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Pourquoi demande-t-on aux dragons de garder les trésors? de SupraEnergy



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Informations

» Auteur : SupraEnergy - Voir le profil
» Créé le 26/09/2023 à 00:09
» Dernière mise à jour le 26/09/2023 à 00:09

» Mots-clés :   Drame   Fantastique   Présence de personnages du manga   Romance   Suspense

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Contre-nature
Nous passâmes plusieurs heures à explorer les grandes rues commerçantes et les monuments culturels de Motorby, particulièrement envahies de touristes à la veille du Défi des Arènes.

Sonya n’avait pas son pareil pour me raconter l’histoire de la ville, de ses machines à vapeur et de son impressionnante exploitation des énergies renouvelables. J’appris alors que depuis quelques années, Macro-Cosmos travaillait étroitement avec des conglomérats de régions étrangères afin de contribuer à un monde plus équitable et respectueux de la Nature. Les besoins des Pokémons étaient bien plus considérés et l’on se souciait désormais beaucoup plus de la manière dont leurs pouvoirs étaient exploités.

J’apprenais également que Motorby était la première grande ville moderne construite à Galar au sens premier du terme. La révolution industrielle avait fait prospérer de manière spectaculaire l’économie de la région et de grands entrepreneurs ainsi que des hommes d’affaires venus d'autres pays s’y étaient installés pour développer les premières usines d’exploitation énergétique des Galarions, une source d’énergie extra-terrestre que les terres de Galar auraient emmagasinée dans leurs entrailles depuis des siècles. De ces entreprenariats descendait directement Macro-Cosmos qui avait continué le travail bien des millénaires plus tard. Je réalisais que je découvrais ma région natale pour la première fois.

J’admettais que Motorby respirait cette noble cause : les grandes avenues de macadam étaient reluisantes de propreté, l’eau du canal si clair que l’on pouvait y voir des Froussardines et des Embrochets batifoler tout au fond, et la vapeur si épurée que l’on se surprenait à admirer les grandes roues métalliques tourner pendant des heures sans en être accommodé. Les bâtiments revêtaient fièrement leurs briques rouges comme sorties de terre, et la tour horlogère du stade contemplait humblement l’effervescence de la cité ancienne telle un vieux gardien. Macro-Cosmos s’affichait d'ailleurs par tour de pancartes et de banderoles dans les avenues, vantant l’expansion industrielle de la région.

En outre, une autre grande ville médiévale importante de Galar avait en sa possession le plus grand réacteur de la région, aspirant colossalement l’énergie des Galarions dans le sol pour la rendre utilisable à l’égard des hommes. Cette énergie d’abord brute était apportée en masse à Motorby pour la transformer : « c’est grâce à Macro-Cosmos que l’on a de l’électricité, de l’eau propre et du gaz chaque jour à Galar », faisait remarquer la professeure enjouée.

Kanto ne semblait clairement pas faire le poids face à la richesse et la prospérité de Galar. Et pourtant, Sonya semblait emportée par le fait que je venais tout droit de cette région bien lointaine : elle avait entendu parler des grandes merveilles de ce pays comme le Safari Park de Parmani, la tour de Lavanville et ses mythes fantomatiques, le mont Sélénite et ses mystérieuses météorites, le très célèbre Plateau Indigo qui accueillait la ligue Pokémon, sans oublier la non pas moins connue société de recherche Sylph Sarl à Safrania. Elle rêvait de visiter cette dernière pour en apprendre sur leur propre technologie, eux qui avaient confectionné la rarissime Master Ball dont trouver un exemplaire demandait d’avoir la chance d’un protagoniste.

Elle se passionnait aussi pour nos légendes locales, et tout particulièrement celles qui dépeignaient les oiseaux légendaires, Artikodin, Sulfura et Electhor. Les apercevoir portait apparemment chance et pour une fois, j’acquiesçais facilement à cette croyance. Elle me certifiait que certaines personnes pensaient les avoir croisés dans la région de Galar. Je laissais alors entendre que que tout était possible dans le monde des Pokémons.

Nous goûtions ensemble le milkshake fruité de Motorby à base de lait d’Ecremeuh tandis que je découvrais avec stupeur que les Crok Argenta se vendaient aussi à Galar. Je les mangeais très naturellement devant une professeure Magnolia qui arrivait difficilement à arracher ne serait-ce qu’une bouchée de ces biscuits extrêmement dures. Je goûtais aussi les sablés de Yantreizh, une ville située à Kalos, dont j’avais aussi l’habitude puisqu’ils étaient exportés à Kanto.

