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Effacé de Lief97



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» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 20/12/2018 à 11:22
» Dernière mise à jour le 04/04/2019 à 14:31

» Mots-clés :   Action   Guerre   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Suspense

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Chapitre 19 : Le refuge des pillards
« La loi, l'unique loi, farouche, inexorable, qui régit tout progrès, c'est la loi du plus fort. » Daniel Lesueur


***


Le bourrinos et le tauros menaient le groupe, montés respectivement par Lyco et Darren. Suivait la charrette, tirée par l’indolent frison ; la plupart des pillards avaient eu la place de monter dedans. Cependant, quatre d’entre eux préféraient marcher aux côtés du véhicule brinquebalant, avec les armes qu’ils avaient pu récupérer ; deux épées, un couteau et un vieux pistolet à six balles. L’escorte avançait lentement, mais la route allait bientôt les mener à leur repaire. À moins qu’une embuscade ne les prenne eux-mêmes au dépourvu.

Lyco aurait bien voulu questionner Darren, et ne cachait pas sa curiosité dans son regard. Mais le géant lui avait déjà fait comprendre que sa présence le gênait, et qu’il fallait éviter pour lui de trop ouvrir la bouche. Lyco se taisait donc, se contentant de scruter les sous-bois, tentant de se montrer utile.

Lacrya, assise sur la banquette, était renfrognée. Boralf, assis à côté, avait les rennes en main. Le sous-chef des pillards, avec ses yeux gris acérés, sa carrure imposante et ses cheveux noirs et courts dégageait une aura autoritaire, et semblait peu enclin à taper la discute. Lacrya le voyait bien dans un rôle de sergent. Il ne cachait pas son mépris pour Lacrya, qu’il regardait parfois du coin de l’œil comme pour vérifier qu’elle se tenait à carreaux.

La jeune fille se demandait parfois si ça n’aurait pas été mieux de ne pas rester avec les pillards ; mais c’était trop tard. Désormais, ils avaient des pokémons, des armes, et bientôt un refuge. Elle n’allait pas cracher dessus à cause du sale caractère de Boralf ou de la méfiance de Darren.

Ève, à l’arrière dans la charrette, bailla bruyamment. Elle au moins, elle ne cachait jamais son ressenti. Sa franchise faisait plaisir à voir.

Lacrya fut arrachée de ses pensées quand le sentier se divisa en deux ; une route principale, large et relativement bien entretenue, continuait de serpenter vers le nord. L’autre embranchement menait sur un sentier plus étroit, en sale état, qui s’enfonçait dans la forêt, vers l’est.

— On y est presque… souffla Ève à l’arrière.

Lacrya se sentit rassurée de savoir ça ; elle avait hâte de dormir dans un endroit où elle se sentirait en sécurité. Passer une nuit dans la forêt, ça ne l’enchantait pas trop, surtout dans son état. Elle avait besoin d’un sommeil réparateur. Ils en avait tous besoin, à vrai dire…



***


— C’est…

Lyco s’interrompit en se rendant compte qu’il avait failli adresser la parole à l’implacable Darren.

Ils avaient quitté un étroit sentier à peine un quart d’heure plus tôt, et voilà qu’ils débouchaient dans une petite plaine. Le garçon devina au premier coup d’œil que l’endroit avait déjà servi.

Des barricades composées de barrières de bois, de planches clouées, de pieux, de plaques métalliques, de cordes épaisses et de barbelés entouraient la lisière des arbres autour de la clairière ; pour empêcher les pokémons de la forêt de s’approcher, sans doute. La seule voie d’accès était aérienne, ou via ce chemin qu’ils venaient d’arpenter.

Il y avait trois constructions réparties dans la clairière ; la première était une petite étable en bois au toit recouvert de tôles en fer. Des caisses vides traînaient aux alentours, ainsi que des armes rouillées ou des douilles de balles.

Plus loin, dans le fond de la plaine, une maison en pierre devait certainement servir de foyer principal. Il y avait visiblement un étage et une petite terrasse au sommet du bâtiment, qui permettait d’avoir une vue surplombant de peu les arbres aux alentours.

