait pour l'art pictural les avaient beaucoup rapproché durant leur adolescence.

Ils dînèrent dans une intimité retrouvée, perdue par des années de distance. Narcisse, au milieu d'une conversation banale, posa la question qui lui brûlait les lèvres.

« Dis-moi... Ton problème, ça ne s'est pas arrangé ? »

En même temps qu'il avait employé le terme "problème", il avait désigné avec l'extrémité de son couteau le verre de vin. La mine décontractée de Gary devint soucieuse.

« Tu sais très bien que ce problème ne sera jamais réglé. Depuis cette nuit d'hiver où j'ai tout foutu en l'air.
- Heureusement que je suis arrivé à temps.
- Heureusement, oui. Ça a été la plus grosse connerie de ma vie. »

Le jeune fiancé fixa le verre de vin que son ami avait commandé, les sourcils froncés dans une concentration extrême.

• • • • • • • • • •
Gary avait passé une adolescence difficile. C'était un garçon paumé. Sa mère despotique lui imposait un train de vie qu'il n'avait jamais voulu. Travailler, travailler, travailler jusqu'à épuisement. Le lycée dans lequel il était inscrit depuis la seconde était un établissement prestigieux de Safrania. Il renvoyait les élèves avec moins de seize de moyenne. Autant dire que les seuls loisirs que pouvaient se permettre le jeune lycéen était le travail encore et toujours.

Séraphine, déjà, voulait en faire le digne successeur de son mari, à la tête d'un empire flamboyant, à Kanto. A cause des obligations dû à son poste de PDG, Théophile était trop souvent absent de la maison. Il rentrait tard et partait tôt.

Écrasé entre sa mère et un père fantôme, Gary détestait sa vie. Il aurait aimé fuir loin, fuguer s'il en avait eu le courage. Mais la peur de se faire rattraper par Séraphine, plus forte que tout, ainsi que les sanctions draconiennes qu'elle emploierait si sa fuite échouait, lui faisait vite oublier ses désirs d'échappatoire.

Il n'avait qu'à plier dans l'espoir de ne pas rompre avant sa majorité. A cette date fatidique qu'était son dix-huitième anniversaire, il prendrait ses cliques et ses claques et partirait à l'aventure.
La seul rayon de soleil qui frappait son front lorsqu'il se remémorait cette période trouble était Narcisse. Le futur dresseur d'élite devint son ami parce qu'il partageait lui aussi le même calvaire. Lui aurait souhaité enfiler un tablier ou bien devenir peintre. Il avait très envie de devenir une légende dans le domaine du dressage. Un Flingouste avec qui il s'était lié d'amitié logeait dans le bassin de leur propriété. Il lui avait fait la promesse qu'un jour, ils partiraient.

Les deux adolescents attendaient donc l'âge de la majorité avec ferveur. L'anniversaire de Gary vint en premier. Ses parents qui voyaient d'un bon œil sa relation avec Narcisse, décidèrent d'organiser une fête.
L'adolescent voulu inviter une jeune fille avec laquelle il entretenait une relation secrète, à l'abri du regard austère de ses parents. Bien sûr ces derniers refusèrent. Ils voulaient un anniversaire en petit comité, pas d'une boum pour adolescents.

Furieux, Gary s'enfuit en claquant la porte. Narcisse tenta de le rattraper sans parvenir à le retrouver dans la nuit noire qui tombait dans les rues de Safrania.

Jusqu'alors Gary n'avait jamais bu. Quelques coupes de champagne pour les grandes occasions mais il ne sût pourquoi, ses pieds le menèrent dans un bar très fréquenté des beaux-quartiers.
Il présenta sa carte d'identité, maintenant majeur. Il avala cul-sec un shot de vodka puis enchaîna avec un verre de whisky.

Il quitta le comptoir sans savoir pourquoi il s'y était posé. Sa tête tournait. La sensation de l'apesanteur qui lui échappait était toute nouvelle pour lui.
Pourquoi s'être saoulé alors qu'il aurait eu juste à s'enfuir, vivre son rêve ? Il n'en savait rien. Était-ce une sorte de rébellion ? Jusqu'alors, l'alcool ne l'avait jamais intéressé. C'était un simple sujet de raillerie avec ses amis.

Il déambula plutôt qu'il ne marcha vers le quartier le plus éloigné de là où ses parents l'attendaient ce soir-là. Il n'avait pas eu le temps d'enfiler un manteau. Le froid mordait sa veste, ses mains qu'il réfugiait dans les poches de son pantalon gerçaient, ses oreilles rougissaient. Des coups de vent secouaient ses cheveux mais il s'en fichait bien.

