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Effacé de Lief97



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» Auteur : Lief97 - Voir le profil
» Créé le 06/10/2018 à 17:46
» Dernière mise à jour le 20/03/2019 à 16:52

» Mots-clés :   Action   Guerre   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Suspense

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Chapitre 2 : L'Arène
« L’esclavage fait des monstres. » Giacomo Casanova.


***


Les prisonniers furent enchaînés à la va-vite à leur sortie de cellule. En dix minutes à peine, la file de trente hommes et femmes de tout âges fut escortée dans les larges couloirs souterrains, par des soldats armés et équipés comme s’il s’agissait d’une guerre. Même Lyco, qui n’était là que depuis la veille, sentait la tension dans l’air. Il savait qu’à n’importe quel moment, tout pouvait dégénérer entre soldats et prisonniers. Les regards échangés entre eux en disaient long sur leurs envies meurtrières. Certains s’agitaient dans la file, alors que les soldats tâtaient leurs armes dépareillées d’un air menaçant.

Presque en fin de file, Lyco suivait le rythme en essayant de mémoriser le chemin qu’ils empruntaient ; ça pouvait peut-être servir, pour une potentielle évasion. Il se voyait mal continuer à vivre enfermé ici-bas alors qu’il n’avait pas le moindre souvenir.

Mais il comptait surtout ingérer le plus d’informations possibles pour assouvir sa curiosité. Où était-il, et pourquoi ? Et qui était-il ? Les questions capitales lui restaient toujours en tête. Mais personne ne voulait lui répondre.

Il était un Effacé, point. Voilà ce qu’ils semblaient tous lui dire et lui répéter.

Soudain, il remarqua que le couloir s’élargissait encore, et qu’il montait légèrement. Le sol de pierre fut remplacé par un sol sec et pierreux, mais naturel. La lumière du soleil inonda le corridor et fit briller les menottes des prisonniers presque aveuglés.

Lyco resta stupéfait quand il sentit un vent frais lui souffler au visage. Des sensations familières ! Il se rendit compte qu’il souriait bêtement.

Soudain, le tunnel s’arrêta. Les prisonniers et les soldats sortirent à l’air libre, dans une sorte de grande cour au sol légèrement sableux. Il faisait assez chaud. Il comprit qu’ils étaient dans une région désertique, ou au climat très sec. Lyco regarda autour de lui, curieux.

Des murs de pierre de trois mètres de haut entouraient la cour ; mais de grandes doubles-portes étaient visibles dans le mur face aux prisonniers, à une cinquantaine de mètres de là. Elles devaient mener vers la grande architecture qui les dominait, derrière le mur.

Les soldats libérèrent les mains des prisonniers sans cesser de les menacer de leurs armes, avant de se retirer et de fermer les portes. Lyco repéra des sentinelles armées de fusils sur les remparts. Ils étaient prisonniers de la cour. C’était quand même plus agréable qu’une cellule sombre et humide.

Il vit que Lacrya et Othéus s’éloignaient vers un coin de la cour, certainement pour y parler à l’écart des oreilles indiscrètes. Lyco leur courut après et les interpella :

— Hé !

Ils se retournèrent, surpris. Une certaine méfiance se dégageait d’eux, comme d’habitude.

— C’est quoi, ici ? demande-t-il.

Othéus haussa les épaules et répondit comme si c’était évident :

— Le seul lieu où les prisonniers peuvent se dégourdir les jambes sans craindre de mourir.
— Et ce bâtiment, derrière les portes ?

Lacrya soupira.

— C’est l’Arène. On n’en voit que l’arrière, d’ici. Mais il y a des chances pour qu’on s’y retrouve bientôt.

Il sentit que c’était le moment ou jamais de poser des questions. Ses interlocuteurs semblaient plus enclins à répondre, maintenant qu’ils étaient dehors.

— C’est quoi, exactement, cette histoire d’Arène ?

Othéus grimaça. Visiblement, ce n’était pas une bonne chose.

— Des prisonniers sont choisis au hasard parmi nous tous pour y mener des combats à mort. Contre des pokémons.

Le vieil homme marqua une pause, puis passa une main sur son front fatigué :

— Tu sais quoi, petit ? Je vais t’en dire un peu plus, histoire que tu nous lâches...

Stupéfait, Lyco les regarda s’éloigner. Ils allaient accepter de répondre à ses questions, enfin !

