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» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 15/11/2018 à 21:37
» Dernière mise à jour le 25/03/2019 à 12:28

» Mots-clés :   Action   Guerre   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Suspense

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Chapitre 9 : Faiblesse passagère
« Ou se rebeller ou trahir, on ne nous laisse guère de choix, à nous les simples. » Umberto Ecco.


***



Lyco observa la plaquette qu’il venait de piocher.

« Participant ».

Encore.

Depuis qu’il était là, il avait « participé » à tous les tournois. La chance n’était définitivement pas de son côté.

Galok passa son chemin et laissa les prisonniers suivant piocher leurs plaquettes, dans un silence plein d’angoisse.

Le soleil frappait fort dans la grande cour entourée de murs. Le brouhaha qui retentissait dans l’Arène, dans leur dos, était audible jusqu’ici, comme un bourdonnement continu.

Le public était déjà installé dans les gradins. Prêt à admirer un énième massacre. Lyco ne comprenait toujours pas pourquoi les gens venaient si nombreux pour regarder des effusions de sang. Aimaient-ils ça ? Ou venaient-ils par obligation ? Leurs acclamations le poussaient à croire que sa première idée était la bonne. C’était pourtant la pire des deux.

Galok, dont le crâne chauve semblait presque briller à cause du soleil, fit un geste sec du bras, et ordonna :

— Allez, les exemptés ! On va vous raccompagner à la niche !

La moitié des prisonniers s’éloignèrent sous bonne garde. Parmi eux, Amelis et Boralf, ainsi que Lacrya. Karyl et ses brutes étaient bien aux côtés de Lyco, Othéus et Hank aussi, et le colossal Darren, avec quelques-uns de ses pillards.

Le garçon espérait ardemment qu’il n’y aurait pas de nouveau des pokémons aussi terribles que les polagriffes de la dernière fois…

— Mettez-vous en file ! ordonna brusquement Galok. Allez, mes p’tites merdes, plus vite ! Combien seront là pour me revoir à votre retour, à votre avis ? La moitié ? Un tiers ? Aucun ?

Des soldats ricanèrent. Les ignorant, Lyco suivit docilement les condamnés dans un tunnel passant sous les gradins. Des gardes lourdement armés ouvrirent les portes.

Le parfum du sang et du combat semblait déjà enivrer l’air qui s’engouffra dans le couloir.

Comme un seul homme, les prisonniers se ruèrent à l’extérieur, dans le but de récupérer rapidement les armes de meilleure qualité, entassées au centre du terrain.

Lyco ne jeta pas un seul coup d’œil aux gradins, ni même à la loge de Mervald dont il connaissait désormais l’emplacement. Depuis que le Mutant Combat, Garûnd, l’avait affronté dans l’Arène déserte.

Le jeune homme retrouva son arme de prédilection, avant de lancer une longue dague à Hank, qui peinait à suivre le rythme. Il l’accepta en le remerciant brièvement. Othéus avait déjà ramassé une hache et les quatre autres membres du groupe qui les accompagnaient avaient eux aussi attrapé de quoi se défendre.

Sans se concerter, le groupe se plaça dans son coin habituel de l’Arène, assez près d’une colonne et non loin d’un mur. Karyl fit des gestes grossiers dans leur direction, en allant se positionner avec sa bande un peu plus loin. Les pillards, menés par l’impassible Darren, restèrent au centre de l’Arène.

— Ils n’ont peur de rien, remarqua une femme du groupe. Ils seront la première cible des monstres, à cet endroit.

Hank haussa les épaules :

— Tant pis pour eux. Ils ont l’air de savoir ce qu’ils font, après tout. En tout cas, je compte sur vous pour qu’on s’en sorte, une fois encore.
— Espérons qu’il n’y aura pas de mauvaise surprise, lâcha Othéus avec amertume.

Il fallut patienter quelques minutes avant qu’une des grilles ne se décide enfin à se soulever dans un grincement atroce. De petits pokémons à la peau jaune et dont le dos étaient recouverts de piquants plus sombres en jaillirent en couinant, excités. Excités et véloces.