Il avança jusqu'à des ruelles périphériques. Par ici habitait Linda. Gary eut du mal à reconnaître les maisons et les immeubles dans l'obscurité opaque. Les ampoules des lampadaires n'avaient pas été changés depuis longtemps, par manque d'argent. Il faisait confiance à son instinct brouillé par l'alcool.

Il fit alors une mauvaise rencontre. Un gang de jeunes de son âge siégeaient sur des bécanes noires. Gary accéléra, passa à côté d'eux, bien content qu'ils ne l'ai pas remarqué. La peur flagellait ses mollets. La sueur coulait au bas de sa nuque.

« Hé, toi ! cria l'un d'eux, au moment même où une bourrasque glaciale le frappait. »

Gary s'arrêta, ne sachant s'il devait poursuivre sa route, s'enfuir à toutes jambes ou bien aller les voir. La bande allait à moto, jamais il ne réussirait à les semer.
Celui qui l'avait apostrophé, visiblement mécontent qu'on ne lui réponde pas, vint lui frapper rudement le dos.

« T'es sourd ou quoi ? Putain, tu pues l'alcool ! cracha l'individu en mettant une main sur son nez pincé.
- Q-Qu'est-ce que vous-vous me voulez ? »

Le lycéen crut qu'il allait vomir. Les autres jeunes l'avait rejoint et l'inspectaient d'un air mauvais, la mâchoire crispée.

« Qu'est-ce qu'un richard comme toi fout ici ? Tu sais que c'est pas prudent de se balader avec ta cuillère en argent dans la bouche par ici. Tu pourrais tomber sur des gens qui te détrousseraient. »

Le vent siffla dans les tympans de Gary. Le gang, rassemblé autour de lui, se mit à le tabasser. Le jeune adolescent, dans son état d'ébriété, eut du mal à recouvrer des réflexes de défense. Il ne pratiquait pas de sport. Pendant qu'il encaissait les coups sans pouvoir réagir, il se fit la promesse que s'il s'en sortait, il ferait le nécessaire pour ne plus être une victime aussi amorphe.

Ses agresseurs lui dérobèrent les seuls objets de valeur qu'il portait sur lui, à savoir sa gourmette dorée ainsi que sa chevalière et le laissèrent pour mort, sanguinolent.

Lorsqu'il reprit connaissance, le lycéen réalisa que même à distance, ses parents lui faisait encore du mal. Son statut de privilégié qu'il n'avait jamais désiré -puisqu'il avait entraîné ce train de vie infernal- avait attiré la convoitise de personnes mal-intentionnées.


Måns Zelmerlöw – Should've Gone Home
Il se mit debout. Heureusement il ne boitait pas. Ses côtes le firent grimacer atrocement. Plié en deux, il continua d'avancer vers le lotissement où vivait Linda. Il toqua sans obtenir de réponse. Le besoin de la voir lui fit monter les larmes aux yeux. Il insista puis quand enfin, elle daigna lui ouvrir, ce fut pour lui jeter des méchancetés au visage.

« Qu'est-ce que tu veux ? Arrête de me coller.
- Qu'est-ce qui te prend ?
- Il me prend que c'est pas parce que t'as de l'argent que tu dois t'incruster chez moi et me harceler. L'argent ne fait pas tout. Il n'achète pas l'amour. »

Ce fut tout. Elle lui claqua la porte au nez, en pleine nuit, dans le froid. La baffe qu'il venait de se prendre le laissa pétrifié sur place. Il venait de se faire plaquer par une fille qui n'en avait voulu qu'à son argent.

L'alcool dans le sang avait prit le circuit du désespoir à défaut de celui de la violence. Qu'allait-il faire ? Il pleura si fort que les larmes se mêlèrent au sang de ses meurtrissures.
Il fit la course contre lui-même, contre le démon qui le bousculait à l'intérieur et qui souhaitait que tout s'arrête maintenant.

Le visage meurtri par les coups et la détresse, il se tint dans la frontière entre le réel et ce qu'il prenait pour être le monde qui l'entourait. En arpentant les quartiers les plus éloignés du centre-ville, il suivit le parcours que lui dictaient sa marche.
Il luttait contre un mal de tête qui lui tambourinait les tempes. Dans une ruelle, il ramassa une bouteille de vodka abandonnée, encore remplie d'alcool. Il but au goulot directement, sans faiblir.

