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Egaré de Lief97



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» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 08/04/2019 à 14:36
» Dernière mise à jour le 11/06/2019 à 21:11

» Mots-clés :   Action   Guerre   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Suspense

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Chapitre 5 : À tombeau ouvert
« Qu'est-ce qu'un ignorant ? Un esprit sans passé. » Victor Cherbuliez.


***


Seul le vent assourdissait le bruit de leurs pas sur la terre desséchée. La lune, cachée par d’épais nuages, ne diffusait qu’une infime lumière pâle leur permettant à peine de voir où ils mettaient les pieds. Lyco avançait prudemment, imité par Lacrya, qui restait vigilante quant aux déformations de la chaussée sur laquelle ils cheminaient en silence.

La zone commençait à se faire plus vallonée, presque montagneuse. Dans l’obscurité, ils distinguaient maintenant des hautes collines à la place des plaines rases, et des pics rocheux s’accumulaient de plus en plus, détachant leurs silhouettes longilignes sur le ciel faiblement éclairé.

Le chemin suivait parfois des pentes plus ou moins fatigantes à gravir. Plume, sorti de sa pokéball, voletait autour d’eux, prenant parfois un peu d’avance sans même avoir besoin de se faire rappeler à l’ordre.

Sans pokémon pour les guider dans la pénombre, aucun d’eux n’aurait été assez rassuré pour avancer de nuit dans une région inconnue. Ils étaient probablement déjà dans les Hauts-Éboulis ; ils avaient pris pas mal d’altitude depuis le début de la soirée. Il paraissait évident qu’il s’agissait de la région qu’ils devaient traverser deux jours durant pour parvenir à Bhataïs.

Pendant la plus claire partie de la nuit, ils marchèrent donc sans un mot, guidé par leur fidèle partenaire à plumes, et harassés par les montées et les portions de terrain qu’il fallait parfois presque escalader, tant elles étaient pentues.

Mais, alors que le vent qui soufflait sans discontinuer commençait enfin à balayer les nuages du ciel, les étoiles et la lune commencèrent à éclairer un peu mieux les environs. Peu de temps avant que la route ne se décide à redescendre, droit vers une immense vallée aux frontières incertaines.

— Les ravins et les tombeaux dont parlaient cet homme doivent être là-dedans, commenta Lyco. Il va falloir descendre et traverser tout ça.
— Ça a l’air accidenté, même si on ne voit pas grand-chose… soupira Lacrya en réponse.

Elle aperçut le garçon hocher la tête à sa gauche.

— On va essayer de descendre au fond avant le lever du soleil. On devrait facilement trouver de quoi s’abriter dans un caveau, ou au fond d’un ravin. On avisera sur place. Tu veux une pause, avant ?
— Non, ça ira. Allons-y.

Ils reprirent la route. Plume passa au-dessus d’eux en battant des ailes, les accompagnant alors qu’ils reprenaient leur route en prenant garde de ne pas glisser dans la descente. Le cri lointain d’un cornèbre retentit, suivi de près par l’aboiement d’un lougaroc solitaire.

Comme de providentiels avertissements.

Ils restèrent sur leurs gardes, prêts à se saisir de leurs armes, tout en poursuivant leur route, infatigables.



***


La zone n’était pas si impraticable qu’escompté. Une fois la longue et pénible descente franchie, ils avaient rapidement atteint les premières ravines. Il leur paraissait impossible, avec l’obscurité, de trouver un quelconque chemin pour les emmener sur les hauteurs, au sommet des ravins. Ils avancèrent donc au fond, constatant malgré leur vision amoindrie que la végétation y poussait facilement.

Ils effrayèrent quelques rattatas occupés autour d’une charogne ; et leur périple dans les Hauts-Éboulis, de nuit, continua dans ce silence presque sépulcral seulement brisé par leur respiration laborieuse et le souffle discret d’un vent du nord.

Lacrya commençait à sérieusement faiblir. Le rythme de sa marche diminuait peu à peu. Lyco s’adaptait sans rien dire. Elle comprit rapidement que lui aussi peinait à conserver leur vitesse de marche. Le changement de rythme ne paraissait pas lui déplaire, au contraire.

