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Gardiens de l'Harmonie T.1 : La mélodie de vie de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 05/02/2014 à 09:41
» Dernière mise à jour le 02/09/2017 à 11:31

» Mots-clés :   Aventure   Fantastique   Présence de Pokémon inventés   Région inventée   Romance

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Chapitre 36 : Fuite mouvementée
Avec le soutien de Geran, Ad parvint à surmonter sa peine pour sa mère et à maintenir à un niveau pas trop destructeur sa haine à l'égard de Nathan. Mais rien ni personne, pas même Arceus, ne pourrait préserver la patience d'Ad quand elle avait à faire aux nobles. Elle s'en passerait bien, pourtant, son nouveau statut chez les rebelles faisait qu'elle était obligée d'assister à leurs réunions. Pour l'image, mais aussi pour les empêcher de faire n'importe quoi. En le voyant proférer de telles âneries sur le futur de la guerre, Ad comprenait pourquoi Nathan n'avait quasiment rien fait en un an pour arrêter la Rébellion alors qu'il aurait facilement pu. C'était parce que les nobles qui la menaient étaient de tels crétins que Nathan n'avait absolument rien à craindre d'eux !

Bon, Narek Congois rattrapait un peu tout ça, car il était intelligent et sensé, bien qu'un peu trop soumis aux obligations de son titre. Il y avait aussi son ami Baylan Morneto qui savait à peu près de quoi il parlait. Mais après, ils étaient tous complètement largués. Surtout ces deux imbéciles de Lord Luklon et Lord Vrenos. Ad en vint à se demander pourquoi diable ils avaient formé une rébellion armée s'ils étaient incapables de savoir comment on menait une guerre. Ils évitaient les vrais sujets et se concentraient sur des détails infimes et ridicules. Par exemple, lors du dernier conseil, ils avaient bien passé une heure à palabrer sans fin sur le choix de la couleur des futurs uniformes des soldats de la Rébellion. Lord Luklon avait brillé par son idiotie en déclarant notamment :

- Eh bien, je pensais à des uniformes verts. Voyez-vous, ainsi s'il y a des arbres, l'on ne nous verra point, n'est-il pas ?

À partir de là, chacun était parti dans son idée de couleur et de raisonnements tout aussi crétin jusqu'à ce que deux nobles en soient venus aux mains. Cette fois ci, c'était bien plus sérieux, attention ! Il s'agissait de définir les paroles du nouvel hymne de la Rébellion. Ad parvint à tenir une heure, mais pas plus. Passé ce délai, son mépris à l'égard des nobles mêlé à l'angoisse pour sa mère, son manque de sommeil et ses règles qui avaient choisi aujourd'hui pour apparaître fit qu'elle craqua et oublia momentanément sa promesse de faire preuve de respect envers les nobles. Elle se leva, et tira une flèche de Don au plafond, faisant un joli petit trou. Tous les nobles cessèrent leurs chamailleries à propos d'un mot du troisième couplet pour la regarder comme s'ils étaient étonnés de la voir.

- Vous n'êtes que des crétins, tous autant que vous êtes ! Leur lança Ad. Je n'ai même plus la force de vous mentir en prétendant le contraire. Amusez-vous donc à réfléchir à vos uniformes et votre chanson débile. Moi, je vais me battre.

Elle quitta l'assemblée sous les regards indignés et les murmures étouffés. Ad devait avoir provoqué un incident diplomatique majeur, mais elle s'en fichait. Elle ne comprenait pas pourquoi Maître Balterik avait tant insisté pour qu'ils s'allient aux nobles. Ils n'avaient pas besoin d'eux. Les soldats lui étaient fidèles, à elle, et pas à ces vieux croûtons. Mais avant qu'elle ne puisse quitter le manoir, elle fut rattrapée, une nouvelle fois, par Narek Congois, qui la regardait avec un mélange d'amusement et de commisération.

- J'ne suis pas d'humeur pour une leçon de bienséance, je vous préviens, fit Ad.

- Autant enseigner l'art de la philosophie à un Psykokwak, sourit Narek. Je me demande comment un homme si posé, raisonnable et rassembleur comme Guben Dialine a fait pour avoir une fille comme vous...

Ad voyait bien que Narek se fichait d'elle, et ça n'ajouta qu'à sa colère. Elle décida de se fiche de lui à son tour.

