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La Faucheuse. de T-Tylon



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» Auteur : T-Tylon - Voir le profil
» Créé le 25/05/2011 à 00:22
» Dernière mise à jour le 08/06/2011 à 20:50

» Mots-clés :   Présence d'armes   Sinnoh   Suspense   Terreur

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Déchéance.
(Quatrième partie)

Sinnoh. Voilaroc. Ambassade du Consortium. Sous-sol. Labyrinthe du Dédale, partie Est.

Mercredi 26 Mai, 21 heures 46 minutes.



Courir. Courir, courir, et seulement courir, jusqu'à en perdre haleine, mais sans s'arrêter. Sans même penser à prendre une pause un seul instant… Les couloirs se succédaient devant sa course infernale comme si pour lui ils apparaissaient tous comme un seul et même, n'y prêtant aucune attention autre qu'appréhender leurs virages pour continuer sans ralentir. Les seules choses parvenant encore à l'atteindre en tête étaient les instructions de direction fournies par le contrôle auxiliaire via l'oreillette. D'autres s'étaient lancés à sa suite dans sa course, se rappelant finalement où leur devoir devait les conduire, mais tous se trouvaient encore loin derrière ; largués par la vélocité brute du policier qui les avait littéralement laissé sur place. Il se contrefichait de ces derniers, les attendre étant la perte d'un temps qui s'avérait plus que précieux, vital même. S'ils n'arrivaient pas à suivre la cadence ils étaient des poids. Et n'ayant rien à attendre de poids, il continuait de courir sans penser à rien d'autre.

Il courait, courait et courait encore. Il maintenait une vitesse constante qui aurait de quoi rivaliser avec les meilleurs athlètes de compétition. Mais c'était toujours trop lent ! Plus vite, plus rapide, toujours plus pressé. Il devait arriver à temps. Il le devait ; il ne pouvait pas se permettre d'être moins rapide. Il fallait qu'il arrive à temps ! Pour ça il fallait aller plus vite. Ne pas ralentir. Toujours plus vite…

Sa manière de courir changea dans l'instant pour répondre au désir puissamment ancré dans son esprit. Chaque nouveau détour à angle droit exigeait de lui de devoir ralentir pour pouvoir tourner et continuer sans se prendre le mur, mais chaque nouveau ralentissement repoussait encore ses craintes à sa frustration dans ses retranchements, tout en le fatiguant encore plus. Mais alors qu'il approchait d'un nouveau détour, se devant de ralentir pour pouvoir tourner, il n'en fit rien et continua sa course en conservant sa vitesse jusqu'au bout. Alors qu'il était envisageable de croire qu'il avait perdu les pédales et qu'il allait certainement se prendre le mur, au dernier moment il vira légèrement sur le côté, en mettant son pied sur le mur opposé, pour continuer purement et simplement sa course dessus pendant deux pas supplémentaires. Puis de reposer son pieds sur le sol dans la continuité sans avoir perdu une seconde à maintenir sa course telle qu'elle était.

Cette méthode de course, très loin d'être orthodoxe, il l'avait vu effectuée par l'un des petits voleurs banlieusards dans la périphérie industrielle de la ville alors qu'il le coursait avec ses collègues des suites d'un petit braquage. Bien qu'en surnombre, la course poursuite s'était révélée à sens unique pour le voleur qui les avait baladé, lui et ses collègues, dans son territoire comme d'un Ousticram dans un parcours de gymnastique ; à utiliser le moindre rebord et obstacle comme d'un avantage pour gagner de la vitesse tout en diminuant celle de ses poursuivant. Jamais il n'aurait crû un jour qu'il irait jusqu'à copier le style de course d'un voleur pour rattraper sa bien-aimée. Mais toute considération avait été mise de côté devant l'urgence du danger qui la menaçait ; juste de savoir, et constater que ce moyen pouvait lui permettre de sauver sa fiancée lui avait fait oublié tous ses préjugés sur ces derniers… Jusqu'au virage suivant. Car lorsqu'il tourna d'un nouveau détour de cette course folle, en suivant les instructions, pour déboucher sur ce qu'il n'attendait être qu'un énième couloir, l'horreur de la scène qu'il recelait le fit s'arrêter dans l'instant ; alors qu'il était toujours sur le mur.

Il chuta sur le sol tel l'amateur qu'il était vraiment à croire maitriser en une fois toutes les subtilités de cette course murale (bien que pour sa première fois il avait de très loin dépassé toutes les attentes dans le domaine). Mais il n'avait cure de la douleur ou même penser à ressentir un seul instant la honte d'une chute aussi ridicule. Il se releva, plus vite qu'il ne chuta, pour se ruer vers la demi-douzaine de corps étendus en plein milieu du couloir ; plus précisément vers celui le plus proche de lui. Le seul étendu dans une mare de sang... Portant des vêtements qu'il n'espérait jamais voir drapé de cette couleur.


«Tatiana !»


Il s'accroupit à côté du corps sans force de la jeune femme vautrée dans ses propres fluides à l'odeur qui soulevait le cœur, mais la peur et l'effroi qui s'emparait de lui le rendait incapable d'éprouver la moindre forme de dégout. Il passa son bras derrière son dos, sa main maculée de son sang à la relever pour voir son visage qui avait perdu de ses couleurs.


«Tatiana, réponds-moi ! Je t'en supplie, ouvre les yeux !»


Sortant de la douce torpeur dans laquelle elle s'enfonçait à l'entente de la voix brisée de son amour, celle-ci rouvrit lentement ses paupières, plus lourdes que des montagnes, pour poser les yeux vert-d'eau de son regard vitreux sur le visage de l'homme qu'elle priait qu'il soit le dernier être qu'elle espérait voir avant sa fin, tout à espérer que cela ne soit pas le cas... Elle ne pouvait d'ailleurs croire à ce qu'on l'ait exaucée ; pensant qu'elle hallucinait et que ceci était le dernier cadeau d'illusion que lui offrait son esprit avant de mourir. Puis elle sentit deux petites gouttes chaudes tomber sur ses joues venant du visage de son «rêve», et lui sourit doucement en comprenant qu'il s'agissait là de la réalité…

Sa réalité…

----

Quelques minutes plus tôt.

Les larmes coulaient de ses yeux. Le sang coulait de ses plaies. Mais sa tristesse ne trouvait aucun moyen d'exprimer son désarroi. Tout comme son père, tout comme sa mère : elle allait mourir seule. Alors qu'elle acceptait sa destinée, le chemin immuable tracée pour elle depuis le jour de sa naissance, sous le regard impartial et neutre de son exécutrice, elle voulait qu'on lui accorde l'ultime requête accordée au condamné avant que la sentence ne soit appliquée ; une dernière fois, elle voulait voir son amour. Voir son visage et sentir la chaleur de son toucher une dernière fois avant de tomber dans l'oubli… A abandonner tout espoir de savoir que cela ne serait jamais le cas.

Mais alors que la vie la quittait lentement elle ne pouvait toujours pas détacher les yeux de celle qui lui révéla la futilité de son existence par sa simple présence, et vit malgré elle la forme d'une petite araignée noire évoluer docilement dans sa main, proche de la montre subtilisée à son prédécesseur. Au bout d'un instant, celle-ci reporta à nouveau son regard sur elle et reprit la parole de son ton désespérément neutre.


«La sécurité sera là d'ici peu ; un seul, pour l'instant.» Commença-t-elle alors qu'elle rangeait son araignée dans sa tenue de substitution. «J'ai visée des points précis dans vôtre corps qui interdisent toute possibilité de survie dans les prochaines minutes sans une transfusion sanguine d'urgence. Cependant, à l'aide de mes dagues, je vous ai injecté une substance qui vous maintiendra suffisamment longtemps en vie pour échanger un dialogue clair et sensé avec lui en profitant du temps qu'il vous reste ; à condition que vous préserviez vos forces à ne plus effectuer le moindre geste.»


N'ayant plus rien à lui dire de son côté, sa froide exécutrice se détourna d'elle et commença à partir dans la direction opposée. Sans plus de formalité. Mais pas pour elle, sa victime, qui ne comprenait pas la finalité de son geste après tout ce qui avait été dit.


«Pourquoi…» L'interpella-t-elle des maigres forces qui lui restait. «Pourquoi me laisser en vie pour que je parle…»

Celle-ci se retourna pour reporter à nouveau son attention sur la pauvre femme étendue sur le sol, à la regarder des yeux sans fond de son regard impassible.

«Car les caméras, sous mon contrôle, révèlent qu'il s'agit de vôtre fiancé.»

Malgré la réalité de sa douleur et ses larmes, elle n'arrivait pas à croire ce qu'elle entendait. Mais sa froide interlocutrice n'en n'était qu'aux débuts de ses explications.

«Lorsqu'il sera ici, vous ne disposerez que de quelques instants, deux minutes tout au plus, pour lui faire vos adieux ; vous pourrez lui dire strictement tout ce que vous voulez.»

A nouveau la regarda-t-elle avec incompréhension…

«Pourquoi… ?» Demandait-elle d'une voix ténue, chaque inspiration devenant de plus en plus difficile et douloureuse.

«Pour vous laisser le même choix que le mien : mettre un terme à ma vie, ou non.»

Même si la sensation de lourdeur dans ses paupières continuait de s'amplifier, la jeune femme étendue écarquilla les yeux à l'entente de sa raison.

«Lorsque que vôtre fiancé sera là vous aurez deux options, mais seulement le temps et les moyens pour en choisir une : tout lui révéler sur l'identité de vôtre meurtrier, ou passer les derniers instants qu'il vous reste à lui faire vos adieux.» Reprit-elle en réponse à sa réaction. «Mais en lui révélant mon identité, alors qu'il est certain que vous allez mourir dans ses bras, vous serez assurée qu'il cherchera vengeance à l'exprimer de la même manière qui va vous conduire à la mort : le meurtre. Qu'il soit policier, gardien de l'ordre, ne change rien au fait qu'il reste un homme comme les autres, avec ses vices et ses passions. En souvenir de l'amour qu'il vous porte, il reniera sans la moindre hésitation tout ce à quoi il dédia sa vie pour vous afin de mettre un terme à la mienne ; afin d'accomplir sa justice.»

A nouveau les larmes coulèrent de ses yeux en réalisant le véritable aspect empoisonné du «cadeau» qu'elle lui faisait, comme étant la pire torture qui soit.

«Voilà le dernier choix que je vous laisse, comme preuve de vôtre libre-arbitre : dîtes la vérité à l'amour de vôtre vie, à lui révéler l'identité de celle qui vous tue comme étant la personne que vous vouliez assassiner, ou cachez-la lui jusqu'au bout et emporter ce secret dans la tombe ; à le laisser errer dans son existence, vidée de but et de sens, et ressasser sa haine et son malheur jusqu'à sa mort sans jamais pouvoir oublier.»


C'était le pire châtiment imaginable auquel elle ne pensait jamais devoir un jour être confrontée. Et, dans le comble ultime du malheur, correspondait parfaitement à la vérité qu'elle lui avait révélée : la vie est le véritable visage de l'enfer. Car ses derniers instants de vie, d'existence, elle allait les passer dans les plus horribles conditions jamais inventées… Et, comme si l'ironie n'en n'était plus à un pallier ultime prêt, ces conditions étaient édictées par la tueuse qu'elle avait engagée inconsciemment contre elle-même.

Mais, même devant cette vision d'enfer et de cauchemar, elle n'arrivait pas à comprendre quelque chose la concernant ; la plus grosse contradiction qu'elle est perçue d'elle après son monologue. Elle qui disait la tuer pour assurer sa survie, pourquoi remettez-t-elle sa vie et son existence entre les mains de sa victime ? Etait-elle sûre qu'elle n'allait rien dire ; qu'elle l'avait déterminée comme lâche et misérable à ce point ?


«Comment pouvez-vous être sûre que je ne lui dise rien…» L'interrompit-elle une dernière fois.

Le noir abyssal trônant au centre de ses yeux lui révéla qu'elle avait posée la question la plus inutile de toute l'histoire ; à laquelle cependant elle daigna l'honorer d'une dernière réponse.

«Parce que la vie ne vaut rien : la vôtre pas d'avantage que la mienne.» Lui rendit-elle platement. «Quand il arrivera, le dernier choix que vous aurez sera de déterminer la valeur que vous accordez à la vie ; la sienne autant que la mienne. Cela sera vôtre dernier jugement de valeur en tant qu'être vivant, ou existentiel. Vous êtes seules juge à devoir assumer en face le poids de vos actes entre ces deux aspects de l'existence : l'illusion de l'idéal, ou la fatalité de la réalité. En lui cachant la vérité, il vivra une existence plongée dans la morosité et le malheur ; en lui disant la vérité, il me traquera sans fin dans une lutte d'où ne sortira au final qu'un seul vainqueur, et qui entrainera fatalement la mort de l'autre. A vous de déterminez laquelle de ces deux options, de ces deux valeurs, correspond à la nature de vôtre propre existence : mort ou mensonge.»


