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Apocalyptica de Drayker



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Informations

» Auteur : Drayker - Voir le profil
» Créé le 18/01/2014 à 16:56
» Dernière mise à jour le 03/12/2017 à 13:18

» Mots-clés :   Drame   Présence de poké-humains   Région inventée   Science fiction   Suspense

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Chapitre 02 : Air frais et sang chaud
« Écoute-moi bien ! Il faut que tu sortes, tu m'entends ? Regarde-moi ! REGARDE-MOI ! »

Un homme gesticulait derrière la vitre du tube où l'adolescent était enfermé. Les cheveux mal coiffés, le regard apeuré visible derrière ses lunettes, tout chez lui trahissait la hâte, l'anxiété.
Tout autour de lui, le monde semblait perdre la tête. Des gens en blouse blanche couraient dans tous les sens, tandis que les murs paraissaient trembler, éclairés par des néons qui clignotaient avec frénésie. Une alarme lui vrillait les tympans, couvrant les hurlements de tous ces gens qui s'agitaient. De terribles grincements se faisaient entendre, comme si les entrailles de la terre remuaient, mais le garçon n'y prêtait pas attention. Il essayait de comprendre ce que pouvait bien dire son interlocuteur.

« Je ne peux pas te libérer ! Je ne peux pas ! Je... je suis désolé. Je n'ai jamais voulu... »

L'homme s'interrompit et réprima un sanglot nerveux, secouant violemment la tête. Lui aussi semblait devenir fou, comme si la situation le dépassait. De la poussière tombait du plafond, et les lumières vacillaient de plus en plus, s'éteignant parfois plusieurs secondes.

« Tu es prêt.. Tu survivras ! Ils t'ont fait pour. Tu survivras ! Mais tu dois sortir ! Quand.. quand tout ça sera terminé, on..
- Morgan, on n'a pas le temps ! Laisse-le là, tu vois bien qu'il ne comprend même pas ce que tu lui raconte ! intervint une femme, soudainement apparue dans le champ de vision troublé du garçon.
- Mais c'est un gosse ! Un gosse...
- Plus après ce qu'on lui a fait ! Il n'est plus rien, maintenant ! Au nom d'Arceus, laisse-le, Morgan! »

La femme, elle aussi terrifiée, empoigna le bras de son compagnon et le tira en arrière avec l'énergie du désespoir.

« Il faut y aller ! Les cellules d'isolement ont lâché ! On doit pas rester !
- Il faut que tu sorte. Tu comprends ? A partir de maintenant, tu es seul !
- Bon sang, si on reste ici, on est morts ! Je t'en supplie, Morgan !
- TU DOIS SORTIR ! TU ES SEUL ! » lui hurla l'homme tandis que sa collègue le traînait vers la sortie.

Un morceau de béton se détacha du plafond et écrasa l'homme dans un craquement sinistre. Le garçon fixa longuement la femme qui hurlait, des larmes ravageant ses joues. Il l'examina tandis qu'elle cédait à la panique, jusqu'à ce que d'autres personnes en blanc l'emmènent avec elle.


« Je suis seul. »

~*~
Musique d'ambiance conseillée

L'adolescent cligna des yeux. Il se rappelait. La voix. Morgan. Le plafond. Les cris. La femme.

Il était seul. Et il avait chaud. Et soif. Le garçon n'avait aucune idée du temps qui s'était écoulé depuis qu'il marchait dans ce désert sans fin. Il ne se rappelait même pas avoir descendu la montagne brune. Pourquoi avait-il fait ça ? C'était idiot. Ses jambes lui faisaient horriblement mal depuis qu'il avait sauté du haut de la falaise.
Tout ce qu'il voulait, c'était se reposer. Tuer la voix dans sa tête.

Il leva les yeux vers le ciel d'un bleu insolent. Le soleil lui souriait, ironique, comme s'il se réjouissait de le voir tituber sous ses rayons cuisants. L'adolescent s'arrêta et s'allongea dans le sable brûlant.

Il n'y avait plus de vent. Quand était-il tombé ? C'était la seule chose qui bougeait dans ce monde inerte, hormis l'adolescent. Le vent lui manquait. Il lui tenait compagnie. Désormais, il était réellement seul.

