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Gardiens de l'Harmonie T.1 : La mélodie de vie de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 22/01/2014 à 09:37
» Dernière mise à jour le 02/09/2017 à 11:29

» Mots-clés :   Aventure   Fantastique   Présence de Pokémon inventés   Région inventée   Romance

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Chapitre 35 : Mère et tante
Ad n'avait pas tardé à tenir sa promesse faite devant les nobles. Avec les autres Gardiens et quelques dresseurs et soldats loyaux, elle avait assiégé la ville d'Adervun, au sud de Tardsho. Il fallait profiter de la déroute de l'armée de Nathan pour prendre les villes situées à proximité. Bien sûr, Adervun était protégée. Même très bien protégée. Mais plus par des moyens conventionnels, types canons et armes à feu, que par des Inhumains et des armées de Pokemon, bien qu'il y en avait aussi. Les lignes de défense de la ville étaient solides mais très exposées et donc vulnérables. Il aurait été facile de les détruire par les airs en les bombardant, mais cela aurait mis en danger la population locale, et Ad voulait prendre Adervun sans faire de victimes innocentes et inutiles parmi ses habitants.

C'était un sale temps. Il pleuvait des cordes, et il faisait froid. Pour être plus légère et trouver plus d'adhérence quand elle se servait de ses flèches pour s'envoler, Ad s'habillait toujours le plus finement possible. Aussi là se caillait-elle comme ce n'était pas permis. Heureusement, elle avait son fidèle Lopchu sur son épaule qui collait son corps doux et chaud contre sa joue. Les échanges de tirs se poursuivaient depuis maintenant bien une heure. Les lignes de défense ennemies s'affaiblissaient de minutes en minutes, mais tenaient toujours bon, et Ad avait déjà perdu un certain nombre d'hommes. Le siège s'éternisait, parce que ce crétin de gouverneur du Triumvirat refusait toujours de se rendre, quitte à y faire passer tous ses soldats. Mais sans doute avait-il plus peur de ce que pourrait lui faire Nathan si jamais il perdait l'une de ses villes que des Gardiens de l'Harmonie. Spyware, son casque sur la tête, vint l'informer de l'avancée du siège.

- Il y a une brèche dans leurs lignes à 124 degrés. Notre groupe 14 commence à s'y engouffrer, mais je repère pas mal de Pokemon costauds qui arrivent vers la porte Est. Killian n'a pas attendu et est parti sur place pour tenter de les endormir avec sa musique.

- Demande à Hugo de lui envoyer quelques dresseurs. Puis indique la brèche à nos deuxièmes lignes. Qu'ils abandonnent leur position pour aller en renfort là-bas.

Spyware transmit mentalement les ordres, puis dit :

- Ah, et Geran me fait savoir qu'il ne tiendra plus trop longtemps...

Du fait de son Don matérialisé qui prenait la forme d'un bouclier géant, Geran se trouvait à l'arrière pour protéger le gros des forces des tirs à longue portée. Mais son Don n'était pas éternel.

- Que fait Balterik ? Il pourrait lui refiler un peu de Don...

- Il soigne les blessés. Lui aussi est presque à court.

Ad jura à mi-voix. Comme le pouvoir de Maître Balterik était de matérialiser un tissu de Don qui soignait quasiment toutes les blessures, son rôle était à l'avant-garde pour guérir les cas les plus graves.

- Bon, Spyware, tu vas donner tout le Don qu'il te reste à Geran, lui demanda Ad.

- Je ne pourrai plus utiliser mon casque, la prévint la jeune femme. Et donc plus de coordination et d'informations.

- On n'en n'aura plus besoin. Je vais rentrer dans la ville et trouver ce gouverneur. Je vais le forcer à se rendre. En attendant, continuez l'assaut dans la brèche, et qu'on ne laisse pas de répit aux premières lignes.

Spyware hocha la tête et partit. Ad chercha un peu parmi les dresseurs pour trouver le Pokemon qu'elle voulait.

- Eh, toi, tu pourrais me lancer à l'intérieur de la ville ? Demanda Ad à un Steelix.

Le Pokemon Acier la regarda avec stupéfaction. Mais il avait reconnu Ad comme étant un Gardien de l'Harmonie, et les Pokemon ne discutaient jamais les ordres de ceux qui avaient le Don. C'était dans leur nature. Ad monta sur sa queue et s'y accrocha.