En revanche, j'avais ressenti une vague nouvelle de sucre arc-en-ciel envahir mes papilles gustatives en essayant les Malasadas d’Alola, petites pâtisseries vendues par un marchand ambulant. Son Bazoucan s’activait avec énergie à leur promotion et j’admettais qu’il m’avait légèrement fait abuser de mon argent en achetant une grande quantité de ces petits beignets sucrés au plus grand bonheur de Voltia qui adorait les desserts. D’ailleurs, je commençais à douter de ma capacité à tout avaler par moi-même.

Nous jouions aussi à des jeux d’arcades dans la plus importante avenue des animations de Motorby où je battais Sonya une fois sur cinq. J’avais aussi tenté la pêche aux cadeaux dans un bassin et commanditée par un Gobou qui avait l’air de prendre un malin plaisir à se moquer de tous les perdants. Mais après plusieurs tentatives, j’avais attrapé un paquet qui cachait un petit foulard imprimé de petits Voltalis pour mon plus grand bonheur. Voltia jappait joyeusement en se voyant multipliée sur la pièce de soie tandis que Sonia réussissait à obtenir un autre foulard, cette-fois couvert de petits Voltoutous.

Nous avions aussi croisé plusieurs challengers qui continuaient de me reconnaître : ils discutaient vivement avec moi en se faisant des promesses de matchs endiablés qui, curieusement, me motivaient autant qu’elles rendaient mes futurs opposants impatients. Le Défi des Arènes n’avait pas débuté que chaque concurrent se voyait déjà frôler la pelouse du stade de Winscor, exposé comme des œuvres rarissimes sous les projecteurs. Et j’arrivais pour je ne sais quelle raison à frôler du bout de mon esprit, le mystère de ce souhait.


***


Les rayons crépusculaires commençaient déjà à s’annoncer, peignant le firmament de jets orangés.

Nous nous étions rapprochées d’un grand secteur de la gare qui était à l’opposé de celui que j’avais traversé avec Nabil : on y croisait de très nombreux marchands ambulants vendant de l’artisanat galarien, notamment la sculpture sur bois. Sonia m’expliquait par ailleurs que Tarak s’y était essayé il y a longtemps et qu’il était plutôt doué, ayant créé une dizaine de petites statuettes représentant ses Pokémons préférés. Cependant, son emploi de Maître Pokémon qui n’aurait rien envié à celui d’un ministre de Kalos ne lui permettait plus de s’atteler à ce passe-temps. Sonia me montrait ensuite ce petit pendentif de Voltoutou en bois verni, né des doigts de Mélofée du Maître de Galar : « cadeau de Tarak quand je l’avais beaucoup soutenu lors de la finale au Défi des Arènes ! C’est sa manière préférée d’exprimer sa gratitude », soulignait la jeune scientifique en souriant.

La foule était moins dense par rapport aux grandes avenues commerciales, nous laissant le loisir d’apprécier un soudain calme apaisant.

Notre longue balade se terminait alors vers un grand pont de briques rouges qui se figeait sur le canal artificiel. Des rambardes en fer perçaient la surface des murs, lui donnant un air de vestige de guerre.

Sonia avait légèrement trottiné devant moi, soudainement excitée.

- Ha ! Les voilà ! Je voulais te les montrer !

Je me rattrapai de justesse à la rambarde quand ce puissant Léviator se dressa devant moi, rugissant un son profondément rauque.

Les sphères de fer poli qui lui servaient de globes oculaires brillaient d’une ferveur déstabilisante. Sa couleur cuivrée dominante faisait ressortir sous le soleil somnolent, tous les rouages et câbles qui mécanisaient son corps serpentaire tandis que les plaques de fer qui faisaient office d’écailles étaient si bien agencées qu’ils illustraient à eux seuls, la perfection technologique. Une vapeur blanche sortait des narines du grand Pokémon eau robotisé et je devais me convaincre avec un effort considérable de sa nature d’automate : sa majesté et son allure n’avaient rien à envier à son homologue biologique.