Le ciel ne tarda pas à s’éclairer des premiers rayons matinaux du soleil. D’abord il se teinta d’un bleu nuit, puis d’un pourpre brillant qui commença à disparaître quand le jaune apparut. Lacrya, subjuguée par la beauté de la région dans laquelle ils avançaient, constata rapidement que les dires de l’homme, au village à la tête de dracaufeu, étaient vrais.

Ils débouchèrent bientôt sur une grande ouverture au bout de leur ravin, qui s’élargissait et formait une sorte de vaste cercle d’où partaient des dizaines d’autres crevasses, plus ou moins larges et empruntables. Dans la roche tout autour d’eux, des trous avaient été taillées et sculptées à la main. De nombreuses cavités étaient visibles, certaines maintenues fermées par des portillons en bois pourrissants, et d’autres ouvertes à l’air libre.

Lyco désigna un renfoncement où se trouvaient deux tombeaux adjacents ; un rocher était dressé à proximité et leur fournirait de l’ombre une bonne partie de la journée.

— Allons voir ceux-là, lâcha-t-il, le souffle court.

Elle ne répondit pas ; elle n’en avait pas la force. Elle siffla pour rappeler Plume. L’oiseau, qui planait loin au-dessus d’eux, plongea en piqué pour les rejoindre.

Lyco poussa le portillon de bois grinçant qui permettait d’accéder au premier caveau. Il y entra avec méfiance, la main sur le pommeau de son poignard. Lacrya resta en arrière, vérifiant qu’il n’y avait aucun mouvement à proximité. Son regard s’arrêta toutefois sur une empreinte, à moins de quatre ou cinq mètres de leur abri de fortune. Elle s’approcha et s’accroupit devant, en fronçant les sourcils.

— Un incisache ?
— Lacrya ! l’appela Lyco depuis le tombeau.

Elle se releva, pleine d’appréhension, et se baissa pour entrer par l’ouverture du caveau. Elle mit quelques secondes à s’accoutumer à la pénombre.

La salle, basse de plafond, s’enfonçait assez loin dans la roche. Il y faisait frais, et une odeur de renfermé stagnait. Mais l’endroit semblait capable de les accueillir pour la journée. Un pan de mur avait été taillé pour former une sorte de long banc sur toute la longueur de la pièce. Lyco y avait déjà étendu sa couverture.

— On a de quoi dormir, dit-il d’un air rassuré. Je vais bloquer la porte avec ces pierres, pour qu’on puisse dormir tranquilles. Il vaut mieux rappeler Plume, tu crois ?
— Oui. Il n’aimera pas rester enfermé entre quatre murs pendant toute une journée.

Le roucoups, resté à l’entrée du tombeau et n’osant visiblement pas s’aventurer à l’intérieur, croassa, compréhensif. Une lumière bleue ne tarda pas à le ramener dans sa ball, que le garçon posa en évidence près de sa couchette de fortune.

Lacrya, en posant ses affaires, remarqua d’un bref coup d’œil que le fond du caveau était en partie effondré, à cause du temps. D’anciennes gravures au style pré-épidémie semblaient avoir subsisté aux années, mais difficiles de les discerner clairement avec le peu de lumière qui entrait dans le tombeau. Les couleurs semblaient écaillées.

En parlant de tombeau, Lacrya ne repéra ni cercueil, ni pierre tombale, ni corps. L’endroit avait sans doute été pillé depuis belle lurette, et l’occupant des lieux avait sûrement été dévoré par les charognards il y avait un bon moment déjà.

Lyco parvint à bloquer la porte avec plusieurs des pierres irrégulières qui se trouvaient au fond ; bien qu’en bois et d’aspect fragile, le portillon semblait tenir bon face aux quelques essais du garçon pour la forcer avec ces cadenas de fortune. De l’extérieur, l’ouvrir devait relever d’un véritable tour de force. La seule chose qui inquiétait Lacrya était qu’une partie de la porte semblait avoir été lacérée autrefois. Un rai de lumière filtrait, suffisamment grand pour y passer une main.

— J’ai vu une empreinte d’incisache, dehors, signala soudain Lacrya, malgré ses paupières lourdes.