- Vous ne savez vraiment pas ? Répliqua-t-elle, faussement étonnée. Vous voulez une réponse courte ou je vous sors la version longue, avec tous les détails anatomiques que ça implique ? En résumé, mon père a enfoncé sa...

- C'est bon, je suis désolé, la coupa Narek. Je ne peux vous en vouloir. Ce que vous avez dit aux nobles, je le pensais depuis si longtemps...

- Dissolvez ce conseil débile.

Narek ne put cacher son incrédulité.

- Pardon ?

- Vous m'avez bien entendu. Dissolvez le conseil des nobles et prenez vous-même la tête de notre armée. Vous et moi, nous disposons de l'autorité nécessaire auprès des hommes. Nous n'avons pas besoin de ces idiots.

Narek fut pris de court par la proposition.

- Eh bien, c'est que... Je... Je ne dispose pas du pouvoir de décider ceci...

- C'est vous qui avez fondé la Rébellion non ? S'impatienta Ad. Si vous ne l'avez pas, qui l'a ?

- C'est moi, dit une nouvelle voix, rauque et faible.

Ad se retourna pour voir un homme caché dans l'ombre d'un coin. Il était voûté par l'âge, avait le visage grisonnant, et de fins cheveux blancs dispersés. Mais ses yeux étaient parfaitement lucides, et Ad sut qu'ils renfermaient un esprit vif et calculateur.

- Père ! S'exclama Narek. Pourquoi êtes-vous sorti de... Votre santé...

- Je ne suis pas encore enterré, répliqua Lord Robeos Congois à son fils. Ma santé me permet encore de faire ce que je sais faire le mieux : la politique. Allons, laisse-moi donc un moment avec la jeune Lady Dialine, tu veux ?

Ad fut étonnée avec quelle rapidité Maître Narek obéit à son père. C'était une soumission entière. Ad se rendit compte qu'elle avait devant elle le véritable maître de la Rébellion. Et elle savait que contrairement aux imbéciles de la pièce d'à côté qui discutaient sur les couleurs et les hymnes, ce noble là était loin d'être stupide. C'était au contraire un politicien aguerri doublé d'un stratège hors pair. Le problème, c'était que chacune des manœuvres de Lord Congois n'avaient qu'un seul et unique but : ses propres intérêts. Le vieillard s'approcha d'elle en claudicant et la passa aux rayons X avec ses yeux fins qui firent frissonner Ad.

- Oui... murmura Lord Congois. Je vois beaucoup de votre père en vous. Je l'ai bien connu, vous savez ? Lord Dialine et moi, nous étions les seuls au début qui nous sommes soulevés contre la famille Zolnys.

Ad connaissait cette histoire, oui. À l'époque ou le Triumvirat était une Tétrarchie, Guben Dialine avait osé défier la toute puissante famille Zolnys, véritable maîtresse du gouvernement, et dont son chef Avlos menait le pays dans la ruine et la folie. Les Dialine ne manquaient pas de familles nobles sur qui elles gouvernaient. Mais seuls les Congois avaient respecté leur serment d'allégeance et rejoint Guben dans sa guerre contre les Zolnys.

- Vous aviez bien mesuré les risques et les avantages, lui répondit Ad d'un ton sec.

Loin de paraître offusqué comme les autres nobles par ce ton désobligeant, Lord Congois éclata de rire.

- Ah, enfin quelqu'un qui comprend quelque chose à la politique... Vous avez tout à fait raison, bien sûr. Si j'avais jugé qu'il valait mieux pour ma famille demeurer fidèle aux Zolnys, votre père aurait mené sa guerre tout seul.

- Mais il aurait quand même gagné, répliqua Ad. Et vous n'auriez plus eu un seul crédit à ses yeux.

- En effet. C'est pour cela que j'ai choisi de le suivre. Me voici face à un autre choix complexe, aujourd'hui. Il y a deux Dialine. Je ne peux en suivre qu'un. Lequel des deux dois-je suivre ? Vous, ou votre frère ?

Ad lui servit un sourire ironique.

- Vous connaissant, vous choisirez celui qui a le plus de chance de l'emporter, non ?

