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Pokemonis T.1 : La Pokeball perdue de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 02/09/2015 à 09:34
» Dernière mise à jour le 03/11/2016 à 10:52

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Action   Aventure   Présence de Pokémon inventés   Région inventée

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Chapitre 29 : Base mobile sur tortue géante
Jartobylon


Chaque Pokemon est unique. C'est ce que m'avait dit le légendaire Celebi, il y a de ça un peu plus d'un millénaire. Difficile de trouver quelque chose de plus vrai que ça. Celebi, lui, peut voyager dans le temps, ce qui le rend unique. Moi, mon unicité, je la tirai avant toute chose de ma taille. De mon âge aussi un peu, car j'étais immensément vieux, assez pour avoir connu les humains à l'époque où ils ont commencé à fonder leurs premières grandes civilisations. Mais bon, quelque autres Pokemon avaient aussi mon âge, voir plus, comme les Pokemon Légendaires. En revanche, aucun d'entre eux n'étaient aussi énorme que moi. Si Wailord était le plus grand Pokemon marin, j'étais sans conteste, avec mes 62 mètres de long et mes 480 de haut le plus grand Pokemon terrestre.

Je suis Jartobylon, l'un des Sept Pokemon Merveilleux, tel que les anciens humains nous appelaient jadis. Que sont les Sept Pokemon Merveilleux, au juste ? Même moi, qui en suis un, je l'ignore. Les humains de l'antiquité nous ont nommé ainsi en raison de notre taille, de notre beauté ou de notre grâce. Ils nous vénéraient comme des divinités. Chacun d'entre nous étions uniques, ce qui faisaient de nous, en un certain sens, des Pokemon Légendaires. Mais qui, de nos jours, se souvient encore de la légende de Jartobylon, l'immense Pokemon tortue qui portait sur son dos la plus grande et la plus merveilleuse tour florale du monde ?

Bon, du fait de ma taille, j'avais du mal à passer inaperçu, et à me cacher comme mes frères ou les autres Pokemon Légendaires. J'étais si énorme que chacun de mes pas me prenait bien cinq minutes et provoquait un tremblement de terre conséquent. De plus, bouger alors que je portais sur mon dos une cité habitée, ce n'était pas bien recommandé. Donc, je passais le plus clair de mon temps immobile. Quand j'hibernais pour un siècle ou deux, je pouvais rentrer mes pattes et ma tête dans la tour qui me servait de carapace, devenant ainsi invisible aux yeux du monde, chacun voyant seulement une immense tour verte qui sortait du sol.

Mais le temps de l'hibernation était révolue. Car depuis un siècle, j'abritais en mon sein la rébellion Paxen. La cité-tour sur mon dos était leur base. Une planque idéale, en réalité. Car si la tour passait difficilement inaperçue, personne n'irai oser la fouiller. La tour faisait partie de moi, et personne n'avait envie de me mettre en colère, vu ma taille. Même l'Empire me laissait tranquille, quand bien même j'étais un Pokemon Légendaire. Je ne faisais de mal à personne ; je me contentais d'être immobile au milieu de cette vaste forêt qu'était la Vermurde. Bon, il fallait bien que je mange, de temps à autre, mais malgré ma taille gigantesque, je n'avais pas besoin de beaucoup de nourriture. Un ou deux arbres par semaines me suffisait. Au besoin, j'étirai mon cou pour attraper des arbres éloignés. Je pouvais rester sur place sans bouger au moins six mois.

Je sortais à peine de mon sommeil. Le soleil venait juste de se lever. Comme je m'étirai le cou et les jambes, la forêt toute entière trembla. Mais depuis le temps que j'étais là, plus aucun Pokemon qui y résidaient n'y fit attention. C'était comme le Dodrio qui chantait au levait du soleil : quand la forêt tremblait au petit matin, c'est que j'étais réveillé. Je baillai profondément, et avisa le couple d'Etouraptor qui avait fait son nid sur ma tête. Faut dire, ma tête, c'était un sacré abri. Perchée sur elle, il y avait une petite tour à deux étages. Elle n'était rien comparé à celle qui trônait sur mon dos, mais elle avait l'avantage d'offrir un bon gîte aux Pokemon sauvages assez malins pour s'y rendre. Tant qu'ils ne faisaient pas de raffut ou de dégât, j'étais ravi de les accueillir. J'aimais bien leur compagnie. Parce que, en réalité, j'étais un peu un Pokemon sauvage moi-même.