Elle s’allongea dans le même temps, alors que le garçon rejoignait sa couchette à moins d’un mètre d’elle, en soupirant.

— Un groupe ou un solitaire ?
— Solitaire.
— On ne devrait pas trop s’inquiéter, alors.
— On fait des tours de garde ?
— Pas la peine. Si quelqu’un ou quelque chose essaie d’entrer, ça nous réveillera tout de suite.

Elle hocha la tête. Le vent de dehors soufflait de plus en plus fort, et elle entendait déjà les rares portes ayant survécu sur les caveaux voisins en train d’être malmenées par les intempéries. La leur avait bien grincé en s’ouvrant, nul doute qu’un bruit louche les réveillerait en sursaut.

Lacrya ferma les yeux, et le sommeil vint à elle presque instantanément.



***


Elle fut réveillée brusquement, en plein-après midi, par des sons inhabituels. La jeune femme se redressa d’un coup sur sa couchette, et mit quelques secondes à se souvenir où elle se trouvait. Le rai de lumière qui filtrait par la porte de bois lui rappela brutalement qu’il faisait jour. Elle tourna la tête pour croiser le regard intrigué de Lyco, lui aussi réveillé. Il posa un doigt sur ses lèvres pour l’inciter au silence et se leva lentement.

À pas prudents, il s’approcha du portillon en bois, prenant soin de ne toucher à aucune des pierres qui le bloquaient, et jeta un œil dehors. Lacrya, curieuse et méfiante, le suivit doucement et s’accroupit à côté de lui pour pouvoir elle aussi observer l’extérieur.

Le rocher situé de biais devant leur tombeau obstruait une bonne partie de leur vision. Mais de là où ils se trouvaient, ils pouvaient tout de même apercevoir un pan de canyon creusé d’autres caveaux, ainsi que quelques ravines qui disparaissaient au loin.

Et surtout, ils voyaient nettement le groupe de mercenaires qui venait vraisemblablement du nord, comme eux, et avançait sans hésiter vers la direction opposée. Il y avait donc véritablement des gens qui sillonnaient la région ; même si ceux-là avaient clairement l’air d’être le genre de type peu recommandable qui s’en prenait aux premiers venus. L’homme du village précédent avait bien fait les prévenir.

— Ils vont vers Bhataïs, on dirait, murmura Lyco. Vers le sud, en tout cas.
— Ils sont bien équipés, tu vois ça ? renchérit la jeune femme, étonnée.

Ils devaient être une douzaine ; tous des hommes. Certains portaient des parties d’armure qui luisaient au soleil. D’autres, équipés de tenues de cuir de pokémon, portaient ostensiblement armes à feu et sabres aiguisés. La moitié d’entre eux transportaient sur leur dos de gros sacs certainement remplis de vivres. Lyco et Lacrya ne repérèrent aucune pokéball visible, pas de charrette ni de monture.

Pas de pokémons de compagnie en vue non plus. Ils ne tardèrent pas à disparaître derrière le rocher, et ils entendirent leurs voix s’étouffer et s’éloigner de plus en plus, jusqu’à complètement disparaître. Le vent prit tranquillement la relève.

— Ils ne font que passer, constata bien vite Lacrya en baillant.
— Ils doivent connaître le coin…

Lyco se releva, et retourna s’assoir sur sa couverture en massant son épaule endolorie.

— Dormons. On a encore trois ou quatre heures de sommeil devant nous. Faudra se méfier, cette nuit. On risque de tomber sur leur camp par hasard…
— Plume nous guidera, ajouta-t-elle en retournant s’allonger.

Lyco ne répondit pas, fatigué et se contentant d’acquiescer silencieusement dans la pénombre du tombeau. Il s’allongea. Son regard se perdit dans le plafond de pierre ; une légère migraine naissait dans son front. Il ferma les yeux, comprenant qu’un flot de souvenirs risquait de l’assaillir.

Il appréhendait toujours ces moments-ci ; il avait la sensation désagréable d’être plongé de force dans une sorte d’hallucination plus vraie que nature, sans parler des vertiges et des maux de tête qui pouvaient s’ensuivre. Mais en même temps, il avait hâte de remplir les vides de son esprit ; il lui restait un peu moins d’une année de mémoire à retrouver. Même s’il n’en récupérait que des fragments, ou des pans assez flous, il préférait ça à rien du tout.