Elle épuisa ses ultimes larmes de tristesse en comprenant qu'elle était piégée dans une impasse dans laquelle elle allait sceller pour toujours le destin de celui qu'elle aimait de tout son cœur. Car pour elle, étant le seul être vivant sur terre pour lequel elle irait jusqu'à vendre son âme, sa vie avait trop de valeur pour le pousser au meurtre ou à la dépression ; comble du malheur, la sienne de valeur étant alors inextricablement liée à celle qu'elle devrait alors accorder à sa meurtrière… la meurtrière qu'elle avait voulu éliminer sans même savoir qui elle était.

Alors qu'elle lui tournait le dos la dernière fois avant de la voir disparaitre à jamais, la Faucheuse lui accorda la réalité de la dernière et ultime contradiction de son existence.


«Ma vie ne vaut rien. A vous de déterminer si elle en a une, ou non. Faites vôtre choix.» Conclut-elle avant de disparaitre dans les ombres du voile tombant sur sa vision.

«Adieux. Tatiana Matis.»


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Jusqu'au bout… Jusqu'au bout, elle ne lui avait pas mentie. Son amour était bien là, à ses côtés, à profiter sans le savoir avec elle des derniers moments qu'elle lui avait accordée. A devoir faire face au choix de sa vie…


«Tatiana, reste avec moi !» Lui faisait-il à haute voix, à croire qu'elle s'endormait en la voyant refermer lentement les yeux.

«Théo…» Lui rendit-elle faiblement.

«Oui, je suis là…» Renvoya-t-il plus bas en la serrant dans ses bras. «Je suis là maintenant. Je ne vais plus te quitter.»

«Théo… Je dois te dire quelque chose… Il ne me reste peu de temps…»

«Chhh, ne dis pas ça. Les secours seront là bientôt et t'emmèneront à l'hôpital où tu seras soignée. C'à va aller…» Lui mentait-il d'une voix tremblante autant qu'à lui-même ; la flaque de sang ne cessant pas de s'étendre.

«Théo, s'il te plait écoute-moi… C'est très important…» Insistait-elle des maigres forces qui lui échappaient.

«Tu me diras tout une fois à l'hôpital, quand tu iras mieux. Mais il faut que tu gardes tes forces.» La coupait-il à désespérer qu'elle l'écoute et s'en sorte.


A le regarder et le sentir trembler par-dessus elle, à voir l'homme qu'elle savait inflexible et solide comme un joyeux drille s'effondrer devant son corps se vidant de ses forces, elle réalisa que l'heure de son choix était venu. Elle n'avait plus le temps d'attendre, ni la volonté à devoir condamner sa vie pour ses erreurs. Il lui était donné une dernière fois l'occasion de faire vraiment ce en quoi elle croyait, ce qu'elle savait devoir être juste, il n'appartenait qu'à elle de lui transmettre ses réelles dernières volontés.


«Maitre Alfred Corbier… Transmet-lui ces mots : «les roseaux résistent à tous les vents, mais leurs feuilles tombent toujours au printemps»…»

«Qu'est-ce que ça veut dire… ?» Lui demandait-il en redoutant pourtant la réponse.

«C'est la phrase que m'avait transmit mon père pour que j'hérite de toute sa fortune s'il lui arrivait quelque chose…» Lui rendit-elle faiblement d'un petit sourire. «Trouve-le, et dit lui que cela vient de Sartriana. Il saura que cela vient de moi, et il te lèguera toute la fortune de ma famille…»

N'étant ni plus ni moins qu'une déclaration testamentaire, ce dernier ne pouvait l'accepter et croire qu'elle voulait abandonnée tant qu'il restait un espoir.

«Non, non, non ! Je me contrefous de ton héritage, de ta fortune, de ta réputation ou du nom de ta famille ! Tout ce que je veux c'est que tu restes avec moi !» S'exclamait-il violemment avant de fondre en larme. «Je veux simplement que tu vives, que tu restes avec moi… S'il te plait, n'abandonne pas…»


Maintenant, alors qu'elle savait qu'elle allait mourir, elle comprit la valeur que lui accordait à sa vie, par-dessus toute forme matérielle, et réalisa avec tristesse qu'il ne l'aurait jamais trahie ; et jusqu'où elle avait été trop loin à lui mentir inutilement en se rendant compte qu'elle aussi, tout ce qu'elle voulait était d'être auprès de lui. Mais aussi en quoi les dernières paroles de l'avatar de la mort lui revenaient en tête avec l'écho de leur funeste malédiction à l'allure de prophétie.


«Rising Sun… N'est pas l'ennemi… Pas plus qu'elle…» Reprit-elle de plus en plus faible. «L'ennemi, c'est nous-mêmes…»

«Chhh… Economise ton souffle, s'il te plait…» Lui murmurait-il dans l'oreille, à lui caresser les cheveux fébrilement.

«Théo… Promets-moi de ne pas la haïr… Promets-le-moi…» Continuait-elle résolue jusqu'à son dernier souffle. «Elle n'est pas ce qu'elle parait être… Elle cherchait à vivre, comme moi… Ne cède pas à la vengeance… Parce que ta vie est la chose la plus précieuse qui soit pour moi… Ne la perd pas à cause de mes erreurs…»

«Tout ce que tu veux. Mais reste avec moi…» Suppliait la-t-il à la serrer de plus en plus fort.


Alors qu'il avait la vue brouillée par les larmes, à ne pouvoir réaliser la fatalité qui se déroulait devant lui. Impuissant à y remédier. Il sentit sur sa joue le contact froid, mais doux de sa main qui attirait son visage vers le sien… Duquel il voyait son magnifique sourire, dont même la pâleur de son teint ne pouvait prétendre à en dénigrer l'éclat resplendissant comme au premier jour.


«La dernière année passée avec toi fut la plus belle de ma vie… Merci pour tout…»


Alors que ses paupières se refermaient lentement, deux dernières larmes coulèrent de ses yeux déjà aveugles à la lumière, glissèrent sur ses joues, et laissèrent derrières elles un fin sillon transparent soulignant le dernier cadeau qu'elle n'offrait qu'à son bien-aimée… Et n'irait plus jamais l'offrir à personne.


«… Je… T'aime…»

D'une dernière déclaration à son amour, le seul de sa vie, elle lui offrit la vision d'un dernier sourire devant le regard de ses yeux d'un vert sombre magnifique. Bien vivant. Avant que sa main ne glisse de sa joue pour revenir le long de son corps, et ne soustraie ses propres yeux à sa vue en les refermant.

Pour ne plus jamais les rouvrir.

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Le silence. L'absence de bruit, de nuisance sonore, de percussions vibratoires parcourant l'air en le faisant vibrer à une fréquence donnée perceptible pour l'ouïe humaine. Le son résultant d'une manifestation physique bien réelle d'un mouvement matériel par rapport à un autre ; comme celui des tambours d'une batterie, de la sirène d'un bateau, ou encore les battements d'un cœur… Comme ceux qu'il n'entendait plus venir du sien…


«… Tatia… ?»


Sa voix n'était qu'un murmure. Un pâle reflet de mot soufflé sans une once de conviction, à l'intonation brisée et effondrée comme sa volonté ; à tenir dans ces bras celle qui était l'amour de sa vie… Qui n'était plus.


«Tatia… Ouvre les yeux… S'il te plait…»


Il desserra faiblement sa prise sur son corps pour amener son bras vers son visage, son si beau visage... Et lui écarter doucement les cheveux, ses fins cheveux et cette petite mèche sombre par devant ses yeux, pour lui caresser lentement la joue… Sa joue sur laquelle deux autres larmes perlèrent pour venir animée une dernière fois son visage froid, duquel pourtant se trouvait figé le plus beau des sourire.

De son corps désormais sans vie, Tatiana Matis était partit avec le sourire entre les bras du seul homme qu'elle n'a jamais aimée ; heureuse d'avoir pu le voir et le lui exprimer une dernière fois dans les yeux son amour. L'avoir remerciée pour cet amour qu'il lui avait rendu à chaque instant, jusqu'au dernier. Et d'avoir, dans son ultime souffle, assumer la charge de son existence en ayant répondue aux attentes de la réalité qu'elle avait choisie : sa réalité.

Avant que, dans un cri emplit du désespoir le plus profond, les muets couloirs monotones et monochromes du labyrinthe ne résonnent des pleurs de tristesse et d'agonie de l'homme qui jamais plus n'aimera la vie.

Et que le seul témoin de sa souffrance n'écoute l'écho de son cri depuis la dizaine de mètre la séparant du lieu se son forfait responsable de ses tourments. A renfiler sa tenue et se rééquiper de sa panoplie de mort. Avant de quitter le Dédale, et la dernière scène de l'ange déchu en concluant l'acte final du drame de la vie.


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Sinnoh. Voilaroc. Ambassade du Consortium. Flanc Nord. Accès privé de service externe et sortie de secours principale d'urgence.

Mercredi 26 Mai, 21 heures 50 minutes.



Bien qu'elle ne le sache pas, car n'ayant pas participée au raid de la Ligue mené dans les marais de Verchamp, la championne de Voilaroc se tenait devant le même principe d'accès blindé servant de portail arrière à l'ambassade ; au mécanisme d'ouverture sophistiqué intégré dans la roche strictement identique dans son principe à ce dernier. Bien qu'évidemment moins discret avec ses nombreux avertissements rédigés de part et d'autre soulignant l'aspect clairement restrictif et privé de ce passage, emprunté normalement uniquement par les services d'entreprise privé engagés par le Consortium ; pour la collecte des ordures, le ravitaillement en nourriture, les services de nettoyages et autres. Elles restaient sinon fermées à tout autre visiteur indésirable. Stoïques et inexpugnables… Mais pour cette seule fois, la première de leur histoire, telle l'exception confirmant la règle, elles étaient intégralement ouvertes pour laisser sortir un afflux continuel de personne en vue d'une évacuation totale des lieux. Et à ne laisser passer, pour la première fois aussi de son histoire, du personnel des services publique sous la forme des pompiers, de la police, et des dresseurs de d'arène…

Le passage interne taillé dans la roche consistait en un énorme tunnel à l'aspect de couloir menant à un grand hangar circulaire en guise de fond. Le passage était suffisamment large pour fournir deux voies à double sens, mais seule une file était autorisée pour les véhicules, qui ne devaient de plus rester écartés à plus d'une dizaine de mètres les uns des autres en arrivant à la suite s'ils étaient plusieurs. Cela n'arrivait presque jamais, pour deux raisons : n'étant que peu nombreux à pouvoir emprunter ce passage, ils arrivaient généralement tous séparément à un horaire précis et distinctif des autres, et généralement juste avec le matériel nécessaire pour mener à bien leur entreprise (ce qui ne nécessitait pas d'avoir besoin d'une division entière de véhicule ; tout au plus deux pour les éboueurs.) La deuxième était que l'entrée en elle-même consistait avant tout en une forme de barrage semblable à celle de l'entrée, avec scanners, piliers rétractables anti-intrusion/évasion, vérifications d'identité et autres système technologique de détection poussé, mais en avait aussi un second juste avant le hangar ; ce qui divisait le parcours en deux parties avec deux vérifications. Le temps que le second camion accompagnant le premier entre, celui-ci en serait déjà vers la fin de sa seconde vérification. Enfin le couloir en lui-même menant au second barrage avant le hangar était intégralement blindé, du début jusqu'à la fin, ce qui interdisait l'emploi des pokémons Sol ; que se soit pour pénétrer à l'intérieur ou s'enfuir (excepté pour les plus puissants ; mais il y'avait de toute manière des systèmes de détection sismique prévu au cas où.) Enfin il y'avait un dernier système de défense sous la forme de deux énormes volets de sécurité blindé prêt à s'abattre et sceller l'accès au moindre signe d'alerte en plein milieu du couloir et juste derrière le second barrage, situé juste avant le hangar, et dont le système déclenchant le mécanisme s'activait indépendamment des postes de barrages. Autrement dit, en s'activant les volets piègeaint les éventuels intrus dans le couloir, divisant leurs forces, et leur interdisaient toute chance de s'échapper.