Lorsque enfin ses jambes montrèrent un signe de fatigue, il se trouva devant la gare de Safrania. A l'horloge centrale, Gary décrypta avec difficulté l'heure indiquée. Il y avait un deux devant un un puis laissa tomber. Peu importait au fond de connaître l'heure de sa mort.

Il avait perdu la course contre le démon qui l'avait englouti. Tout son corps ne répondait plus qu'à l'impulsion de l'alcool. Et l'alcool voulait le tuer. Et il s'exécutera, n'ayant plus la force de se battre.

Juste avant d'entrer dans la gare, désertée par les voyageurs et le personnel, il passa un coup de fil d'une cabine téléphonique avec la monnaie que ses agresseurs n'avait pas daigné récolter.
Il ne se souvint pas comment il avait réussit à taper le numéro de Narcisse sur les touches du tableau sans s'écrouler ni se tromper. Et pourquoi l'avoir appelé, lui.

« Allô ? »

Le blond, à l'autre bout du fil, demanda qui était à l'appareil. La voix cassée par les contusions de sa mâchoire et par l'alcool, le lycéen brun répondit sans se faire comprendre.

« Gary ? Où es-tu ?
- Je... j'en ai marre... »

Il reniflait toutes les dix secondes, incapable de retenir le flot de larmes qui coulait sur ses joues meurtries.

« Calme-toi. Dis-moi où tu es.
- Je veux crever... Elle m'a laissé tomber... Tout ça à cause de mes putains de parents... »

Narcisse, inquiet de la tournure que prenait la conversation et par la voix menaçante de son ami, choisit de le suivre dans son désespoir.

« Tu ne vas pas partir sans que je ne te vois une dernière fois, n'est-ce pas ? On est amis. Tu me dois bien ça.
- A la gare. »

Gary raccrocha, content d'avoir un ami qui serait à ses côtés lorsqu'il se jettera sous un train. Il sera le témoin qui racontera à tout le monde par où l'avait traîné ses parents et Linda. Il pourrait compter sur lui, il dira la vérité. Narcisse n'était pas un menteur.

Rassuré, Gary pénétra dans le hall silencieux de la gare par une porte de service laissée ouverte par mégarde. A cette heure, il n'y avait plus que des cargaisons de marchandises qui voyageaient à heures régulières.
L'immensité des quais lui permit de circuler librement. Les trains de marchandises filaient très vite. Safrania faisait la liaison entre Doublonville et Carmin-sur-mer, là où les trains de marchandises devaient finir leur course pour embarquer sur des bateaux.

Il longea les quais pour arriver à l'extrémité avant. Une courte plateforme était séparée du quai par un large fossé herbu. Il attendit patiemment sur le morceau de béton qui servait de plateforme aux ouvriers venant habituellement réparer les grillages sectionnés par des vandales.
Aucun train n'avait circulé pendant ce laps de temps.

« Gary ! Répond-moi ! »

Narcisse avait fait vite. Il avait jugé pertinent de venir seul, sans les parents de son ami. Gary se leva d'un bond, presque menaçant.

« Je suis content que tu sois là.
- Je suis venu pour te ramener avec moi. Ne fais pas de bêtises, je t'en prie. »

Jamais auparavant il n'avait vu son ami aussi inquiet à son égard. Il donnait l'impression d'être aussi fatigué que lui l'était, aussi malheureux d'en finir.

Tout deux entendirent un bruit d'abord lointain puis plus proche : celui d'un train. Ce dernier filait et ne s'arrêterait pas en gare. Ils ne le voyaient pas encore mais l'entendaient qui se rapprochait.

Narcisse tendit sa main, lui cria de ne pas se jeter sur les rails. Gary, dans un accès de fureur, jeta la bouteille en verre qu'il avait ramassé tout à l'heure sur le sol. Elle se brisa.

« Je ne veux plus qu'on me donne d'ordre ! J'ai l'impression d'entendre mes parents ! »

Narcisse vit arriver la tête du train à toute vitesse. Il devait faire quelque chose.
Gary, qui avait lui aussi aperçut la forme pointue du premier wagon, s'avança, tout tremblant.

A l'arrivée du train devant la plateforme, Narcisse, dans un bond que seules les situations périlleuses peuvent accorder à ceux qui les vivent, se jeta sur son ami et le maintint au sol, dans l'attente que le danger s'éloigne dans la nuit.