Lyco fronça les sourcils. Il sentit qu’il en avait déjà vu, ou croisé ; mais leur nom ne lui revînt pas.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-il, prudent.
— Des sablaireaux, répondit nerveusement Othéus. C’est pas bon du tout. Fais attention, ils sont vifs et leurs griffes font des carnages. Espérons qu’ils ne creuseront pas de tunnels pour nous prendre par surprise…

Les sablaireaux commencèrent à accourir vers les prisonniers disséminés dans l’Arène. Le garçon en vit certains plonger littéralement dans le sol et disparaître dedans en y laissant des monticules de sable et de terre. De véritables foreuses dotées de vie !

Mais ce qui le choqua le plus fut le nombre de sablaireaux qui continuèrent de sortir des grilles béantes.

Ils sortaient, encore, encore et encore.

Difficile de les dénombrer, mais Lyco n’aurait pas été étonné d’apprendre qu’ils étaient une centaine. Sachant qu’il y avait une trentaine de prisonniers dans l’Arène.... et ces bestioles agressives étaient plus grosses que ce qu’il avait cru, maintenant qu’elles s’approchaient.

Son sabre s’abattit sur le premier venu qui s’était jeté dans sa direction sans faire preuve de la moindre once de méfiance. Le sang arrosa ses jambes, mais il parvînt à l’ignorer pour se concentrer sur le combat.

De nouveau, son instinct prit le contrôle de son corps et sa lame siffla, coupant les membres et tranchant la peau presque cuirassée de ces pokémons affamés.



***


Le combat lui parut durer une éternité.

D'autres vagues de sablaireaux avaient régulièrement jaillis de la grille à l'autre bout de l'Arène. Ces pokémons, plus intelligents que prévu, étaient retors. Ils communiquaient par des cris et couinements, et coordonnaient leurs attaques pour les avoir de tous les côtés. Sans compter ceux qui jaillissaient du sol sans prévenir.

L'un des sablaireaux parvint à esquiver l’épée de Lyco ; il se faufila sous sa garde et le garçon sentit une intense douleur sur sa gauche, au niveau de la hanche. Son bras s'abattit et la lame trancha le pokémon avec une précision et une vitesse à glacer le sang. Il sentit un liquide chaud couler sous ses vêtements. L'entaille était peut-être profonde, mais il n’avait pas vraiment le temps de vérifier.

Dans son dos, le groupe peinait à survivre. Il s’était placé légèrement plus vers le centre de l'Arène que ses comparses afin d'attirer les Pokémon vers lui. Ça ne marchait pas vraiment. Il recula petit à petit, en continuant de lacérer les bêtes qui lui sautaient dessus ; il valait mieux se rapprocher et resserrer les rangs.

Un homme du groupe, assez âgé, semblait blessé au visage. Une large griffure qui avait bien failli emporter son œil droit à tout jamais, mais s’était contenté d’une vilaine entaille vermeille.

Le bruit d'une grille qui se soulevait attira l’oreille de Lyco. Il pivota vers le bout de l’Arène et frémit.

Deux créatures vertes en sortirent. Des bêtes à carapace, aux longs membres fins, et au regard fixe. Un déclic lui permit de se rappeler, cette fois.

Des insécateurs.

Rapides, si on se fiait à leur apparence. Et leurs griffes étaient bien plus inquiétantes que celles des sablaireaux. Le garçon remarqua cependant que les ailes dans leur dos avaient été découpées sauvagement pour l’occasion. Du sang bleu s'en écoulait lentement.

— Attention ! s’écria Othéus dans son dos. Lyco, reste loin d’eux !

Il acquiesça en se rapprochant davantage du groupe, avant de taillader un sablaireau qui comptait le prendre à revers.

— Leurs ailes, c'est normal ? lança-t-il pour couvrir le raffut qui baignait dans l'Arène.
— Oui, répondit le vieillard. Les soldats les atrophient pour qu’ils ne s’enfuient pas ! Et pour les rendre furieux, évidemment…

Les insécateurs se précipitèrent vers un prisonnier solitaire. L'un d'eux enfonça sa lame jusqu'à la garde dans la poitrine du malheureux. Il retomba sur le sol, inerte, avant que les deux insectes ne se mettent à le dévorer avidement. Quelques sablaireaux se dépêchèrent de le rejoindre pour partager le repas sous les applaudissements et les huées du public. Cet instant terrible leur offrit un moment de répit.

Lyco en profita pour constater les pertes.