- C'est ce que je ferai oui, si seulement je savais lequel de vous deux a le plus de chance. Et c'est là tout le problème. En temps normal, j'aurai parié sur Nathan, mais vous avez accompli beaucoup depuis que vous nous avez rejoint. Vous avez de puissants pouvoirs, je dois le reconnaître. Vous avez aussi le soutien des soldats, des dresseurs, des Pokemon, et vous pouvez vous affranchir des nobles, comme vous le disiez à mon fils.

Robeos désigna de la tête la salle du conseil avec mépris.

- Ce sont des idiots, mais c'est tant mieux. Les idiots sont les plus simples à manipuler. Vous pouvez facilement vous les mettre dans votre poche au lieu de vous les mettre à dos. Je peux vous apprendre, vous y aider. Vous incarnez l'espoir aux yeux de la populace. Gagnez encore quelques batailles, prenez une ou deux villes en plus, et tout Naya va se presser pour vous suivre.

- Et que faites-vous d'Odion ? Vous devez savoir que Nathan dispose de ses propres pouvoirs, et qu'Odion peut annihiler toute une armée en moins de temps qu'il faut pour le dire.

- Ah oui, les fameux Agents du Chaos... se moqua presque Robeos. Mais voyez-vous, je ne suis pas encore totalement aveugle. En dépit de votre grand sentimentalisme pour les causes perdues et la défense des plus faibles, vous m'avez l'air d'une personne intelligente, Lady Dialine. Je ne pense pas que vous auriez pris part à cette guerre si vous n'aviez pas un moyen de la remporter. Cela implique la menace que représente Odion. Vous avez quelque chose en réserve, je me trompe ?

Ad ne répondit pas, car ce n'était pas nécessaire. Robeos avait bien deviné oui. Mais Ad ne comptait quand même pas lui parler du Temple d'Arceus et de la Mélodie de Vie.

- Si c'est le cas, dit Ad, alors vous avez votre réponse. Vous aurez plus intérêt à vous rallier à moi.

- Oui, si ça s'arrêtait là. Mais je soupçonne que votre frère n'a pas encore tout montré lui non plus. J'attends donc et j'observe, Lady Dialine. Continuez donc à accomplir des exploits en attendant, vous et vos Gardiens de l'Harmonie. Les nobles ne vous embêteront pas. Je vais aller leur dire deux mots. Ils me mangent dans la main comme des Passerouge.

Ad regarda Lord Congois s'éloigner, avec le sentiment que cet homme était très dangereux, et qu'elle devait se méfier de lui, plus encore que de Nathan. Le manoir des Congois était devenu pour elle un lieu malsain, qu'il fallait désormais éviter à tout prix. Elle serait bien partie sur l'heure, mais il était tard, et Geran l'attendait dans sa chambre. Marrant comme Ad était devenue le type même de fille qu'elle répudiait avant, celles qui ne pensaient qu'à se lover dans les bras de leur amoureux et à tout faire pour qu'ils les trouvent belles. Ad s'était surprise, pas plus tard que ce matin, à se coiffer ! Quelque chose qu'elle n'avait plus fait depuis qu'elle avait quitté la demeure familiale. Plaise à Arceus qu'elle ne songe pas à se maquiller bientôt. De toute façon, ça ne plairait pas à Geran. Il l'aimait telle qu'elle était. Naturelle.

Pour elle qui avait juré ne jamais tomber amoureuse, avoir comme premier petit-ami un type venu de cinq cent ans du passé la fichait assez mal, d'autant qu'il était déjà fiancé. Mais Geran était sa seule source de réconfort. Quel mal y'avait-il à en profiter un peu ? Juste le temps qu'ils vainquent Odion et qu'il rentre chez lui... ou qu'ils meurent tous. De toute façon, ils seraient séparés tôt ou tard, Ad le savait. Sauf que, quand elle entra dans sa chambre, Geran n'était pas seul. Il y avait au milieu de la pièce un Alakazam. Geran, lui, tenait une espèce de petit cercle en métal, et avait l'air soucieux. Quand Ad entra, le Pokemon se tourna vers elle, apparemment satisfait.

- On a un invité surprise, apparemment...

- C'est celui de ta cousine Madison, répondit Geran.

Ad mit un certain temps à comprendre, et quand elle le fit, elle posa instinctivement ses doigts sur l'une de ses Pokeball à la ceinture, mais Geran l'arrêta.