Une sécurité réellement impressionnante… Qui était devenue une gêne depuis qu'elle avait été outrepassée par l'assiégeur inconnu, en ralentissant la progression des pompiers et des urgentistes cherchant à pénétrer dans les lieux rapidement en même temps que d'assurer la fuite de ceux qui cherchaient à fuir les lieux. Car, même dans un état de crise pareil, la sécurité tenait à maintenir ses procédures de contrôle avec les nouveaux entrant (bien qu'en ne la limitant plus qu'à l'entrée pour des raisons toutes aussi évidentes.) Ce qui n'était pas pour améliorer la situation ou l'humeur de la championne, de voir que le temps perdu en ces banalités inadaptées à la situation était autant de temps qu'elle et ses alliés pouvaient mettre à contribution à l'intérieur.

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«Purée, mais laissez-nous passer nom d'un Luxio !» S'emportait-elle vers l'un des gardes occupé à vérifier les identités du camion de pompier les devançant.

«Ecoutez, les procédures sont là et prévues spécialement pour ce genre d'incident afin de les gérer le mieux possible et rapidement ; nous ne faisons que suivre la procédure. Alors attendez vôtre tour, et cessez de nous interrompre si vous tenez à ce que ça aille plus vite !»

«M'enfin je sais que je ne suis peut-être pas accréditée sécurité nationale, mais je suis championne d'arène de Voilaroc depuis des années ! On reconnait mon visage dans la rue facilement quand même ; vérifier mon identité et mes accréditations à la Ligue ne devraient même pas prendre dix secondes !»

«Bien sûr qu'on vous reconnait ; y'a pas vingt mille personnes qui trouveraient le moyen de se vouloir se balader dans l'ambassade en tenue de combat.» Renvoya-t-il d'un sarcasme.

«Alors pourquoi perdre du temps ?!» S'emportait-elle de nouveau. «On a été appelé comme quoi vous êtres pris d'assaut, probablement par les mêmes sales types dont la Ligue s'est occupée dans les marais, et on est là pour vous aider à faire le ménage ; pourquoi vous nous bloquer la voie aussi inutilement ?!»

«Parce que les pompiers et les médecins sont prioritaires !» Renvoya-t-il exaspéré, avant de pousser un soupir de dépit. «Je ne suis pas sensé vous en faire part, surtout par le fait que vous restez une civile, mais en plus de l'incendie qui ravage la cour au sommet une partie entière des employés de l'ambassade, gardes compris, semblent avoir été prit d'une crise de délire collective qui les a fait se battre entre eux ; le tiers d'après le dernier rapport. Y'a des blessés encore coincés à l'intérieur toujours dans un état de folie furieuse. Et l'incendie n'est pas là pour améliorer les choses.»


La championne resta stupéfaite d'apprendre que les personnes de l'ambassade avaient été poussées à se battre entre elles, comme ses dresseurs et leurs alliés ; mais était plus réservée par ce qu'elle devait en déduire de la forme et la nature de ces agresseurs. Pour plonger autant de gens dans une confusion suffisamment forte pour qu'ils en perdent toute notion de contrôle et attaquent sans discernement d'autres gens, elle ne voyait en responsables dans ses connaissances de dressage que l'attaque «Onde Folie» ou ses équivalents. Ce qui n'était clairement pas pour la rassurer ; «Onde folie» ou «Ultrason» étaient la marque des pokémons comme la famille Nosférapti, des types Poison/Vol à la double résistance au combat particulièrement agaçante, ou les types Spectres et Psy qui étaient alors là ses véritables Némésis en terme de rapport de force (à la limite elle préférait même plus faire face à des Spectre qu'à des Psys). Une petite «Clairevoyance» permettait de les affronter à armes égales, mais pas ces foutus tordeurs de cuillère qui étaient capables de les mettre à terre avant même qu'ils ne les atteignent au combat rapproché. Il y'avait aussi l'attaque «Danse-Folle» qui lui était venue à l'esprit. Mais sachant que très peu de pokémons se révélaient capable de l'apprendre et de la maitriser en dehors des Spindas, et qu'il n'y avait aucune chance qu'autant de personne puissent s'être laissées prendre dans l'hypnose de cette danse sans que personne ne «voit» le pokémon, elle avait d'amblée écartée cette possibilité (puis, sérieusement, attaquer l'ambassade de Voilaroc avec des Spindas en connaissant la spécialité du champion de la ville ?)


«Je comprends bien que les pompiers et les médecins restent prioritaires pour pouvoir s'occuper des blessés et de l'incendie.» Reprit-elle plus calmement. «Mais vous faites comment pour assurer leur sécurité si ceux qu'ils doivent protéger des flammes et soigner s'en prennent à eux violemment ?»

Ne sachant pas quoi lui répondre, un autre garde prit son relais avec la championne ; visiblement occupant un plus haut poste.

«La sécurité encore présente sur les lieux s'est déjà chargée de les maitriser, sans étalage inutile de la violence. Ils sont sous bonne garde et entre de bonnes mains. Les pompiers et les médecins n'ont pas à s'inquiéter pour leur propre sécurité.» Affirmait ce dernier d'une voix ferme, du genre de gens peu habituée à voir ses décisions être remisent en question.

«La même sécurité qui n'a pas vue la folie s'emparer de ses propres alliés ou les empêcher les flammes de se propager ?» Nota calmement l'un des dresseurs composant le groupe à la suite de celui de l'arène.

Bien qu'à l'allure stoïque, la réplique sagace de cet inconnu sut trouver la faille dans l'épaisse armure butée du gardien qui, bien que gardant son calme, n'en put rester indifférent.

«Et en quoi des karatéka pourraient-ils aider à améliorer la situation ?» Releva-t-il d'une remarque toute aussi fine d'esprit que la sienne.

«Je ne cherchais pas à vous mettre en défaut ou à vous insulter. Bien que vous puissiez penser le contraire : nous sommes dans le même camp. Je ne faisais que relever une évidence.» Lui renvoya-il toujours calmement. «Et l'évidence est que l'ambassade que vous gardez, réputée pour être une véritable forteresse avec du personnel compétent en tant que gardien, est pourtant en plein chaos. Le fait est aussi que vôtre système anti-incendiaire n'à pas empêché les flammes de se propager tout simplement parce qu'il ne semble pas fonctionner, et qu'une partie plus que conséquente de vos collègues s'est retournée contre vous sans réserve au pire moment possible. Cette coïncidence ne peut résulter que d'une implication extérieure, ne pouvant être autrement qu'hostile. Ce qui ne répond ni du domaine des pompiers, ni des médecins, et encore moins de vos collègues exténués à l'intérieur qui doivent attendre des renforts pour les soutenir désespérément. Et nous sommes cette aide. Tenez-vous vraiment à vous lancer dans un débat stérile avec nous pour déterminer qui est le plus utile ici sachant que nous sommes tous réunis ici pour vous assister, à vôtre demande, et que ce n'est ni le lieu ni le moment pour ?»


Le gardien en fut interdit ; il resta silencieux mais inflexible. Cependant, la championne avait comprise que c'était parce qu'il s'était fait admirablement remit à sa place sans qu'il ne puisse le contester, et qu'il l'avait été de surcroit dans les règles de l'art sans aucune agressivité ou marque d'irrespect. D'une part le «dresseur» lui avait platement exposé la situation en se servant des informations données par ses propres subordonnés, mais en les flattant et faisant appel à leur orgueil pour leur faire accepter et reconnaitre la nécessité de leur présence en leur faisant remarquer l'état pitoyable de la situation dans laquelle ils évoluaient, malgré leurs compétences «d'excellents gardiens» ; ce qu'ils ne pouvaient nier sans reconnaitre qu'ils avaient merdés avec une grosse boule dans la gorge. Mais c'était cette même boule dans la gorge qu'il leur proposait d'éviter en les laissant passer ; ce qu'ils ne pouvaient non plus refuser sachant l'ennemi toujours à l'intérieur sans mettre d'avantage des leurs et de ceux qu'ils sont sensés protéger en danger, par leur propre fierté mal placé leur interdisant d'accepter leur aide. D'une seule remarque, il avait piégé le garde à l'image du couloir derrière dans lequel il voulait justement s'engouffrer ; duquel la seule sortie était qu'il reconnaisse s'être fait remettre à sa place en leur concédant le passage… C'était sans compter sur le naturel éminemment égocentrique et arrogant de l'être humain, qui a tendance à se raffermir avec l'âge et l'expérience au détriment de tout raisonnement logique.


«Justement, de part l'état d'alerte dans lequel se trouve l'ambassade : nous ne pouvons pas nous permettre de laisser passer d'avantage de potentiels terroristes sans nous assurer avant à 100% de leur intégrité et de leurs intentions, sans risquer de voir la situation dégénérer encore plus et arriver au point où nous devrions faire appel à l'armée.» Statua-t-il platement.

«C'est du délire : vous tenez à ce point là à vôtre réputation que vous préfèreriez que ça dégénère en assaut armé plutôt que nous laisser passer pour vous aider ?! Êtes-vous lâches à ce point ?!» S'emporta Barry après Mélina.

«Surveillez vôtre langue ; j'étais déjà en service à gérer des crises semblables que vous n'étiez pas même nés ! Je n'ai aucune leçon à recevoir d'un petit dresseur de pacotille !» Répliqua-t-il vindicativement. «De toute façon, quand bien-même les terroristes seraient encore dans les lieux, tant que nous continuons de contrôler cet accès, l'entrée et la place centrale de l'ambassade ils n'ont aucun moyen pour s'échapper sans devoir revenir prendre d'assaut toutes nos équipes restantes rassemblées dans le hall principale ; qui ont de quoi encore les retenir pour longtemps avec nos renforts arrivant par la voie des airs et du dôme. Ils sont piégés entre le marteau et l'enclume.»

«Mais vous êtes idiots ou quoi ?! Si ces types ont des pokémons, ce qui doit être forcément le cas vu le bordel au sommet, comment pouvez-vous croire une seconde que vos collègues puissent rivaliser avec eux ?!» Continua Brice sur la même lancée que son comparse.

«Nous sommes équipés des dernières technologies en matière de sécurité et de contre-mesure pokémon : nos bâtons et tazers incapacitant sont à même de sonner un Aligatueur en quelques coups à peine ; à supposer qu'ils puissent les sortir. Car nous sommes aussi équipé de grenades ombre qui désactivent les système de matérialisation des pokéball en les forçant à entrer en mode de veille d'urgence, ce qui les empêchera de pouvoir faire appel à n'importe quel type de pokémon. Ils n'ont aucune chance s'ils se montrent devant nous.» Rendit-il sèchement d'un air dédaigneux.

«Les mêmes chances qu'ils avaient de mettre vôtre précieuse ambassade sans dessus dessous sans que vous n'ayez fait quoique ce soit ?» Lui renvoya-t-il sur le même ton.

«La première fois ils nous ont eu par surprise. Mais maintenant que nous savons qu'ils sont là, ça ne se passera pas de la même manière.» Trancha-t-il. «Maintenant veuillez vous calmer et faire preuve de respect en suivant nos instructions, en attendant vôtre tour comme tout le monde.»

«Et la gouvernante ?» Continua Barry sans se démonter. «Vous croyez peut-être que c'est simplement pour le fun de faire un joyeux feu de camp que vôtre si précieuse forteresse part en flamme ?»

Le gardien s'autorisa à esquisser un sourire dédaigneux en le regardant d'un air hautain.

«Encore une fois : nous suivons les procédures à la lettre. Et la procédure est toujours d'assurer la sécurité du gouverneur avant celle des autres.» Lui rendit-il comme un professeur faisant la leçon à un mauvais élève. «Au moment même où le danger s'est déclarée, nos gardes parmi les plus compétents ont prit sa sécurité en mains en l'extradant avant tout le monde vers un endroit sûr.»

«Un endroit sûr ; vous voulez dire qu'elle n'est toujours pas sortit de l'ambassade ?» S'étonna le premier dresseur inconnu accompagnant le groupe d'arène.

«Bien sûr que si !» S'enquit-il à répondre dans la seconde comme si toute autre possibilité était inenvisageable. «Seulement nous ne sommes pas autorisé à vous dire où elle se trouve, ni comment sa fuite a été assurée.»

«Par les accès situés dans les égouts ?» Supposa-t-il à haute voix, bien qu'il sache pertinemment qu'il ne pouvait y avoir d'autres options.

Comme s'il attendait justement qu'il en fasse la remarque, le gardien décrocha à nouveau un sourire de dédain.

«Cela n'est certes pas le meilleur endroit dans lequel escorter une dame raffinée comme la gouvernante, mais les innombrables détours du labyrinthe situé sous l'ambassade sont sans nul doute le meilleur rempart contre les intrus, tout comme la meilleure porte de sortie. Bien malin serait celui qui arriverait à s'y retrouver sans connaitre le chemin ; chemin connu seulement de nos collègues les plus intègres.»