La dernière construction était un simple toit soutenu par des piliers en bois, très épais. Au vu de l’écorce et des copeaux éparpillés au sol, Lyco devina qu’il s’agissait autrefois d’un abri à bois, mais qu’il avait été vidé depuis.

La clairière était en grande partie saccagée. Des feux de camp avaient noirci l’herbe à plusieurs endroits, et des hautes tiges jaunes avaient commencé à pousser là où elles l’avaient pu. L’état des barricades entourant la propriété était aussi à revoir : la rouille attaquait le métal, et la mousse pullulait sur les planches de bois.

Darren posa pied à terre et guida le groupe vers l’abri soutenu par les piliers.

— Mettez la charrette là-dessous ! Ève, tu te charges de faire rentrer ces bêtes dans leurs pokéballs.
— Et le bourrinos ?
— On s’occupera de lui en trouver une plus tard. Notre repaire a été pillé, et pas qu’un peu. J’ai peur de voir l’état de la maison…

Boralf descendit de la charrette en grommelant.

— Il fallait s’en douter, dit-il d’un air sombre. On s’est absentés plus d’un mois. Mais au moins, pas de squatteurs.
— Ou alors ils sont très discrets.

Darren prit Boralf et Bakrom avec lui, pour aller inspecter les autres bâtiments. Lacrya rejoignit Lyco sous l’abri à bois, frissonnante :

— Pas trop mal au bras ? demanda-t-elle.
— Non, ça va.
— Ça ne saigne plus ?
— Non, non.

Lacrya, rassurée, observa les alentours. Les pillards commençaient déjà à s’activer pour ranger et nettoyer la plaine :

— Je suppose qu’on va devoir les aider. Leur repaire n’est pas aussi grand que ce que j’imaginais. Ces barricades peuvent arrêter des hommes, mais pas des pokémons sauvages motivés. Mais bon, c’est mieux que rien… ça va nous faire du bien de nous reposer, je pense.
— Oui, je n’attends que ça… soupira-t-il en se frottant les yeux.

Lacrya le regarda avec un mélange d’anxiété et d’amusement.

— Quoi ? dit-il, surpris.
— C’est bien la première fois que je te vois te plaindre. Tu avais beau prendre des coups, et mal vivre dans la cellule, tu n’as jamais rien dit.
— Peut-être parce qu’on avait rien d’autre à faire que de dormir, quand on ne se battait pas ? répliqua-t-il.

Un silence s’installa. En voyant des pillards soulever des caisses et vider leur contenu inutilisable par-dessus la clôture entourant la plaine, le garçon eut un déclic.

— Au fait, Lacrya.
— Oui ?
— Tu vas rester ici ? Je veux dire… rien ne t’attends, ailleurs ? De la famille, des connaissances ?
— … non, personne que je ne veuille revoir à tout prix. Tu sais, Lyco, aujourd’hui… avoir des amis, ça n’a plus de sens. Je connais des gens, bien sûr, mais ils sont à Méranéa. Ma mère… est certainement morte, à l’heure qu’il est. Elle était déjà mourante avant que je ne me fasse arrêter par Mervald. Je…

Sa voix se brisa. Lyco, curieux mais respectueux, la laissa finir sans oser se montrer trop intéressé.

— Je n’ai pas spécialement envie d’y retourner. La vie était dure, et elle aussi. D’autres s’occupent d’elle, si elle vit encore. Peu importe ce qu’elle devient… je préfère rester là. Et puis, après tout… tu es devenu une sorte d’ami, tu ne crois pas ?

La tournure de la conversation semblait la gêner. Lyco hocha la tête, rassuré qu’elle veuille bien rester avec lui. Il avait eu peur que cohabiter avec les pillards ne lui donne envie de partir, et il se voyait mal vivre avec eux sans elle. Ils s’étaient serré les coudes en Arène, s’étaient mutuellement sauvé la vie plusieurs fois… et derrière son air froid et distant, il savait que Lacrya était quelqu’un de bien, digne de confiance. Elle était forte et déterminée. C’était une véritable survivante.

Ils pourraient bien survivre encore un peu ensemble.

— Allons les aider, lâcha Lacrya en s’éloignant vers le foyer principal.



