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L'incroyable épopée du Poireau Flamboyant de Lief97



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Informations

» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 13/05/2021 à 17:03
» Dernière mise à jour le 13/05/2021 à 17:03

» Mots-clés :   Amitié   Aventure   Humour   Médiéval   Région inventée

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Chapitre 6 : 100 mètres de douleur
Ticho sentit la patte d’un Rhinastoc venir lui chatouiller tendrement les omoplates, et, l’instant d’après, notre pauvre héros éprouva la sensation dérangeante d’avoir été écrasé par un rouleau-compresseur.

Et c’est un début de 100 mètres IN-CRO-YABLE ! s’égosilla Palkia, fou de joie. Boss et Boloss sont en pole position !
— J’ai l’impression que certains concurrents sont un peu à plats en fin de peloton
, ajouta Dialga, perspicace.

Alors que Ticho entendait le bruit de multiples pattes le piétiner et le dépasser, il sentit soudain quelqu’un le saisit dans ses mâchoires. Ce quelqu’un accéléra soudain, l’emmenant avec lui sur la piste.

— C’est quôa, ce bordel… râla Ticho, pas encore complètement remis.

Il croisa le regard acéré de son sauveur. C’était Timothée, le Taupiqueur. Sur la tête chauve de l’élève se trouvait Azurill, l’air fier d’avoir une telle monture.

— Azurill ? s’étonna Ticho.
— Je ne fais pas ça pour toi, sale piaf, répliqua l’ex-sataniste. Je veux que Maître Pichu gagne, c’est tout. Il faut qu’il récupère le Poireau Flamboyant, et qu’il retrouve la mémoire.
— Ah ouais, j’me disais aussi…

Ticho s’agita pour tordre le cou de droite à gauche. Ils étaient en plein dans la cohue, mais Timothée allait à grande vitesse ; ils devaient déjà avoir dépasser les 50 mètres.

— Et Pichu, il est où ? s’inquiéta Ticho.
— Pff. Premier, évidemment, pour qui prends-tu mon sérénissime Maître ? s’outra Azurill.
Ça alors, Palkia ! Regarde ce Pichu, en toute dernière position ! On dirait qu’il s’est arrêté.

Azurill blêmit.

Pichu était entouré d’une aura électrique à quelques mètres seulement de la ligne de départ. Ticho l’aperçut sur un écran géant au-dessus de la piste ; et il comprit que ce légendaire barjo allait mettre leur plan en place. Celui de mettre hors course une bonne partie des concurrents pour leur faciliter la vie pour les épreuves suivantes.

Soudain, une tornade électrique jaillit du petit Pokémon — Ticho fut d’ailleurs surpris que son type colle à sa capacité, c’était rare dans ce monde de fous ! — et l’attaque jaillit vers les coureurs.

Ticho sentit des éclairs l’éviter de peu, et se frayer un chemin de Pokémon en Pokémon. Des cris retentirent, et Timothée qui continuait à carburer fut contraint de zigzaguer pour éviter les corps fumants.

C’est IM-PRE-SSIO-NANT ! Pichu se remet à courir après avoir éternué sur ses adversaires ! On dirait que la puissance de son rhume les a mis à terre !
— Un éternuement ? bafouilla Ticho. Mais il est vraiment con, lui ! C’était clairement une attaque, ça !
Il n’est pas interdit d’éternuer pendant la course, renchérit Dialga. Je ne vois donc aucune entorse faite au règlement ! Et pendant que nous parlons, voici que Boss passe la ligne d’arrivée ! Suivi de Boloss !

Ticho, exaspéré par les commentaires et l’idée que des proches parents soient arrivés en 1ère position, s’agita pour échapper aux crocs anormalement taillés en pointe de Timothée.

— Lâche-moi, j’peux courir, tichôôô !
— Laisse-le, Timothée.
— D’accord, Maître…

Timothée cracha, et Ticho fut projeté au sol dans une flaque baveuse. Ça lui rappela ce bon vieil Insolourdo et ses crises salivaires.