- Non, il n'est pas venu se battre. Il voulait te transmettre un message de sa dresseuse.

Il montra le cercle de métal qu'il tenait, et Ad reconnut seulement un mini projecteur holographique, qui pouvait enregistrer des messages audio et vidéo. Ad fit un assez grand détour pour rejoindre Geran, en s'éloignant le plus possible de l'Alakazam de Madison.

- Comment est-il arrivé ici déjà ?

- Par la Téléport, répondit Geran.

- D'accord, mais comment savait-il que j'étais là ?

- Il suffisait à ta cousine de lui montrer quelque chose qui était en relation avec toi pour qu'il devine l'endroit sur terre où elle était la plus forte. Et apparemment, actuellement, c'est cette chambre.

Geran lui tendit le mini-holoprojecteur.

- Je l'ai déjà écouté, ajouta-t-il.

Intriguée, Ad appuya sur le bouton pour voir se matérialiser en miniature devant elle l'image de sa cousine. Ad ne l'avait plus vu depuis longtemps, et si elle avait un peu grandit, elle paraissait momentanément vieillie. Son visage était blême, et elle avait beaucoup de cernes sous les yeux. Ad écouta attentivement sa vieille rivale lui annoncer son marché... et son plan.


***


- C'est un piège, répéta pour la dixième fois Spyware quand le petit groupe d'intervention pénétra le quartier du Centre Général, à Odipolis, le capitale de Naya. Il n'y a aucun foutu garde ! C'est clair que c'est un...

- Madison a dit qu'elle s'occuperait des gardes, murmura Ad avec agacement. Et si tu es aussi persuadée que c'est un piège, pourquoi es-tu venue ?

Ad regretta ses paroles aussitôt qu'elle les eut prononcées. Même si elle ne l'avait pas dit comme ça, Spyware était venue uniquement pour elle, pour l'aider. Elle était la seule Gardienne en dehors d'Ad. Balterik n'aurait pas été d'accord, donc Ad ne lui avait rien dit. Killian aurait été inutile et fort peu discret. Quant à Geran, il craignait que son Don trop développé et expérimenté n'attire l'attention des nombreux Agents du Chaos présents au Centre Général. Spyware elle, grâce à son pouvoir de communication et de radar, ainsi que par sa formation à la Team Malware, pouvait lui être très utile pour infiltrer le Centre Général.

Ad avait aussi amené deux autres personnes. Un soldat de la Rébellion spécialisé dans les missions d'infiltrations nommé Bogur, et une dresseuse de Pokemon spectres, une aimable quinquagénaire qui s'appelait Christie. Tous les deux faisaient parti du groupe loyal aux Gardiens de l'Harmonie qui les suivait partout lors des batailles. Et tous les deux s'étaient portés volontaires pour cette mission un peu folle qui était de libérer la mère d'Ad, Fastia Dialine, et l'Agent du Chaos Madison Hugerson du Centre Général, le cœur de l'ennemi, au nez et à la barbe de Nathan.

Une mission suicide, surtout qu'elle dépendait exclusivement de l'aide que Madison leur apporterait de l'intérieur, et Ad ne lui faisait pas du tout confiance. Certes, elle n'avait senti aucune tromperie de sa part dans son message. Elle semblait bouleversée par la supposée mort de sa mère, et en grande colère contre Nathan. C'était pour cela qu'Ad avait tendance à la croire. Vu qu'Ultan avait coulé lors de l'attaque d'Odion, Nathan supposait que tout le monde à l'intérieur, dont tante Frilvia, étaient morts. Il ignorait qu'ils s'étaient échappés par le Temple de la Vie. Donc Madison devait considérer Nathan comme responsable. Au moins, comme Ad, se souciait-elle encore un peu de sa mère. En échange de son aide pour libérer Fastia, Madison voulait qu'on l'amène elle aussi, loin de Nathan et de ses sbires, et que la Rébellion lui accorde l'amnistie pleine et entière pour ce qu'elle avait pu faire en tant qu'Agent du Chaos.