«Et s'ils étaient justement entrés par le labyrinthe ?» Releva-t-il en sachant entrer sciemment dans son jeu.

«Chacun des accès est sécurisé et surveillé 24 heures sur 24 par la seconde branche de la société qui nous engage, travaillant de concert et en relais avec celle principale dans l'ambassade. Si une personne intruse pensait même à approcher de loin ces accès, il serait repéré avant même de le savoir.» Répondit-il avec l'entrain auquel le dresseur s'attendait. «De plus il faudrait déjà qu'il trouve le moyen d'entrer dans le secteur des égouts sous le domaine de l'ambassade, dont chaque entrée dudit périmètre est maintenu sûr par des portes de barreaux blindés interdisant les téléports, les passages via des changements de forme, l'utilisation de hack via même des Porygons, ou l'utilisation de tout type d'attaque spéciale ou physique de part leur extraordinaire résistance qui donnerait de toute manière l'alerte au moment où elle serait portée. Et les seules personnes pouvant y accéder sont périodiquement contrôlés par leur société et la nôtre en parallèle, qui de toute manière se feraient repérer par les caméras.»


En effet, présenté comme cela le gardien avait de quoi paraitre certain de l'infaillibilité de leur système en faisant étalage gratuitement de ses connaissances comme preuve de la confiance qu'il lui portait ; ce que des civils normaux auraient certainement acceptés comme explications en s'arrêtant à cela sans chercher plus loin. Mais le fait était que, malgré toute cette sécurité : l'ambassade avait bien été percée par l'intrusion qui a sut y trouver une faille, ou s'en être créée une quelque part. Et c'était pour ça que ce gardien, se prétendant si «expérimenté», leur donnait ces détails aussi facilement : il savait pertinemment qu'ils s'étaient fait bernés en beauté malgré leur «infaillibilité» qui, si elle était révélée sans qu'ils n'aient pu redresser la barre par eux-mêmes avant, mettrait un coup terrible et brutal à leur réputation en additionnant avec l'histoire du gouverneur Matis. Ils avaient tout à perdre à laisser quelqu'un de l'extérieur venir les assister (sauf pour les médecins et pompiers, dont la présence était plus que normale), et préféraient encore tenter le diable dans une situation aussi dramatique que d'admettre leurs torts… Ce qui leur coûtera bien plus que s'ils s'étaient montrés coopératifs.


«Vous voyez : tout est sous contrôle.» Reprit-il d'une voix plus calme, et même aimable. «Je comprends vôtre désir de vouloir vous rendre utile, et je veux bien admettre que je me suis probablement emporté plus que je ne l'aurais dû. Cependant je vous assure qu'il n'ait pas nécessaire de s'inquiéter d'avantage pour ce qui pourrait arriver à l'intérieur, car la situation est entre de bonnes mains. Garder vôtre calme se révèlerait même être une bien meilleure option si vous tenez à ce que tout se déroule plus rapidement.»


Bien que pestant de frustration, la championne et le dresseur s'étant emportés comme elle à sa suite se retinrent de continuer sur cette voie ; sachant qu'avec un type aussi buté et orgueilleux, bien plus préoccupé par sa condition et sa réputation, ils n'avaient aucune chances de passer en le faisant plier par la force d'une argumentation sensée (l'option de force brute était, quand à elle, tout à fait inenvisageable.) Plus révulsant encore était qu'il reconnaissait qu'ils étaient affaiblis dans leurs propres rangs, que des civils étaient durement atteints, et qu'ils pouvaient servir d'otages pour des terroristes acculés parfaitement déterminés à mener des attaques suicidaires jusqu'au bout (à supposer qu'il ne sache pas l'objet exact de leur venu). Ils se doutaient parfaitement de la réponse qu'il leur sortirait en faisant la remarque : «nous ne négocions pas avec des terroristes» ; ce qui se traduirait grosso merdo par : «tant pis pour les malheureux innocents pris au piège avec un calibre collé sur la tempe, tant que ça n'entache pas la belle insigne toute brillante accrochée sur ma veste.» Jusqu'à ce que l'un des subordonnés de ce dernier ne vienne à leur encontre depuis le poste à l'intérieur du barrage.

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«Chef Grudge, les communications sont rétablies avec l'intérieur !» Déclara ce dernier d'un bref salut respectueux.

«Les communications étaient coupées avec l'ambassade ?!» S'exclama la championne de stupéfaction.


Le chef gardien Grudge grogna brièvement d'une mimique mécontente à l'encontre du garde imbécile qui avait révélé le point qu'il tâchait de préserver secret depuis le début. Mais c'était trop tard ; et le peu d'estime qu'il pensait encore pouvoir prétendre à obtenir s'évapora aux yeux des dresseurs. Son attitude condescendante, dédaigneuse, son arrogance et de son complexe de supériorité, à la limite ils pouvaient le comprendre et ne pas le remettre en cause en gardant leur avis pour soi. Mais là, ce qu'ils venaient d'apprendre était qu'il leur avait tout bonnement et simplement menti du début à la fin ; il leur avait fait perdre un temps précieux juste pour sa réputation et l'orgueil de son égo surdimensionné ?! Et ça se prétend garde de sécurité «expérimenté» qui n'a pas besoin de prendre de leçon en trahissant ses propres engagements ?! Il était si écœurant qu'il fallu faire appel à tout son sang-froid et self-control à la championne pour se retenir de le mettre en pièce à mains-nues et de donner une excellente nouvelle raison aux médecins pour leur présence ici ; bien que le gardien se contrefoutait à ce moment là royalement de ce qu'ils pouvaient penser. Son attention uniquement tournée vers le pauvre bidasse officiant sous ses ordres.


«Et bien alors, qu'en est-il ?» Demanda-t-il d'un ton sec.

«Je ne sais pas ; il y'a encore quelques petits parasites sur la ligne qui rendent les informations confuses.» Admit-il gêné.

«Et vous venez à moi en me disant que les communications sont rétablies ?» S'énerva-t-il outrageusement à son encontre sous le regard limite ulcéré des dresseurs.


Le pauvre garde, dont la main gauche était apposée sur son oreillette tandis que sa pokémontre à sa main droite continuait d'œuvrer à rétablir «vraiment» les communications en incorporant les nouvelles directives, fit mine de s'aplatir devant son supérieur pour son manque cruel de discernement.


«Veuillez m'excu-»

Il s'interrompit dans sa phrase sous le regard courroucé de son supérieur en appuyant d'avantage la main sur son oreillette, puis d'afficher un visage plus confiant.

«C'à y'est, les parasites sont éliminés : les communications sont rétablies cinq sur cinq !»

«Et quelles sont les nouvelles ?» Reposa-t-il la question toujours sur le ton de l'exaspération.

«Un inst…»


Comme si sa précédente expression n'avait jamais existée, tout l'excès de confiance retrouvé sembla quitter le garde lorsque son visage passa purement à celui d'une pétrification dans tous les sens du terme. Ce qui se confirma lorsqu'il reposa les yeux sur son supérieur, qui fut lui-même étonné par la tête apeurée qu'il affichait.


«Et bien quoi, crachez le morceau !» Le pressa-t-il plus furieux pour le faire sortir de son état.

«La… La gouvernante…» Commença-t-il d'une voix presque brisée. «La gouvernante Matis… Est décédée…»

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Comme si l'altercation avec le gardien n'avait jamais eut lieu, de même que l'agitation ambiante, jusqu'à la panique et le tumulte causé par le chaos générée par l'incendie, et même l'attaque à l'origine de tout le trouble : toutes les personnes à proximité à portée furent figées dans un état semblable à celui du garde ; jusqu'au chef gardien, le plus touché, qui perdit littéralement toutes ses couleurs.


«Qu… Quoi… ?» Reprit-il si abasourdi qu'il peinait à rester debout.

«La gouvernante Matis… Est décédée…» Confirma-t-il à nouveau d'un teint blafard. «Morte assassinée… Comme toute l'escouade de gardes chargée de sa protection… Pas de trace des tueurs…»


Il n'en fallut pas plus au gardien pour s'effondrer sur place, puis à fixer le sol d'un air ahuris. Totalement brisé. Avec la mort du gouverneur, maintenant sa fille… C'est finit pour lui et ses rêves de promotion ; et pire pour les îles lorsque la nouvelle se répandra aux informations. Mais alors que lui s'effondrait en abandonnant clairement la partie, le dresseur calme qui entamait la discussion depuis le tout début se rua littéralement sur le garde encore debout pour l'empoigné fermement par le col de ses deux mains -si fermement qu'il le soulevait au dessus du sol- à la surprise générale.


«Où ?» L'interrogea-t-il fort et clair. «Où sont-ils, dans quelle partie du complexe se trouvent les corps ?»

«D- dans le Dédale sous l'ambassade !» Répondit-il apeuré par l'homme qui le faisait léviter par la force de ses bras comme d'un rien.

«OU !»

«Labyrinthe, secteur Est, sortie Cirtion ; proche de l'accès de sortie des égouts du Canal Azuroc, au Sud-est de la ville !» Avoua-t-il limite terrifié à la perspective de finir taillé en pièce sur place.


Le «dresseur» le relâcha sans autre forme de procès, sans brutalité, mais cela n'empêcha pas le garde de tomber à la renverse par le contre-choc qu'il venait de subir –en plus de la nouvelle. Ce n'était plus dans les préoccupations de celui qui l'avait relâché en enchainant immédiatement avec sa montre.


«Zoan, Miles, et les champions, est-ce que vous me recevez ? Ici Léonid.» Pressait-il d'un ton urgent en passant le raccord de l'écouteur à l'oreille pour que la conversation reste sécurisée et relativement privée.

«On vous reçoit parfaitement.» Répondit posément la voix de la championne. «Que se passe-t-il ?»

«Nous sommes arrivés trop tard : la gouvernante Matis est décédée.» Déclara-t-il fatalement.

«Oh putain de merde…» Reprit le champion sur le même ton, sachant tout ce que cela présageait dans les jours à venir.

«D'après l'endroit où ça s'est passé, il semblerait que l'attaquant se serait servit du Dédale de labyrinthe sous l'ambassade relié aux égouts comme entrée, donc aussi certainement comme sortie. L'accès public des égouts le plus proche se trouve au Sud-est, relié au Canal Azuroc-»

«Lovis, c'est proche du quartier Méréo-site passant à proximité du passage reliant la route 214, à la limite de la banlieue forestière !» Interrompit la championne en suivant la conversation avec sa propre montre.

«Punaise j'veux bien, mais c'est pas un petit saucisson ton canal ! Par où on est sensé chercher ?» S'exclama-t-il limite frustré.

«Lovis, c'est Catherine.» Intervint la directrice de son éternel ton strict, malgré la tournure dramatique que prenait les évènements. «J'ai parlé avec le directeur du poste de Voilaroc et ai mis en commun nos informations sur l'ambassade : l'accès Cirtion correspondant à l'Est possède trois entrée sécurisée de niveau A reliées directement au canal Azuroc, espacée chacune à plus de cinquante mètres les unes des autres. Dirigez-vous vers celles-là. Leurs localisations exactes devrait vous être transférées sur vos montres.»


Comme en signe de confirmation, la fonction «carte repère» de leurs pokémontres s'afficha instantanément en mode zoom sur Voilaroc, avec plusieurs petits symboles clignotant de couleurs différentes à plusieurs endroits sur la carte.


«Et on commence par lequel ?» Reprit à nouveau Lovis. «Une distance de 150 mètres c'est pas rien à couvrir à deux !»

«A une.» La corrigea-t-il platement. Mais avant qu'il n'ait eu le temps de répliquer, elle enchaina avec la raison.
«Le manque de discernement et la lenteur des gardes n'à fait qu'aggraver l'incendie qui a finit par atteindre l'aile principale de l'ambassade, et les topdresseurs, malgré l'abaissement du dôme, se battent désespérément pour maintenir les flammes en respect le plus longtemps possible en l'absence des pompiers : ton équipe est absolument réclamée de toute urgence ou le compte de mort ne va pas s'arrêter avec la gouvernante.»

Il n'était pas nécessaire de connaitre de fond en comble le champion pour être certain qu'il devait grincer des dents à l'autre bout de la communication.

«Mr Torrent, j'ai toujours été plus rapide seule avec mon Nostenfer.» Intervint calmement à son tour l'autre championne de Kanto. «Même si 150 mètres fait une bonne distance, je devrais pouvoir réussir à m'en sortir seule.»

«Vous ne serez pas seule, outre les deux agents restant qui vous serviront d'ailiers.» Répliqua platement la directrice. «Une partie des effectifs de police posté au point de passage de la route 214 a été redirigé par le directeur vers les accès du canal à leurs extrémités. Vous n'avez plus qu'à pleinement vous concentrez vers le milieu, mais je vous répète le même avertissement : n'engagez la Faucheuse seule sous aucun prétexte.»