Il se releva, et regarda autour de lui. Des Pokémon grillés gisaient ici et là, respirant difficilement ou appelant leur maman d’une voix stridente. Pichu dérapa et se figea devant Ticho :

— C’est fait, mon ami. J’ai fait ce qu’on avait prévu.
— Parfait. Plus qu’à passer la ligne d’arrivée. On n’a pas fini premier, mais c’est déjà bien qu’il ne reste que… que…

Ticho chercha des yeux des adversaires. En fait, Pichu n’en avait pas éliminé la moitié, mais bien les trois-quarts. Heureusement qu’il n’y aurait aucune conséquence… un léger sentiment de culpabilité s’empara du cœur de Ticho, mais il le rejeta bien vite.

Il y avait le Poireau Flamboyant à la clé, après tout !



***



Et c’est… TER-MI-NÉ, mon cher Dialga ! Les derniers participants en état de courir viennent de franchir la ligne d’A-RRI-VÉE !
— Quelle course ! Cet éternuement en aura soufflé plus d’un ! Mais ce que nous retiendrons surtout, c’est que les premiers à avoir franchi la ligne ne sont autre que les Poireaulympiques ! Acclamez bien fort les grands favoris de cette année ! Ils remportent le premier point de la compétition !


Le stade explosa des applaudissements et des cris sauvages des spectateurs.

Ticho tourna le regard vers les participants qui avaient terminé la course. Il grimaça en reconnaissant le Rhinastoc qui l’avait écrasé au départ ; il aurait aimé que celui-là se soit fait électrocuter par son pote légendaire, mais ça aurait été trop beau pour être vrai.

Avec ces rebondissements, on dirait bien qu’il ne reste plus que sept paires de concurrents ! Voilà qui risque de modifier un peu le programme des prochaines épreuves, mon cher Palkia.
— Tout à fait, c’est FOR-MI-DABLE ! L’inattendu rend ces Jeux Pokélympiques PAL-PI-TANTS !

— Parlez pour vous… grommela Ticho.

Pour lui, affronter six autres équipes, c’était déjà beaucoup. L’avantage, c’était qu’Azurill et Timothée allaient vouloir aider Pichu. Mais ils étaient si stupides que Ticho craignait que leurs tentatives ne se retournent contre eux. Ç’aurait été un scénario terrible à encaisser.

Avant de lancer la deuxième épreuve, je vous propose, chers spectateurs, de regarder l’épreuve de 100 mètres des Jeux Parapokélympiques de l’année dernière !
— Parapoké-quôa ? s’étrangla Ticho.

Ce fut Spectrum, un concurrent de l’équipe des Passe-Partout, à côté de lui dans la pelouse, qui lui répondit en désignant les écrans géants de sa grosse main gazeuse.

— Ce sont des épreuves alternatives pour les Pokémon à handicap physique.
— C’est une rediffusion de l’année dernière, tichôôô ?
— Non, non. La course de l’année dernière n’est tout simplement pas encore terminée.

Ticho, ébahi, cligna bêtement des yeux en fixant les écrans. La course avait visiblement lieu dans un petit stade voisin. Sur la piste se trouvaient quelques coureurs… pas très pressés.

Un Chrysacier muait sereinement 3 mètres après la ligne de départ. Il était immobile, et c’était vraisemblablement le vent qui lui avait permis de s’éloigner de la ligne de départ et d’avancer de 3 mètres en 1 an.

Derrière lui, sur la ligne de départ, un Blindalys et un Armulys fronçaient les sourcils, et paraissaient faire un effort monumental pour courir. Mais, gênés par leur corps incapable de bouger, ils n’avaient pas avancé d’un millimètre.

— Mais ça ne se terminera jamais, tichôôô !
— On sait jamais, si y’a une petite bourrasque, ajouta Spectrum en haussant les épaules — oui, les épaules.

