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Tout ça pour mourir de Asako



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Informations

» Auteur : Asako - Voir le profil
» Créé le 11/12/2009 à 15:38
» Dernière mise à jour le 28/11/2012 à 18:01

» Mots-clés :   Romance   Science fiction   Suspense

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0-2 : Insouciance
-Réveille-toi, gamin, tu as de la visite !

Une main le secoua vigoureusement. David, qui avait le sommeil léger, se redressa aussitôt, le cœur s'affolant dans sa poitrine tandis qu'il se demandait où il était... puis la mémoire lui revint et son regard se durcit. C'était Mr Valery, celui qui aimait taquiner Johanna Warren, avec son visage banal mais souriant. L'homme lui lança un tas de linge chiffonné.

-Qui est-ce ? s'enquit David, tout en dépliant une chemise rayée et un jean.

Ce n'était pas ses habits. Ils étaient trop grands et ils dégageaient une déprimante odeur de naphtaline qui le rebuta. Néanmoins, ayant décidé d'être obéissant jusqu'à ce qu'il puisse en savoir plus, il les enfila docilement, non sans esquisser une petite moue dédaigneuse.

-Des amis à toi, à ce que j'ai compris. Au fait, moi, c'est Sébastien Valery. Tu peux m'appeler Sébastien, je suppose.

-Et les autres scientifiques, quels sont leurs noms ?

« Mieux vaut connaître l'ennemi » songeait David en refermant les boutons de sa chemise.

-Celle qui est aussi aimable qu'un pot de chambre, c'est Johanna Warren. Une femme bien, dans le fond, mais pas très féminine et pas non plus très commode. Et en combat Pokémons, c'est une véritable bourrine. Le vieux, là, c'est Stieg Jackson. Mieux vaut pas lui chercher des noises. Tu sais que c'est un homme admiré et craint parmi les scientifiques, notamment grâce à sa thèse sur les Pokémons feux ? Il a fait une carrière époustouflante. Et le dernier, c'est Matt Keyes. Je n'arrive pas trop à le cerner, mais il est sérieux, il fait bien son boulot.

Sébastien Valery aimait parler et s'écouter, David le remarqua aussitôt. Il se promit de le retenir. Un homme aussi volubile parmi les adversaires représentait l'idéal. Nonchalamment, l'enfant le suivit dans ces couloirs clairs qu'il commençait à connaître par cœur, et, comme la veille, il s'appliqua à retenir le chemin qu'ils parcouraient, bien qu'ayant très peu de repères.

Ils débouchèrent sur une sorte de pièce lumineuse et étrangement avenante, dans laquelle l'attendaient deux enfants de son âge. En les apercevant, David sentit pour la première fois depuis longtemps une vague de ravissement et d'euphorie l'envahir.
Sébastien les laissa seuls, non sans fermer la porte à clé et les avoir prévenu qu'ils avaient un quart d'heure pour discuter.

-DAVID !

Un gamin aux cheveux bruns et ébouriffés, débraillé, se jeta sur lui et l'étreignit si fort que David dut le retenir pour ne pas être broyé entre ses bras. Derrière lui, en retrait, une fillette blonde et pâle, qui ressemblait à une poupée de porcelaine, lui adressa un sourire rayonnant quoi que teinté de tristesse.

-Ted, Rebecca... murmura David. Je suis vraiment heureux de vous voir.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi tu t'es retrouvé ici ? lui demanda Ted, le relâchant enfin.

-Apparemment, je suis malade, mais... commença David, avant de s'interrompre, incertain.

-Malade ? N'importe quoi, tu es en aussi bonne santé que moi ou Rebecca ! répliqua Ted.

-... je crois qu'ils me mentent, murmura le garçon.

L'incompréhension se lut dans les yeux marron de Ted, mais Rebecca, elle, approuva silencieusement. David se tourna vers elle et sentit sa bouche tressaillir en un léger sourire. Ils s'observèrent quelques secondes sans rien dire, puis Rebecca s'approcha de lui et, doucement, un peu gêné, il enroula ses bras autour de ses épaules et la serra contre lui délicatement, de peur de la briser, elle, si fragile.

