[L] Dans mes rêves (2/2)
Le temps s'arrête.
Il n'y a plus que le silence. Un silence lourd, troublé seulement par le bourdonnement lancinant à l'intérieur de mon crâne. J'ai la bouche ouverte, mais aucun son ne sort. Mon cri s'est figé dans ma gorge.
Thomas et Dracaufeu ont disparu. Le vide les a engloutis sans leur laisser la moindre chance de s'en sortir. Peut-on seulement survivre à une telle chute ?
Je me sens incapable de bouger. C'est comme si la moindre impulsion allait briser ce qu'il reste de mes nerfs.
Le souffle chaud du serpent balaie mes cheveux. Il plane au-dessus de moi sans un bruit. Ses anneaux brillent d'une lumière menaçante. Il m'observe sans ciller, comme un prédateur prêt à fondre sur sa proie.
Je sais ce qui va suivre. Mais je ne fais rien. Parce que je ne sais plus comment lutter.
Ses crocs s'entrouvrent lentement. Une nouvelle sphère prend forme dans sa gorge. Plus vive, plus instable. L'air vibre dangereusement autour de moi.
– COLÈRE !
Un éclair orangé traverse la caverne comme un météore et vient percuter le Pokémon de plein fouet. Je suis projetée en arrière par la détonation et heurte avec violence la paroi derrière moi.
Je secoue la tête pour reprendre mes esprits et vois le serpent reculer sous l'impact. L'attaque mortelle qu'il préparait s'est désintégrée dans un jaillissement de lumière bleue.
Au-dessus de moi, un Dracolosse chromatique tourbillonne dans les airs. Son corps vert luit comme un astre dans la pénombre, et ses yeux brillent d'une intensité démentielle.
C'est alors que j'aperçois le dresseur sur son dos.
Michael.
Le Maître ne m'accorde pas un seul regard. Il reste focalisé sur son adversaire et lance déjà une nouvelle offensive. Dracolosse fond sur l'ennemi et le heurte avec une violence inouïe qui le projette cette fois-ci contre un mur.
Sa Colère n'est pas seulement une capacité. C'est une sentence.
Le Pokémon tente de riposter, mais le dragon ne lui en laisse pas le temps. Il s'élance sur lui avec une rapidité hors norme et le frappe une troisième fois. Puis une quatrième.
Je n'arrive pas à suivre.
Michael glisse une baie dans la gueule de son dragon en plein vol. Ce dernier lâche un grognement appréciateur et pivote sans perdre une seconde.
– Il évite la confusion... je murmure en me redressant douloureusement.
Le serpent réussit malgré tout à se soustraire de la pression exercée par son adversaire. Il libère alors un nouveau rayon d'énergie, mais celui-ci ne touche que le vide. Trop lent.
Dracolosse plonge, fauche, remonte. Chaque impact affaiblit un peu plus l'ennemi. La caverne tremble de plus en plus.
Puis vient l'assaut final.
Le Pokémon dragon se redresse d'un battement d'ailes et ouvre grand sa gueule. Un Laser Glace fend l'air dans un hurlement gelé et percute violemment sa cible.
Le froid est à peine soutenable. Il s'insinue dans mes os et brûle mes poumons comme si l'air lui-même s'était figé autour de moi.
Le serpent de jade s'écrase au sol dans un fracas sourd.
– Il est... vaincu ? je murmure, incrédule.
Michael décroche une Pokéball et la lance sur le reptile sans crier gare. La capsule percute sa carcasse avant de l'englober dans un flash rouge.
La Pokéball retombe mollement devant moi avant de remuer.
Une fois.
Deux fois.
Trois fois.
Le dispositif émet un léger tintement avant de se figer.
Michael a capturé le mystérieux Pokémon.
– Rappelle Élecsprint... ordonne-t-il en posant sa monture à côté de moi. Et dépêche-toi de grimper.
Je lance un regard par-dessus mon épaule et remarque avec horreur le corps de mon partenaire gisant sur le sol. Lui aussi a dû être soufflé pendant l'affrontement. Et le choc de la situation m'a fait oublier jusqu'à sa présence.
– D... Désolée... je balbutie d'une voix tremblante en le rappelant dans ma Pokéball.
Un craquement sinistre résonne dans toute la caverne.