Il leur emboîta le pas avec fébrilité et excitation.

Othéus le mena vers un coin de la cour, légèrement plongé dans l’ombre. D’autres prisonniers, assez âgés pour certains, venaient de s’y asseoir. Lyco comprit qu’il s’agissait du groupe constamment installé près d’un des feux, dans la cellule souterraine.

Othéus s’assit au milieu d’eux. Lacrya, la fille qui le suivait comme son ombre, resta debout, bras croisés et adossée au mur. Lyco se plaça en face du vieil homme quand celui-ci lui fit signe de s’asseoir.

— Rappelles-moi ton nom, petit ?
— Lyco.
— Tu sais que tu es un Effacé. Tu n’as plus de souvenirs.
— Oui…
— Ça signifie que tu as dû faire quelque chose qui a fortement déplu au gouverneur qui dirige cette prison. Est-ce que le nom de Mervald te dit quelque chose ?
— Euh… non. Des soldats m’ont posé la même question hier, quand je me suis réveillé.
— C’est le nom du gouverneur. Il a dû ordonner que ta mémoire soit effacée après que tu lui aies porté préjudice. C’est rare, qu’il y ait des Effacés parmi nous. D’habitude, ils ne tiennent pas longtemps en Arène.

Lyco resta silencieux. Othéus ne lui laissa pas le temps de digérer l’information.

— Des tournois sont organisés en Arène, régulièrement, par le gouverneur Mervald en personne. Il fait combattre des prisonniers contre des pokémons. Le peuple aime beaucoup ce genre de… divertissement.
— Le peuple ? Où vit-il ?
— Dans Méranéa, la ville juste à côté de l’Arène… ou plutôt ce qu’il en reste. Mais ce n’est pas le sujet. Tout à l’heure, la moitié d’entre nous seront choisis pour aller en Arène. La moitié d’entre nous risque fort d’y rester. Et toi aussi. Prépare-toi bien à cette idée, petit.

Lacrya grimaça.

— Je suppose que si t’es Effacé, tu n’as aucun souvenir sur la manière de te battre ? La démonstration de Karyl hier nous l’a prouvé. T’es mal barré.

Elle dit cela avec un ton qui n’avait rien de compatissant. Elle paraissait indifférente et lasse à la fois. Lyco en fut vexé, avant de montrer brièvement les huit autres personnes installées près de lui, pour changer de sujet.

— Vous faites partie d’un groupe ?
— Oui, et j’en suis le chef, répondit Othéus. Se regrouper avec les bonnes personnes, c’est le seul moyen d’être en sécurité. Que ce soit dans la cellule ou dans l’Arène. Par contre, petit, tu n’en feras pas partie. Tu vas nous attirer des ennuis si tu restes avec nous. Et un dernier conseil ; évite d’énerver les soldats avec tes questions. Ils seraient moins cléments que nous, surtout le chauve, Galok. Des histoires circulent à son sujet.

Lyco acquiesça, inquiet. C’était l’un des soldats qui l’avait ramené en cellule.

— Alors maintenant que tu en sais plus sur cet endroit, laisse-nous. J’ai accepté de te donner un peu d’aide, maintenant c’est à toi de te débrouiller.

Lyco réprima son envie de s’énerver face au vieil homme. C’était tout ? Trois misérables réponses alors qu’il y avait encore tant de questions à poser ?

Lacrya approcha d’un pas :

— T’as compris ? Barre-toi. Sinon je vais t’en coller une, et je peux t’assurer que tu t’en souviendras longtemps.

Lyco soupira et se releva, et sans plus accorder un regard aux membres du groupe, il rejoignit le centre de la cour. Les prisonniers étaient rassemblés en petites bandes, disséminées un peu partout.

Certains roulaient des mécaniques pour impressionner les solitaires comme lui ; mais ces derniers étaient toutefois une minorité. Le groupe de Karyl, à l’écart, comptait neuf personnes, seulement des hommes. Dans les autres groupes, les femmes semblaient bien intégrées, et Lyco repéra même l’une d’elle qui semblait le chef d’une maigre coalition de cinq membres.

Et lui, il était seul. Sans souvenirs, sans rien. Il se sentait vide. Il voulait sauter par-dessus les murs de la cour, découvrir le monde qui l’entourait, trouver quelqu’un qui pourrait lui dire qui il était précisément. Et savoir s’il retrouverait ses souvenirs un jour.