Ticho soupira de dépit. Ce monde était toujours autant de travers. Il n’osait imaginer à quoi ressemblaient les autres épreuves Parapokélympiques…

Dans le stade, les spectateurs commençaient quand même à s’en aller. Même eux, même ces imbéciles profonds, trouvaient cette épreuve insoutenable à regarder. En même temps, il ne se passait rien. Dialga lui-même finit par reprendre la parole après cinq minutes de silence, et toussota d’un air gêné :

Hm, hm. J’apprends qu’il va nous falloir mettre fin à cette épreuve pour commencer les Jeux Parapokélympiques de cette année. Le maire de Krénios a décidé d’éliminer les trois derniers concurrents de l’année dernière. Quant à la deuxième épreuve, elle aura lieu ce soir. Jusque-là, prenez tous une pause bien méritée !

Ticho soupira. Voilà qui l’ennuyait. Il aurait aimé pouvoir enchaîner les épreuves et gagner le Poireau Flamboyant le plus vite possible. Mais il allait devoir rester patient.

Un tableau des scores s’afficha sur les écrans géants, et Ticho y jeta un regard atterré.

Classement des Jeux Pokélympiques
Mise à jour après l’épreuve 1/16

1ers : Les Poireaulympiques, Boss et Boloss, 1 point
Tous les autres : bah 0 points du coup ils sont derniers jcrois ?

Même l’équipe technique paraissait complètement perdue. C’était déprimant.

— Bon, c’est pas tout ça, tichôôô, mais je vais pas poireauter ici jusqu’à ce soir, moi ! Pichu, on se revoit plus tard.
— Avec plaisir, mon ami.

Sans plus accorder un regard à Azurill, Boss, Boloss et même Michel et sa Grand-Mère, il s’envola à tire d’ailes et quitta le stade par voie aérienne. Un petit vol près de la côte allait lui faire du bien. Il avait besoin d’air frais pour se remettre les idées en place après le vacarme assourdissant qu’il avait dû supporter dans le stade.

Ce fut en survolant un commissariat de Lockpin virils et musclés qu’il entendit avec stupéfaction une voix reconnaissable entre mille.

— Saperlipopette ! Puisque je vous dis que je ne faisais que mon devoir de supporter ! Je ne suis qu’un humble chevalier admiratif des Jeux Pokélympiques, messire ! Je scandais le nom d’un ami pour l’aider à gagner l’épreuve, tel un preux guerrier sauvant une damoiselle en détresse !
— Ah ouais ? répliqua un Lockpin à la voix caverneuse. Je dois encore préciser que vous avez fait exploser les tympans de 24 spectateurs assis autour de vous ? Je dois vous répéter le nombre de commotions cérébrales, peut-être ?
— Ce n’est rien, mon brave ! Ce ne sont pas des princesses, sacrebleu ! Ils s’en remettront !
— Oh non… soupira Ticho en baissant les yeux.

Il ne rêvait pas. Cette armure rutilante, cette voix puissante, ce ton hautain, cette petite moustache taillée ; c’était Gontran. Il était là, dans la capitale de Kassos. Et ce n’était pas le pire.

— MOI CRIER TRÈS FORT AUSSI ! MOI TROUVER ÇA RIGOLO !
— Ouais, c’est ça, grogna le Lockpin, agacé.

Alakazam se tenait près du chevalier. Près de lui se trouvaient les Groudon de son cours de danse. Vu leurs têtes dépitées et leurs regards interrogateurs, ça ne faisait aucun doute : ils faisaient partie de ceux qui avaient perdus l’audition.

Ticho hésita. Devait-il descendre, et demander à ces abrutis ce qu’ils faisaient là ? Devait-il fuir, se cacher, et profiter d’un peu de répit ? Ou alors…

— ROUCARNAGE ULTRA-LÉGENDAIRE ! C’EST MOI, ALAKAZAM !

Le gueulard s’était mis à battre frénétiquement des bras ; il voletait et s’approchait maladroitement d’un Ticho en vol stationnaire.

— Oh non, trop tard, tichôôô…
— MOI ÊTRE VENU EN BATEAU, MAIS BATEAU AVOIR COULÉ ! PAS TRÈS SOLIDE, LE BATEAU !
— Quôa, le Titanictamair a coulé ?
— OUI !
— Mais comment on va rentrer, après tout ça ? s’étrangla le canard, abasourdi.