Enfin, malgré l’impressionnante présence de l’animatronique, il se contentait de répéter les mêmes mouvements à l’infini. Celui-ci était accompagné d’autres Pokémons comme ce Draco de taille légèrement supérieure dont on pouvait admirer le puzzle de petits rouages dorés s’activer à l’air libre dans ses entrailles. Il y avait aussi un Ptera aux ailes repliées qui, je l’admettais, était très impressionnant dans sa version robotique avec cette peau de métal sculptée au détail près et cette membrane transparente couvrant ses appendices ailés et qui révélait tout ce mécanisme complexe digne d’une horloge, même si sa large tête tordue et son grand regard vitrifié dénué d’émotions donnaient la chair de poule.

Je devinais des mouvements de foule en contrebas du pont, vers une grande place fleurie où les automates avaient été installés. Malgré la distance, je pouvais entendre la stupéfaction des gens face au son fluide de la vapeur et le cliquetis clair des mouvements mécaniques.

- C’est la grosse attraction de cette année, les Pokémons-animatroniques ! Ils sont incroyables, non ? S’amusa Sonya.

J’avais particulièrement observé le sommet de leur crâne en dissimulant un très léger soupir de soulagement dans ma poitrine.

- Ils sont le résultat d’une collaboration entre Macro-Cosmos et une société de recherche moléculaire partenaire. Ces Pokémons-robots célèbrent les futurs projets énergétiques qu’ils mettent en place dans la région. T’en trouveras dans chaque grande ville de Galar ! M’expliquait alors fiévreusement la jeune femme.

Je murmurais un « chouette » dont le simulacre joyeux n’aurait convaincu personne. Sonya semblait souligner ma perplexité mais n’en faisait rien heureusement. Pour ma part, j’évinçais rapidement mon inquiétude.

- Cette société partenaire ne s’appellerait-elle pas Monochrome par hasard ?

- Tiens, tu connais ?

- Ho, j’ai vaguement vu ce nom à Kanto une fois ! Je crois qu’elle travaille avec plusieurs centres de recherches à travers le monde… Inventai-je du mieux que je pus.

- Je n’étais pas censée révéler le nom avant demain mais bon, puisque tu as deviné ! Il y a eu une conférence privée l’autre jour, j’y étais et je dois dire que leurs projets sont innovants : créer de nouvelles sources d’énergie à partir des pouvoirs des Pokémons en étudiant les structures moléculaires qui activent leurs capacités, c’est passionnant ! Et tout ça dans le respect et l’éthique que nous leur devons, ça sonne très responsable !

Elle ajoutait alors la longue liste douteuse des grandes promesses qui avaient été déblatérées tout au long de la conférence, prônant particulièrement la protection des Pokémons et leurs pouvoirs très importants dans l’équilibre des énergies qui façonnaient notre monde. Je ne comprenais pas spécialement cette notion d’équilibre mais les automates servaient d’une certaine manière à rendre hommage à toute l’aide qu’ils apportaient à l’humanité, comme un symbole émanant de la technologie dernier cri des grandes sociétés scientifiques de notre univers qui s’harmonisaient avec les extraordinaires facultés des Pokémons.

Des interrogations brumeuses aveuglèrent alors mon esprit : mes yeux se perdirent sur les mouvements brutalement inquiétants du Léviator machinique et je crus pendant un vif instant percevoir une lueur enragée embraser les billes lui servant de globes oculaires.

Mon esprit trompa le présent : Kabutops, démonté de fureur, se dressa devant moi pendant quelques secondes.

Je détournai les yeux, enfiévrée par la vision.

- Euh… Tu sais pourquoi cette collaboration s’associe au Défi des Arènes en fait ?

Sonya joua avec une mèche de ses cheveux.

- Travailler avec des centres de recherches permet d’associer culture populaire et science et les ligues doivent nécessairement montrer l’exemple tout en prônant l’art des combats qui représente le lien plus évident entre humains et Pokémons. Par-exemple, le phénomène Dynamax était un truc exclusif au domaine scientifique avant que le président de Macro-Cosmos ne décide de l’incorporer dans les matchs pokémon à Galar. Du coup, le public a pu être davantage sensibilisé aux pouvoirs que nous offre la Nature. Leur protection concerne chacun de nous après tout : Monochrome Corporation veut comprendre et utiliser avec éthique les énergies de la vie tandis que Macro-Cosmos exploite les énergies fossiles avec respect pour faire prospérer notre civilisation. Enfin, j’aime bien l’idée dans cette collab’ en tout cas !