Pendant une fraction de seconde, le garçon voulut se relever. Mais son corps ne répondait plus, et l'envie de reprendre sa marche fatigante retomba aussi vite qu'elle était venue. Non, maintenant, il allait dormir. A jamais.

L'adolescent ferma les yeux et le monde devint rouge. Les rayons du soleil perçaient même à travers ses paupières closes. Il se mit à respirer plus lentement. Ce qu'il faisait chaud. Sa gorge sèche le faisait souffrir, comme l'intégralité de son être. Il déglutit. Sa salive lui semblait brûlante, elle aussi. Peut-être son sang était-il en train de bouillir.

Un léger vrombissement berça doucement le garçon tandis qu'il mourait tranquillement. Un bourdonnement doux, sourd, comme s'il venait d'un autre monde, un univers qu'il allait bientôt rejoindre. Il aimait ce bruit. Il était réconfortant.

Le vrombissement montait lentement en intensité. Petit à petit, il devint plus clair et plus facile à distinguer. De sourd, le bruit se mua en un son parfaitement audible. De doux, il changea en une vibration désagréable, dérangeante. Était-ce là la respiration abyssale du monde des morts ?

L'adolescent ouvrit les yeux. Son corps entier était engourdi. Le ciel d'un bleu insolent était toujours là, comme une chape de plomb qui recouvrait le désert cuisant.
Il était toujours coincé chez les vivants. S'il en restait.

Mais alors, d'où venait ce ronronnement qui l'irritait tant ? De doux bruissement, il s'était mué en vrombissement agressif. En grognant, le garçon ferma les yeux, trop faible pour se redresser et chercher la source du son.

Ce bruit continuait de gagner en puissance, comme s'il se rapprochait de lui. Mais il s'en moquait. Il voulait juste que tout s'arrête, que son cœur s'arrête, qu'il puisse enfin dormir.

Et soudain, le vrombissement cessa.

Enfin.

« Bon sang, encore un ? »

Une voix. Tonitruante, semblable à un éclair qui déchira ses tympans. Jamais l'adolescent ne se serait attendu à entendre une voix.

Il voulut ouvrir les yeux, mais n'y parvint pas. Le sommeil l'aspirait petit à petit, l'emportant dans un siphon inexorable qui l'entraînerait, il le savait pertinemment, vers sa fin.

« On ne peut pas le laisser là. Il respire encore, fit une autre voix, plus douce.
- Attends, Lina, t'as vu ses jambes ? Elles sont brisées. Tu m'explique comment il a fait pour venir du labo jusqu'ici avec des jambes pétées ?
- Qu'est-ce que j'en sais ? Ils ont tous des dons différents. » argua la voix, sur la défensive.

L'adolescent se battait pour entrouvrir les paupières, manifester sa présence, contempler ces gens. Il avait oublié à quoi ressemblaient les êtres humains. Mais son corps ne répondait plus. Son esprit s'embrumait, et les paroles qu'il percevait lui semblaient de plus en plus confuses. Non... Pas maintenant... il ne voulait plus mourir...

« Si on l'abandonne là, il va se faire bouffer par le premier groupe de Griknot qui passera ! T'as bien vu ce cadavre tout à l'heure, non ? Même les morts ne méritent pas ça !
- C'est pas pareil ! Je veux pas d'un autre monstre à la colonie !
- Un MONSTRE ?! »

Un claquement sec parvint jusqu'aux oreilles du garçon à l'agonie, suivi d'un juron étouffé. Une troisième voix, profonde, mûre et rauque, se fit alors entendre :

« Du calme, vous deux. On l'emmène. C'est ma décision, et c'est moi qui en porterait la responsabilité.
- T'es pas sérieux, Thrak ! »

Les protestations s'amenuisèrent pour ne devenir qu'un brouhaha sans consistance. L'adolescent fut bientôt incapable de mener une pensée cohérente, et son esprit ne perçut alors que des sensations diffuses, atténuées par le linceul de la mort qui se déposait doucement sur lui.

La dernière perception que le garçon eut du monde fut la reprise de cet étrange vrombissement.


Crédit : strudenfreund sur DeviantArt