***


Perché sur la terrasse au sommet de la maison, Darren se permit un soupir d’aise assez discret pour que personne ne puisse l’entendre. Il détendit ses muscles et s’accouda au rebord, contemplant la plaine du refuge avec satisfaction.

En une semaine, l’endroit avait presque retrouvé son visage d’antan.

Boralf avait mené un groupe pour couper du bois ; l’abri commençait à avoir une réserve conséquente, suffisamment pour se permettre d’allumer un grand feu dehors le soir venu, et un autre dans la cheminée du foyer. La charrette avait été déplacée près de l’étable.

Cette dernière, qui avait subi de nombreux pillages, possédait désormais un toit comme neuf. Les trois pokémons y avaient chacun leur propre enclos, bien qu’assez petits pour de gros herbivores. Ils faisaient amplement l’affaire pour le moment. Amelis s’occupaient souvent d’eux, prouvant une fois de plus qu’il n’y avait qu’elle qui savait si bien s’y prendre avec les pokémons.

Darren ne s’inquiétait pas pour Ève et Bakrom ; même avec des armes rudimentaires, ils allaient bientôt revenir de leur chasse avec de belles proies et de quoi manger. D’autres pillards allaient également ramener des armes, si leurs vols et leurs tentatives de dialogues portaient leurs fruits.

Le chef des pillards ne se faisait pas trop de souci pour la suite. Leur groupe revivait et se faisait de nouveau une place dans le coin. Des alliés distants savaient déjà qu’ils étaient de retour, et les négociations pour obtenir des armes et des pokémons en échange de nourriture et de bois allaient bientôt porter leurs fruits.

Le regard indolent de Darren vagabonda dans la plaine. Il s’arrêta sur Lyco, assis sur un muret et en train de discuter avec cette fille, Lacrya. Au moins, ces deux-là avaient réussi à se faire discrets. Ils avaient même rendu service à pas mal de monde en se proposant pour aider aux réparations ou à la chasse. La blessure de Lyco semblait presque totalement guérie.

Ils commençaient également tous les deux à reprendre un peu de poids, et les entraînements physiques les aidaient à récupérer de leur séjour en cellule. Il fallait dire que les deux jeunes gens avaient passé des semaines en prison, avec un régime alimentaire strict et toujours enfermés entre quatre murs. Même s’ils n’étaient toujours pas en très bonne santé, ils recouvraient la forme peu à peu. Le groupe commençait même à les apprécier, malgré la rancœur toujours très présente concernant Lyco.

Mais un garçon comme lui, sans souvenir, et avec un caractère si docile et conciliant, ce n’était plus vraiment le Lyco qui les avait trahis. Darren ne pouvait s’empêcher de penser la même chose, et de le préférer à l’ancien.

Pourtant, bientôt, Darren devrait bien se consacrer à un problème qui semblait beaucoup motiver Amelis ; la jeune fille voulait que Lyco retrouve la mémoire à tout prix. Le colosse comprenait un peu son envie, mais ne pouvait s’empêcher de se dire que ça ne servirait à rien d’en apprendre plus. Lyco était un Effacé, tant pis. Ses souvenirs ne feraient que prendre conscience au jeune homme de ses fautes passées. Et peut-être réveiller ses mauvaises habitudes.

Après tout, il savait toujours se battre comme personne, donc où était le problème ? Être un pillard nécessitait d’être fort plutôt que de se préoccuper du passé. Survivre, c’était se battre, vivre dans le présent et penser à l’avenir, pas ressasser des souvenirs inutiles.

L’engouement d’Amelis et ses demandes répétées commençaient à avoir raison de la patience de Darren. Il allait falloir s’y coller. Il faudrait préparer un voyage pour le Vallon du Silence, et trouver cet ermite… ainsi que son pokémon. Certains disaient qu’il s’agissait du tout dernier Xatu sur Terre, d’autre qu’il était même le tout dernier pokémon de Type Psy, les autres ayant beaucoup servi lors de la guerre qui avait précédé l’Épidémie.

Darren se fichait de savoir si ce Xatu était le dernier ou non tout comme il se fichait de connaître la couleur du caleçon de Mervald.