Un marché digne de sa grande arrogance. Car pour la Rébellion, la vie de Fastia Dialine ne valait sûrement pas tout ça, sans compter le risque de perdre Ad, le porte étendard de leur armée. Mais Ad était venue, en suivant les indications de Madison. Parce que s'il y avait une seule chance qu'elle puisse sauver sa mère des griffes de Nathan, Ad ne pouvait pas l'ignorer. Et si Madison s'était bien payée sa tête et que tout ça n'était qu'un plan de Nathan pour la capturer, eh bien, tant pis.

Geran avait longuement tenté de l'en dissuader. Mais au moins ne l'avait-il pas retenu contre son gré. Il aurait pu. Il lui aurait suffit de la dénoncer aux nobles ou à Maître Balterik avant qu'elle ne parte. Mais parce qu'il l'aimait, il n'en avait rien fait. C'était dangereux, certes, mais d'un autre côté, ce n'était pas la première fois qu'Ad pénétrait le Centre Général du Triumvirat pour y libérer quelqu'un. Elle l'avait fait un an plus tôt avec Kinan pour secourir Kelifa. Bon, ça avait été plus un assaut éclair qu'une infiltration, mais ça avait fonctionné. Et là, ils avaient Madison de leur côté, qui se trouvait au cœur de la structure pour baisser les défenses et distraire les gardes avec ses illusions.

Ad s'était demandé pourquoi elle n'aurait pas pu se servir de son Alakazam pour se téléporter loin d'ici, elle et Fastia. Mais Bogur lui avait expliqué que le Centre Général était probablement rempli de contre-mesure anti-téléport. En clair, les Pokemon pouvaient se téléporter comme ils voulaient, mais sans personne avec eux. Après, Madison n'aurait pas pu faire évader Fastia seule. Elle n'aurait même pas pu s'enfuir elle-même, car Nathan ressentait son pouvoir et savait en permanence où elle se trouvait. Le plan était donc pour l'équipe d'Ad de pénétrer à l'intérieur, de provoquer suffisamment de grabuge pour permettre à Madison de les rejoindre avec Fastia, puis de s'enfuir tous ensemble grâce à son Alakazam et son Téléport.

Normalement, avec les capacités d'Ad, ça devrait fonctionner. Mais il y avait un problème. C'était Nathan et ses Agents du Chaos. Ad avait beau s'être entraînée en secret au Souffle Noir, elle savait qu'elle n'était pas de taille contre le terrible pouvoir de son frère, surtout s'il avait avec lui Varnellan et les deux autres triumvirs. Le truc était de les éviter autant que possible. Ad avait donc baissé son Don au maximum, pour ne pas que son frère ne le repère. Mais dès qu'elle tirerait la moindre flèche, il la sentirait immédiatement. Après tout, il avait lui aussi le Don.

Comme elle l'avait promis dans le message, Madison s'était occupée des gardes du rez-de-chaussée, sans doute à l'aide de ses illusions obscures. Elle avait pu les attirer ailleurs, ou les faire se cacher quelque part, tremblants de peur. Mais elle ne pouvait pas trop se servir de son pouvoir, car là encore, Nathan le sentirait. En contrôlant à la fois les pouvoirs des Agents et des Gardiens, Nathan avait toujours une longueur d'avance sur eux. Et Arceus merci, au moins Odion était-il toujours coincé, enseveli au plus profond de la mer avec les restes de l'île d'Ultan. Car si Odion avait été présent, il n'y aurait pas eu la moindre mission de secours.

Une fois le rez-de-chaussée sécurisé, Christie, leur dresseuse de Pokemon spectres, fit appeler son Ectoplasma. Grâce à son corps immatériel et sa capacité de se rendre invisible s'il le voulait, le Pokemon Spectre jouait le rôle d'un parfait éclaireur. Il inspecta le premier étage pour répertorier les forces en présence. Il aurait été certes plus simple que Spyware utilise son casque de Don ; elle aurait aussitôt eu le plan entier de l'immeuble avec la position précise de toutes les personnes à l'intérieur. Mais ça aurait été comme si elle avait pris un haut parleur et hurlé dans tout l'immeuble : « NATHAN, JE SUIS LA ! ».

Mais elle servit quand même à manipuler les commandes de l'ascenseur. Le rez-de-chaussée étant ouvert au public, l'ascenseur était bloqué pour les étages où ils n'étaient pas censés aller, comme le bureau des Triumvirs, au treizième. Il fallait des cartes spéciales à rentrer dans l'ascenseur pour ça. Selon Madison, Fastia était enfermée dans une chambre dans cet étage justement. Spyware bidouilla donc le boitier en arrachant des fils et en connectant d'autres entre eux jusqu'à que l'ascenseur démarre pour le treizième étage.