Je lève brusquement la tête. Des gravats se détachent du plafond. Un nuage de poussière descend lentement autour de nous, étouffant la lumière. La paroi tremble. Une nouvelle secousse fait vibrer le sol.
– On n'a plus de temps... répète Michael en tendant la main. Grimpe !
Je reste figée, les yeux rivés vers l'abîme où mon ami a sombré.
– On doit retrouver Thomas... je souffle dans un murmure à peine audible.
Le visage du Maître s'assombrit.
– On ne peut plus rien pour lui... déclare-t-il d'une voix grave. Et on ne pourra jamais demander de l'aide pour le retrouver si cette montagne s'effondre sur nous.
Je m'apprête à répliquer. À courir vers le bord. À hurler le nom de mon ami. Mais Michael ne me laisse pas le choix. Il m'agrippe par la taille et me hisse brusquement devant lui avant de talonner sa monture.
– Accroche-toi.
Dracolosse bat furieusement des ailes et s'élance en ligne droite, évitant de justesse un éboulement qui manque de nous faucher. Je m'agrippe de toutes mes forces au cou du Pokémon, les yeux mi-clos, la gorge serrée.
Nous fonçons à travers les galeries en ruine sans nous retourner. Des gerbes de roche éclatent tout autour de nous et menacent de nous arracher la tête.
– La sortie est bloquée... grogne Michael.
J'écarquille les yeux en remarquant le cul-de-sac. Le tunnel est bouché par un pan entier de montagne. Impossible de passer.
Mais Dracolosse ne ralentit pas.
Je crois comprendre son intention. Michael resserre sa prise autour de ma taille et se penche légèrement pour être entendu de son Pokémon.
– Ultralaser !
Un rayon incandescent fuse hors de la gueule du dragon et vient frapper la paroi devant nous. L'impact est démentiel. La roche explose sous la puissance du tir et laisse enfin apparaître une ouverture vers l'extérieur.
– Couche-toi ! me crie Michael.
Je m'aplatis contre Dracolosse et retiens mon souffle sans perdre de vue notre porte de sortie. Le Pokémon de Michael s'y engouffre dans un dernier battement d'ailes avant de pousser un rugissement victorieux. Nous surgissons hors de la montagne dans un souffle de poussière et accueillons la lumière avec un sentiment de soulagement mêlé de tristesse.
Je jette un dernier regard en arrière. Le tunnel s'effondre dans un vacarme apocalyptique, engloutissant avec lui la caverne dans laquelle j'ai abandonné mon ami.
Le silence retombe peu à peu. L'air glacial nous fouette le visage alors que notre monture amorce une descente prudente à flanc de montagne.
Michael repère une petite clairière protégée du vent et guide son Pokémon jusqu'à un espace dégagé. Dès que mes pieds touchent le sol, quelque chose cède en moi. Je me précipite alors vers lui et le frappe au torse de toutes mes forces.
– T'aurais pu faire demi-tour ! je hurle en laissant éclater ma rage. Tu l'as laissé là-bas ! Tu l'as laissé au fond de ce gouffre !
Le Maître ne bouge pas. Il ne cherche même pas à se défendre. Il encaisse mes poings et mon chagrin sans rien dire.
– Il est peut-être encore en vie... je lâche dans un sanglot. Il attend peut-être qu'on vienne le sauver. Et nous...
Je vacille. Mes jambes ne me portent plus. Michael me rattrape à temps, me soutient un instant, puis me laisse m'asseoir à terre.
– Repose-toi quelques minutes... murmure-t-il avec douceur. Je reviens vite.
Il me laisse sur mon carré d'herbe et s'éloigne sans ajouter un mot. Je songe un instant à libérer mon Drattak pour partir à la recherche de mon ami, mais j'ai l'impression que mes réserves d'énergie sont épuisées. Je ne sais pas combien de temps je reste assise, comme ça. Une minute. Une heure.
Michael revient avec de quoi dresser un campement. Il commence par recouvrir mes épaules d'une couverture, puis s'agenouille pour essayer de faire un feu. En vain. Thomas, lui, l'aurait allumé en moins de cinq minutes. Mais Michael n'est pas son frère. Il perd vite patience et finit par appeler son Dracaufeu chromatique pour le faire à sa place.
Je reste assise à l'écart. Mon regard est tourné vers le ciel, espérant de tout cœur y voir surgir une silhouette familière.