Alakazam saisit son menton, l’air soudain pensif.

— MOI PAS AVOIR PENSÉ À ÇA…
— Oh, t’en fais pas, j’en demandais pas tant, venant de toi !

Se rendant soudain compte qu’il avait cessé de battre des bras, Alakazam hurla et tomba comme une pierre. Il atterrit sur Gontran, et un bruit d’acier froissé résonna dans l’avenue. Ticho poussa un énorme soupir décontenancé, et les rejoignit à contrecœur.



***



C’était prévisible, mais Gontran se montra particulièrement joyeux de retrouver Ticho. Quand ce dernier termina d’esquiver des accolades qui auraient pu le réduire en purée pour la deuxième fois de la journée, le chevalier mena évidemment la bande dans un bar pour, selon lui « boire un p’tit coup ».

Dès qu’il entra, il commanda trois fûts de bière de 160 litres chacun.

Ticho, installé avec ces deux énergumènes à une table dans un coin du bar, se retenait de soupirer en boucle. Les Groudon en tutus roses attendaient dehors, et avaient commencé à faire un spectacle de rue qui terrifiait les habitants.

— Pourquoi vous êtes venus jusqu’ici ? finit par demander Ticho.

Gontran reposa son premier fût en bois de chêne, vidé en deux gorgées, et s’essuya la bouche avec le dos de la main :

— C’est messire Antoine qui m’a quémandé !
— Ah ouais, t’es sûr ? Il a voulu se débarrasser de vous deux, plutôt !
— Que nenni, sacrebleu ! Je n’avais jamais vu messire Antoine aussi inquiet.

Ticho saisit une pointe de gravité très inhabituelle dans le ton du chevalier. Alakazam, qui s’amusait avec deux cuillères à soupe comme un demeuré, se figea lui aussi, et devint soudain attentif.

— Antoine, inquiet ? Pourquoi ? s’étonna le volatile.
— Azurill avait disparu depuis plusieurs jours, et il voulait que je le retrouve. Il a supposé qu’il t’avait suivi à Kassos. Mais il m’a surtout envoyé vérifier que tu te portais bien !
— Je vois… étonnant…

Depuis qu’il avait obtenu la recette du cookie au miel d’Apireine, Ticho n’avait jamais vu Antoine inquiet. Il peinait à se l’imaginer, tant le garçon lui avait paru obnubilé par la confection de ces gâteaux.

— Il n’était pas seulement inquiet pour moi, pas vrai ? reprit Ticho. Les affaires se passent mal, je suppose !
— En effet, c’est ce qu’il m’a semblé comprendre ! répondit Gontran en s’emparant du deuxième fût. Ces malandrins de clients n’achètent plus les biscuits carbonisés. La Guilde du Cookie rencontre des soucis financiers. Si seulement un bon coup d’épée chevaleresque pouvait régler ces maudites affaires !

Ticho soupira de dépit. Gontran avala le fût de travers, et se mit à toussoter, presque jusqu’à l’étouffement. Sans bouger d’une plume, Ticho regarda distraitement Alakazam bondir de sa chaise pour frapper la cage thoracique de Gontran à coups de massue ; la gorge du chevalier finit par être remise en place, et il remercia chaleureusement le Pokémon Psy et sa « délicatesse infinie ». Des propos qu’on aurait pu croire ironiques, mais pourtant, le chevalier était on tout à fait sincère.

Ce n’était pas étonnant, que le business du cookie au miel d’Apireine se passe mal ! Depuis le premier jour, Antoine n’avait réussi à sortir qu’un cookie parfait de ses fourneaux. Depuis, il vendait ses essais brûlés à des clients idiots ; des imbéciles finis qui pensaient que l’aspect noirci des biscuits était typique de ce gâteau légendaire.

Forcément, ce business hasardeux allait finir par couler. Dans un monde normal, ça n’aurait même jamais pu voir le jour !