- Bien le bonjour, chers amis, fis-je aux Etouraptor qui volèrent à hauteur de mon œil droit. Comment se portent vos œufs ?

- Ils vont bientôt éclore, noble Jartobylon, répondit la femelle. Nous vous sommes si reconnaissants de nous avoir permis de faire notre nid ici !

- Oui, approuva son compagnon mâle. Aucun prédateur ou Pokemon voleur d'œuf n'osera venir nous causer du tort sur votre tête. Merci mille fois, noble Jartobylon.

- Ho ho ho, vous allez donc continuer à me remercier ainsi chaque jours ? Rigolai-je. Cela ne me pose aucun problème de vous accueillir. Au contraire, j'apprécie la compagnie de Pokemon respectueux.

Pour ça oui, je l'appréciais, car à part les Pokemon Paxen que j'abritais dans mon dos, je n'avais pas vraiment l'occasion de communiquer avec ceux de mon espèce. Les Pokemon de l'Empire m'étaient fort désagréables, tandis que le grande majorité des Pokemon sauvages me craignaient et me fuyaient. Pourtant, malgré ma taille, je n'aurai pas fait de mal à une mouche. J'avais une sainte horreur des conflits. Chose bizarre quand on était la base vivante d'une organisation rebelle qui ne rêvait que de faire tomber l'Empire, je sais.

J'aidais les Paxen en les abritant, mais je n'étais pas un Paxen moi-même. Je n'avais nul partenaire humain, et je ne prenais aucunement part aux missions et aux combats. Et leur cause me laissait quelque peu indifférent, en toute honnêteté. Pour moi, que ce soit l'Empire Pokemonis qui règne ou quelqu'un d'autre, ça m'importait peu. Que les humains soient des esclaves ou non, ça n'allait pas bouleverser mon existence. Je n'appréciais pas particulièrement l'Empereur Daecheron, mais je n'avais rien contre lui. Pourtant, quand l'Empire allait se rendre compte de mon implication avec les Paxen, il ne manquera pas de me mettre dans le même sac qu'eux.

Alors, pourquoi aider les Paxen ? Eh bien, il se trouvait que l'un de leurs Fondateurs était un très vieil ami à moi. Un Pokemon plante, comme moi, que j'avais connu trois siècles plus tôt. Plus tard ensuite, j'ai fait la connaissance de Jyvan Chen et de son acolyte Cernerable, les deux Fondateurs à qui on doit d'avoir rassembler les quatre autres pour créer leur rébellion. Jyvan et Cernerable étaient des compagnons de discussions agréables, et j'avais accepté de les héberger dans ma tour dorsale. Bien sûr, à l'époque, les Paxen n'étaient même pas cinquante ; rien à voir avec le millier que j'abritais aujourd'hui. Mais je continuais à le faire, par loyauté. Jyvan était bien sûr mort depuis des années, mais Cernerable était toujours vivant, bien que vieux. Contrairement à moi, il n'était pas un Pokemon Légendaire immortel, et il était déjà âgé quand il a cofondé la rébellion il y a cent ans. Viendra bientôt le moment où il quittera ce monde à jamais. Mais moi, tant que les Paxen existeront, je continuerai à les loger dans ma tour dorsale tant qu'ils le désireront.

Le problème, c'était que l'Empire n'était pas dupe. Il avait fouillé partout pour tenter de localiser la base principale des Paxen, et il n'avait rien trouvé. Ce Général Légionair qui commandait ses armées était un malin. Il savait très bien que j'existais, et que j'avais sur mon dos une tour-cité capable d'abriter des milliers d'humains et de Pokemon. Il m'avait déjà plusieurs fois demandé, par messagers impériaux, de lui donner la permission d'inspecter la tour sur ma carapace. J'ai refusé à chaque fois, prétextant ma fierté et la protection de mon domicile privé qu'était ma carapace. Légionair n'avait pas été jusqu'à ordonner cette inspection de force, mais je savais qu'il se doutait de ce que ma tour cachait. Et il insistait de plus en plus pour vérifier. Comme aujourd'hui, tiens...

Légionair avait laissé un messager impérial dans la forêt de Vermurde. Officiellement pour pouvoir me contacter rapidement, mais officieusement, pour me surveiller. Non pas que je risquais de m'enfuir sous leur nez, étant donné la lenteur avec laquelle je bougeais, et ma taille quelque peu handicapante pour rester discret. Ce messager impérial était un Libegon, ayant le grade de lieutenant. Un Pokemon poli et respectueux, pour un impérial. Mais aussi poli soit-il, si Légionair lui ordonnait de venir fouiner dans ma tour dorsale sans ma permission, je ne pourrai pas l'en empêcher, étant donné sa vitesse.