Une silhouette que je ne reverrai peut-être jamais.
– Il faut que tu boives... dit Michael en me tendant sa gourde. On a avalé beaucoup de poussière dans le tunnel.
Je saisis machinalement le récipient et prends une longue gorgée d'eau. Une quinte de toux me secoue aussitôt, vite calmée par une deuxième gorgée, plus prudente.
Boire me fait du bien. Mais ça ne suffit pas à effacer ce qui s'est passé.
– Je n'irai pas plus loin... je déclare en plantant mon regard émeraude dans celui du Maître. Pas tant que je n'aurai pas retrouvé Thomas.
Michael soutient mon regard un moment avant de lâcher un soupir.
– J'ai contacté mes équipes au Repaire... dit-il en s'asseyant face à moi. Elles sont déjà en route, avec tout le matériel nécessaire.
Je hoche doucement la tête. C'est plutôt une bonne nouvelle.
– Comment tu m'as retrouvée ? je demande en lui rendant la gourde. Qu'est-ce que tu faisais dans ce tunnel ?
Michael plisse les yeux. La tournure que prend cet interrogatoire ne lui plaît pas beaucoup, mais il ne fait aucun commentaire. Il prend le temps de s'hydrater à son tour avant de répondre.
– Elyndia m'a dit que vous étiez partis pour Brise-Mer... explique-t-il d'un ton neutre. J'ai survolé le sentier en pensant vous croiser en chemin. Je ne vous ai pas trouvés, alors j'en ai conclu que vous aviez emprunté le tunnel. Je suis venu aussi vite que j'ai pu, mais...
Le Maître détourne les yeux. Nous connaissons tous les deux la suite des événements.
– Je suis vraiment désolé, Lucille... souffle-t-il d'une voix brisée. Si j'étais arrivé une minute plus tôt, j'aurais pu...
– Tu ne pouvais pas savoir... je le coupe, touchée par sa détresse. Tu n'es pas responsable de ce qui est arrivé à ton frère. Je suis désolée de t'avoir frappé.
Un silence inconfortable s'installe entre nous, troublé seulement par le crépitement des flammes qui dansent sous nos yeux.
Thomas et moi étions bien conscients des risques que nous prenions en entrant dans ce tunnel. Elyndia nous avait mis en garde contre le danger qui y régnait, même si nous ne soupçonnions pas l'existence de cette monstrueuse créature.
– C'était quoi, ce Pokémon ? je demande à Michael.
Le Maître me dévisage un instant avant de comprendre à quoi je fais allusion. Il décroche la Pokéball de sa ceinture et l'observe d'un air songeur.
– C'est un Rayquaza... murmure-t-il en faisant lentement pivoter la capsule. Dans les légendes, on l'appelle le Gardien des Cieux.
Je hausse un sourcil incrédule.
– Le Gardien des Cieux ? je reprends en lançant un regard noir à la Pokéball. Qu'est-ce qu'il foutait dans un tunnel ?
Michael secoue la tête.
– Je ne sais pas... reconnaît-il. De nombreux mystères entourent les Pokémon légendaires, et c'est un sujet encore mal documenté.
Un Pokémon légendaire. Évidemment. Quelle autre créature aurait pu tenir Thomas en échec ?
– Je pensais qu'il était invincible... je souffle, le cœur en miettes. Que rien ni personne ne lui arrivait à la cheville.
– C'était le cas... admet Michael en tirant sur un brin d'herbe. Il a toujours été le meilleur. Dans tous les domaines. Déjà, à l'école, il surclassait tous les enfants de son âge. Nos parents n'avaient d'yeux que pour lui. Il était d'ailleurs pressenti pour reprendre la tête de l'empire familial, tu imagines ?
Je crois déceler une pointe d'amertume dans les propos du Maître. Je peux difficilement me mettre à sa place, dans la mesure où je suis fille unique, mais je peux sans mal imaginer la douleur d'être placé au second plan.
– Mais c'était sans compter sur ma mauvaise influence... continue-t-il avec un sourire nostalgique. J'ai transmis la fibre du dressage à mon frère. Et même sur ce terrain-là, il était meilleur que moi.
– C'est pourtant toi qui es à la tête de la Ligue... je fais remarquer en fixant le pauvre brin d'herbe qui se désagrège entre ses doigts.