«Ne m'en veuillez pas de poser la question, mais si elle s'était déjà échappée ?»

«Compte tenu de la taille du labyrinthe, de la relative proximité avec l'accès à l'intérieur des égouts et ceux reliant ces derniers à l'extérieur, et en estimant la mort de la gouvernante s'étant déclarée à quelques minutes plus tôt, il y'a de grandes chances qu'elle se trouve encore dans ce dernier, ou au pire déjà dans les égouts.»

«Et si elle possède des pokémon munis de Téléport, des pokémons Sol ou creuseurs connaissant Tunnel ? Ou si tout simplement elle prend une autre sortie toujours à l'intérieur des égouts pour perdre d'éventuels poursuiveurs ?» Continuait-elle de questionner calmement.

«Toute activité sismique anormale aurait été détectée immédiatement par les détecteurs situés dans le labyrinthe et les égouts, tout comme la téléportation est rendue impossible à cause de brouilleurs intégrés dans le même système servant d'accès à leurs entrées. Et si elle choisissait de prendre un autre chemin cela ne signifierait qu'à rallonger encore d'avantage le temps passé sur les lieux du crime, donc à augmenter ses chances de laisser une trace ou un indice quelconque derrière elle, et ainsi à se faire repérer.» Exposa-t-elle sur le même ton. «Pour s'infiltrer dans un tel bâtiment elle doit avoir prévu un plan doté de nombreuses issues prenant en compte autant de variables et de possibilités de variation de situation que possible, mais doit surtout s'être imposé un timing extrêmement pointu et serré. Plus elle est rapide, et moins ses risques d'être exposée au danger augmentent. Et en se basant sur la manière et la maestria avec laquelle elle a brisée le petit roc de l'ambassade sans que même toute la sécurité n'ait vu venir le coup, elle doit penser à juste titre que son plan s'est parfaitement déroulé à la perfection sans que personne ne pense à regarder vers les égouts et là où elle peut s'échapper le plus rapidement possible sans être vue.»

«En un mot, elle ne soupçonne absolument pas nôtre venue et nous bénéficions de l'effet de surprise.» Déduit-elle spontanément. «Si tel est le cas, je pourrais en venir à bout sans qu'elle me remarque ; avec le bon timing et mes pokémons poison.»

«Je me répète : n'engagez sous aucun prétexte la Faucheuse seule. Et ne prenez aucune initiative, même si vous croyez avoir l'avantage ; surtout si vous croyez avoir l'avantage.» Insista-t-elle à nouveau fermement. «Nôtre but est de la capturer vivante. Et pour mettre toutes les chances de nôtre côté il faut mettre en commun nos efforts et suivre à la lettre un plan précis : Miles et Zaon sont redirigés vers l'autre accès à l'intérieur des égouts pour prévenir la possibilité de fuite par ces derniers en scellant le passage «à l'ancienne», pendant que vous et les effectifs de police faisant jonction vers le canal ferez de même avec les trois s'y trouvant. Ce faisant elle sera confinée dans cet espace clos sans possibilité de s'enfuir, ce qui la forcera à agir par la force en déduisant rapidement ce qu'il se passe. Vôtre tâche consistera à l'obliger à rester campée sur ses position avec vos pokémons poison en attendant l'arrivée des renforts. M'avez-vous bien comprise ?»

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Habituée à recevoir des directives et à les suivre à la lettre, la championne ne put s'empêcher d'être admirative devant le méthodisme et l'ingéniosité de son interlocutrice, en plus du calme dont elle faisait preuve à exposer la situation et le charisme de leader qu'elle dégageait naturellement. En regardant le plan selon son propre point de vue, en comparant la Faucheuse à ses propres compétences acquise par la maitrise des techniques de combat uniques et ancestrales de sa famille, elle reconnaissait que même elle aurait toutes les difficultés du monde à pouvoir s'échapper d'un tel piège si elle n'en connaissait pas précisément la nature avant ; c'était même d'ailleurs comme si elle avait prévu depuis leur venue ce stratagème tellement il était précis et bien ficelé. Et sachant que pour piéger un ninja il faut bien plus que des mots et de la volonté, le fait qu'elle se le reconnaisse à elle-même suffisait amplement à lui permettre de se faire une image de quelle genre de personne était à la tête de Moon Dawn.


«Bien compris.» Rendit-elle calmement, mais avec une dernière question. «Et si elle tente malgré tout de passer en force, n'ayant plus rien à perdre ? Les Rattatacs sont toujours plus dangereux quand ils sont acculés dans un coin.»

«Ce qui la forcera à se lancer à découvert à proximité d'intervention de dizaines de policiers, dont certains expérimentés appartenant aux brigades canines, sans compter vos pokémons poison. Dans ce cas vous êtes autorisée à l'engager, mais seulement à moyenne portée en usant d'autant d'attaque de distance que possible pour la forcer à rester campée sur ses positions. Je me répète encore une fois : ne prenez aucun risque en l'approchant au corps à corps.»

«Très bien ; je n'ai plus qu'à attendre vos policiers.» Rendit-elle posément, déjà sur place.

«Ha, c'est franchement rapide une chauve-souris mauve !» Releva Lovis d'un léger sarcasme ; étant encore bien derrière avec son Békipan.

«La fille du gouverneur Matis est morte des mains de la Faucheuse comme son père. Il est inutile de préciser les effets désastreux qu'aura cette annonce sur la population, mais l'occasion nous est donnée de mettre un point final à cette macabre comédie.» Reprit durement la directrice. «Ne perdez pas vos objectifs de vue. Restez concentrés et en alerte maximum. Ne baissez jamais vôtre garde, même si vous vous trouvez tous au même moment, au même endroit face à elle ou lui ; pensez une seule fois que vous êtes en sécurité et vous pouvez vous considérez comme mort. Et si vous avez de la famille ou des proches, je ne tiens absolument pas à devoir faire passer sous silence vôtre décès. Restez en vie : c'est un ordre.»

«A vos ordres.» Répondirent les agents d'une même voix, autant par volonté qu'automatisme.


Cette rigidité à en réinventer le sens du mot «strict» semblait être taillée dans un bois proche de celui du tempérament tête brulée du kamikaze, dans le sens où il était contagieux et se contractait rapidement à partir de quelques paroles seulement. Même ce dernier, pourtant intenable (littéralement, sur place il ne tenait pas) et connu pour posséder un caractère pratiquement indomptable, avait laissé de côté son tempérament de «Kamikaze» pour correspondre à celui du véritable dresseur d'élite qu'il incarnait vraiment. Des fois il y'a un temps pour s'amuser, des autres pour frimer, certaines pour être sérieux ; et des fois il y'en avait où il devait oublier ses propres intérêts pour penser aux autres. Ce soir était l'une de ces fois, comme celle avec la team Galaxie aux Colonnes Lance ; une fois où il ne peut pas même se permettre à envisager l'idée d'échec moins qu'une défait personnelle. Et ce soir, comme la dernière fois, il pouvait permettre d'y mettre un terme avant que le soleil ne se lève sur mauvais lendemain. Comme tous les autres : il allait tout faire en ce pouvoir pour que tel soit le cas.


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Sinnoh. Voilaroc. Canal 40-SE du réseau d'épuration publique. Sous-accès 22 du secteur Centre-ville catégorie privé A : système d'égout de l'Ambassade du Consortium de Voilaroc.

Mercredi 26 Mai, 21 heures 50 minutes.



Tout s'était déroulé exactement comme prévu, à la seconde près. La progression du plan suivait les prédictions du timing en respectant ses conditions à la virgule prêt. Et maintenant elle entamait la dernière partie de ce même plan minuté à la perfection, l'exfiltration, qui devait se révéler comme la partie la plus aisée de toutes. Comme dirait l'adage pour la qualifier : elle est venue, a vu, a vaincu, et sans être vue.

Tout avait été anticipé, rien laisser au hasard. L'orgueil et la fierté mal placée des gardes lui eurent facilitée indécemment la tâche ; tel le bûcheron pensant encore sauver sa maison en feu sans voir et reconnaitre que la forêt l'entourant est en flamme. En fait, l'intégralité même du plan reposait sur ça : la faiblesse du cœur humain. Le système informatique le plus sécurisé de tous les temps, la forteresse la plus imprenable, les portes au blindage le plus résistant et aux serrures les plus complexes ; toutes ces choses ne servent à rien si elles se trouvent être entre les mains d'incompétents rongés par le pire mal qui soit pour un gardien : la fierté. La fierté amène à se penser supérieur, au-delà des autres, à l'abri du danger en faisant croire que la réalité se plie à toutes ses exigences au moindre caprice. En un mot : se sentir invincible. Il est le sentiment d'illusion parmi les plus puissants de l'être humain. L'amour rend aveugle, la fierté aveugle ; ces deux sentiments amènent invariablement à rendre l'humain aveugle à la dureté de la réalité, même lorsqu'il la réalise devant ses yeux. Mais l'orgueil est encore pire que l'amour sur ce principe. C'est par orgueil que les dissensions s'installent réellement, que les guerres éclatent pour des raisons frivoles, et que les hommes n'apprennent jamais autrement que dans la douleur. Mais l'orgueil, comme tous les autres sentiments, fut crée sur un principe de besoin : celui de s'affirmer comme le leader, le commandant qui dirige, affirmer ses choix, ses idéaux, et bien évidemment à les considérer comme la seule voie à suivre…

Par orgueil c'est fondamentalement simple de dire «2+2 = 4, et rien d'autre : c'est la vérité absolue» sans même penser une seconde à se remettre en cause ; en n'imaginant tout simplement pas que l'erreur reste une possibilité. Alors que se passe-t-il lorsqu'une rencontre à lieu avec une personne pour qui la formule «2+2» donne comme résultat «5» au lieu de «4» ? C'est très simple, au lieu de chercher à comprendre comment il parvient à ce résultat différent du sien, il chercher à forcer l'autre à admettre qu'il a tort et lui raison ; alors qu'il peut s'agir d'une simple différence d'appréhension sur la signification d'un seul mot. Selon son modèle de calcul, tel qui lui a été enseigné, «5» signifie «4» dans l'attribution de sa valeur numérique, avec par exemple quatre «AAAA» tel qu'ainsi exposé que lui compte comme «5» dans cette suite numérique : 1, 2, 3, 5, 4. De la même manière que le premier compte lui : 1, 2, 3, 4, 5.

En un mot : l'orgueil est le véritable sentiment duquel né la corruption, plus que tous les autres ; même devant la peur. La peur reste le système de rejet par excellence auquel l'être humain se plie en fuyant le danger ou un combat inutile : il ne cherche pas l'affrontement. L'orgueil est totalement l'opposé, non seulement il cherche l'affrontement, mais en plus ne l'envisage jamais autrement que comme un acte répondant à une logique toute à fait normale basée sur un raisonnement tout aussi louable et dénué de tout défaut : les nazis tuent les juifs, c'est tout à fait normal ; les racistes et xénophobes s'en prennent aux personne ne possédant pas les attributs physique semblables aux leurs, c'est tout à fait normal. En résumé : détruire la réalité et la convertir à ses caprices illusoires est tout à fait normal. Qui pourrait prétendre à être au-delà de tout reproche ? Tout le monde évidemment. Tout simplement parce qu'il est impossible de se rendre compte où et comment quelque chose pourrait clocher avec soi-même sans un avis extérieur, et accepter de prendre en compte cet avis extérieur en reconnaissant quelque part la possibilité effective qu'il y'ait bien été commise une erreur… Ce qui est rendu d'autant plus ardu en la présence d'un autre sentiment qui empêche presque toujours l'être humain d'envisager cette possibilité : la honte ; l'ironie de l'histoire étant que la honte est un sentiment secondaire naissant de la peur (tout est toujours lié.) La honte est d'autant plus difficile à accepter, par définition, que la peur d'avoir honte est au moins aussi résiliente que le fait de ressentir la honte en soi. Car la honte amène à la sensation la plus proche pour se rappeler de l'aspect le plus impitoyable de l'univers : la honte d'avoir tort en sachant que cela ne déprécie la valeur de ses mots, la honte de l'échec en n'imaginant pas autre chose que de se faire considérer comme un moins que rien, la honte de reconnaitre au final ne pas avoir sa place dans le monde qu'occupe ses semblables, etc. Dans les faits : la honte d'être, et de constater en face qu'effectivement la vie ne vaut rien ; en commençant par la sienne.