Bien sûr, les Paxen à l'intérieur le tueront avant qu'il n'ait pu faire un quelconque rapport, mais si Légionair ne recevait plus de nouvelle de son messager, il allait venir ici en personne. Et probablement avec une armée. De même, il était impossible que tous les Paxen puissent quitter l'abri de leur base et se déplacer sans se faire repérer, alors que Légionair me faisait surveiller. De n'importe quel coté qu'on regarde, les Paxen étaient bloqués. Il allait falloir se battre tôt ou tard, j'en avais conscience.

Le Libegon de l'Empire planait à hauteur de mon regard. Dès son arrivée, le coupe d'Etouraptor s'empressa de rentrer dans la petite tour sur ma tête. Les Pokemon sauvages se méfiaient des impériaux, et à juste titre. Le but de l'Empire Pokemonis était de s'étendre autant qu'il le pouvait. Chaque jour, il rongeait de plus en plus les territoires des Pokemon qui préféraient vivre libres, les forçant à s'intégrer dans leur communauté. Moi, heureusement, ils ne m'avaient pas forcé à devenir un impérial. Je les aurai un peu embarrassé, avec ma taille, dans une de leur cité.

- Noble Jartobylon, commença le lieutenant Libegon, le Général Légionair s'impatiente de plus en plus.

- Pas autant qu'il ne m'ennuie, je le crains, répliquai-je en faisant mine de soupirer. Vous venez me voir chaque jour. Quand allez-vous vous décider à laisser un vieux Pokemon inoffensif comme moi à la quiétude de ses jours ?

- Quand vous aurez décidé à nous laisser contrôler l'intérieur de votre cité-tour, déclara Libegon sans détour.

- Je ne permets à personne de pénétrer la royale cité que je porte, et ce depuis le dernier souverain de Babylone que j'abritais ! Oh, mais vous ne devez pas connaître Babylone. C'est un peu vieux pour vous... C'était un royaume humain bien plus impressionnant que tout ce que pourra devenir votre sacré Empire Pokemonis.

- Peu me chaut les anciens royaumes humains. En revanche, je suis sûr que ça intéresserai le Général Légionair. Il a toujours été un grand féru d'Histoire. Vous vous entendriez bien, lui et vous, si seulement vous consentiez à nous laisser jeter un coup d'œil.

- Le lieu sur mon dos est un lieu sacré ! Protestai-je. Nul Pokemon ni humains ne le souillera. Ça vous concerne vous, mais aussi ces Paxen. Je n'en héberge aucun. Avez-vous le front de m'accuser, moi, de me souiller au contact de vulgaires humains ?!

S'il y avait une chose dont j'étais fier, c'était de ma capacité à proférer des mensonges convaincants. Mais ça ne suffisait pas à l'Empire.

- Comprenez notre position, je vous prie, noble Jartobylon, renchérit le lieutenant Libegon. Nous avons fouillé partout pour localiser la base Paxen. Il n'y a qu'un seul endroit où ils pourraient se cacher que nous n'avons pas vérifié, et c'est la cité sur votre dos.

- Je crois que je le saurai si toute une bande d'humains et de Pokemon logeait dans mon dos. Il n'y a personne dans la cité-tour antique que je porte depuis des millénaires.

- Le Général Légionair ne demande qu'à vous croire. Juste un rapide coup d'œil à l'intérieur pourrait...

Je fis mine de m'énerver.

- Etes-vous sourd ? Personne ne peut entrer dans cette cité antique, et personne ne le fera, pas même votre empereur, à moins qu'ils ne souhaitent provoquer mon courroux. Je sais qu'il nous craint, nous autres anciens légendaires.

- Sa Majesté ne craint rien ni personne ! Protesta le lieutenant. Vous avez beau être grand et ancien, s'il prenait au Général Légionair la fantaisie de venir avec son armée, vous seriez anéanti !

- Cela reste à prouver, dis-je avec indifférence. Mais même si c'était le cas, vous perdriez des milliers de Pokemon contre moi. Pouvez-vous vous permettre une telle chose alors que vous êtes en guerre contre les Paxen et contre l'Empire Lunaris ?

- Le général en décidera de lui-même. C'est votre obstination qui vous perdra, Jartobylon. L'Empire Pokemonis n'est guère patient quand il s'agit d'écraser les Paxen. Rappelez-vous en.