- Et donc, l’événement sportif leur sert de décor pour exposer leurs théories ?

- Plus que ça : ils vont étudier la production d’énergie des Pokémons grâce à un système complexe de capteurs qu’ils ont installé dans trois stades : Winscor, Kickenham et Ludester. Ce sera silencieux et non-invasif mais ça va servir apparemment à développer de nouvelles perspectives énergétiques, autant pour Monochrome que pour Macro-Cosmos. Ils parlaient de pouvoir compenser l’utilisation des énergies fossiles en créant de nouvelles sources qui ne seraient pas complètement empruntées à la Nature mais reproduits par l’intermédiaire des Pokémons, comme une alternative !

J’osais maintenant faire revenir mon regard sur le Léviator machinique. C’était pour replonger dans le vague d’une étrange sensation familière, comme si j’avais déjà entendu ces mots.

- Ils deviennent donc des… réservoirs d’énergie en quelque sorte ? Drôle de notion du respect… réfléchissais-je à haute voix.

Je pensais nerveusement au contenu du dossier oublié de mon père : le contrat entre les deux entreprises avait été évoqué dans ses recherches sans plus de détails néanmoins. Mais mon murmure était un peu fort.

- Tu as l’air intriguée par cette collaboration, tu t’intéresses à la science Pokémon ?

Je sursautai.

- Euh… Un peu mais bon, je n’y connais pas grand-chose alors que ma mère était chercheuse en biologie Pokémon, c’est ironique tu me diras !

Elle leva un sourcil, le sourire néanmoins bienveillant.

- Excuse-moi d’être indiscrète mais tu es revenue seule à Galar, n’est-ce-pas ? Tu as de la famille ici ?

J’ignorais si c’était un effet secondaire née de la contemplation d’automates presque vivants mais j’avais envie de parler de moi.

- Hum... A part Nabil et sa famille, je ne me souviens pas être sortie avec mes parents pour visiter qui que ce soit d’autre.

Mon regard contempla des images embrumées.

- En fait, je ne sais rien de ce qui me rattache ici.

Je sentis Sonya s’approcher.

- Tu sais… Le Défi des Arènes est connu pour aider les challengers à se redécouvrir ! Regarde Nabil, il a enchaîné avec des études pour devenir professeur Pokémon alors qu’il rêvait pourtant de détrôner son frère ! Souligna-t-elle avec une certaine chaleur.

Elle sembla si convaincue que je laissai cette sensation bousculer mon esprit.

- Je parie qu’il t’arrivera la même chose !

- Je vais devenir professeur Pokémon ?

- Ce que je veux dire, c’est que tu vas apprendre à redécouvrir tes racines ! Tu sais, il existe un vieux dicton galarien qui dit : "la vérité en soi n'est jamais une chose à dire : elle est un combat à remporter" Rit malicieusement la scientifique.

- Hey ! C'est le dicton des Realta !

Elle écarquilla légèrement les yeux.

- C'est ça ! Le conte de la princesse ! Tu connais tes classiques, c'est un bon début !

Les quelques murs encerclant mon plus vieux passé se mirent à trembler : j'observai le panorama de la gare, pensive.

- Ma mère me racontait tout le temps cette histoire quand j’étais petite : la princesse Luo Realta qui s’est battue corps et âme pour prouver que les Pokémons dragon et les Hommes pouvaient vivre ensemble... C'est bizarre de se dire qu'ils étaient autant craints à l'époque ?

- C'est vrai ! Aujourd'hui, ça nous parait tellement naturel d'en croiser ! Mais toi aussi, quand tu auras rétabli la vérité en toi, tout te paraitra plus simple ! Nous sommes tous des princesses Luo après tout... On se démène pour les vérités auxquelles on veut croire, non ?

Je contemplais les Pokémons machiniques dans ma courte pause. Cela dit, le sourire interpellé de Sonya n’échappa pas à mon angle mort.

- Oui... J'imagine que tu as raison. Mais ça reste un conte.
- Pas tant que ça, Leava. Elle a une composante historique qui intéresse beaucoup la science Pokémon.

Je me tournai vers elle, surprise.