Le temps qu'ils montent, Christie envoya tout de suite son Ectoplasma en éclaireur à cet étage, dès lors que quand la porte s'ouvrit, l'équipe eut la satisfaction de voir les vigiles d'étage tous endormis, ayant subit l'attaque Hypnose d'Ectoplasma. Bien sûr, ça aurait semblé un peu suspect aux caméras, mais Madison avait dit qu'elle s'en occupait aussi, au moins pour cet étage ci. Vu que l'alarme n'avait pas sonné, elle avait tenu promesse, et il ne fallait pas traîner. Ça n'allait certainement pas durer. Le temps que quelqu'un constate le non fonctionnement des caméras et amène quelqu'un ici pour voir ce qui se passe. Ou alors qu'ils se rendent compte que les gardes de cet étage ne répondent plus...

L'alarme s'enclencha cinq minutes plus tard, au moment où le groupe d'intervention tomba sur Madison et Fastia au croisement d'un couloir. Ad avait du mal à reconnaître sa mère, toujours bien habillée, toujours éclatante de beauté. Elle n'avait plus ni maquillage ni ornements stupides. Elle ressemblait à... eh bien, à une femme comme une autre. Ad ne l'avait jamais vue comme ça. Les yeux de Fastia s'éclairèrent quand ils tombèrent sur sa fille. Elle s'apprêtait à dire quelque chose, peut-être une remarque désobligeante sur la tenue si peu digne d'Ad pour une héritière d'une grande maison, quand Ad la coupa en la serrant dans ses bras.

Il aurait été difficile de dire qui de Fastia ou de Ad fut la plus surprise. Ad n'arrivait pas à s'expliquer ce geste spontané. Elle n'avait plus serrée sa mère dans ses bras depuis... trop longtemps pour qu'elle se souvienne. D'ailleurs, Fastia Dialine n'avait jamais été adepte de ces grands témoignages d'affection, et Ad avait hérité de ça. Bizarre. Pourtant, l'alarme sonnait, les gardes seraient bientôt là, et Ad n'arrivait à se détacher de sa mère. Et en plus elle se rendit compte qu'elle pleurait. Très très bizarre. Madison fit preuve de présence d'esprit en les séparant de force.

- Plus tard pour ça, idiotes ! Il faut qu'on se bouge pour sortir !

Déjà, les bruits des bottes de la Garde Gouvernementale se firent entendre. Spyware et Bogur sortirent leurs armes et ouvrirent le feu. Mais le chemin de l'ascenseur était déjà bloqué, et de toute façon, l'ascenseur sûrement mis hors service. Ils allaient devoir descendre un peu plus brutalement. Ad invoqua son arc et tira des énormes flèches sur le plancher, provoquant des trous assez grands pour s'y glisser. Peu importe que Nathan sente son Don à présent. Il devait se douter de ce qui se passait.

Ad aidait sa mère à descendre tandis que les autres retenaient leurs assaillants. Spyware avait appelé son Electrode en renfort et Madison se servait de ses illusions. À chaque étage de descendu, Ad devait faire le ménage avec son arc, tirant sur tout et tout le monde, même des employés désarmés. Une balle, tirée par derrière, lui traversa l'épaule et manqua de la faire tomber entre l'étage 7 et 6 si sa mère ne l'avait pas soutenue. Bogur descendit le tireur et s'avança pour examiner la blessure d'Ad quand la jeune femme le repoussa.

- On n'a pas le temps ! Continuez, fit-elle les dents serrées par la douleur.

- Adélie, ciel, mais tu saignes ! S'exclama Fastia comme si elle venait juste de le remarquer.

Ad se rappela que sa mère avait une peur phobique du sang. Même quand Ad était enfant et qu'elle se blessait en tombant par terre, elle n'était même pas capable de lui coller un pansement s'il y avait une seule goutte de sang.

- Ce n'est rien mère. Il faut se dépêcher de...