Il s'en retourna sans autre forme de procès, et je soupirai. Ce lieutenant Libegon n'avait certainement pas le courage de passer outre mon refus et de venir fouiller dans ma cité-tour seul. Mais Légionair, qui était l'une des Cinq Etoiles Impériales en plus d'être le commandant en chef des armées, était fait d'un tout autre bois... ou un tout autre acier, dans son cas. Lui et son âme damnée, le colonel Tranchodon. Un vrai fou celui-là, doublé d'un sauvage. Lui non plus n'hésiterai pas à pénétrer mon dos si jamais il soupçonnait l'existence d'un seul Paxen à l'intérieur.

Oui, j'allais bientôt devoir me battre. Mais venir en aide aux Paxen, c'était mon choix. Je me devais d'en assumer les conséquences. Je n'étais pas toujours d'accord avec eux, ceci dit. La façon dont ils avaient tué le Seigneur Xanthos, par exemple. Un humain comme lui aurait mérité une meilleure fin. J'ai admiré ce personnage. Un tyran, effectivement, qui a maltraité son propre peuple. Mais avant cela, un humain qui a accompli des choses phénoménales, surtout pour les Pokemon. Ne nous avait-il pas donné longévité et intelligence grâce au Fragment d'Eternité ? Avant cela, bien qu'étant unique et légendaire, je ne savais pas parler le langage humain, et mon esprit était à peine supérieur à celui d'un vulgaire Pokemon sauvage qui vivait par instinct.

Grâce au Seigneur Xanthos, il y a cinq cent ans, j'ai pu accéder, en même temps que tous les autres Pokemon du monde, à l'intelligence humaine, à leur langage, à leur mode de pensée fascinant . Comme je ne pouvais guère me déplacer, ma vie était tristement monotone. Mais grâce à Xanthos et à son Fragment d'Eternité qu'il a partagé avec tous les Pokemon de la planète, je pouvais désormais vivre avec moi-même, avec mes réflexions, avec mes pensées, avec mon imagination.

Outre ce service rendu aux Pokemon en même temps que leur libération des humains, Xanthos avait fondé ce grand Empire qu'était Pokemonis. Aujourd'hui, il avait dérivé vers la corruption et la tyrannie, certes, mais à ses débuts, il avait été une grande et belle chose, un symbole de puissance et d'espérance pour les Pokemon, quelque chose qui pouvait les rassembler tous en dépit de leurs différences. Et moi, j'étais avant tout un Pokemon, et je ne pouvais que rendre hommage au souvenir du Seigneur Protecteur pour tout cela. C'était aussi un peu pour lui que j'aidais les Paxen, aujourd'hui. C'est après tout l'Empereur qui l'a trahi, et à en croire les Paxen, Xanthos avait, dans ses derniers instants, souhaité la mort de Daecheron au point de révéler la localisation de sa Pokeball à Tannis Chalk. Tuer l'Empereur était donc la dernière volonté de Xanthos, et le but ultime des Paxen.


***

Astrun


Le dernier étage de la tour cité de Jartobylon offrait une vue imprenable. Située à quelque 500 mètres du dessus du sol, le sommet de la base avait été aménagé comme stade, pour les évènements, les matchs, les entraînements. Avant, on s'y rendait souvent, mais comme il était à l'air libre, et qu'on cherchait à se faire discrets, nous y allions de moins en moins. J'ai attendu que le Libegon de l'Armée Impériale s'en aille pour monter en haut. J'aimais cet endroit. J'avais ainsi l'impression d'être le maître du monde. Mais loin s'en fallait. Je n'étais que le maître d'un groupe de rebelles moribonds.

Je suis Astrun Beneos, l'actuel leader des Paxen. J'ai pris mes fonctions de chef il y a trois ans, alors que je n'avais que vingt-deux ans. C'était jeune, très jeune, pour devenir le meneur des Paxen. Mais notre précédent chef, le charismatique Braev Chen, avait été exécuté par Xanthos. Comme c'étaient les membres de la famille Chen qui dirigeaient les Paxen depuis Jyvan Chen en personne, le rôle de chef aurait dû revenir à sa fille unique, Ludmila. Mais ma cousine n'avait alors que treize ans. Les Paxen n'avaient pas voulu d'une gamine pour leader, même si elle s'appelait Chen. Le choix naturel avait alors été de se tourner vers Kashmel. Ce dernier était expérimenté, il était respecté et apprécié, et immensément doué. Mais Kashmel avait refusé le poste. Son truc à lui, c'était les missions sur le terrain. Il aurait été incapable, a-t-il dit, de rester toujours à la base, assis sur une chaise, à envoyer les autres se battre à sa place.