***


— Donc ce sont des traces de pokémon ? s’étonna Lyco.
— Des triopikeurs, oui. Ils attaquent rarement les hommes, mais si tu les effraies, ils peuvent se montrer dangereux.
— J’imagine, oui.

Les sillons larges et profonds laissés par les mystérieuses créatures avaient de quoi inquiéter. Bien que parfaitement droites et parallèles, les lignes creusées dans la terre asséchée étaient donc complètement naturelles. Lyco aurait juré qu’il s’agissait d’une fabrication humaine.

Il releva la tête et observa les dunes au loin ; la frontière du désert de la Désolation était comme une région à part, quand il y réfléchissait. Darren, resté à ses côtés pour étudier les traces, s’éloigna sans rien ajouter, vers le petit camp que les autres installaient dans leur dos.

Les pillards passaient presque plus de temps ici qu’à leur véritable repaire, dernièrement. Darren avait commencé à drastiquement diminuer leurs attaques, et le commerce commençait à florir dans la région. Les Forêts de l’Est, dans leur dos, leur offraient un toit, de la nourriture et un abri naturel contre l’armée de Mervald.

Mais la frontière du Désert leur permettait de garder contact avec l’extérieur, et de ne pas laisser leurs armes rouiller sans rien pour les remplacer. Lyco serra le poing et sentit les muscles de ses bras se tendre ; il avait de moins en moins la sensation d’avoir besoin d’une épée.

La Némélia 1 qui coulait dans ses veines lui offrait suffisamment de force pour affronter n’importe qui en duel. Les triopikeurs ne lui faisaient pas non plus si peur que ça. Il laissa sa main redescendre et se poser sur la poche cachée dans le revers de sa veste. Une toute petite fiole plastifiée contenant une dose du produit dormait là.

Aucun pillard ne savait, évidemment. Ni qu’il en possédait, ni qu’il en avait bu ; ni même que la Némélia 1 existait. Il n’était dans leur groupe que depuis trois mois. Même s’il commençait enfin à s’intégrer, et à accepter leur confiance, il ne pouvait se résoudre à leur parler de tout ça. Qui savait quelles idées ça pourrait leur donner ? Comment le verraient-ils, en apprenant que la grande partie de son talent au combat venait en fait de là, plus que de son passé de chasseur de pokémon ?

En rejoignant le camp en passe d’être monté, Lyco croisa le regard admiratif du jeune Bakrom ; bien qu’âgé de seulement dix-sept ans, soit cinq années de moins que lui, il avait un véritable don pour l’escrime. Leurs entraînements réguliers l’avaient déjà prouvé plusieurs fois.

Lyco n’avait pas emmené cette fiole ici pour rien ; il comptait la lui faire boire discrètement, si possible à son insu. Il serait bien plus rassuré de savoir que Bakrom pourrait défendre les pillards au même titre que lui. Il était le seul en qui il avait pleinement confiance.

Évidemment, il ne faudrait pas tout lui faire boire d’un coup. Une goutte par-ci, une goutte par-là… ça n’éveillerait pas autant les soupçons de voir Bakrom s’améliorer petit à petit.

Le jeune homme s’approcha de Lyco et lui tendit une épée de bois.

— Un petit duel ?

Lyco sourit et s’empara de la lame d’entrainement. Il se mit en garde.

— Avec plaisir.

Alors que les deux garçons commençaient leur entraînement quotidien, sous le regard bienveillant de quelques pillards déjà installés auprès du feu, Amelis cessa de bêtement tripoter l’amulette taillée qui pendait à son cou. Elle les observa curieusement, et son regard scrutateur porté sur Lyco ne tarda pas à éveiller les soupçons de ce dernier.

En plein échange de coups, il tourna la tête dans sa direction, intrigué par la sensation dérangeante d’être fixé plus que de raison. Il croisa brièvement le regard de la jeune femme, et son inattention lui fut fatale ; Bakrom le désarma avec habileté. Lyco le félicita et ramassa son sabre, avant de vérifier près du feu. Il surprit un sourire amusé sur le visage d’Amelis et se sentit défaillir l’espace d’une seconde.