Sa voix fut coupée par un cri des plus étranges. Un son guttural et strident, qui n'avait strictement rien d'humain. Et Ad n'avait jamais entendu un Pokemon crier de la sorte. Surtout qu'il y en avait plusieurs. Des Inhumains ? Non, ils étaient totalement muets. Alors, qu'est-ce que c'était que ça ?! Plus inquiétant même, les tirs derrière eux avaient cessés, signe que leurs poursuivants avaient décampé. Spyware invoqua son casque pour faire apparaître un plan tridimensionnel de l'immeuble. Les points bleus symbolisaient les humains, qui s'éloignaient de leur position. Les rouges symbolisaient les Pokemon qui étaient avec eux. Les noirs symbolisaient les Inhumains, et dieu merci il n'y en avait aucun. Sauf que... il y avait plusieurs points verts qui se rapprochaient d'eux au dessus et par en dessous.

- C'est quoi, les points verts déjà ? Demanda Ad à Spyware comme si elle avait oublié.

- Il n'y a jamais eu de point vert, répondit la Malware avec une certaine peur dans sa voix.

Ils purent bientôt voir l'identité de leurs poursuivants. Ça ressemblait à un croisement entre un humain, un lézard et Arceus savait quoi d'autre. Ces... choses se tenaient sur deux jambes, comme les humains, mais avaient une queue, une peau reptilienne, une face allongée, des griffes et des crocs effilés. L'un d'entre eux était en train de grignoter un bras humain, sans doute celui d'un des soldats abattus par Borgu. Cette vision d'horreur eut raison de Fastia qui s'évanouit dans les bras de sa fille.

- Madison... C'est quoi ces trucs ? Murmura Ad à sa cousine.

- Inconnus aux bataillons, répondit la jeune fille. Sans doute une création de ton frangin. C'est lui qui a créé les Inhumains, et il reste pas mal de temps dans son labo à faire je ne sais quoi.

Un des hommes-lézards sauta dans leur direction. Ad dut poser sa mère pour lui tirer une flèche de Don en plein dans la tête, sauf que... ça ne lui fit rien du tout. Ad n'arrivait même pas à sentir ces créatures avec son pouvoir. En tous cas, le neuf millimètres de Borgu fonctionna lui, de même que les attaques d'Electrode, Alakazam et Ectoplasma. Sauf qu'il en arrivait en pagaille, et l'étage inférieur en était plein aussi.

- Plus qu'une solution, fit Ad. On fait exploser le mur.

- Et on saute depuis là ? Demanda Madison d'un ton mordant. On est au septième, on va s'écraser en bas !

- On a des Pokemon non ? Tes Pokemon Psy peuvent nous rattraper si on les sort en premier. Et Christie a un Grodrive. Vous pouvez prendre ma mère ?

- Bien sûr, dit Christie en sortant son Pokemon.

Le Pokemon Spectre, qui ressemblait à une montgolfière, prit Fastia en la tenant par l'un de ses quatre appendices aux bouts jaunes qui pendaient de son corps. Spyware ordonna à son Electrode d'utiliser Explosion pour détruire le mur, et le groupe dut s'éloigner et donc marcher vers les horreurs génétiques de Nathan, que Borgu n'arrivait plus à retenir. L'une d'entre elle parvint à le faire tomber et toutes les autres se jetèrent sur lui. Ad entendit ses cris d'agonie tandis que les monstres le lacéraient de toute part. Et ils ne furent pas au bout de leur peine. Au moment même où Electrode explosa, provoquant un trou dans le mur, ils eurent droit à un invité surprise. Nathan Dialine venait d'arriver par l'ascenseur, son pouvoir déjà prêt alors qu'il tenait sa faux de ténèbres.

- Eh bien, quel charmant groupe que voilà. Ma chère sœur, ma tendre mère et ma cousine réunies, qui essaient de me fausser compagnie. Allons donc, il fallait me prévenir de ton arrivée, Adélie. Je n'ai rien pu préparer en ton honneur.

Au fur et à mesure qu'il avançait, les créatures reptiliennes s'écartèrent de son chemin, la tête baissée. Nathan remarqua le regard d'Ad et sourit.