Ainsi donc, la place de leader m'avait été échu. Bien que jeune, j'avais été sous les ordres directs de Braev Chen, qui m'avait formé lui-même. De plus, j'avais en moi du sang Chen. Je partageais avec Ludmila des ancêtres communs. Si Ludmila était la descente du légendaire Régis Chen, moi, je descendais d'Estelle Chen, qui fut la demi-sœur de Régis. Tous deux étaient des enfants de Giovanni Chen, et des petits-enfants de Samuel Chen, deux grands noms de la famille. On était donc des cousins très éloignés, mais au final, j'avais autant de sang Chen que Ludmila, même si je n'en portais pas le nom. Je ne ressemblais pas vraiment à un Chen non plus, avec ma peau pâle, mes yeux clairs et mes cheveux blonds ondulés.

Un autre que moi aurait pu être jaloux de Ludmila et de sa légendaire lignée, mais ce n'était pas mon cas. J'étais fier de mes propres ancêtres. Le mari d'Estelle Chen avait été par exemple, durant des années, le dirigeant de la Fédération des Alliances Libres. Il avait aussi été le maître penseur de Dame Solaris puis le leader des aujourd'hui disparus Gardiens de l'Innocence. Leur fils avait été le meilleur ami et fidèle compagnon de Salia Chen, la fille de Régis Chen, qui a guidé les survivants humains libres suite à la victoire de Xanthos. Ma lignée a toujours soutenu celle des Chen, et elle allait continuer. Quand Ludmila aura gagné en âge et en sagesse, et quand elle aura enfin donné un héritier aux Chen, je lui laisserai ma place de leader, ainsi qu'il se devait. Enfin, cela seulement si les Paxen survivaient jusque là...

- M'sieur, sauf vot respect...

Je me retournai. Zoulouf Crocs d'Acier se tenait bien droit devant moi. Zoulouf était un vieux de la vieille chez les Paxen. Avec ses soixante ans passé et ses nombreuses blessures, il ne pouvait plus vraiment se battre, et donc me servait d'aide de camp. Jadis, il avait été un grand guerrier Paxen. C'était un ancien esclave, et on le surnommait Crocs d'Acier parce qu'on racontait qu'il avait dévoré son propre maître Pokemon pour obtenir sa liberté. Je ne me souvenais plus de quel Pokemon c'était. Un solide en tout cas, d'où la raison de son surnom. Zoulouf avait certes était un Paxen brutal, mais c'était un brave type.

- Mon pote Cornèbre, y dit qu'le sire Jartobylon dit qu'le foutu messager de l'Empire, c'Libegon d'mes couilles, y s'est tiré, sans doute pour faire son rapport à Légionair, voyez quoi ?

Le partenaire de Zoulouf, un Cornèbre, nous servait d'observateur dehors, se faisant passer pour un Pokemon sauvage. Il nous transmettait également les messages de Jartobylon.

- Oui, je l'ai vu partir. Je crois que ça sera sa dernière mise en demeure, cette fois. La prochaine fois, Légionair ne se gênera pas pour rentrer, quitte à employer la force. Il nous faudra nous tenir prêt.

- On est prêt d'puis des lustres, sauf vot respect, m'sieur. Qu'ils y viennent, ces impériaux d'merde ! Cette base est imprenable !

- Sans doute, acquiesçai-je, mais je ne pense pas qu'ils aient l'intention de la prendre. Ils comptent plutôt la détruire, et tuer Jartobylon avec.

- On est paré à les recevoir m'sieur.

Oui, ça, nous l'étions, mais seulement parce que nous ne pouvions rien faire de plus. Nos défenses étaient à leur maximum, tous nos éléments sur le pied de guerre. J'ai fait revenir de mission toutes nos équipes dispersées çà et là. Seuls Kashmel et son partenaire Pokemon Furaïjin n'étaient pas rentrés, parce qu'ils se trouvaient en mission très importante dans la capitale impériale. Et comme ils étaient nos meilleurs éléments, leur absence allait peser...

- V'croyez qu'la petite Chen va r'venir à temps, m'sieur ? Me demanda Zoulouf.