Ce qu’il savait, c’était que Lyco allait être nécessaire au groupe pour la suite.

Darren, après son passage dans l’Arène, comprenait mieux à quel point Mervald allait loin pour se complaire dans sa petite vie de gouverneur. Finalement, il comprenait pourquoi l’ancien Lyco haïssait tant cet homme et cherchait à le tuer.

Le chef des pillards était même prêt à dire que l’assassiner ferait sans doute du bien à Méranéa et tous les habitants autour du Désert de la Désolation.



***


— Les dernières nouvelles ! s’écria Lacrya en se plantant devant Lyco, avec un rouleau de papier à la main.
— Quoi, déjà ? Le groupe est revenu du nord ?
— Oui. Ils ont déjà fait leur rapport à Darren tout à l’heure. J’espère qu’on va en apprendre plus sur ce qu’il se passe dans le pays.

Lacrya s’assit près de lui sur son muret de prédilection. En tentant de regarder par-dessus son épaule, Lyco se rendit compte qu’il avait du mal à déchiffrer ce qui y était écrit en lettres noires et régulières. Il reconnaissait certains mots, mais avait du mal à se souvenir de la manière de prononcer certaines lettres. Sa tentative vaine éveilla un début de migraine ; signe que sa mémoire effacée luttait pour l’empêcher d’en savoir plus.

Lacrya remarqua son air dubitatif :

— Toujours autant de mal à lire, pas vrai ? Quand tu t’es retrouvé bras ballants sur l’édition ramenée la semaine dernière, j’ai cru que tu plaisantais.
— Je sais… c’est stupide, mais je devais sûrement être un mauvais lecteur avant. Pourtant, j’ai l’impression que je savais mieux me débrouiller qu’aujourd’hui…
— T’inquiète pas, au moins tu sais repérer quelques mots. Les analphabètes sont nombreux, tu sais. J’ai appris grâce à une vieille de mon quartier, qui donnait des cours à tous les enfants de ma rue… c’est assez exceptionnel d’avoir quelqu’un comme moi pour t’aider.

Lyco soupira de dépit ; il aurait voulu pouvoir se passer d’aide. Il sentait que lire était une chose importante, et trop utile pour qu’il se résigne à garder un niveau si faible. Lacrya déplia le rouleau et laissa son regard courir sur la mise en page sommaire.

— Évidemment, c’est un journal contrôlé par Mervald, comme celui de la dernière fois… sauf que celui-ci est beaucoup plus rare. Il ne font que quelques centaines de tirages à Psyhéxa, et ce sont les nomades qui le distribuent gratuitement à ceux qui croisent leur route.

Lyco acquiesça. Il savait déjà qu’avoir accès à ce genre de flux d’informations était difficile. Ce n’était pas pour rien que Darren envoyait spécifiquement une petite équipe au nord, afin d’en récupérer une copie. Ces choses-là permettaient à la fois de se tenir au courant des actualités dans le pays, mais aussi de les revendre à prix d’or dans les jours suivant sa distribution.

— L’Arène a été réparée, ça y est, indiqua Lacrya. Pff, ce Mervald. Je parie qu’il a employé ses esclaves pour faire les travaux le plus vite possible.
— Ce ne serait pas très étonnant.
— Ça ne parle pas du Condamné, comme toujours… ils évoquent un séisme. Ah ? Psyhéxa a un nouvel intendant à sa tête. Il aurait plus de pouvoirs que son prédécesseur.
— Vraiment ? Il délègue son pouvoir à d’autres que lui ?

Des bruits de pas se rapprochèrent. Lacrya et Lyco levèrent la tête. C’était Ève, qui agita sa chevelure blonde en lâchant un rire enjoué :

— Non, il ne délègue rien ! Figurez-vous que l’intendant est un de ses Mutants. Le gars de type psy, là.
— Molch, souffla Lacrya, surprise.

Ève acquiesça et soupira.