- Vise bien mon grand.

En un puissant geste, Steelix fit tournoyer sa queue en direction d'Adervun. Ad lâcha au bon moment, et fila droit sur la ville en traversant de haut les lignes de défenses ennemies. Quand elle fut au dessus d'Adervun, elle appela son Cliticlic et s'y agrippa pour atterrir en douceur. Elle tomba sur le toit d'une maison, tandis que plusieurs soldats du Triumvirat, qui l'avaient vu arriver avec stupeur, ouvrirent le feu sur elle. Cliticlic s'interposa entre sa dresseuse et les balles qui rebondirent sur son corps d'acier. Lopchu quitta l'épaule d'Ad pour sauter sur les ennemis tout en évoluant. Ad n'eut même pas à sortir son arc.

Elle tâcha de se repérer à travers tous ces bâtiments. Adervun n'était pas une petite ville. Heureusement, le centre de gestion du gouverneur était très visible, avec tous ses drapeaux du Triumvirat qui flottaient dessus. Ad invoqua son arc et créa une grosse flèche de deux mètres de long, qu'elle pointa sur le bâtiment. Elle lâcha ses doigts pour la laisser partir, mais sans couper le lien avec l'arc, et Ad partit avec elle. Elle se dégagea un peu avant l'impact pour traverser l'une des fenêtres du centre. Elle jura en sentant le verre sur ses bras et ses jambes. À trop vouloir jouer les ninjas, voilà ce qui arrivait. Elle avisa un homme qui passait par là, qui la regardait comme si Giratina venait de traverser la vitre coiffé d'un béret jaune. Vu sa tenue, ce n'était pas un soldat.

- Toi, fit Ad en utilisant son Don sur lui. Où est le gouverneur ?

Bien que toujours stupéfait, l'homme répondit, hypnotisé par le puissant Don d'Adélie.

- Un étage plus haut. La porte avec les statues de Feunard.

- Je te remercie.

Tous ne furent pas si aimables que cet employé. Ad croisa plusieurs soldats ou gardes du corps du gouverneur. Si elle pouvait facilement les avoir à ciel ouvert quand elle avait beaucoup d'espace pour se mouvoir, dans un couloir, c'était une autre affaire. Elle se fia plus donc à ses Pokemon qu'à son Don. Cliticlic se chargeait de stopper les balles tandis que Kung-Fufu et Zegrozard étalaient les gardes un à un. Elle trouva facilement le bureau du gouverneur, qui en effet avait une porte magnifiquement boisé entourée de deux statues grandeur nature du Pokemon Feunard. Le Triumvirat faisait toujours dans la démesure même pour ses petits fonctionnaires de rien du tout, tandis que le peuple crevait de faim.

Elle ne prit pas la peine de frapper. Elle tira une grosse flèche qui défonça la porte, et comme elle l'avait prévu, elle entendit les tirs de plusieurs mitraillettes automatisées qui se trouvaient dedans. Ad se permit un rapide coup d'œil pour repérer leur position avant de revenir à l'abri. Il y en avait deux dans les angles de la pièce. Elle créa alors deux flèches qu'elle auto-dirigea par la pensée pour les détruire. Puis elle entra calmement, les yeux fixés sur le petit bonhomme qui tremblotait derrière son bureau.

- Je... je suis le gouverneur de cette ville... Mon autorité dépend du Premier Triumvir en personne... Vous... vous allez vous attirer beaucoup d'ennuis !

- Sans rire ? Répondit Ad. Des ennuis, rien que ça ?

- Vous êtes des fous de rebelles... Oser défier le Triumvirat est...

- Oui oui, on lui dira, coupa Ad. Pour l'instant, vous allez vous servir de votre communicateur général pour ordonner à vos forces de se rendre aux miennes. Vous avez perdu. Ayez au moins l'intelligence de le reconnaître.

- A-absurde... La puissance du Triumvirat est...

Ad en eut déjà assez et se servit du Don contre lui. Un homme avec si peu de volonté tomba bien vite sous son emprise, et il lui obéit en appelant d'une voix morne tous ses soldats à se rendre séance tenante. Quelques instants après, Ad entendit les coups de feu de dehors s'arrêter. Elle soupira. Ça de fait. Elle dévisagea le gouverneur qui continuait de la fixer de son air ahuri et hypnotisé. Qu'est-ce qu'elle allait pouvoir faire de ce gus ? Le garder comme otage n'aurait sans doute servi à rien. Nathan n'avait que faire de ses sous-fifres, surtout s'ils l'avaient déçu. Mais elle profita d'être seule avec lui pour l'interroger.