Mais en attendant ce moment, hors de question de se laisser aller. Il était déterminé à retrouver son passé, et à quitter cette prison dans laquelle il s’était mystérieusement retrouvé.



***


L’heure passée dans la cour fut longue.

Il s’était trouvé un coin d’ombre où la température n’était pas trop élevée, et avait attendu. Puis des soldats étaient entrés dans la cour. Les prisonniers avaient été placés en ligne. Tout le monde avait été menotté, et chacun leur tour, ils avaient été forcés de piocher à l’aveuglette des plaquettes de bois sculpté qu’un soldat avait placé dans une petite boîte.

Lyco remarque que les premiers à avoir reçu leurs plaquettes semblaient soit rassurés, soit terrifiés.

Quand le soldat s’arrêta devant lui, avec la boîte ouverte qui semblait l’attendre, il y plongea la main avec appréhension, avant d’en ressortir une plaquette.

Dessus, il était écrit maladroitement : « Exempté ». Il devina qu’il était donc exempté d’Arène. Il ne risquait donc pas de mourir aujourd’hui.

Plus loin à sa gauche, Othéus piocha une plaquette « Exempté » à son tour, au vu de son petit sourire satisfait. Lacrya grimaça ; elle n’avait pas eu de chance, semblait-il.

— Bien, déclama le chef des soldats, le dénommé Galok. Les prisonniers qui iront en Arène ont été choisis. Les autres, approchez. On va vous ramener en cellule.

Lyco suivit donc la petite trentaine de personnes, qui comme lui était exemptée d’Arène. Il n’aimait pas trop l’idée de retourner dans les sous-sols, mais c’était toujours mieux que de se battre contre des pokémons. En tout cas, d’après les dires d’Othéus et Lacrya.

— Un instant ! lança une voix forte, venue d'un mur en hauteur.

Tout le monde leva les yeux en l’air ; un homme grand, la trentaine, les cheveux blonds brillant au soleil, les dominait depuis le mur d’enceinte. Ses épaules étaient encadrées par une somptueuse cape pourpre et or. Ses traits restaient difficiles à discerner à cause du contre-jour.

Les soldats s’inclinèrent aussitôt :

— Gouverneur Mervald ! s'exclama Galok en signe de salut.
—Relevez-vous, soldats, répondit tranquillement le gouverneur.

Il avait l’air sympathique au premier coup d’œil. Lyco peinait à croire que cet homme à l’air charismatique puisse être un gouverneur aux mauvaises intentions ; il se dit qu’il était peut-être un véritable tueur, après tout, et qu’il méritait sa place en ses murs. Le gouverneur, habillé richement, était encadré de deux silhouettes restées en retrait derrière lui. De loin, il était difficile de les discerner. Mais Lyco parvenait à voir les traits droits et harmonieux du visage de Mervald. Il avait des yeux clairs, sûrement bleus.

— Je suis venu vérifier l’état des combattants de l’Arène, s’expliqua le gouverneur d’un ton autoritaire. Mais vous avez oublié un de mes ordres, n’est-ce pas ? Je veux que l’Effacé se batte dès son premier jour.
— Oh ! Oui, monsieur, bafouilla Galok. Pardonnez mon oubli.

Le chauve fit volte-face et me pointa du doigt :

— Toi, avec les autres, là-bas ! Allez, demi-tour !

Lyco tressaillit et vit des pistolets se pointer sur lui. Il n’avait définitivement pas le choix. Il recula et se plaça près de Karyl, qui était également de la partie, apparemment. Lacrya poussa un léger ricanement et Lyco lui jeta un regard noir. Cette fille ne lui plaisait pas du tout.

— Bien, conclut Mervald. Le tournoi débute dans 10 minutes. Dépêchez-vous de remettre ces prisonniers en cellule. Je vous promets un beau spectacle aujourd’hui !



***


Lyco fut placé dans la file des prisonniers, avant d’être contraint d’avancer dans une sorte de tunnel lugubre et sombre. Les gardes étaient partout, les escortant prudemment.

Un bruit résonnait au plafond, comme un mélange d’applaudissements, de cris, et de martèlement de pieds. Cela ressemblait à s’y méprendre à un rugissement inconnu qu’aurait poussé un monstre énorme.

— Le public est dingue, aujourd’hui… marmonna un prisonnier devant le garçon.