-On va te sortir de là ! affirma Ted dans son dos.

-T'inquiète, je trouverais un moyen pour m'enfuir, dit David, se retournant après avoir lâché Rebecca.

Cette dernière lança d'une petite voix :

-Es-tu sûr que tu n'es vraiment pas malade ?

-Je m'en serais rendu compte... Que vous a-t-on dit, dehors ?

-Hier, nos professeurs nous ont assuré que tu avais dû partir vivre en catastrophe à la campagne, pour des raisons de santé.

-Mais Bourg-en-Vol, c'est la campagne ! C'est n'importe quoi ! s'écria Ted.

-Et mes parents ?

-Ah, ça, il faut demander à Rebecca ! D'ailleurs, c'est grâce à elle que nous t'avons retrouvé si vite, dit le petit brun, une pointe d'orgueil dans la voix, visiblement très fier de l'avoir pour amie.

La fillette rougit.

-Je suis allée voir tes parents hier après-midi, murmura-t-elle, baissant les yeux.

David fut stupéfait. Il savait que sa famille était intimidante, entre cette mère insolite, ce père belliqueux et leur Linéon de compagnie à moitié sauvage. Pourtant, malgré sa timidité, Rebecca avait osé leur rendre visite pour avoir des nouvelles de lui... Tout comme Ted, il se sentit immensément fier d'être son ami.

-Ton père a d'abord refusé de répondre à mes questions, mais finalement, ta mère a décidé que je méritais d'en savoir plus. Ils m'ont dit que tu avais de graves problèmes de santé et qu'ils avaient dû t'envoyer dans un hôpital privé, situé sur une île près de Myokara. Comme on est dimanche, le père de Ted nous y a emmené ce matin de bonne heure sans problème.

Le père de Ted travaillait entre Myokara et le reste du continent, assurant un service en bateau toute la semaine pour les relier.

-Je ne suis pas malade, répéta David.

-Comment en être sûrs ? insista Rebecca.

-Sois pas idiote, tu vois bien qu'il est normal !

-Ecoutez. Je ne vais pas m'enfuir tout de suite, je vais d'abord fouiller un peu cet endroit et comprendre où est-ce que j'ai réellement atterri. S'il s'avère que tous ces gens ne veulent que mon bien, je resterais, mais s'il s'avère que je ne suis pour eux qu'un cobaye et qu'ils auraient payé mes parents pour se servir de moi, alors je partirais. En attendant, je peux vous demander un service ?

-Evidemment ! répondirent les deux enfants à l'unisson.

-Si j'arrive à m'enfuir d'ici, vous m'aideriez à me cacher d'eux ?

-De qui ?

-De ces quatre scientifiques qui font des expériences sur moi.

-Bien sûr ! lancèrent-ils, les yeux brillants.

-Je vais bientôt devoir y aller, annonça David, et, en disant ces mots, il sentit quelque chose se déchirer à l'intérieur de lui.

Il aurait voulu rester un peu plus avec ses amis. Il avait presque omis que, malgré les apparences, il restait captif, tandis qu'eux allaient regagner la liberté.

-Ces scientifiques... comment sont-ils ? lui demanda Rebecca, en prenant sa main dans la sienne, minuscule mais bien plus chaleureuse que celle de Johanna Warren.

-Je ne sais pas, avoua David. Il y a en a beaucoup, je m'y perds un peu. Matt Keyes, Johanna Warren, Sébastien Valery et Stieg Jackson...

-J'espère que tout ira bien, ajouta-t-elle, avant de se dresser sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur sa joue.

Il sentit son visage s'embraser, sous le regard espiègle de Ted qui lui donna une tape amicale dans le dos.
Puis il regarda les deux enfants s'éloigner de lui, sortant par une porte dérobée sous la surveillance de Sébastien, et, après un soupir qui venait du plus profond de ses entrailles, David tourna le dos à Ted Sempere et Rebecca Swann, abandonnant ses onze ans momentanément retrouvés et retrouvant son masque d'indifférence et de maturité qui caractérisait tant ses traits.