- Je prie Arceus pour cela chaque soir, mon ami. Dame Solaris sera un élément déterminant de notre défense. Si elle est là, on peut avoir une chance. Et s'ils revenaient avec la Pokeball de Daecheron en plus, ce serait l'idéal.

Zoulouf fit la moue. Je savais tout le mal qu'il pensait de ce plan, que j'avais en partie élaboré. Aucun Paxen ne pouvait se fier à Tannis Chalk après ce qu'il avait fait. Il ne s'en rappelait sans doute plus maintenant, mais nous oui. Pourtant, lui seul savait où Xanthos avait planqué cette fichue Pokeball. C'était un plan fou et désespéré, mais audacieux, m'avait dit Cernerable. Et, quand on était dos au mur, valait mieux parier sur l'audace que sur la sécurité.

Je me sentais bien seul ici, bien que j'étais entouré de quasiment tous mes hommes. Ils comptaient tous sur moi pour les sauver, pour les mener à la victoire. Mais moi, qui suis-je pour prétendre à tout ça ? Rien qu'un simple humain de vingt-cinq ans, leader par défaut. Si je voulais que Dame Solaris revienne au plus vite, c'était aussi pour me reposer sur elle. Elle était l'une des Six Fondateurs, avait plus de six-cents ans et était dotée d'une sagesse et de pouvoirs incroyables. Je serai plus que ravi qu'elle prenne les décisions à ma place. Et le Premier Fondateur, qui était toujours dans l'Empire Lunaris... si cette figure légendaire venait nous aider, nous nous en sortirions, sans l'ombre d'un doute !

Bon, il y avait bien Cernerable qui m'aidait dans ma lourde tâche de commandement. Lui aussi était l'un des Six Fondateurs, et aujourd'hui mon partenaire Pokemon. Cernerable avait été le partenaire de Jyvan Chen, cent ans plus tôt. Depuis, la coutume voulait qu'il soit le partenaire de chaque leaders des Paxen. Ça avait été dans leur grande majorité des Chen, les descendants de Jyvan. Et moi, qui n'était pas un Chen, je me sentais toujours gêné et impressionné d'avoir messire Cernerable pour partenaire.

Il y avait de quoi. Cernerable était très vieux. Il avait longtemps été une figure de sagesse et de science dans l'Empire Pokemonis, un de leur plus grand professeur, qui avait formé quantité de Pokemon appelé à devenir importants. Il avait même enseigné à celui qui allait devenir le Général Légionair, alors qu'il était encore un tout jeune sous-officier Airmure. Puis, il avait eu comme esclave Jyvan Chen, et une grande amitié avait lié maître et esclave. Cernerable a décidé de se rebeller contre les mauvais traitements infligés aux humains, et lui et son ancien esclave avaient rassemblé quatre autres personnes, deux humains et deux Pokemon, pour fonder la rébellion Paxen. Aujourd'hui, Cernerable était considéré comme le plus grand traître de toute l'histoire impériale.

Cernerable m'assistait, mais refusait de commander à ma place. Il fallait que le chef des Paxen soit toujours un humain, disait-il. Il le savait mieux que moi, vu qu'il avait contribué à la mise en place des règles des Paxen cent ans plus tôt. N'empêche que je trouvais ça bizarre, de commander à cet illustre Pokemon qui avait été le partenaire de tous nos précédents chefs. Enfin, il ne servait à rien de me morfondre. Je devais tenir bon, et faire ce qu'il fallait pour que cette rébellion survive.

Je devais ça à mon professeur, Braev Chen. Peut-être avait-il su qu'il allait mourir tôt, car il n'avait cessé de me former au commandement. Belle idiotie ! Il aurait mieux fait de survivre et de continuer à nous commander. Les Paxen, humains comme Pokemon, me respectaient et m'obéissaient, mais c'est tout. Braev Chen, lui, avait été adulé, vénéré et aimé par ses troupes. Je me souviens encore sa mort, ce jour là d'il y a trois ans. J'étais là, à retenir Ludmila pour l'empêcher d'aller l'aider, tandis que Xanthos lui assenait le coup de grâce. Et je me souviens de ce qu'il avait dit à Xanthos avant de mourir, une phrase dont je me souviendrai toute ma vie.
Tu ne peux pas me tuer, Seigneur Tyran. Je suis quelque chose que tu n'as jamais pu tuer, malgré tout tes efforts. Je suis l'espoir.

- Etes-vous encore là, monsieur Braev ? Murmurai-je en regardant le ciel. Y'a-t-il encore de l'espoir pour nous ?




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Image de Jartobylon :