- Dis-moi, que prépare mon frère ?

- J'ignore les projets de Lord Dialine, répondit le gouverneur. Mais je sais qu'il est furieux ces temps ci. La Rébellion lui pose des problèmes, ainsi que vous et vos Gardiens.

- C'est bon à entendre. Et Odion ? Des nouvelles de lui ?

Ad savait que le Prince des Ténèbres avait coulé en même temps que l'île où se trouvait la base Rocket, mais vu qu'il était immortel, il n'allait pas rester sous la mer indéfiniment.

- J'ignore qui est cet Odion, fut la réponse du gouverneur.

Ad retint un sourire. Nathan continuait donc à jouer l'innocent et n'avait pas révélé à ses sbires avec qui il travaillait ?

- En revanche, poursuivit le gouverneur, je sais que Lord Dialine a fait venir madame sa mère près de lui. Il l'empêche de sortir, et la surveille nuit et jour.

- Mère ? Pourquoi ça ?

- Personne ne le dit, mais tout le monde le sait. Il veut vous forcer la main. En prenant votre mère en otage, il espère que vous cesserez de le défier, ou que vous vous précipiterez pour la sauver, et il pourra vous capturer.

Ad serra les poings. Elle ne s'était pas attendue à ça, même de la part de Nathan. Ce salaud osait se servir de Mère pour l'avoir ?!

- Nathan sait que je n'aime pas notre mère, riposta Ad.

- Il doit compter sur votre noblesse d'âme. Vous ne laisseriez pas votre mère en danger de mort.

- De mort ? Nathan n'irait pas jusque là ! Il a toujours été le chouchou de Mère !

- Lord Dialine est prêt à tout, rétorqua le gouverneur. Vous l'avez grandement insulté, et il veut vous faire payer par tous les moyens. Si vous ne vous montrez pas ou que vous continuez à le combattre, madame votre mère court à sa perte.

Ad laissa la colère l'envahir et tira une flèche de Don dans le corps de cet homme. Ça ne le tua pas, bien sûr. Ses flèches ne pouvaient pas tuer, même à pleine puissance. En revanche, il allait dormir pendant un moment. Puis Ad quitta le bureau, en détruisant au passage les magnifiques statues de Feunard.


***


Une nouvelle fois, la Rébellion triomphait. Une nouvelle fois, les hommes fêtaient la victoire dans les rues de la ville, prise presque intacte. Et une nouvelle fois, Geran était à la recherche d'Ad. C'était elle qui avait gagné la bataille à elle toute seule, mais elle ne s'était pas montrée depuis. Bien qu'il savait qu'elle n'était pas très sociable et folle des attroupements, surtout en son honneur, elle aurait normalement du venir un peu pour donner du baume au cœur de leurs partisans, qui la vénéraient presque comme une déesse maintenant. Elle savait que c'était important, et elle ne se serait pas défilée. Il devait s'être passé quelque chose.

Vu que personne ne savait où elle était passée, Geran se servit de son Don pour la localiser. Celui d'Ad était si semblable au sien qu'elle n'était pas bien dure à pister. Il la trouva au Centre Pokemon, assise dans la salle d'attente tandis qu'on s'occupait de ses Pokemon. Ces infirmières Joëlle étaient vraiment très efficaces. Qu'importe la bataille ou le fait que la ville venait de changer de mains, elles continuaient à faire leur travail en n'importe quelles circonstances. Geran en profita pour confier aussi son Rétrectis, qui s'était durement battu. Puis il vint s'asseoir à côté d'Ad.