- C'est marrant ! J'en ai encore entendu parler pas plus tard que la semaine dernière au bureau ! Quel est son nom déjà ? « Pourquoi est-ce qu’on demande… ? »

Fulgudog et Voltia jappèrent alors hâtivement derrière nous. Leurs appels nous firent tourner les yeux vers un autre animatronique que curieusement, nous n’avions pas remarqué.

- … Aux dragons de garder des trésors !

J’avais complété son jet de souvenir d’enfance en contemplant ce Dracolosse machinique qui nous faisait amicalement face.

L'animatronique était installé sur une grande plate-forme métallique et rapprochée de la rambarde par rapport aux autres machines. II semblait déjà beaucoup plus naturel que ses semblables animatroniques en révélant moins ses rouages et tout ce câblage hydraulique qui dynamisait ses mouvements. Ce dernier crachait une forte fumée blanche et babillait un bruit mécanique grave qui ne lui allait pas très bien.

Je l'observais, pensive, tout en me malaxant lentement les poignets.

- Et en quoi la science Pokémon se passionne-t-elle pour les contes pour enfants ?

- En fait, la branche royale des Realta qui a vraiment existé, comportait des alchimistes très talentueux et à la pointe de la science pour l'époque. Ils auraient fabriqué des minéraux d'énergie très proches des pierres évolutives mais dont les facultés dépassaient même les pouvoirs des Pokémons. Les archives de cette famille parlent d'espèces d'Opales dont on aurait retrouvé des traces fossilisées dans le nord du pays.

Je dévisageai Sonya, perplexe.

- Des pierres ? Je ne me souviens pas de ça dans l'histoire, pourtant ?

- Parce que dans l'histoire, il était question d'une créature inconnue qui donnait des pouvoirs fantastiques ! L'étude des archives alchimistes des Realta existe depuis une vingtaine d'années mais elle n'a fait que très récemment le lien entre le conte et les fossiles des roches prétendument fabuleuses... j'ai pas encore fini la lecture de la recherche mais tu vois comme la science trouve toujours chaussure à son pied, même dans les contes pour enfants !

Elle marqua une pause avant de prendre une voix plus grave.

- « Mais non, ce n’est pas une bête histoire pour enfants, Sonya ! C’est le fondement de l’existence que de devenir le commandant de sa propre vérité » !
- C’est de qui ? Un dramaturge johtonais ? Pouffai-je.

Elle se redressa, l’œil malicieux.

- Je vais t’apprendre un secret super secret : tu sais que Roy adore écrire de la poésie ?

Aucun mot ne put venir chatouiller ma gorge, coupée par l’étonnement.

- En plein combat Pokémon, tu l’entends crier des vers entiers parlant de la météo mais à ses heures perdues, il écrit des poèmes complets dans des petits carnets ! Il n’aime pas que les autres soient au courant alors, on est juste une petite poignée de personnes à le savoir ! Tu pourras le taquiner à ton tour quand il t’embêtera un peu trop ! Ho, et il connait bien cette histoire comme toi, il en était fan quand il était tout gamin ! Rit-elle.

J’arrivais tout juste à souffler une émotion admirative du bout de mes lèvres : son allure galvanisée par l’instant du combat endiablé contre le Kabutops machinique était revenu chatouiller mes yeux.

Je me demandais subitement si tous les poètes avaient l’habitude de se mettre en danger de mort dans la recherche de l’inspiration. Cela dit, m’imaginer Roy contempler un océan embrumé de matchs Pokémon en noircissant des pages de mots emportés par la fureur du combat me plaisait bien, étonnamment.

Sonya croisa alors les bras, observant à son tour les mouvements lents du Dracolosse machinique.

- Tu sais quoi ? On a qu'à dire que ce conte, c'est la première racine qui te rattache à Galar ! Qu'en penses-tu ?

Je gardai le silence pendant quelques secondes : puis, je me mis à rire, l'esprit plus calme.

- Ouaip ! Pourquoi pas, après tout ?

Soudain, Voltia grimpa sur le rebord du pont en pierre, enjambant la rambarde métallique. Elle se pencha alors particulièrement vers l’imposant Pokémon dragon de Kanto.

- Volta ? Voltaaali !

Sonya s’accouda vers elle, amusée.

- Ta Voltali a l’air fascinée par ce Dracolosse !

- Ho, ça doit lui rappeler des souvenirs de Kanto, elle en avait déjà vu là-bas, expliquai-je rapidement dans un sourire léger.