Il déglutit difficilement. Il allait se battre dans une arène, à mort, devant des gens qui n’allaient même pas tenter de lui venir en aide ? Ces personnes étaient venues assister à la mort d’humains dans une arène ? Ce genre d’individu existait-il vraiment ? Était-ce… normal, d’assister à ce genre d’évènement ?

De grandes portes s’ouvrirent devant la file de prisonniers. La lumière et la clameur d’un public en extase s’engouffra dans le couloir.

— Les armes ont été déposées au centre de l’arène, merdeux ! cria Galok. Maintenant, allez-y !

Ils avancèrent sous la menace des armes de leurs geôliers. Lyco jaillit à l’air libre avec eux et la porte se referma dans son dos. Il releva la tête, stupéfait.

Des gradins s’élevaient tout autour d’eux. Des foules immenses s’amassaient sur des bancs, criaient, huaient, dans un vacarme assourdissant. L’arène était vaste, au sol sec et un peu sableux. A certains endroits, des rochers ou des piliers rompaient la monotonie du terrain, parfaitement plat, et offraient un peu d’ombre.

Lyco remarqua que les prisonniers couraient vers le centre de l’Arène. Il les suivit avec un petit temps de retard, et repéra un tas d’armes blanches ; des couteaux, des épées, des sabres, des haches de toutes les tailles. Les autres se servirent et il n’eut guère le choix. Il ne restait déjà plus que deux armes ; un glaive un peu rouillé qui paraissait trop lourd, ou un sabre plus long, dont la fine lame avait un aspect plutôt fragile. Il hésita, puis prit ce dernier. Il avait au moins l’air un peu aiguisé, comparé à l’autre.

Une fois en main, il ne ressentit rien de particulier. L’arme était plus lourde qu’il n’y paraissait, et visiblement moins maniable. Il n’avait peut-être jamais manié ce genre d’armes auparavant, ou alors ses souvenirs étaient résignés à ne pas remonter à la surface. Il allait devoir improviser.

La voix de Lacrya retentit dans son dos :

— Allez, les gars, en formation ! Et n’oubliez pas, s’ils nous refont le coup des Griknot, on grimpe sur les colonnes, c’est clair ?

Lyco fit volte-face ; une bonne moitié des prisonniers formaient un cercle, et ils étaient déjà en garde, armes à la main. Il reconnut les membres du groupe d’Othéus parmi eux. Il comprit mieux le principe d’une alliance dans la prison.

Les autres prisonniers étaient restés dans les environs, seuls ou à deux, mais aucun ne paraissait être un habitué de l’arène, à part le groupe de Karyl, qui avait lui aussi opté pour la technique du cercle.

Lyco soupesa son sabre encore une fois. Il était surpris par sa lourdeur. Pourtant, la lame paraissait bien trop fine. Cette chose était-elle vraiment assez aiguisée pour blesser ?

— C’est un katana, lâcha Lacrya. Utilise-le à deux mains.

Il sursauta. La jeune fille s’était rapprochée.

— Pas de bonne qualité, mais mieux que ce glaive.
— Un katana…
— Ouais.

Lacrya ramassa le glaive et le ramena vers son groupe. Un des hommes, déjà armé, s’en équipa en deuxième main.

Puis soudain, une grille se souleva à l’extrémité de l’Arène. Lyco frémit en voyant surgir plusieurs chiens gris et noirs. Les bêtes, apparemment affamées, se ruèrent vers nous en lançant des aboiements féroces.

— De simples medhyénas ! cria Lacrya. Tenez vos positions !

Pris de court, Lyco vit un des pokémons lui foncer dessus, sa gueule écumante prête à refermer ses crocs sur lui. Bien que de petite taille, le medhyéna semblait féroce et ses crocs dangereux.

Sans réfléchir, il abattit son sabre alors que la bête lui sautait dessus ; il fut écœuré quand il sentit la lame s’enfoncer dans la chair. Du sang gicla et un morceau de fourrure s’arracha alors que le pokémon retombait, inerte, au sol. Une entaille fine mais profonde était visible sur tout le côté droit de son corps.

Lyco faillit lâcher son arme, dégoûté d’avoir fait une chose pareille. Mais en même temps rassuré. Ce « katana » paraissait plus efficace que prévu. Il n’avait rencontré que peu de résistance.