Il ne savait plus trop ce qu'elle était pour lui actuellement. Sa consœur ? Sa protégée ? Sa chef ? Son amie ? Son amante ? Peut-être tout à la fois. Geran n'arrivait pas à qualifier de quel genre d'amour il l'aimait, mais le fait est qu'il l'aimait. Et énormément. C'était pourtant une fille peu commode, rien à voir avec son Amelina, qui était toujours ouverte et souriante, la douceur incarnée. Ad elle était plutôt un volcan qui menaçait de se réveiller à n'importe quel moment, comme une épée tranchante et froide que rien ne pouvait faire plier. Et elle n'avait pas la beauté sculpturale d'Amelina. Elle était jolie bien sûr, mais comme elle prenait rarement soin d'elle, ça ne ressortait jamais. Elle était toujours couverte de suie, de sueur et parfois de sang, les cheveux en bataille. Mais c'était ainsi que Geran l'aimait. Il n'arrivait pas à se l'imaginer portant une magnifique robe avec les cheveux admirablement coiffés. D'ailleurs, ça ne lui serait pas allé.

Et puis il y avait ses yeux. Ses yeux d'un jaune si doux, mais pourtant si brûlants, si vivants. Quand Ad le regardait dans les yeux, Geran avait bien du mal à les détacher des siens, comme s'ils avaient été enfermés dans une quelconque prison. Et enfin son Don, si chaleureux mais aussi si fort et indomptable. C'était peut-être parce qu'Ad avait presque le même Don que lui que Geran était tombé sous le charme ? Une forme d'attirance similaire à celle d'aimants ? Geran lui caressa la joue de ses doigts, et Ad consentit à le regarder. La douleur et l'appréhension voilait ses traits.

- Que se passe-t'il ?

Ad soupira.

- Tu as sans doute mieux à faire et à penser que t'intéresser à mes petits problèmes personnels.

- Au point où nous en sommes, tes problèmes sont nos problèmes, répliqua Geran. Tu es devenue notre chef et notre inspiration à tous, que tu le veuilles ou non. Et il n'y a aucun problème qu'on ne puisse résoudre si on est ensemble.

Geran lui prit l'épaule, et Ad se laissa aller contre lui.

- J'ai appris que Nathan détenait ma mère, expliqua Ad après un moment. Il menace de lui faire du mal si je ne me rends pas.

Geran se raidit, et Ad sentit son choc. Elle leva vers lui un regard interrogatif.

- Juste de mauvais souvenirs, expliqua Geran. Odion avait fait pareil à mon époque. Il s'en est pris à notre mère pour me blesser. Et il y ait parvenu. Il a tué celle qui lui a donné la vie, affirmant que c'était de ma faute. C'est pour ça que je ne doute pas que ton frère puisse aussi le faire. Les Agents du Chaos n'ont aucune sorte de scrupules.

Comme Ad baissait les yeux, encore plus mal, Geran se rendit compte de sa gaffe.

- Désolé... Ce n'était pas une chose à dire dans ta situation.

- Le plus ironique, c'était que je croyais me ficher de ma mère, dit Ad avec un pauvre sourire. Avant que tout ça ne commence, elle aurait pu mourir sans que je ne verse une seule larme. Mais maintenant, je me rends compte qu'elle me manque. Je la méprise toujours pour la noble hautaine et arrogante qu'elle est, mais je me souviens aussi des rares bons moments que j'ai passés avec elle. Le jour où elle m'a offert Lopchu. Je l'ai simplement remercié, et elle m'a prise dans ses bras, ce qu'elle n'avait sans doute jamais fait depuis que je suis bébé. Après la disparition de mon père, elle a été bien plus présente pour moi. On avait jamais été proche, car elle s'occupait exclusivement de Nathan tandis que moi j'allais plutôt avec père. Je crois qu'elle a essayé de se rapprocher de moi, mais je l'ai rejetée. C'est peut-être une mère terrible et une femme odieuse, mais elle m'a toujours aimé quand même. Et l'une des dernières choses que je lui ai dites, c'était que je serais heureuse de payer ses frais d'obsèques...

Ad n'y tint plus et laissa couler ses larmes. Geran la serra fort et tenta de faire couler un peu de son Don en elle pour la réconforter.

- Je ne peux pas la laisser tomber... Mais je n'ai aucun moyen de la sauver, je le sais.

- Non, tu n'en as aucun, affirma Geran. Te rendre est impensable. Ça sonnerait le glas de la Rébellion, et je n'ose imaginer ce que ton frère a prévu de te faire. Quant à tenter une mission de sauvetage, c'est tout aussi inimaginable. Un coup pareil à celui que vous avez fait toi et Kinan pour sauver Kelifa ne marchera pas deux fois. Nathan doit attendre que tu fonces vers lui tête baissée.