Une partie de Ticho se disait « Bien fait ! », car il avait encore en travers de la gorge le fait qu’Antoine l’ait laissé partir sans lui accorder la moindre importance. Le garçon n’avait rien fait pour l’aider, et ne l’avait plus jamais considéré comme un partenaire de voyage ou un véritable ami, depuis la fin de leur quête précédente.

Mais d’un autre côté, Ticho ressentait une pointe d’inquiétude. Ce pauvre Antoine était entouré de types plus incapables les uns que les autres. Entre Julie, cette petite peste, Insolourdo et Terry Lancepelle, le garçon pouvait être considéré comme un génie parmi les abrutis. Seul Keunotor pouvait peut-être se révéler utile. Et encore, pas sûr !

— Ça alors ! s’exclama Gontran en posant son dernier fût, vidé d’une traite. C’était de la bonne vinasse, tavernier ! C’est une ignominie que vous ne soyiez pas réputés pour ça !
— C’est pas de la vinasse, c’est de la bière, crétin ! répliqua le tavernier, un Flabébé dans la force de l’âge.

Ticho ferma les yeux, las, et sentit le poireau en plastique entre ses ailes. « Lui au moins, il ne déblatère pas un flot ininterrompu de conneries ! » songea-il avec tristesse.

— Excusez-moi… ? Ticho, ce sont des amis à vous ?

Le canard sursauta. Quelqu’un s’était furtivement approché de leur table, sans faire de bruit. Tranchodon, le journaliste et poète refoulé.

— Quôa, Tranchodon ? Qu’est-ce que tu fais là ?
— Oh, je passais dans le quartier par hasard, et figurez-vous que j’espérais tomber sur vous.
— Asseyez-vous à côté de moi, dit rapidement Ticho. Votre présence rendra peut-être ces deux-là plus intelligents.

Gontran et Alakazam, sans comprendre l’insulte, regardèrent Ticho avec surprise, puis fixèrent Tranchodon avec une pointe de méfiance.

— Tranchodon, voici deux camarades venus de Krénios, Gontran et Alakazam. Vous deux, je vous présente le journaliste grâce auquel j’ai trouvé un partenaire pour les Jeux.
— Journaliste ? s’étonna Gontran. Qu’est-ce donc ? Cela fonctionne-t-il comme ces colporteurs qu’on trouve étendus sur le bord des routes ?

Ticho ouvrit le bec, sans trouver de quoi répliquer. « De quels colporteurs il parle, ce con ? » faillit-il dire à voix haute.

Heureusement, Tranchodon fut vif.

— Je dirais que c’est un métier proche de celui des hérauts et des bardes, plutôt.
— Hm, je vois ! Hé bien, mon brave, devenez donc mon laquais, vous ferez un bon divertissement ! Vous nous chanterez mes louanges et mes exploits héroïques !

Gontran éclata d’un rire gras tout en tapotant fermement les écailles du Tranchodon, qui afficha une expression gênée.

— Navrée, monsieur le chevalier, mais je dois refuser. Mon cousin a tenté l’expérience de laquais, fût un temps, et il a amèrement regretté. Il était tombé sur un incompétent, voyez-vous. Un homme arrogant, qu’il avait fini par devoir déshabiller dans des toilettes en plein désert, jusqu’à l’arrivée d’inconnus qui ont mal interprétés la chose ! Il a beau être grossier, mon cousin s’est senti particulièrement humilié, ce jour-là, et il fait une sévère dépression depuis !

Gontran et Ticho blêmirent. Soudain, un lointain souvenir leur revint. Oui, c’était bien comme ça qu’ils s’étaient rencontrés…

— Ah, répondit seulement Ticho.
— Oh, d’accord, bafouilla Gontran, soudain mal à l’aise. Ça avait en effet l’air d’un incompétent, ce chevalier ! Heureusement que je suis bien différent de cet homme ignoble !

Tranchodon acquiesça vivement. Puis s’illumina en se rappelant soudain pourquoi il était venu.