Michael laisse échapper un rire bref. Sans joie.
– Tu parles d'une consécration... Je n'ai jamais eu le sentiment de mériter cette place. Thomas a été poursuivi pour l'attentat du Centre Commercial de Lunapolis, et j'ai hérité du titre de Maître.
Cette histoire semble l'affecter plus qu'il ne veut bien le montrer. Michael n'est pas aussi détaché que je l'imaginais. Son côté je-m'en-foutiste n'est qu'une façade et semble cacher un mal-être plus profond.
Rien n'est jamais simple, quand on s'intéresse en profondeur à la vie des gens qui nous entourent.
– Il y a bien un domaine dans lequel tu excelles... j'ajoute après un moment. C'est toi qui as les Pokémon les plus rares. C'est vrai qu'ils sont tous chromatiques ?
J'ai lu beaucoup de choses sur le sujet. Selon certaines études menées par des professeurs, les chances de rencontrer un Pokémon d'une couleur inhabituelle seraient en moyenne de une sur huit mille. Moi-même, je n'en ai jamais croisé un seul dans la nature.
Alors s'en faire une équipe toute entière...
– Je suis persévérant... répond-il sur le ton de la conversation.
Je hausse un sourcil perplexe.
– Plus que pour allumer un feu, c'est certain.
Michael ne se vexe pas. Il laisse échapper un léger sourire et secoue la tête, amusé.
– Touché.
Il se penche vers son sac de voyage, l'ouvre soigneusement, puis en extrait un petit objet métallique. Il s'agit d'une petite valise au design élégant et high-tech. Je fronce les sourcils en la voyant. Elle semble renforcée par un alliage rare, et un logo que je ne reconnais pas est gravé sur le dessus.
Michael appuie sur un bouton situé sur la tranche, et le couvercle se soulève doucement en révélant deux emplacements circulaires.
– Donne-moi la Pokéball d'Élecsprint... dit-il en tendant la main.
J'obéis sans poser de question et lui tends la capsule de mon partenaire. Michael l'installe dans l'un des réceptacles, puis détache celle de Dracolosse de sa ceinture pour l'ajouter à côté. Il referme ensuite la valise, qui émet un bip discret, suivi d'un très faible bourdonnement.
– C'est quoi, ce truc ? je demande en fronçant les sourcils.
– Un Centre Pokémon miniature... répond-il en levant les yeux vers moi. C'est un prototype. Très rare. Très cher. Et strictement réservé à un usage interne.
Je fixe le dispositif avec fascination.
– Et tu transportes ce truc dans ton sac parce que...
– Parce que je suis un privilégié... termine-t-il en me lançant un clin d'œil. Thomas ne t'a jamais parlé de notre père ?
Je fouille ma mémoire à la recherche d'une information qui pourrait m'être utile, mais mon ami n'est jamais vraiment rentré dans les détails de sa vie privée.
– Je crois qu'il a vaguement évoqué une entreprise pharmaceutique, une fois...
Une lueur de surprise traverse le regard de Michael.
– Une... entreprise ? répète-t-il d'un air incrédule. Lucille. Notre père est Alaric Gray. Il est à la tête de GrayTech Industries – la plus grande multinationale du pays ! Ça ne te dit rien ?
Je cligne plusieurs fois des yeux sans réagir.
– Euh... Non. Ça devrait ?
Le Maître passe une main sur son visage d'un air exaspéré. Cette fois, il semblerait que je l'ai vexé. Mais il faut dire que l'environnement économique de la région ne m'a absolument jamais intéressée.
– C'est mon grand-père qui a imaginé les premières machines de soin que l'on trouve dans les Centres Pokémon. Les boissons nutritives pour optimiser les caractéristiques des Pokémon, c'est mon père. Les aromates, qui influencent leur caractère, idem !
J'acquiesce lentement en faisant mine d'être impressionnée. Michael semble passionné par le sujet, mais toutes mes pensées sont encore tournées vers Thomas. Ses chances de survie s'amenuisent à chaque seconde que l'on perd à discuter.
Le Maître fouille à nouveau son sac et en sort un étrange cylindre métallique. Le contenant est transparent et laisse apparaître un liquide bleu pâle luminescent. Il ajuste un petit embout situé à l'extrémité de l'appareil et le raccorde avec précision au bouton central de la Pokéball contenant Rayquaza.