- Je sais...

- La seule chose que tu puisses faire, c'est continuer le combat. Quoi qu'il arrive à ta mère, ce sera le fait de Nathan, pas le tien. Et quand tu auras vaincu ton frère, tu pourras rendre la justice.

Ad se redressa. La lueur vive dans ses yeux s'était changée en brasier.

- Non. Il n'y aura aucune justice pour Nathan. Il ne la mérite même pas !


***


Madison avait enfin trouvé le courage de parler à Nathan. Depuis qu'il l'avait humiliée, la jeune fille avait constamment évité son chemin. Mais là, elle venait d'apprendre quelque chose qui rendait la chose impossible. Il fallait qu'elle sache... Quand elle entra dans son bureau, elle eut la surprise d'y trouver son cousin affable et souriant comme autrefois. Un masque qui cachait sa véritable nature. Elle le savait maintenant. Cet homme était aussi changeant qu'un serpent.

- Madison, ça faisait longtemps. Que puis-je pour ma tendre cousine ?

Sa « tendre cousine » se retint de lui fiche son poing dans la figure. Nathan la répugnait. Elle ne pouvait plus le voir sans être assaillit par la nausée et le dégoût.

- J'ai entendu quelque chose... commença Madison en prenant garde de mesurer ses paroles. L'on dit que l'île d'Ultan aurait été détruite et aurait sombré dans l'océan.

- C'est vrai hélas, dit Nathan avec son hypocrisie habituelle. Tant de gens... C'est une tragédie.

- Ma mère se trouvait sûrement sur cette île ! Comment est-ce arrivé ? S'exclama Madison en perdant son calme.

- J'ai envoyé Odion pour retrouver tante Frilvia et éliminer Archangeos et ses Gardiens une bonne fois pour toute. J'ignore ce qui a pu arriver. Peut-être que ces fous de Gardiens ont fait eux-même exploser l'île...

- Ce n'est pas leur genre, fit catégoriquement Madison. Ils n'auraient jamais sacrifié tous les habitants. C'est Odion le responsable, j'en suis sûre !

Et elle était tout aussi certaine que c'était Nathan qui lui avait ordonné. Il n'avait jamais eu l'intention de sauver sa mère, seulement de détruire tous ses ennemis à la fois. Le haussement d'épaule désabusé de son cousin le lui confirma.

- Je l'ignore vraiment. Odion n'est pas encore revenu. Et ça m'embête, vois-tu... Sans lui, pas de Cibleur Mortel.

- Je me fiche de ton canon ! C'est de ma mère que...

- Son sort m'attriste profondément, sache-le, coupa Nathan. Mais les seuls responsables sont les Gardiens qui l'ont capturée. Ils sont sûrement morts maintenant, alors elle est vengée. Mais je sens grâce à mon Don qu'Archangeos est toujours en vie. C'est embêtant, oui... très embêtant...

Madison quitta le bureau de Nathan avant de faire quelque chose qu'il lui ferait payer au centuple. Ainsi, Odion avait maintenant tué ses deux parents ? Autant Madison n'avait que peu d'intérêt pour son père, autant elle tenait à sa mère. Travailler aux côtés de ce taré que Nathan tentait de domestiquer n'était plus possible. Tout le pouvoir que le Seigneur Diavil pourrait lui donner n'était rien comparé au fait d'être la bonniche d'un homme aussi répugnant que Nathan. Au final, c'était Adélie qui avait raison. Encore une fois. Elle avait toujours une longueur d'avance sur Madison. Elle la haïssait pour ça, mais elle se haïssait elle-même encore plus pour s'être laissée manipuler par Nathan et Diavil.

Mais elle ne pouvait plus quitter le Centre Général. Pas sans que Nathan soit au courant, et il aurait tôt fait de la rattraper. La seule solution serait de se réfugier chez des gens qu'il n'arrivait pas à appréhender. Demander la pitié des rebelles ? Elle aurait pu le faire si c'était juste Maître Narek qui serait en face d'elle. Mais s'humilier de la sorte devant Ad était impensable. Madison préférait même mourir. En revanche, si elle faisait quelque chose pour elle, pour qu'elle ait une espèce de dette à son égard...