- Sérieux ? Elle n’a pas l’air d’avoir peur ! Pourtant les Dracolosses sont imposants malgré leur air pacifique !

J’hochai la tête.

- Ho mais ceux-là étaient très paisibles, rien à voir avec ce que l’on dit sur les Pokémons dragon généralement.

- Et qu’est ce qu'il se dit sur eux en général ? Sourit-elle alors en rejoignant mon mouvement.


Elle devait avoir souligné le crépitement qui dynamisa mon regard cendré : je posai mon sac de viennoiseries contre le mur du pont et appuyai ensuite mon dos contre la rambarde de briques en observant aveuglement les nuages orangés.

- Ils étaient incompris aussi à Kanto il y a longtemps... On les considérait comme insensibles et indignes de confiance… Par-exemple, les Dracolosses ont été accusés de provoquer de terribles tempêtes en mer et de faire chavirer les navires. On a retrouvé des estampes qui illustraient des Pokémons dragons dans les cieux, faisant abattre la foudre sur les océans ! Des chasses étaient organisées pour les repousser vers des îles inconnues afin qu’ils n’approchent jamais les côtes.

Je plongeai quelques secondes dans l’écoute des sons mécanisés des automates.

- Tu as raison, nous sommes tous des princesses Luo... Je me dis toujours qu'il ne tient qu'à nous de se confronter à nos croyances afin de trouver le courage de démêler le vrai du faux. En tout cas, j'essaye chaque jour... je crois.

- En tout cas, tu as l’air de bien les connaître les Pokémons dragons ! Tu les aimes bien ? Demanda malicieusement Sonya.

J’hochai lentement la tête, soudainement intriguée par une curieuse sensation familière.

- Oui, j’ai beaucoup appris sur eux quand j’habitais Safrania et…

Mais des brûlures agressives arrachèrent brutalement mes phalanges,

je me tins les poignets, le souffle coupé.

Et je levai la tête.

Alors, le Dracolosse machinique me fixa de ses yeux enfiévrés de colère.

Il était en train de m'attaquer.


***


En sueurs, je fixais l'animatronique poussé par un instinct effrayant. A ce moment précis, plus aucun câble électrique ne dynamisait ses muscles.

« C’est pas… possible !? »

C’était le battement d’une réelle aigreur que j’entendais couler dans tout son corps draconien : son œil mécanique brûlait maintenant d’une violence nauséeuse sur moi.

Une chaleur insupportable s’empara alors de mon corps entier, comme piégé dans la mâchoire d’un incendie. Je reculai vivement, le visage écartelé. Puis j'entendis des cris sortir du néant, suivis d'acouphènes assourdissants.

C’était pour sentir aussitôt Sonya m’attraper le bras !

J’étais maintenant à terre, le corps sans force : je réalisais enfin qu’un bref malaise m’avait coupé les jambes.

- Leava ?!

Elle avait fait remarquer ma soudaine pâleur.

Je me mis à transpirer dans ma respiration haletée, visitée d’images brèves qui me parurent si affreuses que j’essayai en vain de détourner mon regard du vide.


- Ca va !? On aurait dit que tu ne pouvais plus respirer !?

- Il… Il m’attaquait ! Comme la dernière fois !

Une sensation de gel envahit désagréablement ma mémoire.

Le Dracolosse machinique continuait son lent ballet rythmique de gestes programmés. Voltia remuait son museau vers l’animatronique avant de me regarder, soucieuse. Son regard tiré par l’inquiétude et les mouvements nerveux de ses oreilles m’indiquaient sans peine qu’elle avait tout saisi de ma vision de cauchemar mais elle n’avait probablement pas plus d’explications que moi à donner.

- Comme la dernière fois ? Quoi, un Dracolosse t’a agressée par le passé ?

J’hésitais entre beaucoup trop de réponses incohérentes à lui donner.

- Je… Je sais pas pourquoi j’ai dit ça.

Petit à petit, cette sensation d’incandescence finit par laisser mes veines tranquilles. Seules quelques douleurs persistèrent encore un peu dans mes tempes.
Elle m’aidait alors à me relever : par chance, personne ne semblait avoir remarqué ma crise délirante passagère.

- Hum… ça n’est peut-être pas une bonne idée de côtoyer ces machines trop longtemps, plaisanta-t-elle du mieux qu’elle put.

Je ne perdis pas de temps à acquiescer.



***