Je me redresse et observe la scène d'un air intrigué.
– Et ce truc sert à...
Michael ne répond pas tout de suite. Il termine ses manipulations avec le plus grand soin, puis lève enfin les yeux vers moi.
– C'est une forme de sédatif.
Je fronce les sourcils sans comprendre.
– Tu veux l'endormir ?
– Pas exactement... répond-il en fixant à nouveau son attention sur le dispositif. Je souhaite atténuer son agressivité. Ce Pokémon est bien trop puissant pour être contenu normalement. Tu imagines ce qui se passerait, s'il parvenait à se libérer ?
Je garde les yeux rivés sur l'étrange liquide bleuté. Une lueur étrange traverse la capsule au moment où le dispositif injecte son contenu. Un frisson me parcourt l'échine.
– C'est sans danger pour lui ?
Michael hoche la tête avec assurance.
– Oui... dit-il en esquissant un sourire furtif. Tout ce que j'utilise ici a déjà été testé en laboratoire. Testé, et approuvé !
Il détache l'injecteur, le referme soigneusement et le replace dans une poche isolée de son sac, comme s'il venait de manipuler une matière radioactive.
D'autres questions me brûlent les lèvres, mais un vrombissement sourd se fait entendre au loin. Je lève brusquement la tête et scrute le ciel à travers les feuillages. Une forme sombre se détache de l'horizon. Quelques secondes plus tard, le bruit caractéristique d'un rotor d'hélicoptère envahit la clairière.
Michael se redresse immédiatement.
– Ce sont mes équipes... annonce-t-il.
L'appareil descend lentement, soulevant un nuage de poussière et d'aiguilles de pin. Il se pose en douceur à une vingtaine de mètres de notre campement. Une fois les pales ralenties, une porte latérale s'ouvre, laissant sortir une demi-douzaine de personnes en combinaison sombre. Le chef du groupe vient directement à la rencontre de Michael, qui lui présente l'écran de son smartphone.
– Je vous ai envoyé les coordonnées précises du lieu de l'accident... lance-t-il d'un ton directif. Fouillez méthodiquement, sans prendre de risque. S'il y a quoi que ce soit à récupérer... je veux que ce soit fait proprement.
– Bien reçu, Monsieur.
Je me précipite vers eux.
– Attendez ! Je veux venir. Je peux aider à fouiller la zone.
Le responsable m'adresse un regard intransigeant.
– Je suis désolé, mademoiselle. Vous n'avez ni les autorisations, ni les qualifications pour intervenir sur ce type d'opération. Il y a toujours un risque d'effondrement. Vous seriez un poids supplémentaire pour nos équipes.
Je serre les poings.
– Mais c'est mon ami qui est là-dessous !
Michael pose une main ferme sur mon épaule.
— Lucille. Laisse-les faire leur travail. S'ils peuvent retrouver Thomas, ils le feront.
Je ravale difficilement mes objections. Le groupe se déploie sans un mot, s'engouffre dans la forêt et disparaît peu à peu dans les ombres des pins. L'hélicoptère reste au sol, prêt à repartir à tout moment.
Un nouveau bip me fait sursauter. Je me retourne et constate que la valise métallique vient de s'illuminer. Deux petites diodes vertes clignotent, signalant que le processus de guérison est terminé.
Michael ouvre la mallette et récupère les deux Pokéball à l'intérieur. Il me tend celle d'Élecsprint.
– Il est en pleine forme... dit-il avec un sourire plus doux. Prêt à retourner au combat.
Je saisis la sphère rouge et blanche avec un pincement au cœur. Je ne me suis pas encore pardonnée d'avoir négligé mon Pokémon dans la caverne. Lui aussi aurait pu disparaître.
Michael s'adosse à un rocher et croise les bras.
– Tu veux que je t'emmène à Jasélia ? propose-t-il d'un ton compatissant. Thomas voudrait sans doute que tu continues ton voyage jusqu'au bout.
Je secoue la tête.
– Non... je réplique. Pas tout de suite. Je dois d'abord rentrer à Solbourg.
Je ferme un instant les yeux, en songeant qu'il aurait peut-être mieux valu que je ne quitte jamais mon village natal.
– J'ai besoin de revoir mon père.