— Ah, et ce n’est pas précisé dans le journal, mais ils ont recruté un paquet de soldats supplémentaires. Les routes n’ont jamais été aussi surveillées que maintenant. Mais bon, on s’en fiche quand on va dans la forêt, Mervald n’a aucune emprise ici.
— Tu reviens de la chasse ? s’étonna Lacrya.
— Oui ! Ça a été fructueux, je peux vous le dire. Le petit gibier est nombreux ici. Heureusement qu’on est plutôt en bordure des Forêts qu’en leur cœur ! On croiserait des scarabrutes tous les jours, et ce ne serait pas très drôle…

La jeune femme s’éloigna d’un pas sautillant. Lacrya reporta son regard sur le journal :

— Rien de bien intéressant sinon…

Elle laissa le papier sur le muret et étendit ses jambes devant elle.

— Je crois que je n’avais jamais ressenti ça avant, dit-elle soudain.
— De quoi ?
— Je suis reposée, j’ai le ventre plein, je ne meurs pas de froid ou de chaud, j’ai un toit pour dormir, et nous sommes protégés des dangers. C’est bien la première fois de ma vie que je me sens… chez moi.

Lyco hocha la tête, distrait. Elle avait raison.

Même si les pillards ne les considéraient pas pleinement comme des leurs, vivre ici lui plaisait bien. Lui qui n’avait connu que l’Arène, il se sentait plus vivant que jamais, et il ne regrettait pas d’avoir rejoint le groupe. Sans les pillards, qui sait ce qui lui serait arrivé…



***


Psyhéxa était impressionnante vue de loin.

La cité, entourée de hauts remparts d’un blanc éclatant, avait beau ressembler à une fourmilière à cause des bidonvilles qui se formaient à ses pieds, la ville intramuros reflétait les rayons du soleil comme si elle était faite d’or pur. Bizarrement, elle paraissait bien plus imposante et riche que Méranéa ; sans doute un peu parce qu’ici, le climat était plus agréable qu’au cœur du Désert.

De près, ça n’allait sûrement pas être aussi mirobolant, mais ça n’empêchait pas Karyl de rêver.

L’homme avait erré longtemps avant d’arriver ici. Les meutes de grahyénas avaient réussi à mettre en pièces ses alliés, mais il avait pu s’en sortir seul ; une unique morsure et quelques griffures prouvaient qu’il avait été confronté à ces bêtes affamées.

Psyhéxa était la première étape de sa nouvelle vie. Il comptait devenir soldat. Après tout, l’armée de Mervald recrutait depuis quelques jours. Il entendait les rumeurs, croisaient des voyageurs inquiets.

Psyhéxa ne manquait pas d’hommes, donc il risquait d’être envoyé dans une cité périphérique, mais il s’en fichait. Tant qu’il avait un salaire et qu’on le nourrissait, tout lui conviendrait. Heureusement, il avait beau s’être évadé de l’Arène, il n’y avait pas de registre des prisonniers là-bas. Aucun risque que son futur employeur ne le suspecte d’être un évadé. Il n’était certainement pas recherché non plus. Qui se préoccuperait d’un type comme lui ? L’Effacé, par contre…

Et puis, bon, quelle chance y avait-il pour qu’il tombe sur quelqu’un qui le reconnaîtrait là-bas ? Ces enfoirés de pillards devaient se cacher loin des villes, et les autres prisonniers étaient morts pour la plupart, en tentant de fuir comme lui.

Karyl songea avec amertume à Darren. Le colosse l’avait ridiculisé et jeté comme un vulgaire ponchien.

« Si tu veux survivre, je te conseille de baisser ton arme et de reculer. Je sais me servir d’une épée mieux que toi. »

Karyl ne pouvait s’empêcher de vouloir le retrouver et lui prouver le contraire ! Et l’Effacé… ce petit tueur à l’air si gentil avec les siens. Rien que de l’imaginer, il révulsait Karyl. Oh, il aurait aimé le tuer, lui aussi… et leur prouver à tous qu’il était un homme. Un homme digne et fort.

Mais avant ça, être recruté comme soldat était la seule option. C’était un métier facile, où on pouvait maltraiter les mendiants sans se soucier de ce qu’en penserait la hiérarchie. Il y avait tant de vermines à nettoyer autour des cités…

Karyl se dirigea droit vers les murs pâles de Psyhéxa, en claudiquant, sans cesser de ruminer de sombres pensées.