***
Il faisait face à Zigzaton, décontenancé. Le Pokémon soutenait son regard, plongeant ses grands pupilles d'ambre dans les siennes. Dans son dos, Johanna Warren prenait des notes, calfeutrée dans un fauteuil pourpre.

-Tu connais les attaques d'un Zigzaton, non ? demanda-t-elle, mais cela sonnait davantage comme une affirmation que comme une question.

David acquiesça.

-Tu es muet ou quoi ? s'emporta la jeune femme, crispant la main autour de son stylo qui décrivait de larges arabesques sur sa feuille.

-Oui, je connais les attaques d'un Zigzaton, répondit-il sombrement.

-Alors, donne-lui des ordres ! l'houspilla-t-elle comme s'il s'agissait d'une évidence.

Il la foudroya d'un regard flamboyant par-dessus son épaule, mais elle ne daigna même pas lever le visage vers lui.

-Comme ça, dans le vide ? s'étonna-t-il, ne pouvant retenir un certain mépris.

Johanna cessa d'écrire et écarquilla les yeux, entre ébahissement et exaspération.

-Donne-lui des ordres, répéta-t-elle lentement. Tu es vraiment idiot ou tu fais semblant ?

-Contre quoi dois-je lui donner des ordres ?

-Obéis-moi ! Crois-moi, ce petit jeu ne marchera pas avec moi.

-Quel petit jeu ?

-DONPHAN, ROULADE !

Et David vit un sanglier métallique bondir hors d'une Poké Ball jusque là discrètement accrochée à la ceinture de la jeune femme, se lover sur lui-même et se catapulter non pas vers le robuste raton laveur, comme l'avait d'abord cru David, mais bien vers lui, enfant vulnérable et sans défense qui subsistait là, bras ballants...
Comme au ralenti, le sol se rapprocha de ses yeux, ses jambes se dérobant sous son poids et une douleur fulgurante lui traversant le ventre. Il avait l'impression que des centaines de minuscules poignards invisibles venaient de lui trancher l'estomac. Le souffle coupé, furieux, il parvint à murmurer entre ses dents :

-Zigzaton, Lance-Boue.

Le raton laveur obéit et gratta le sol, faisant apparaître des giclées de boue qui se collèrent au Donphan et stoppèrent net sa Roulade.

-Dard-Nuee...

-Reflet !

Des milliers de petits pics émergèrent du pelage hirsute de Zigzaton mais se fichèrent dans de simples Reflets de Donphan, qui se volatilisaient au moindre contact.

-Maintenant, Donphan, FURIE !

A travers ses larmes de douleur, qui formaient un nuage vaporeux partout où il posait les yeux, il vit la masse blafarde du Donphan cavaler à toute vitesse tel un boulet de canon encore une fois vers lui. Il eut juste le temps de rouler sur le côté, évitant de justesse une défense affûtée qui siffla à ses oreilles, mais déjà le sanglier revenait à la charge, impitoyable.

-Zigzaton, Lance-Boue, répéta-t-il difficilement.

Le petit raton renvoya vers l'ennemi une fange poisseuse qui aveugla le sanglier. Ce-dernier, déstabilisé, dérapa et s'affala dans un bruit sourd. David se redressa, non sans remarquer avec horreur que ses mains et ses jambes tremblaient violemment, et s'essuya les yeux pour se débarrasser de ce voile de larmes qui obscurcissait sa vue.

-Zigzaton, Charge...

Zigzaton se jeta sur Donphan, qui ne se laissa pas faire et s'apprêta à lui donner un coup de corne.

-... et Coup D'Boule !

Au dernier moment, écoutant l'ordre de David, le raton se faufila adroitement sous le ventre du sanglier et lui donna un coup de tête bien placé qui fit bramer le Pokémon.

-Reviens, Donphan, murmura Johanna Warren, s'avançant de quelques pas.

