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Informations

» Auteur : Serekai - Voir le profil
» Créé le 24/01/2021 à 22:51
» Dernière mise à jour le 24/01/2021 à 22:51

» Mots-clés :   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Chapitre 24 : Abandons
Descendre le versant oriental du mont couronné était bien plus aisé que le monter. De nombreux petits ponts de bois et de béton enjambaient lesprofondes gorges blanches, offrant un panorama impressionnants des multiples torrents qui s'ébrouaient furieusement pour se déverser en cascade dans le fleuve Niestr. A l'inverse des torrents, les eaux au fond de la gorge s’écoulaient calmement en contrebas, avant de disparaître à l'occasion d'un détour entre deux pitons de craie, poursuivant leur écoulement vers le sud et les marais côtiers.

Le dénivelé était des plus impressionnants, tout comme le nombre de Racaillou qui s’accrochaient aux falaises, avant de se lancer dans des courses. Les golems ramenaient leurs bras autour de leurs corps, avant de se donner un fort élan avec leurs mains, pour glisser le plus vite possible le long des pentes. Des grondements secouaient régulièrement les pans de montagne dès qu'ils se projetaient en une nouvelle course.

Ils semblaient faire des courses aux étranges règles. Je filmai les pokémon, qui semblaient tout faire pour s’arrêter au plus près du bord de la falaise, sans la dépasser pour ne pas choir dans le torrent qui écumait en contrebas. Les pokémon observaient longuement les traces de leur freinage, comme s’ils étudiaient la largeur et la profondeur, discutant longuement en poussant de petits grincements aux accents métalliques. Les petits golems s’assemblaient ensuite pour délibérer et partager des rocs, dans un ordre hiérarchique pas des plus simples à appréhender, tant j’avais du mal à comprendre leurs standards. J’espérais juste que le professeur Sorbier pourrait en savoir plus, alors que j’essayais de zoomer au maximum sur les pokémon pour pouvoir offrir un bon aperçu de leurs caractéristiques physiques. Les Racaillou avaient visiblement une attitude très compétitrice, puisqu'ils essayaient également de remonter le plus vite possible.

Je continuai mon voyage, observant les dénivelés de la montagne, lorsqu’au détour d’un talus, un petit sifflement m'interpella. Je vis un homme bedonnant surgir des nombreux sentiers couverts par la végétation touffue qui dessinait un matelas vert sur les racines des montagnes enneigées.

- Toi, m’appela t-il d’une voix épuisée, prends ça !

Complètement prise au dépourvu par cette apparition si soudaine et incongrue, je ne pus rien faire que rester passive, simple spectatrice de mon corps gelé. L’homme haletant me mis une pierre dans les mains, avant de poursuivre sa route et de s’enfoncer de nouveau dans le labyrinthe de petits sentiers recouverts de vignes et de ronces folles.

Je m’éloignai avec prudence de cet huluberlu, avant de penser à regarder l’objet qu’il m’avait passé.

J’hésitai, comme si je ne voulais pas savoir ce qu’il m’avait donné. Une arme ? Un disque de données ? Une pokéball ?

Je me forçai à baisser mon regard ... pour poser les yeux sur une pierre.

Une pierre. Une simple pierre, un banal caillou marron qu’on aurait pu trouver partout et qui ressemblait aux cailloux qui se trouvaient sous mes pieds, à peu près similaires à celui que je venais de pousser dans le lac.

Pourtant, quand je retournai la pierre, je pus voir qu’elle était étrangement érodée. Il y avait une marque verticale, comme si elle avait été taillée par une lime. On aurait dit une sorte de visage triste, banale paréïdolie qui me faisait voir un reflet sur cette face lisse et dépourvue des aspérités qu’il y avait au verso.

La pierre était légèrement fraîche, comme si elle avait été mouillée récemment.

Lors que je voulais la jeter, j’eus comme un doute. Soit ce gars était un fou échappé de l’asile, soit ce caillou avait un peu plus de valeur qu’il n’y semblait au premier abord.

Une petite voix, discordante et inimitable, m’incita à la garder … juste au cas-où. Je me surpris à la mettre dans la poche de ma veste, l’alourdissant inutilement, tout en restant plongée dans mes pensées.

Une part de moi m'implora de balancer ce truc et de ne plus m'en soucier, mais cette petite idée ne me plaisait pas. Cette voix, qui avait un timbre moralisateur, me tira un frisson, tout en étant tendre et douce, en un mélange incohérent. C'était la première fois que je n'appréciais pas son timbre.