— Oh, Ticho, j’avais à vous parler.
— Oui ?
— J’aimerais faire une petite interview avec vous, de nouveau. Histoire de dresser un beau portrait. Votre parcours intéresse beaucoup de spectateurs. Vous n’êtes pas le favori, mais les gens sont curieux à votre sujet. Il est rare qu’un étranger parvienne à se démarquer dans les Jeux, vous savez !

Ticho gonfla le torse avec orgueil.

— Si ce n’est que ça, ce sera avec plaisir, tichôôô ! J’ai le temps, la 2e épreuve m’attend dans une heure.

Tranchodon sortit son petit carnet d’un repli de ses écailles, et commença à griffonner dessus.

— Pour commencer… d’où venez-vous, exactement ?
— D’un monde alternatif inversé où les Type Eau savent nager et où les Type Feu crachent du feu.

Tranchodon éclata de rire. Gontran aussi. Alakazam aussi. Le tavernier aussi.

— Ah, vous avez un sacré sens de l’humour, Ticho ! lança Tranchodon en prenant des notes. Vous voulez donc garder le mystère sur vos origines, je peux le comprendre.
— Pas du tout, je suis très sérieux, tichôôô !
— Bien sûr, bien sûr… dites-moi, les gens veulent savoir : avez-vous un lien de parenté avec Boss et Boloss, les favoris ?
— Absolument aucun !
— Je vois, je vois… et sinon, dites-moi, comment avez-vous rencontré Gontran et Alakazam, ici présents ?

Ticho se tut. Il croisa le regard exorbité et suppliant de Gontran qui ne voulait SURTOUT PAS que Tranchodon apprenne qu’il avait été le chevalier ayant causé la dépression de son cousin. Le Pokémon Vol soupira.

— C’est une longue histoire, mais, pour résumer… disons que j’ai été un aventurier, et que nous nous sommes rencontrés au fil de mon périple, à Krénios.
— Oh, intéressant, intéressant… votre profil va plaire à la population, Ticho. Je le sens déjà. Vous aurez des tonnes de nouveaux supporters quand j’aurais publié cet article !
— Déjà fini ? s’étonna le canard.

Tranchodon hocha la tête avec énergie, et le rassura :

— Je comblerai l’article avec quelques commentaires sur vos exploits pendant la première épreuve. Les gens aiment apprendre des informations au compte-goutte.
— Si tu le dis, tichôôô…

Le Pokémon Dragon se leva de chaise, et après avoir amicalement salué les autres, quitta la taverne.



***



À quelques mètres de l’établissement, Tranchodon s’empara de son téléphone portable.

— Ici Filou-du-72.
Ici Sei Shonagon. Quel est le problème, Filou-du-72 ?
— Aucun problème, mentor. Je tenais juste à vous informer que j’ai de quoi rédiger l’article de demain matin.
Et qu’est-ce que ça peut me foutre, idiot ? Je m’en fiche, de ta couverture de journaliste ! On est des agents secrets, tu comprends ? Tes histoires de poèmes et d’articles, tu te les gardes pour toi, je veux rien savoir, moi !
— C’était… euh… hésita Tranchodon. Je me suis dit que ce serait intrigant et palpitant de terminer le chapitre par une conversation téléphonique secrète…
On s’en fout ! On n’est pas là pour créer du suspense à partir de rien ! Ramène-toi au QG quand t’auras fini tes bêtises. L’agent Beau-Gosse-Baraqué est revenu. Il a du nouveau au sujet de l’Organisation.

Tranchodon se figea à l’entrée d’une ruelle déserte, stupéfait.

— Beau-Gosse-Baraqué ? C’est le nouvel agent, débarqué tout droit de Krénios ?
Tout à fait. Il a hacké quelques Motisma et a fini par découvrir que l’Organisation était bel et bien impliquée dans les Jeux Pokélympiques. On va devoir se préparer à les faire tomber, Filou-du-72.
— Bien noté, mentor. J’arrive.

Il raccrocha, et s’empressa de s’éloigner du quartier des buvettes. Il avait un devoir à remplir.