Elle avait quitté son fauteuil et elle considérait David avec un mépris non dissimulé, qui se dégageait de chaque courbe de son visage dur. Il lui rendit sa morgue et sa rage d'un regard glacial qui en disait long.

-Pourquoi m'avez-vous attaqué ? s'enquit-il froidement, éprouvant envers elle un vif mélange de colère et d'effroi.

-Pour te bouger un peu les fesses, évidemment ! Tu crois que je n'ai que ça à faire, d'attendre que tu acceptes de m'obéir ? Je t'avais dit de donner des ordres à ce Zigzaton !

-C'est ce que j'ai fait.

-Tu aurais continué de m'assaillir de questions idiotes si Donphan n'était pas intervenu. Je n'ai pas les mêmes méthodes douces et molles que ce Keyes, moi ! Bon, c'est pas tout ça, mais tu n'as pas besoin d'aller te faire soigner. On va retourner dans ta chambre.

-Ce n'est pas un hôpital ? s'étonna faussement David.

-Un hôpital ! répéta Johanna avec aversion. Quelle idée ! Est-ce que j'ai une tête d'infirmière ?

David s'abstint de tout commentaire.

-Je suis une scientifique, pas une gentille nurse ! Cesse de poser des questions, sinon je vais finir pas croire que tu es réellement attardé. Tu peux marcher sans problème, non ? Inutile de t'administrer des soins particuliers, Donphan t'a à peine égratigné. Ah, et ramasse-moi ce Zigzaton, on va le déposer chez Mr Jackson au passage.

-... Si vous n'êtes pas infirmière, risqua David en chemin, alors pourquoi m'avez-vous fait cette prise de sang et tous ces tests ?

-Quelle insolence ! Tu as de la chance que je ne sois pas Jackson, sinon tu t'en serais déjà pris une.

Pourtant, David était convaincu que Johanna n'hésiterait pas une seconde pour lui balancer son poing dans la figure si, un jour, il parvenait à la faire sortir de ses gonds.

-J'ai d'importantes connaissances en médecine, fort heureusement, sinon je n'aurais pas été choisie pour ce projet. Que t'as dit Keyes ? Que nous allons te soigner, c'est ça ? Et bien avant ça, il va nous falloir continuer nos petites recherches sur ta maladie, et ta présence nous est indispensable. Mais ça ne fait pas de ce lieu un hôpital, loin de là... Pourquoi tu t'intéresses tant à notre travail, gamin ? lâcha-t-elle finalement.

-Je suis concerné par votre travail, vous venez de le dire, rappela-t-il simplement. Même si ma participation est involontaire.

En vérité, depuis plusieurs minutes, il avait eu une illumination et son cœur s'était mis à palpiter frénétiquement dans sa poitrine. S'agrippant au Zigzaton qu'il avait ramassé à la demande de Johanna, il approcha sa bouche de son oreille et lui murmura un ordre d'une voix si basse que lui-même discerna à grand-peine le sens de ses paroles. Quant à la scientifique, devant lui, elle avançait à grandes enjambées puissantes sans faire attention à lui, le considérant vraisemblablement comme trop jeune et trop idiot pour nourrir les ambitions qui tourbillonnaient à présent dans son esprit.
Lorsqu'elle le confina dans sa chambre et repartit après lui avoir arraché Zigzaton des mains, il poussa un soupir de soulagement et sortit la main qu'il avait enfouie dans sa poche et qui s'était refermée autour d'un objet précieux. Cet objet avait eu le malheur de dépasser de la blouse de Johanna et Zigzaton l'avait subtilisé sans difficulté.
Ce n'était en vérité qu'une simple barrette, que la scientifique accrochait sûrement dans ses cheveux pour les empêcher de tomber devant ses yeux de manière inopinée. Mais avec un peu de travail et d'invention, il n'aurait aucun mal à tordre cette lame de métal pour un faire un rossignol, clef primitive qui lui permettrait de crocheter sa serrure et d'examiner les parages en détail...