- Tais-toi, me dis-je en reprenant, me débarrassant l’esprit de ces idées parasites. J'ai autre chose à faire que de m'occuper des cailloux.

Je repris ma route en direction de la ville voisine. A part des lampadaires disposés de temps à autre, il n’y avait que peu de présence de l'activité humaine. Un petit Statitik était posé sur un des lampadaires, tapi en attendant qu’une proie passe dans le halo lumineux qui dissimulait sa toile. Un petit Papinox fit l’erreur de se laisser attirer par la lumière et s’englua dans la toile, attirant le prédateur qui n’avait plus qu’à capturer son futur repas.

Malgré tout ce que certains pouvaient dire, ces insectes étaient laids et aucun ne me faisait réellement envie. Je préférai les observer et les étudier de loin, plutôt que d’un capturer et d’en dresser un. Peu d’insectes trouvaient grâce à mes yeux, ni mignons, ni forts. En fait, ils sont vraiment répugnants lorsqu’on les voit de près, avec leurs yeux à facettes et leurs antennes, leurs membres couverts de poils …

Je frissonnai de dégoût, ne pouvant plus chasser ces images, ces photographies de ma tête. C’était des images que j’avais eu lorsque je cherchais des trucs à la fois dégoûtants et si intrigants, qu’on ne pouvait s’empêcher de les regarder en étant partagé entre stupeur et écœurement. Au final, chercher volontairement la vidéo d’un médecin retirer un Larvibulle d’une plaie suintante de pus était un peu du même niveau qu’un gamin qui fixait le contenu de son mouchoir usagé.

Le lendemain, alors que j’approchais de Unionpolis, une scène suspicieuse se joua sous mes yeux, tandis que je sortais de ma tente. Alors que l’aube ne pointait pas encore le bout de ses rayons, un véhicule s’arrêta sur un bas côté de l'autoroute surplombant le chemin. Un homme mal rasé, sentant encore la nuit et le lit, sortit de sa berline. Après un rapide coup d’oeil aux alentours, il prit un carton et le jeta dans le bas côté, avant de remonter dans sa voiture.

Après avoir entendu la portière claquer et les pneus crisser sur le macadam, je me dirigeai vers la boite, afin de l’ouvrir. A mon horreur, je vis qu’une boule de fourrure ensanglantée se pelotonnait dans un coin. Sans hésiter, je mis le pokémon blessé dans une pokéball. Je rangeai ma tente en urgence, avant de courir vers le centre pokémon le plus proche.

J’entrai en trombe, pour déposer le pokémon en grillant la priorité à un homme élégamment vêtu, qui semblait trop nonchalant pour que ce soit un cas urgent.

- Il a été abandonné, expliquais-je en revoyant la caisse dégringoler de plusieurs mètres, tendant la pokéball.

L’infirmière la prit pour l'emmener en salle de soins, avant de revenir s’occuper du dandy que j’avais fort peu élégamment doublé. Toujours nerveuse, je dus faire face à la préposée qui remplit un bordereau pour le petit Evoli.

- Apparemment, ce pokémon n’est pas enregistré. Il ne figure sur aucun de nos registres de pokémon disparus. Allez au commissariat, pour signaler l’abandon et voir s’il a été déclaré volé. Si ce n’est pas le cas, vous en serez légalement la dresseuse.

Je suivis le conseil, me dirigeant vers un grand bâtiment situé en face. La façade de béton noircie par la pollution était d’une laideur à pleurer et le fronton massif imposait un vague respect pour l’autorité.

J’entrai à l’intérieur, un peu intimidée à l’idée d’entrer dans ce lieu dédié à faire respecter la loi.

Une fois dedans, ce n’était pas si différent d’un simple bureau de poste, avec un accueil, des portraits officiels, des tableaux de service punaisés et des fonctionnaires en uniforme.

J’avançai vers la personne à l’accueil qui ne me calcula absolument pas, occupée à signer de la paperasse, utilisant un vieux tampon encreur à moitié sec.

- Euh, excusez-moi, l’interpellais-je d’une voix un peu gênée et fluette.

L’homme à la courte chevelure blanche releva la tête, ses lunettes cachant une expression d’agacement.

- C’est pour quoi ? répondit-il avec un ton très abrupt.

Un peu mal à l’aise, je lui tendis le bordereau rempli par l’infirmière et commençai à vouloir parler, mais il me coupa.