Deux membres du groupe de Karyl étaient morts, au sol, et la plupart des solitaires l'étaient également. Les pillards étaient au complet, bien qu’acculés par une petite horde. En se retournant vers son propre groupe, le garçon constata qu’il n’y avait que des blessures légères ; et une fatigue extrême.

Le combat s'annonçait mal. Il espéra de tout cœur qu'il n'y aurait rien de plus que ces insécateurs à tuer. Sinon...

Lyco sursauta quand, soudain, un nuage de poussière lui obstrua la vue. Un sablaireau, plus malin que les autres, profita du rideau sableux pour se jeter sur lui avec une vélocité incroyable.

Le pokémon percuta lourdement son bras armé ; il lâcha le katana involontairement et il retomba au sol en tintant. Il aperçut le sablaireau se rouler en boule à sa droite, avant d’hérisser ses lames dorsales. Il courba l’échine et se tendit ; prêt à se projeter vers lui.

Soudain, Othéus se porta à sa hauteur et abattit sa hache sur le pokémon, qui mourut en lâchant un faible râle qui se termina en pauvre gargouillis.

— Merci… lâcha Lyco en récupérant vivement son arme.

Othéus ne lui répondit pas, et posa un genou à terre. Vérifiant rapidement qu’il n’y avait pas de danger immédiat aux alentours, le jeune homme s’approcha du vieil homme en posant une main sur son épaule :

— Othéus ! Tu es blessé ?

Il était pâle et semblait avoir des difficultés à respirer. Il secoua la tête négativement.

— Non, je… souffla-t-il avec hésitation. J’ai mal à la poitrine, mais… je n’ai pas été touché.

Un sablaireau bondit vers lui : la femme blessée du groupe intervînt et le tua avant qu’il ne puisse trop s’approcher. Elle s’écria par-dessus son épaule :

— Les coups de fatigue, ça nous arrive tous ! T’en fais pas, Othéus, on te couvre !

Lyco se résigna à laisser le vieil homme exténué en retrait, derrière lui : car un des insécateurs accourrait vers eux. Apparemment, il avait encore faim, celui-là !

Faisant fi de sa blessure à la hanche, Lyco se positionna dans sa trajectoire avec la ferme détermination d’en sortir indemne.



***


Othéus sentait que son corps peinait. Il était à la lisière de l’inconscience. Un voile noir commençait à danser devant ses yeux.

Son cœur battait si fort dans sa poitrine qu’il avait l’impression de s’être transformé en tambour. Sa respiration sifflante et irrégulière, ainsi que sa gorge sèche, ne l’aidaient pas à se rassurer.

Autour de lui, il entendait les cris, le public, les pokémons. Les sablaireaux ne devaient plus être très nombreux, mais le vieil homme aperçut Lyco du coin de l’œil, qui semblait danser en évitant comme par magie les taillades d’un insécateur furieux.

Et Othéus, immobile et souffrant, prenait soudain conscience que son corps n’arrivait plus à suivre. Ce qui était en train de lui arriver lui faisait vaguement penser à un malaise cardiaque ; chose que son père avait souvent expérimenté avant lui. Même si dans son cas, ça ne paraissait pas si douloureux que ça, et probablement pas aussi grave.

Mais il était bien incapable de se relever pour l’instant. Ses muscles noués et ses articulations n’allaient pas l’aider dans ce sens…

Othéus ferma les yeux. Les sons autour de lui s’atténuèrent. L’obscurité de ses paupières le rassura. La douleur dans sa poitrine s’apaisa légèrement. Il se sentit vaciller.

Un bruit sourd lui fit rouvrir les yeux.

Il croisa le regard mort d’un de ses partenaires. Un des plus anciens. Un homme dans la force de l’âge.

Un camarade d’ordinaire plein d’énergie.

Un ami.

Il avait une plaie béante au niveau de la gorge, d’où s’écoulait un flot visqueux de sang.

Othéus releva la tête.

L’insécateur leva sa lame.

Un katana trancha l’abdomen de l’insecte, et du sang bleu éclaboussa le vieil homme. Celui-ci, bien conscient maintenant, se releva en tremblant et en reculant à petits pas. Lyco venait de surgir de nulle part. Ce jeune homme était décidément un allié de choix ! Mais aussi un partenaire un peu inquiétant… sa vitesse n’était clairement pas celle d’un humain normal.