Pour revenir aux gardes de l'ambassade, leur orgueil de croire la place imprenable les a poussé à la négligence en relâchant inconsciemment leur attention ; ce qui arrive invariablement en faisant aveuglément confiance à la technologie comme la solution miracle automatique. En se disant «je suis un garde du corps bien équipé et entrainé, et je me trouve dans un bâtiment surveillé par autant de types tout aussi compétents que moi avec le soutien des meilleures technologies actuelles : je ne crains rien.» Sachant qu'il n'y a aucune raison pour remettre en cause cette idée : pourquoi devraient-ils penser l'inverse ? Aussi, lorsque le drame se produit, pourraient-ils admettre que l'erreur fut de leur dû alors qu'ils ne voient même pas en quoi cela pourrait être le cas ? Et avant de chercher à comprendre, serait-ce acceptable pour eux de se faire par défaut accuser de ce drame sans justement prouver que tel fut le cas ? Là encore, l'évidence est non. Mais voilà où vient le «véritable drame» de l'orgueil, le moment où il déclenche et révèle sa véritable nature corrompue : en disant par défaut «non, ce n'est pas de nôtre faute» parce qu'ils refusent de se faire accuser pour rien, c'est ironiquement leurs paroles qu'ils engagent sur leur innocence de la même manière. Aussi lorsqu'il est effectivement révélé que le drame est bel et bien de leur faute, c'est leur parole selon leur propre affirmation qui ne vaut strictement plus rien. Et dans la société humaine, basée sur le principe de la hiérarchie de statut social, une parole qui ne vaut plus rien est invariablement égale à l'échelon le plus bas de la société. Ce qui n'est clairement pas un problème pour un SDF, n'ayant plus grand-chose à perdre, mais pour un patron d'entreprise ou pour un Empereur… La chute est synonyme de mort. Car une parole qui perd toute sa valeur correspond simplement à une volonté qui n'a plus lieu d'être et de se transmettre : la fin de la survie.

Voilà comment peut naitre et prospérer un empire, par l'ambition et le courage né par la fierté, ou pourrir dans la décrépitude de la corruption, rongé par le ver inique de l'orgueil.

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Les voitures explosant commençant un départ d'incendie, alimentant lentement un brasier qui accaparerait rapidement toute leur attention ; la confusion des baies qui plonge le tiers de leurs forces dans la confusion, en les forçant à se battre entre eux lorsque retenti le cataclysme de l'explosion ; le système anti-incendie ne marchant pas qui rend la situation d'autant plus dangereuse qu'ils comprennent instantanément qu'ils se sont fait berner ; de même que leurs communications quand ils se rendent finalement compte qu'elles sont totalement compromise… Quand les gardes durent faire face à tous ces problèmes à la fois en s'étant déclaré d'un coup, ils se rendirent compte immédiatement que c'était impossible ; mais surtout ils se rendirent compte qu'ils s'étaient fait impitoyablement écrasés sans même n'avoir pensé à lever le petit doigt. Comment pourrait-il justifier une telle débâcle du haut du piédestal de leur forteresse imprenable réduite en cendres fumantes, avec les corps brisés et inconscients de leurs propres collègues et personnel couverts de bleues et d'ecchymoses qu'ils leur ont eux-mêmes faites, alors qu'ils étaient sensés être justement là pour les protéger ? C'était juste impensable ; mieux valait encore mourir que de reconnaitre et vivre une telle humiliation.

Mais alors à ce moment qu'ils devaient apprendre la mort de la personne qu'ils devaient protéger par-dessus tout, décédée des suites accumulées de leurs erreurs et leur orgueil, ils étaient surement vraiment en train de réfléchir à cette possibilité ; et s'ils apprenaient que tout n'avait été le fait que d'une seule et unique personne, cela achèverait sans doute de leur donner l'impulsion nécessaire pour passer à l'acte.

En effet, du point de vue du citoyen extérieur, qui était le plus coupable à blâmer : l'assassin ayant pénétré «tranquillement» dans l'ambassade et commit son forfait en se servant de la propre fierté mal placée des gardes contre eux, ou au contraire les gardes arrogants et aveugles qui n'ont rien tentés pour arrêter l'assassin en ravalant de côté leur fierté en n'acceptant de reconnaitre le fait qu'ils avaient merdés ? Probablement autant l'un que l'autre. A une différence prêt : l'assassin assume ses actes. Pas les gardes.

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Au-delà de l'utilisation de leur propre fierté redirigée contre eux-mêmes, les stratégies insidieuses de manipulations mentales avaient aussi fait leurs preuves. Le rôle joué de Nélise Sisca en avait été la principale représentation ; Se faire passer pour une alliée et faire accepter cette vision des choses aux meilleurs gardes de la gouvernante avait été d'une facilité déconcertante pour qui n'y serait pas préparé. Infecter et prendre lentement mais inexorablement le contrôle en surface des communications avec certaines escouades sans attirer l'attention. Puis enregistrer à l'avance le texte à réciter devant l'escorte de garde en prenant en compte toutes les réponses envisageables qu'ils pouvaient prendre (étape rendue encore plus aisée de part leur comportement mécanique). Enfin apparaitre fatiguée et «vulnérable» devant l'escorte totalement alerte, poser les premières étapes visant à les rassurer en montrant sa fiche d'identification «réputée infalsifiable», puis achever de gagner leur confiance par le petit numéro de son petit robot en révélant que les communications étaient vraiment compromises tout en ajoutant le bruit de fond d'une arrivée ennemie en masse pour donner la pression. Ce faisant, à cause de la fausse appréhension de surnombre laissée par sa petite araignée, la seule réaction logique venant à l'esprit de gardes «dévoués jusqu'au bout» était de poster tous les hommes valides à l'encontre des forces ennemies pour permettre à la gouvernante de s'échapper en sécurité. Le seul problème était qu'il fallait qu'il reste un garde avec elle jusqu'au bout pour la diriger et assurer sa protection le plus longtemps possible.

Quelle chance qu'ils soient tombés par hasard sur la garde qui leur avait révélée l'ampleur du danger qui les menaçait tous ; et qui avait fait preuve de son «intégrité» en s'inquiétant sur le devenir desdits gardes en cherchant à vouloir rester avec eux jusqu'au bout, à son tour… Se faisant, la laissant passer totalement derrière eux… Dans leurs dos…

La différence entre un assassin et un tueur ne réside qu'en un seul point : s'assurer du tuer sans que la victime n'ait vu la mort. Et pour cela la règle d'or restait inchangée : toujours frapper son ennemi par surprise dans son angle mort, de la manière dont il s'y attend le moins. Comment une demi-dizaine de garde d'élite auraient-ils pu soupçonner la personne en qui ils venaient justement de placer toute leur confiance d'être l'assassine qui mettrait fin à leur vie par derrière, quand ils étaient en même temps préparés à recevoir un assaut de face justement par là d'où elle venait ? Les deux premiers plus proches d'elle au moment où elle révélait son jeu n'avaient même pas senti le coup, et les deux suivant ont dû juste sentir le recul quand les dagues pénétrèrent leurs crânes par le front ; il n'y avait que le leader qui pu voir et faire face à la vérité, mais juste de quelques secondes de plus.

Ce faisant il ne restait plus que la gouvernante, la principale actrice autour de laquelle se jouait toute la scène. Mais encore fallait-il la mettre en conditions adaptées pour qu'elle devienne le pantin docile dont elle avait besoin pour répondre à ses questions et à ses attentes. Premièrement, la peur étant déjà présente : il fallait lui mettre d'avantage la pression en la forçant à révéler les raisons «personnelles» derrière les conditions de son contrat, pour la forcer à «s'impliquer» volontairement et reconnaitre «ses crimes» en lui donnant le faux espoir qu'elle puisse adhérer à ses principes pour abaisser d'avantage sa garde. Deuxièmement : elle lui révélait son identité de la manière la plus brutale et cruelle possible, à laquelle la peur poussée à son paroxysme l'empêchait de s'évanouir en regardant la mort venir en face. Enfin troisièmement, il fallait la désorienter totalement : quoi de mieux qu'un pseudo débat philosophique mettant sa raison à dure épreuve ; déjà durement éprouvée par la perte de sang et le fait de savoir consciemment avoir rendez-vous en face avec la mort ?

Certes il est vrai que tout ne s'était pas passé comme prévu, mais elle prévoyait justement ce qui ne devait pas être prévu ; car après tout rien ne se passe toujours totalement tel que prévu. Selon le plan initial, il suffisait de mettre la gouvernante dans un tel état avant de mourir qu'elle ne cherche pas à penser au regret un seul instant ; celui pouvant mener à la résurrection en spectre (quoi de mieux que de se mettre en face de la personne dont elle souhaitait la mort comme étant celle qui allait la lui donner dans l'ironie absolue ?) L'imprévu s'était juste révélé encore plus avantageux pour elle en la présence de son fiancé, et le choix final qu'elle lui laissa juste avant de mourir était parfait pour mener à bien son plan ; encore plus efficacement que celui établit à la base. Elle n'avait déjà lors plus qu'à repartir en laissant continuer le cours des choses de son côté.

Les flammes brulant toujours au sommet attireraient encore invariablement toute l'attention de la ville, et même de l'île entière rivée sur leurs écrans matériels ou holographique, pendant qu'elle pouvait s'éclipser furtivement sans que personne ne l'ai vue. Les gardes seront les prochains dans le collimateur des médias et de la foule lorsque la mort de la gouvernante sera rendue publique et mise sur leur dos (à juste titre : ils étaient vraiment pitoyables), tandis que des responsables seront tout trouvés par les opposants de l'ex gouvernante dans le Consortium en la présence des Team de Rising Sun. Personne n'irait faire le lien entre Tatiana Matis et une tueuse solitaire, de part l'exploit impensable que cela représenterait de briser le roc de l'ambassade pour une seule personne –sans pokémon. Enfin, aucune trace quelconque de son passage ne serait trouvée par les investigations qui seraient menées par la suite : les «œufs parasites» de son araignée étaient munis d'une petite capsule d'acide les dissolvant intégralement une fois le signal lancé sur la bonne fréquence, les billes explosives ne laissaient aucune autre trace que là où elles s'accrochaient sur la carrosserie (cette même carrosserie qui devait avoir fondue sous l'effet de la chaleur et de l'explosion), et enfin sa composition de folie ne laissait aucune trace derrière elle dans l'air, passé un certain délai ou subissant un fort changement d'atmosphère (comme un système anti-incendie s'activant pour mouiller les lieux et effacer toute trace de molécule olfactive ; mais n'influençant en rien sur celles déjà absorbées par les organismes des employés et des gardes…)

La seule trace que relèverait ces investigations serait la certitude qu'un hack de haut niveau avait bien été mené contre leurs système, et avait brisé et outrepassé tous leurs pare-feu et contre mesure de piratage sans même qu'ils ne se soient douté un instant d'être la cible d'une attaque. Mais le pire serait que la faille qu'ils trouveraient et détermineraient comme celle utilisée par «les» pirates pour passer en toute impunité viendrait tout simplement d'un accès accrédité de la sécurité en question. La révélation serait alors horrible : les terroristes seraient entrées tranquillement tout simplement parce que la sécurité les avait laissée passer… Voilà qui devrait régaler les médias pendant plusieurs semaines, facilement, et au contraire donner le plus mauvais coup de pub à toutes les entreprises de sécurités privées existantes…

Ce qui ferait encore nettement moins d'ennemis pouvant potentiellement lui barrer la route lors de futurs contrats.

Il n'y avait rien à redire. C'était la perfection même. Mais même la perfection possède ses propres limites, celles du choix et du point de vue, car la perfection n'existe pas ; pas plus que l'imperfection. Il n'existe dans cet univers que des faits sonnants et trébuchants, et ceux qui savent les utiliser en les regardant en face. Rien de plus, rien de moins.

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Soudain, alors qu'elle suivait son araignée qui la précédait dans sa marche vers la sortie de deux canaux plus loin (une fois sa tenue renfilée à nouveau et la batterie de son petit robot rechargée avec son pokématos), cette dernière émit un signal d'alerte qu'elle ressentit sous la forme d'un petit choc électrique dans la partie métallique de son pokématos touchant sa peau (pas de vibration ou de son pour avertir un ennemi à l'ouïe potentiellement fine pour entendre l'un comme l'autre). L'alerte consistait au fait que son araignée relevait les signatures thermiques de nombreuses personne attendant de l'autre côté de l'accès par lequel elle était entrée ; un visuel direct indiquant à leurs uniformes qu'il s'agissait de policier…

La réaction fut immédiate et l'ordre à son petit appareil absolu : reconnaissance et repérage des lieux rapidement et en toute discrétion, pendant qu'elle-même se mettait encore plus à couvert dans les ombres en n'esquissant plus le moindre geste. Profitant par la même du délai nécessaire à la collecte de donnée pour réfléchir aux raisons de ce revirement brutal de situation.