Un plan germa dans l'esprit de la jeune fille. Il y avait quelqu'un qu'elle devait voir avant. La mère de Nathan et d'Ad, enfermée dans une chambre du Centre Général. Tante Fastia était loin d'être idiote, et avait vite finie par deviner pourquoi son propre fils la retenait contre son gré. Elle avait aussi vite fait le lien entre Odion et le Triumvirat. Les agissements de Nathan étaient la preuve de ce qu'avançaient les rebelles. Madison avait entendu les cris de tante Fastia contre son fils, affirmant qu'il était un démon, qu'il n'aurait jamais du naître, et qu'elle espérait qu'Adélie allait lui faire mordre la poussière. Ça n'avait pas plu à Nathan, qui était allé jusqu'à battre sa propre mère. Mais même ça ne l'avait pas fait taire pour autant. Elle avait une grande gueule, Fastia Dialine. De ce point de vue là, Adélie avait hérité d'elle.

Elle entra dans sa chambre sans être vue des gardes grâce à ses illusions. Une chambre qui était sans dessus dessous, tellement Fastia était en colère. Madison n'avait jamais été proche de la sœur de son père. Parce qu'elle était la mère de la fille qu'elle détestait, bien sûr, mais aussi parce que la propre mère de Madison, Frilvia, tenait Fastia en horreur. Pour autant, Madison n'avait rien contre elle. Fastia Dialine, passablement échevelée, la foudroya du regard quand elle entra.

- Ah, te voici, toi ! La digne fille de mon frère, en train de lécher les bottes de ses meurtriers. C'est fou comme tu peux ressembler à ta mère.

- Elle est morte, dit Madison d'un coup.

Ça eut l'avantage de couper la chique à tante Fastia.

- Elle a été sans doute tué par Odion, elle aussi... Toute l'île d'Ultan a sombré.

L'inquiétude peignit le visage de l'ancienne présidente.

- Adélie ?

- Elle n'y était pas. Elle était occupée à ratatiner notre armée à Tardsho.

- Eh bien, j'espère qu'elle continuera. Je ne peux pas vraiment dire que je suis désolée pour ta mère, mais si tu avais la moindre once de fierté, tu ne resterais pas là à obéir à mon fils. Dieu, que j'ai été sotte avec lui...

- Il va vous tuer, vous le savez sans doute ?

Fastia ricana.

- Si je le sais ? Mais bien sûr que je le sais à présent. Mais qu'il n'attende pas que je le supplie. Il devrait savoir que nous autres les Dialine, nous sommes durs à briser.

Madison fut impressionnée par l'audace de sa tante. Elle, elle savait qu'elle aurait inévitablement craqué face à Nathan. Elle refusait de l'admettre, mais elle en avait peur.

- Ça ne sert à rien de continuer à le provoquer, fit Madison. Essayez plutôt de le caresser dans le sens du poil. Ça vous fera gagner du temps.

- Du temps ? Pourquoi faire ? Mon mari a disparu et est sûrement mort. Ma réputation est finie depuis longtemps. Mon fils est un serpent, et ma fille me déteste et joue sa vie à chaque instant. Que ferai-je de plus de temps ?

- Mourir ne va pas arranger les choses, insista Madison. Vous voulez sûrement vous venger de Nathan, ou du moins l'empêcher de continuer sa folie ? Je le veux aussi.

- Toi ? Siffla méprisamment Fastia.

- J'ai fait des erreurs, je le reconnais. Mais Nathan vous a abusé vous aussi non ? Si je vous aide à vous échapper et à rejoindre la rébellion, vous interviendrez en ma faveur auprès de votre fille ?

Fastia fut un moment surprise, puis secoua la tête.

- Adélie doit me détester encore plus que toi. Ce que je pourrai dire ne servirait à rien...

- N'en soyez pas si sûre. Ad est très différente de vous ou de Nathan. Je ne pense pas qu'elle soit rancunière. Votre fils croit dur comme fer qu'elle tient à vous, sinon il ne vous aurait pas prise en otage.

Un certain espoir naquit dans les yeux de Fastia. Pour elle, avoir une chance que sa fille tienne un peu à elle fut apparemment comme un rayon de soleil.

- Comment vas-tu faire ?

- Laissez-moi faire, dit Madison. En attendant, souvenez-vous. Ne contrariez pas Nathan. On va partir d'ici, toutes les deux.