- Vous voulez vraiment déposer plainte ? Ce genre d’affaire n’est pratiquement jamais élucidée. Il y a peu de chances que ce soit une affaire qui finisse autrement que par un classement sans-suite.

J’insistai, montrant ma carte de dresseuse en exigeant d’être reçue et il finit par céder, se levant en soupirant.

- Suivez moi, je vais prendre votre déposition, accepta t-il sans le moindre enthousiasme.

Il héla un collège pour le remplacer, avant de se diriger vers une petite pièce ou était indiqué en grosses lettres « Adjudant Chef Didier Legermain. »

Il prit ma disposition, avec un ton ennuyé, ne s’embarrassant pas de demander des détails, avant de me la faire signer.

Deux heures, c’est ce que je dus attendre, le temps que toute l’administration se mette en branle.

Après ces deux heures, un agent de plus arriva avec un sac contenant des potions. Je les reconnus comme étant mes potions vides, utilisées pour soigner mes compagnons et que j'avais oubliées de ranger. J'avais été trop pressée de mener le pokémon au centre pour tout vérifier lorsque j'avais plié bagages.

- Chef, on à …

- Adjudant chef, coupa l’agent, glacial.

- Adjudant chef, nous avons fait les vérifications. Aucun Evoli n’a été déclaré disparu. Le pokémon n’a pas de maître connu et la dresseuse Noyer est considérée comme gardienne légale depuis sa capture. On a trouvé quelques bouteilles sur la route, près d’un bivouac et des traces de pneus.

- Sans numéro de plaque d’immatriculation, il n’y a aucune chance de retrouver le véhicule. Vous n’avez pas non plus vraiment identifié le conducteur en raison de l’obscurité …

L’adjudant au regard glacial soupira et remplit un document.

- L’Evoli est votre, à moins que le propriétaire d’origine soit retrouvé. Dans ce cas, le pokémon sera conservé par la justice, confié à la S.P.P. le temps qu’un jugement soit rendu.

Je serrai les poings, refusant que ce pauvre pokémon soit de nouveau confié à un organisme sordide sous-financé et se reposant essentiellement sur des bénévoles épuisés et un personnel sous-payé et mal formé.

- Je vais retirer la plainte, décidais-je en me relevant.

- 750 pokédollars de frais administratifs, puisque vous vous retirez de vous-même, annonça t-il.

- Pardon ? m'étouffais-je. Pour quelle raison ?

- Vous retirez vous-même la plainte, elle n’est pas classée sans-suite. Elle ne sera classée ainsi que dans un an, si aucun élément nouveau n’est ajouté au dossier. En attendant, vous devrez vous soumettre à toute demande concernant la pièce à conviction que vous avez trouvée, vous n’en êtes que la gardienne et non la propriétaire.

- La pièce à conviction est un pokémon, fis-je froidement et … ce dilemme est abject. 750 pokédollars, c’est du vol !

Il haussa les épaules.

- Ce n’est pas moi qui fais la loi, je l’applique juste, dit-il sans aucun sourire narquois, juste avec une froideur et une rigidité bureaucratique. Aussi, pour l’abandon de déchets que vous avez reconnus comme étant vôtres dans votre déposition, expliqua t-il en montrant le sac de potions, cela fera 1 500 pokédollars d’amende.

- Mais, m’étouffais-je sous le poids de cette injustice, c’est des méthodes de truands !

- Et 2 000 pour outrage à agent, finit-il. Maintenant, je vous conseille de payer sur le champ et de vous calmer si vous souhaitez éviter une garde à vue.

Ma colère bouillait en moi, mais je me retins, obligée de dépenser presque toutes mes économies durement gagnées. Je lâchai l’argent, sous les yeux d’un autre fonctionnaire bedonnant, qui prit tout son temps alors que je contenais mon impatience à grand peine.

Je sortis de ce commissariat absolument ulcérée. Une belle justice que voilà, tracassière avec les gens ordinaires, laxiste avec les délinquants et les criminels.

- Bande de pourris, sifflais-je entre mes dents, en un parfait accord avec la petite voix agaçante qui me servait de conscience.

Si jamais je me retrouvais en situation difficile, je n’avais guère de chance de compter sur ces fumiers. Tous des pourris, aucun n’ayant eu d’amabilité ou de respect.

- Mais tu as tes pokémon, Elizabeth, me dis-je. Tu peux compter sur eux …