=Constat des faits : présence de policier confirmée. Nombre trop important pour une simple patrouille hasardeuse. Probabilité de présence de membres de la branche canine élevée. Présence devant l'un des trois accès du canal Azuroc menant à l'accès Cirtion de l'ambassade : très fortes probabilités de chance qu'il en soit de même pour les deux autres accès, et même celui menant aux restes de égouts. Raison envisageable derrière la mobilisation et la mise en place tactique d'aussi nombreux policiers dans une stratégie de piège aussi rapide et élaborée, une seule correspondant trouvée en mémoire en fonction des données et de la conclusion élaborée à partir de ces mêmes informations : l'organisation enquêtant sur l'affaire du Leuphorie Shiny.

Seconde étape analystique : comment ou pourquoi ici, aussi parfaitement élaboré pour la prendre en défaut, alors qu'aucune erreur n'avait été commise de ma part ? Réponses probables après élimination par procédure : Tatiana Matis, fille de Bertrand Matis : Gouverneur du Consortium suspecté officiellement d'avoir été tué par une organisation paramilitaire. Lien du gouverneur Matis avec l'affaire leuphorie Shiny évident comme celui ayant proposé l'expédition. Sujet «Faucheuse» confirmé responsable de cet incident. Lien avec le gouverneur pour un regard attentif évident. Meurtre du gouverneur = forte probabilité de voir sa fille subir un sort semblable. Eventualité d'affronter l'organisation secrète d'enquête élevée mais anticipée, car possibilité d'accès par les égouts et le labyrinthe beaucoup trop nombreuses pour pouvoir toutes être surveillées en même temps sans que je ne me sois assurée moi-même avant qu'elles ne l'étaient pas. De plus aucune alerte n'avait été donnée après avoir pénétrer dans les lieux par ces accès ; voir autant de policiers présents ici à ce moment relevait de la divination pure et simple en s'arrêtant à ces critères. La divination n'existant pas et étant bien plus limité qu'il ne fallait le croire avec les pokémons Psy, en relevant de tellement de variables que prédire un futur exact à plus de 80% relèverait déjà d'un exploit (pour ces pokémons). Il ne restait que de la déduction logique basée sur les faits. La seule explication logique me venant à l'esprit en se basant sur les faits faisait simplement état que les membres de cette même organisation étaient déjà à Voilaroc depuis le début de l'opération, probablement même avant, et qu'ils attendaient patiemment ma venue…

Mais comment avoir su voir au travers de mon jeu et deviner par où précisément j'étais entrée ? Le comment savoir où était simple : les communications furent rétablies comme prévues par la sécurité des cellules extérieures, mais bien plus tôt que je ne l'avais envisagée ; ce faisant la dernière position connue de la gouvernante se dirigeant vers la sortie Cirtion était transmise à qui pouvait l'entendre. Seulement, étant encore reliée en surface à leurs communications à ce moment là, aucune proposition d'implication des services de police n'avait été abordée, ni même envisagée conformément tel que je l'avais prévu. Les policiers devaient même être seulement déployés aux alentours de l'ambassade ; aussi comme prévu…

Réponse trouvée, probabilité d'affirmation théorique surpassant la barre des 90%. L'organisation n'attendait pas depuis des jours, ni même n'avait prévu son coup à l'avance : ils venaient tout juste d'arriver. Un tel nombre de policier déjà présents, compte tenu de la position de leur poste de police par rapport à ces accès et l'ambassade, en plus d'avoir de fortes présomptions sur la présence de membre de la brigade canine ne peuvent impliquer qu'une chose : une mise en place d'un barrage de ville de type blocus terrestre, dont une partie dédiée à la surveillance de tous les accès de ville menant aux routes principales -partie de ces mêmes effectifs bloquant ma sortie. Comble de la «malchance», n'ayant eu vent d'aucune pareil déploiement dans les informations, rumeurs dans la population de la ville ou même par ses observations, la seule possibilité pour qu'un tel système soit mis en place sans que je n'en sois avertit ne trouvait qu'une explication logique : il avait été déployé au même moment où je pénétrais dans l'ambassade. Ensuite, tous se sont dirigés vers l'ambassade dans l'espoir d'arriver à temps, mais furent fatalement ralentis par les inutiles procédures des barrages menées par les gardes orgueilleux ; ces mêmes gardes qui leur ont évidemment révélés la mort de la gouvernante… Mon timing méticuleux s'était fait prendre à revers par celui de la variable inconnue.=

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Comme pour confirmer ses déductions, sa petite araignée en reconnaissance juste à l'entrée de la grille du milieu (étant la plus à même de lui fournir une vision globale de la scène) lui fit un rapport détaillé de la situation : l'accès en amont du canal était tout aussi bourré de flics que celui en aval où elle se situait actuellement, mais pas celui du milieu d'où émettait son araignée. Une telle «faille» relevait de l'évidence la plus élémentaire en stratégie pour elle : c'était une tenaille ; il devait y avoir forcément quelqu'un de prêt à la cueillir au vol à partir du moment où elle pointerait le bout de son nez cagoulé dehors.

Elle transmit une nouvelle directive à son araignée pour vérifier ses suspicions en la forçant à passer au peigne fin toutes les signatures thermiques des environs –jusqu'à la limite maximale de sa portée- et de lui rapporter la présence de toutes celles se trouvant à un endroit clairement inhabituel par rapport à celles des habitants se trouvant dans leurs maisons. Et elle le trouva, du premier coup...ou plutôt la trouva : sur le toit du bâtiment situé sur l'autre rive parfaitement opposée à l'accès sécurisé des égouts du milieu, cachée accroupie derrière le rebord bétonné à l'abri du risque d'être découvert par vision normale ; plus la signature caractéristique d'un pokémon visiblement «aplatit» à ses côtés, tout aussi caché que sa maitresse… Vu qu'elle occupait le milieu et qu'elle se trouvait sur un toit, la seule conclusion lui parvenant était qu'il devait s'agir d'un type Vol. L'image thermique le montrait dotée d'ailes larges, mais son corps était bien plus petit en comparaison. En procédant par élimination et en regardant la forme avec la meilleure définition possible, très peu de pokémons lui arrivaient en tête pour déterminer la nature de celui-ci : Scorvol, Papilord, Papilusion, Charmillon, Maskadra, Yanmega et Nostenfer. Mais les insectes étaient tous trop petits en comparaison, la silhouette était trop fine pour être celle d'un Scorvol, et le corps était au contraire bien plus petit et rond que celui tout en longueur d'un Yanmega…

Le déclic se fit immédiatement au Nostenfer, dont la fiche technique défila dans sa tête plus clairement que celle d'un pokédex : Nostenfer. Pokémon Vol/Poison. Taille moyenne estimée : 1m 80. Poids moyen estimé : 75Kg. Famille Chovsouris. Pokémon chasseur nocturne au vol parfaitement silencieux, dont la double paire d'aile lui permet d'atteindre des vitesses de pointe le place dans le top élite de la catégorie des pokémons les plus rapides au monde, sans perdre avantage de sa discrétion même lorsqu'il utilise toutes ses ailes à fond en même temps. Pokémon pratiquement introuvable à l'état sauvage et faisant aussi partie des pokémons aux conditions d'évolutions les plus atypiques du monde. De part ce constat, peu nombreux étaient les dresseurs à en posséder un ; et n'en voyait encore moins qui puissent les utiliser de la sorte pour tendre une embuscade à une position aussi surélevée et lointaine ; plus rajouter l'information concernant les liens de l'organisation avec la Ligue, confirmée involontairement par la championne de Vestigion depuis le raid mené contre Rising Sun dans les marais à leur participation dans cette opération ; plus rajouter la discrétion dont faisait preuve la personne présente à côté du Nostenfer… En envisageant le pire : Koga du conseil 4 de Kanto. Ou en moindre mesure, mais bien plus réaliste vu les tournois actuels se déroulant là-bas, sa fille : Jeannine, la championne de Parmanie.

Le pourcentage de chance était extrêmement faible, mais pas inexistant ; et l'afflux continuel de coïncidence désavantageuse pour elle ne lui permettait pas de négliger ces possibilités –surtout pas face à ces champions là en particulier. Etant les seuls experts reconnus du type poison des Ligues des îles les plus proches de Sinnoh, leurs équipes étaient aussi celles dont les pokémons se trouvaient être les plus difficiles à gérer avec l'instabilité et le danger omniprésent qu'ils représentaient de part leur toxicité. Descendants d'un clan de ninja ancestral, leurs techniques faisaient d'eux ses plus redoutables adversaires en étant ceux possédant les méthodes de combat et doctrine de guerre les plus proches des siennes : poison, armes cachées, art martial secret développé pour l'assassina, l'infiltration, l'approche discrète et l'embuscade de l'ennemi sans même qu'il soupçonne leur présence avant le moment fatidique… Mais, sans compter les policiers, elle semblait être seule pour l'instant aux yeux de sa petite araignée ; ce qui se confirmait dans le fait que, sans son araignée, elle n'aurait pas été en mesure de la détecter par les moyens conventionnels. Le fait que son araignée l'ait repérée à si longue distance tend à prouver qu'elle agit en solitaire, pour le moment… Mais plus elle attendait, plus elle était sûre que d'avantage de renfort, bien plus puissants que les flics, convergeaient rapidement vers sa position.

Il lui fallait fuir, maintenant.

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A sa demande de rappel, sa petite araignée quitta son poste avancé de reconnaissance pour revenir prestement vers elle et se positionner docilement dans sa main. Aussitôt, dès son arrivée, sa sombre maitresse vida le reste du contenu des billes à l'apparence métallique dans son abdomen et à coller le surplus sur sa petite coque (laissant juste son œil et ses pattes vierges pour lui permettre de continuer à se mouvoir parfaitement) Puis sortit de l'arsenal de sa panoplie deux petits cylindres à peine aussi gros que ses doigts (l'une sombre à la forme plus qu'originale d'un trognon de pomme dont les pôles auraient été épargnés lors du grignotage) qu'elle rajouta sur le dos de son petit robot en se servant de la fonction adhésive des billes recouvrant sa carapace pour qu'elles tiennent en place. Enfin elle termina en activant les derniers protocoles holographiques, enregistrés dans sa mémoire électronique et projetés par son «œil», pour lui donner ses nouvelles et dernières instructions…

Une fois celles-ci chargées et comprises par son fidèle servant mécanique, le petit robot à l'apparence arachnide entreprit son ultime voyage dans le sens opposé pour se rendre au troisième accès en amont du canal. Pendant que sa maitresse se préparait à en faire de même avec l'accès en aval, trois grenades différentes de son arsenal en main prêtent à être utilisée. N'attendant plus que le petit robot n'atteigne son objectif. Tout devait être orchestré et déclenché à la seconde prête. Elle n'avait qu'une seule chance…


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Sinnoh. Voilaroc. Quartier Sud-Est Méréo-Site. Accès de sécurité A 24 du canal Azuroc.

Mercredi 26 Mai, 21 heures 54 minutes.


Plus d'une vingtaine d'agent, divisés en deux équipes, surveillaient l'accès de part et d'autre de la rive du canal ; prêts à prendre en tenaille n'importe qui sortant par là à partir du moment où il pointerait son nez dehors. Le fait que le directeur les ait mobilisé ici en leur faisant part de la forte probabilité que les terroristes s'en étant pris à l'ambassade se soient servis des égouts pour commettre leur forfait et qu'ils se trouvaient actuellement aux endroits suspectés parmi lesquels ils devaient en sortir, avait mit tous leurs sens en alerte. Si ces criminels pensaient pouvoir s'en tirer sans que personne ne les remarque et sans problème, ils allaient avoir une bien mauvaise surprise. Bien qu'ils ne voient pas, pour la plupart, comment cela pouvait être possible ; comment des terroristes pouvaient avoir passés ces accès ultra-sécurisés sans que personne les remarque, et continuer jusqu'à l'ambassade par les égouts avec la même facilité. C'était irréaliste et très difficile à concevoir. Mais ils étaient là, bien déterminés à accomplir leur devoir.

Cela allait s'avéré payant. Car bien qu'ils furent démobilisés à la va-vite ils s'étaient rapidement et parfaitement mis en formation, tout comme leurs pokémons canins répartis dans les deux équipes ; et ces derniers émirent de très faibles jappements pour indiquer qu'ils relevaient le son d'une personne approchant par l'entrée surveillée.

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«Ici unité 2, signalons contact en approche.» Emit l'un des membres de la brigade canine à sa pokémontre.