- Ah, tu apprécies mes nouveaux amis ? Je les ai créés spécialement pour toi et tes petits camarades. Elles ne ressentent pas le Don et ne peuvent pas être touchées par lui. Une arme anti-Gardien de l'Harmonie. Hélas, leur apparence est fort répugnante, j'en conviens. Tu sais qu'ils étaient humains avant, tout comme les Inhumains ? Certains sont même d'anciens rebelles que j'ai capturés.

Ad ne put que secouer la tête, accablée. Elle avait pensé frémir d'une haine incontrôlable en revoyant son frère, mais elle ne ressentit que de la tristesse et de la pitié.

- Tu es un monstre, lui dit-elle. Bien plus que tes bestioles.

- Ah ? Fit simplement Nathan. Et c'est pour ça que ma chère Madison a choisi de me quitter ? Qu'est-ce que tu espères, cousine ? Que les Gardiens t'accueillent à bras ouvert ? Tu possèdes le pouvoir que t'a donné le Seigneur Diavil, et tu ne pourras jamais t'en débarrasser. Il t'a marquée comme l'une des siens. Tu seras à jamais un Agent du Chaos, quoi que tu fasses. Tu seras toujours à moi.

Ce faisant, il abattit sa faux noire sur le sol. Les ténèbres qui en jaillirent furent sur Madison avant qu'elle ne puisse faire un geste. Son pied, et bientôt sa jambe gauche entière était désormais sous le contrôle total de Nathan. Ad voulu l'aider, l'amener de force, mais Madison lui cria :

- Dégage ! Casse-toi !

Avec son bras encore à elle, elle lança deux Pokeball par le trou du mur.

- Alakazam, amène-les...

- Non, je ne crois pas !

Nathan lança ses horreurs génétiques sur eux, sauf qu'avant de se jeter sur Ad, Spyware et Christie, ils hésitèrent, regardant à droite à gauche, comme perdus. Nathan se rendit compte que Madison utilisait ses illusions contre elles.

- Petite garce !

Il la frappa au visage si fort qu'Ad vit plein de sang jaillir. Elle cria, mais l'Alakazam de Madison avait pris au mot le dernier ordre de sa maîtresse, bien qu'il lui en coûta. Il expulsa Ad, Spyware et Christie par le mur avec ses pouvoirs psychiques, tandis que Grodrive décollait avec Fastia attachée à lui. En tombant, Ad et les deux autres furent rattrapés par les pouvoirs psys des Pokemon de Madison, puis tous furent téléportés hors de la ville par Alakazam, sous le cri de rage de Nathan.

Il se retourna pour passer sa colère sur Madison, incapable de bouger. Au bout d'un moment, il se força à se calmer. La tuer maintenant serait bien trop clément. Elle allait d'abord devoir souffrir. Beaucoup souffrir... C'est ce moment que choisi Odion, le Prince des Ténèbres, pour réapparaître. Il volait sur son Pokemon Proscuro et atterrit devant Nathan en passant par le trou dans le mur. Son costume était bien mal en point, sans doute dut à un séjour prolongé au fond de la mer dans l'explosion d'une île entière. Mais dans ses yeux gris brillaient toujours la même folie, la même envie de meurtre. Une envie que Nathan partageait totalement en ce moment.

- C'était Geran, le Don que je viens de sentir ? Demanda-t-il.

- Non, ma sœur, qui vient une fois de plus de se jouer de moi, répondit Nathan en retrouvant son calme.

- Et elle ? Fit Odion en désignant Madison.

- Une traîtresse. Mon cher Odion, pour fêter votre retour, je vais vous la donner. Amusez-vous donc avec elle de votre façon habituelle.

- C'est gentil, mais ça serait plutôt avec les Gardiens d'Ultan que j'aurai voulu m'amuser... et ce damné d'Archangeos ! Je n'ai pas pu les offrir à Mère comme je le voulais... quelle déchéance !

Nathan plissa les yeux.

- Vous voulez dire qu'ils sont vivants ? Malgré la destruction de l'île ?!

- Ils sont partis à bord d'un truc... Je ne saurai le nommer, mais on aurait dit un temple qui volait.

Nathan serra les poings. Ces fichus Gardiens... Qu'est-ce qu'ils complotaient ?! Nathan en avait assez. Il les voulait. Tous. Cette comédie avait assez duré.

- Mon cher Odion, reprit Nathan d'une voix qui se voulait enjouée. Que diriez-vous de tuer des milliers de personnes en même temps ?