Othéus mit un peu de temps à comprendre que les deux insécateurs étaient morts. De la main de Lyco. Ce garçon avait vraiment quelque chose qui le rendait différent. Il avait dû apprendre à se battre très tôt, Othéus ne voyait pas d’autre explications à son talent. Et… il y avait sûrement autre chose. Une facette plus sombre, héritée de son passé houleux avec le gouverneur, peut-être ?

— Ça va mieux ? demanda Hank en saisissant le bras d’Othéus.
— Oui, oui, ça va… répondit-il en grimaçant un peu.

Sa poitrine le lançait, mais moins qu’avant. Il pouvait tenir debout, c’était déjà bien.

Il sentit Hank lui remettre sa hache en main, et au même moment, la grille de l’Arène se souleva. Encore. Othéus fixa la silhouette qui sortit lentement de l’ombre, avec la patience et la lenteur du prédateur qui sait que ses proies ne peuvent lui échapper.

Othéus frémit.

Un drascore.

Ce genre de pokémon, en plus d’être pourvu d’une carapace solide, de membres costauds, d’une agilité remarquable et de pouvoir empoisonner en une seule morsure, risquait fort d’être rapide et malin. Othéus en avait déjà vu sur des marchés noirs, ou dans des combats illégaux. Il savait qu’ils représentaient une menace terrible.

C’était ce genre de créature qui indiquait que Mervald avait envie de voir un bain de sang. Un monstre pareil était presque impossible à tuer sans armes à feu.

— Je m’en occupe ! lança Lyco.

Les autres le fixèrent avec incrédulité. Othéus s’avança :

— Attends ! La moindre égratignure peut t’empoisonner et te tuer ! Arrête, Lyco ! Ta vie ici est aussi précieuse que la nôtre !
— Je serais prudent. Je suis sûr qu’avec l’aide de Darren, on peut en venir à bout ! Faites attention, il y a encore deux ou trois sablaireaux, là-bas.

Et sur ce, il courut vers le groupe des pillards qui était la cible du drascore, car situé en première ligne.

Othéus soupira.

Ce garçon… qui était-il vraiment, pour se montrer si négligent à l’égard de sa propre vie ?



***


Le drascore se déplaçait vite.

Bien plus vite que ne l’imaginait le colossal Darren.

Il tenait fermement son épée, alors que le drascore lui tournait lentement autour en l’observant sous tous les angles. Cette bestiole paraissait attentive, et méfiante. Dès que quelqu’un s’approchait un peu trop près, le monstre crachait des nuages de poison. Résultat : Darren était isolé et les autres incapables de l’approcher. Le drascore jouait avec lui. Il était persuadé d’avoir déjà gagné ce duel, en l’isolant avec ce mur de vapeur toxique.

Le drascore réitéra une frappe. Son long bras pourvue d’une sorte de pince claqua près du visage de Darren, qui rejeta son buste en arrière et frappa de sa lame dans le même mouvement.

L’acier rebondit sur les écailles du monstre et des étincelles retombèrent dans la poussière en grésillant.

Un dard jaillit de sa gueule entrouverte, et le colosse l’évita par pur réflexe ; le projectile se planta dans le sol sans faire de victimes. D’un bref coup d’œil, le colosse remarque que le dard en question faisait la taille d’un couteau de chasse.

Soudain, Darren sentit que quelqu’un était dans son dos. Il crut à un énième danger, mais une autre œillade lui apprit que c’était Lyco. Et le jeune homme semblait décidé à tuer le drascore. Une alliance provisoire s’imposait pour survivre. Elle paraissait évidente ; et Darren le savait bien. Sa colère mise de côté, il reprit un peu confiance et se prépara à se coordonner avec le garçon.

Le drascore cracha un nuage de gaz vers Lyco, qui le contourna largement avant de passer à l’attaque par un côté. Darren décida de passer à l’offensive au même moment, de front.

Le pokémon n’allait pas pouvoir parer chacune de leurs attaques !

Le sabre de Lyco rencontra le bras musculeux du Pokémon Poison. L’épée de Darren, elle, trouva une ouverture… avant d’éclater en mille morceaux contre l’exosquelette si solide du drascore.

Les morceaux de métal retombèrent dans le sable avec un bruit sourd.

Darren, éberlué, regarda le pommeau de l’épée qu’il tenait, et la lame brisée, devenue inoffensive… avant de voir que la tête du drascore pivotait dans sa direction. Un dard empoisonné pointa au fond de sa gorge, prêt à jaillir.