Il reprit bien vite ses esprits, concentré sur son combat. Mais il ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter à ce sujet. Depuis quelques temps, il avait l’impression étrange qu’Amelis se rapprochait de lui. Et le pire, c’était qu’il ne trouvait pas ça désagréable, au contraire. Mais entre sa promesse tacite de ne plus s’attacher à personne, et ses sentiments naissants, il ne savait plus quoi faire.

Cette contradiction avait de quoi l’angoisser ; même si ces derniers temps il avait commencé à être convaincu de ne plus accorder d’attention à Mervald, et de ne plus quitter le groupe, il avait peur de s’engager sérieusement dans quoi que ce soit.

Le vent pouvait tourner n’importe quand. Les tragédies s’abattaient généralement sans prévenir. Il n’était pas obligé de se dépêcher à trouver une solution, mais il avait quand même une boule dans la gorge quand il pensait à ce que pouvait bien lui réserver l’avenir…

Mettant provisoirement ses hésitations de côté, il se remit en garde. Il lança le signal du début du combat, et Bakrom, avec son énergie habituelle et cette éternelle lueur de reconnaissance et d’admiration au fond des pupilles, se jeta sur lui pour tenter de l’emporter de nouveau.




***


La nuit commençait tout juste à tomber, dehors. Lyco venait juste d’entasser les pierres sur un côté du tombeau, et d’ouvrir le portillon de bois, avec précaution. Il sortit la tête dehors. Il attendit une minute ainsi, et ne nota rien d’autre que la présence d’un abo endormi sous un rocher, à plusieurs dizaines de mètres de là. Il retourna à l’intérieur d’un air soulagé.

— Rien en vue. Dépêchons-nous de reprendre la route.

Lacrya acquiesça. Elle fit sortir Plume de sa pokéball ; le roucoups ébouriffa ses plumes et lança un bref cri en guise de bonjour.

— Va te dégourdir les ailes, Plume. On va pas tarder à partir. Fais un petit tour, on sait jamais. Y’a peut-être des gens dans les parages.

L’oiseau cria de nouveau, et sautilla jusqu’à l’entrée. Lyco maintint la porte ouverte pour le laisser sortir, et le rapace ne tarda pas à écarter les ailes pour prendre son envol et disparaître dans le ciel violacé.

Lacrya rangea leurs couvertures dans leurs sacs, pendant que le garçon étouffait le feu de bois qu’ils avaient allumé pour réchauffer le peu de provisions qu’il leur était resté. Le garçon accepta son sac avec un remerciement et signala à sa comparse :

— On va devoir chasser, ou au moins trouver de quoi grignoter, cette nuit. Il ne nous reste plus grand-chose, et je ne sais pas quand on arrivera précisément à Bhataïs. Tu te sens prête ?
— Oui, bien sûr. Plume pourra nous aider à trouver des proies faciles. Il voit bien dans le noir.

Ils effacèrent rapidement les traces de leur passage, et sortirent à l’air libre, respirant l’air tiède des Hauts-Éboulis. Ils entendirent le lointain appel d’un canidé par-delà les ravins ; et sans plus un regard vers la caveau qui les avait abrités pendant cette pénible journée passée à somnoler plus qu’à dormir, ils s’avancèrent en direction du canyon qui filait en direction du sud. Les dernières lueurs du soleil couchant ne tardèrent pas à disparaître et à plonger leur environnement hostile dans la pénombre.

Guidés par la lumière chatoyante des étoiles et les battements d’ailes discrets de leur compagnon à plumes, ils passèrent sous une arche de pierre naturelle et marchèrent, silencieux.

Leur objectif n’était plus très loin, mais le danger rôdait encore. Le groupe de mercenaires était passé là environ quatre heures avant eux ; il allait falloir éviter prudemment leur campement… s’il était possible à éviter.

Pour le moment, le ravin s’étirait en ligne droite, sans intersection, et sans donner l’illusion de leur offrir la moindre opportunité de dévier leur route.

Aucun d’eux n’eut le courage de faire part de ce détail à l’autre : ils préféraient voir ça en temps voulu que d’appréhender inutilement. La fatigue était déjà un souci bien assez lourd à porter…