«Bien reçu unité 2.» Répondit le personnel de com du poste policier. «Unité 1, préparez-vous à rejoindre unité 2. Championne, restez en stand-by mais soyez prête à agir.»

«Bien reçu.» Répondit calmement cette dernière depuis sa cachette sur le toit.


Au même moment où les instructions finissaient d'être relayées que le son de bruit de pas se rapprochant perçut par les pokémons parvint finalement à leurs oreilles, et qu'ils se raffermissaient sur leurs positions en préparation du l'interpellation imminente. Puis, tranquillement, une silhouette humaine encagoulée à l'apparence sombre sortit du passage sous surveillance pour apparaitre devant eux naturellement ; sans qu'aucun d'entre eux, à leur étonnement, n'ait entendu l'ouverture de barreau de l'accès s'ouvrir. Marchant simplement comme si de rien n'était… Jusqu'à ce qu'ils sortent tous de leur couvert pour encercler la silhouette plus que suspicieuse ; les armes tirées de leurs étuis pointées sur elle, et les pokémons canins à l'avant montrant tout croc dehors.


«Police ! Ne faites plus un geste ! Mettez-vous à genoux et les mains en l'air, bien en évidence !»

La sombre silhouette s'arrêta d'elle-même en obéissant à la première sommation. Mais pas à celles qui suivirent en restant simplement où elle était. Totalement immobile.

«Je répète : à genoux et les mains en l'air !» Lui Re-fut-il sommé alors qu'ils raffermissaient leurs prises sur leurs révolvers.


La silhouette ne répondit pas d'avantage, même devant la menace représentée par les armes et les molosses à l'attention inflexible rivée sur elle. Puis, alors qu'ils commençaient à croire qu'il s'agissait d'une statue pour être aussi inflexible, la silhouette tourna lentement sa tête en direction du policier la sommant de se rendre… Puis de mimer le geste de sortir quelque chose de sa veste à la vitesse de l'éclair, que les policiers n'eurent le temps d'en saisir la nature et le danger qu'il représentait, lorsqu'aussitôt qu'elle fut sortit «haute» devant leurs yeux la flashbang détonna dans une explosion de son et lumière aveuglante.

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A l'entente de la brève mais forte détonation, dont l'écho amoindrit parvint sans mal et sans contre-effet jusqu'à leur position, le Nostenfer étalé de tout son long pour rester discret se redressa pour décoller dans l'instant comme sa dresseuse le lui avait ordonné ; qui en avait profitée pour le monter dans le mouvement avec un exemple de synchronisation parfait. Et se ruaient à l'encontre du lieu d'origine à une vitesse aussi foudroyante qu'elle en était effroyablement silencieuse.

Comme si cela n'avait duré que l'espace un battement d'aile le pokémon chovsouris les avait déjà mené à destination, pour leur faire voir le spectacle malheureux de la vingtaine de policier et leurs pokémons complètement déboussolés par les effets incapacitants de ce qu'elle savait être une flashbang en reconnaissant le bruit, même d'aussi loin. Mais surtout de voir que, grâce à la formidable vélocité de son pokémon, l'ennemi responsable de tous les maux (étant le seul présent encore debout, en plus de sa dégaine de suspect par excellence) n'en était à peine qu'à commencer à vouloir profiter de l'occasion ainsi offerte pour s'enfuir… Elle n'allait pas lui en donner l'occasion.

La directrice avait été très claire concernant les conditions à respecter pour engager cette «Faucheuse» si elle se montrait désespérément agressive : maintenir une forme de combat à moyenne distance, pour la forcer à rester sur ses positions autant qu'elle-même rester en dehors de sa portée. Mais elle n'avait pas été formée pour cela, même si elle avait confiance en la précision de son fidèle ailier nocturne. Elle était une descendante du clan Dokulis : famille ancestrale de ninjas versée dans l'art de la guerre des ombres depuis des dizaines de générations. Frapper l'ennemi par surprise dans son angle mort depuis les recoins les plus sombres et inattendus qui soient, sans peur ou hésitation, et l'abattre à terre avant même que le combat soit engagé ou ne voit son agresseur. Depuis sa plus tendre enfance elle avait été élevée et éduquée sans relâche chaque jour selon ces principes jusqu'à ce qu'elle sache les reproduire et les appliquer à la perfection naturelle dans sa vie de tous les jours, et avait été versée dans les connaissances secrètes de sa famille sur les poisons autant qu'à y être exposée continuellement jusqu'à ce que son corps acquiert la faculté à pouvoir faire face à strictement n'importe lequel d'entre eux et les connaitre par cœur. C'était ancré profondément dans sa nature à ne pas laisser passer une telle chance de porter le coup fatal : l'angle d'approche était parfait, l'avantage de la surprise complet, et se savait –elle et son pokémon- infailliblement précis. Même les plus puissants prédateurs voient leur force rendues sans la moindre utilité s'ils se font vaincre avant même d'avoir vu venir le premier coup ; y comprit pour un adversaire tel que cette «Faucheuse».

La surprise est la clé de la victoire, et elle était dans son camp… Du moins le croyait-elle. Car lorsqu'ils s'étaient suffisamment rapprochés d'elle, prêts à lui administrer le K.O en un coup, la silhouette retourna presque instantanément le regard droit dans leur direction ; à leur plus grande stupéfaction. Avant qu'elle n'aille volontairement à leur encontre d'un saut qui paracheva de lui faire comprendre qu'il ne s'agissait clairement pas d'un humain, et de sentir un pic foudroyant d'adrénaline lui parcourir l'échine lorsque la silhouette holographique se dématérialisa pour révéler sa vraie nature : celle d'une sorte de petit robot arachnide bouffi sur lequel elle reconnue désagréablement la forme d'une grenade «ombre» attachée sur son dos. Et que son pokémon ne change brutalement au dernier moment de trajectoire, juste avant que toute sa carapace ne se mette à briller d'un éclat aussi intense qu'alarmant.

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Le réflexe du Nostenfer leur fut salutaire. L'ampleur de l'explosion provoquée par le gadget kamikaze aurait dû les réduire en cendre s'il n'avait pas piqué instinctivement en plein dans le canal pour que l'eau les protège en partie du choc ; en partie seulement. Car dans l'abri relatif du courant qui les poussait lentement en arrière, s'étant rapidement remise du choc initial grâce à la dextérité de la chauve-souris, la championne vit que son pokémon était inconscient à ne plus esquisser un geste sous l'eau et comprit qu'il l'avait protégée de son corps du choc de l'explosion et celui de l'entrée brutale dans l'eau. Elle chercha à le rappeler dans sa pokéball sous l'eau mais, comme elle le craignait, celle-ci ne répondit pas des suites des effets de la grenade ombre qui enrayait la procédure de dématérialisation, et prit sur elle de le ramener sur la terre ferme à la nage en le prenant par les pattes postérieures.

Remontée à la surface, elle prit une grande bouffée d'air en se forçant à hisser d'un coup les soixante-dix kilos de son pokémon sur la rive bétonnée, puis de se remonter elle-même à la suite en mettant la main sur l'hyper potion de son équipement pour s'occuper de ses blessures. Mais savait qu'il ne pouvait rien faire de plus pour l'aider. Bien qu'en vie : il était hors course. Comme toute son équipe ; piégée dans leurs propres balls.

Elle tourna la tête pour déterminer l'état de ses alliés policiers (n'ayant que très peu dévier dans le courant en n'étant restés dedans que quelques instants) et vit que ces derniers, bien que rendus encore plus sonnés et confus par la seconde terrible détonation, étaient tous en vie mais blessés. C'était plus qu'il n'en fallait pour passer le message d'alerte et de demande de renfort via sa propre montre au central et à ses autres alliés, mais c'est à ce moment qu'elle se rendit compte que sa propre montre n'avait put encaisser le double-choc à la suite de l'explosion et du plongeon, et était elle aussi H.S que son Nostenfer. Elle se précipita alors automatiquement vers le policier à terre le plus proche dans l'idée de se servir de sa montre incorporée dans son uniforme. Mais tandis qu'elle s'apprêtait à relayer l'appel d'alerte, elle capta celui désespéré de l'équipe 1 qui se trouvait toujours en aval.


«Alerte, ici équipe1 ! Subissons- HAAAAAA-»


La communication fut brutalement coupée en s'arrêtant sur ce cri. Elle comprit que leur adversaire, qui s'était servit de son gadget comme d'un macabre et terrible leurre, avait profité de la diversion pour briser le piège tendu et maintenu par l'équipe 1 : ils s'étaient fait totalement anticipés par lui, elle comprise, et regretta immédiatement de ne pas avoir aussi sérieusement pris en compte l'avertissement fournit par la directrice. Mais cela ne retirait rien à la gravité de la situation, maintenant que l'équipe 1 devait être tout aussi hors-jeu que l'équipe 2 : l'ennemi était libre de ses mouvements et allait leur échapper. Personne, malgré l'appel à l'aide, n'allait pouvoir répondre à leur demande de renfort dans les temps, et pour rien de toute manière s'ils perdaient sa trace.

En partant de ce simple constat, elle arriva rapidement à la conclusion qu'elle était la seule qui pouvait encore empêcher que cela n'arrive. Mais était soudain prise d'un désagréable sentiment qui l'empêcha à agir en conséquence ; sentiment qu'elle croyait pourtant avoir évincé depuis longtemps : celui du doute. Elle évoluait désormais seule, sans ses pokémons ou un soutien extérieur, face à un ennemi dont elle avait cruellement sous-estimée les capacités et en payait le prix sous la forme de cette hésitation. Mais elle restait convaincue qu'elle ne pouvait pas le laisser s'échapper. Ses pokémons, sa famille, son nom et celui de son clan ; si elle s'arrêtait maintenant elle ne pourrait plus jamais les regarder en face. Plus que sa vie, sa fierté était en jeu. Elle ne pourrait jamais supporter le déshonneur que cela représenterait, aussi bien aux yeux de son père que pour elle-même si elle se refusait à agir… Mais son père l'avait aussi formée à toujours prôner la conservation de son calme et une approche méthodique de la situation, et à agir en conséquence en fonction des choix qui s'offraient à elle en n'omettant jamais ni d'assurer sa sécurité tout autant que l'objectif de sa mission. Mais surtout à ne jamais céder impulsivement sous le coup de l'émotion ; même si son honneur lui parait être en jeu. Car où se trouvait l'honneur pour un ninja si ce dernier comptait plus pour lui que l'accomplissement de sa mission, qui était son devoir comme son véritable honneur à l'accomplir ? Parfois reculer face au danger en reconnaissant son échec se trouvait une décision plus sage que de foncer droit dessus au risque de courir à sa perte.

Mais elle avait un argument qui lui fit comprendre qu'elle pouvait encore mener à bien la mission du rôle qui lui avait été confié. De part l'explosion et la mise hors d'état de sa montre : son adversaire ne savait pas qu'elle était encore en vie. Et même si il suspectait que ce fut le cas, avec la grenade sombre qui l'empêchait de faire appel à son équipe, il devait être sûr qu'elle ne prendrait pas le risque de l'affronter et la prendre en chasse. Ce qui voulait dire qu'elle avait cette fois-ci réellement l'avantage de la surprise. Et pour son Nostenfer, pour les policiers et leurs pokémons, les gens de cette ville, de cette île tout autant que ceux de la sienne et des autres, en tant que championne d'arène de la ligue et héritière du nom de sa famille : elle n'abandonnerait pas.

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Laissant son compagnon ailé se reposer sur le côté, la championne de Parmanie s'élança à pleine vitesse du style de course de sa famille (à l'image du vol des Nostenfer : rapide et silencieux) en direction du premier accès vers l'équipe 1, en approchant déjà de celui dont elle était initialement chargée de sa surveillance… Et d'en voir en face, venant de la direction opposée, se dessiner les formes sombres proches de celle de la silhouette holographique se rapprocher d'elle rapidement ; comme si elles se déplaçaient toutes deux à la même vitesse à l'image des reflets d'un miroir s'apprêtant à se croiser.

Mais alors qu'elles étaient à une dizaine de mètres proche du contact (ce qui à leur vitesse se calculait en l'espace de seconde) et que la championne se préparait déjà au combat, sa sombre adversaire effectua une sorte de brusque arrêt dans sa course, qui se révéla être une feinte lorsqu'elle accéléra d'un coup, encore plus vite, et vira sur le côté pour engager l'ascension abrupte à 45° de la bute de la rive du canal et la remonter à pleine vitesse ; la championne faisant de même une seconde plus tard en se lançant à sa poursuite. Sans plus la lâcher d'un instant à partir de maintenant.

La chasse était lancée.



[A suivre.]