Lyco fut plus rapide encore. Il dérapa près de Darren et le bouscula. Le dard se ficha dans le sol à moins de dix centimètres du pied du jeune homme, qui frappa vers le haut, droit dans la bouche encore ouverte du monstre.

Le pokémon lâcha un cri modulé et désagréable à l’oreille alors que la lame du jeune homme plantée dans sa gorge, ressortait par sa nuque. Du sang empoisonné jaillit, et Lyco et Darren s’éloignèrent en vitesse alors que le drascore s’ébrouait dans tous les sens.

Après deux minutes passées à lutter en s’agitant comme un forcené, la bête tomba, frémit un long moment, puis se figea.

Il était mort.

Le public accueillit ce moment avec une salve de cris et d’applaudissements surexcités.



***


Le retour à la cellule se fit dans un silence déprimé.

Karyl et sa bande comptaient trois morts, celui d’Othéus deux, et la dizaine de prisonniers solitaires qui les avaient accompagnés n’étaient plus de ce monde.

L’ambiance n’était pas vraiment à la fête.

Lacrya et les autres leur posèrent de multiples questions. Othéus leur répondit, mais ils remarquèrent vite sa fatigue. Lyco leur raconta brièvement qu’il avait eu mal sans raison apparente dans l’Arène, et ils lui ordonnèrent de prendre du repos. Là encore, il peinait à respirer et on voyait bien qu’il se retenait de dire qu’il avait toujours mal.

Assis sur son matelas, Lyco regardait ses mains d’un air songeur.

Il avait tué aujourd’hui. Beaucoup. Plus que d’habitude, et plus facilement encore. Comme s’il s’habituait à… ce corps aux capacités étranges. Il avait de plus en plus peur de savoir d’où lui venaient ces facultés meurtrières. C’était comme s’il avait toujours eu un sabre entre les mains. Comme s’il avait grandi pour se battre.
Il évitait les gestes brusques du mieux qu’il le pouvait ; sa blessure à la hanche était douloureuse, surtout depuis que l’adrénaline était retombée. Lacrya, après un moment passé auprès du feu, rejoignit son matelas près du sien en soupirant.

— Tu as vraiment tué deux insécateurs et un drascore à toi tout seul, alors ? interrogea-t-elle en le fixant avec intérêt.
— Darren m’a aidé pour le drascore.
— T’es pas croyable…

Elle se tut, puis désigna sa hanche du menton.

— T’es au courant que ça saigne, là ?
— Oui, je sais. Mais de moins en moins.
— C’est une hémorragie, t’es débile ou quoi ?
— Molch va passer nous soigner, non ?
— Peut-être seulement dans quelques jours, imbécile !

Elle se retourna, tendit le bras vers un matelas abandonné avant d’en déchirer les tissus. Elle se rapprocha de lui et dit d’un ton sec :

— Soulève ton t-shirt.

Il obéit sans broncher, surpris de son ton autoritaire. Elle noua les morceaux de tissu entre eux et les les passa au-dessus de la tête avant de serrer le tout sur sa blessure. Il grimaça quand la douleur fusa dans la plaie. Elle acheva de l’attacher sans un mot et esquissa un sourire hésitant.

— Tiens-le bien, et veille à ce que ça reste serré. Ça t’évitera de te vider de ton énergie.
— Merci.
— Y’a pas de quoi.

Elle s’allongea sur le dos, sur son matelas, et ferma les yeux pour dormir. Lyco garda une main appuyée sur ce précieux bandage de fortune, et jeta un œil furtif vers les pillards.

Ils étaient en forme, et toujours au complet. Certains étaient blessés, mais en comparaison avec les autres prisonniers, leurs griffures paraissaient très superficielles. Eux aussi semblaient taillés pour le combat. Ils savaient se battre et survivre. Était-ce à cause des conditions de vie du monde extérieur ? Les pillards affrontaient certainement moult dangers là-haut… mais quels dangers, exactement ?

Il s’endormit presque sereinement, en pensant à plein de choses et en revivant le tournoi de la journée dans ses rêves. Et surtout ses cauchemars.

En pleine nuit, il fut brutalement réveillé par les gémissements de douleur d’Othéus, agité de spasmes devant le feu de camp.