Un regard vers les autres lui apprit que des pokémons identiques avaient été tués par le groupe de Lacrya. Plus loin Karyl et ses hommes se démenaient face à deux chiens, en vociférant.

Puis Lyco arrêta son regard sur un prisonnier solitaire.

Cinq pokémons s’acharnaient à la réduire en charpie sanguinolente. Fasciné et terrifié, il ne parvenait pas à détacher son regard de cet hideux spectacle.

Le public hurlait, dément. Il semblait s’extasier à chaque goutte de sang versée. Leurs applaudissements et leurs visages excités le répugnaient autant que la mort de ce pauvre prisonnier.

— Qu’est-ce que c’est que ça ? s’affola un des hommes du groupe de Lacrya, dans son dos.

Lyco suivit son regard ; la grille au bout de l’arène s’ouvrait sur un autre pokémon. Les derniers medhyénas furent éliminés à quelques mètres par Karyl, avant que tous les prisonniers ne portent leur attention sur la créature monstrueuse qui émergea des profondeurs de l’Arène.

Le garçon sentit son corps trembler devant l’abomination qui s’avança dans l’Arène.

Lacrya lâcha un cri de surprise :

— Un rhinoféros !

Le pokémon, un colosse au corps gris et à l’aspect rocailleux, était inquiétant. Ses pattes, épaisses comme des troncs d’arbres, ses yeux perçants, sa gueule écumante, sa corne imposante… tout participait à le rendre terrifiant.

— Ils veulent vraiment notre mort, ces enfoirés ! s’écria Karyl. C’est de l’artillerie lourde !

Lacrya émit un rire faux :

— C’est à cause de toi, l’Effacé ! Mervald doit vraiment te haïr. Ce rhinoféros est là pour qu’aucun de nous ne s’en sorte, mais surtout pour que toi, tu meures !

Lyco se retourna pour la regarder dans les yeux.

— Moi ? Mais je ne me souviens de rien ! Pourquoi ne pas m’avoir tué, plutôt que de m’effacer mes souvenirs ?
— Qu’est-ce que j’en sais, moi ? s’énerva Lacrya. Le gouverneur est connu pour son plaisir à assister à des bains de sang. Othéus avait raison de dire que tu allais nous attirer des problèmes… heureusement qu’il n’est pas là pour voir ça !
— Allions-nous ! proposa sèchement Karyl, visiblement déterminé à survivre.

Le rhinoféros ne semblait pas pressé d’attaquer. Il n’avait fait que quelques pas hésitants dans l’Arène, observant curieusement le public déchaîné autour de lui.

— Bonne idée ! railla Lacrya. Comme ça, on va mourir tous ensemble !
— Comment on tue cette… chose ? demanda Lyco en reculant lentement auprès d’eux.
— C’est un type roche, alors vise ses yeux ou sa bouche ! rétorqua Karyl avec hargne. C’est le seul moyen, abruti !

Le rhinoféros sembla enfin porter attention sur eux. La peur étreignit Lyco. Sans s’en rendre compte, il avait fermement resserré ses mains autour de la poignée de son arme, à s’en blanchir les phalanges.

Le pokémon poussa un rugissement avant de foncer vers eux, corne baissée.



***


Quand le pokémon chargea vers un groupe de prisonniers armés de haches, Lyco ne put que le regarder faire, paralysé par sa violence. Une sorte de terreur fascinée semblait avoir pris possession de ses muscles.

Comment un pokémon aussi imposant pouvait se déplacer si vite ?

Comment tuer cette bête immonde à la peau de pierre ?

Toutes ces questions furent balayées de son esprit, tout comme le groupe de prisonniers fut balayé par le monstre en furie.

Il regarda un homme projeté vers un rocher, et entendit très nettement sa colonne vertébrale se briser contre le granit, tandis que son corps retombait dans la poussière, complètement désarticulé.

Il observa ce qu’il restait encore d’une femme à demi-piétinée qui parvenait encore à hurler, à l’agonie.

Puis son regard sombra vers ce jeune homme rachitique au bras ensanglanté, qui reçut un violent coup de corne qui l’envoya valser à dix mètres de là, jambes arrachées.

Et sur un autre, à la poitrine béante d’où jaillissait une fontaine de sang.

Et les spectateurs, cette foule rugissante… ils acclamaient, criaient, quémandaient toujours plus de violence.

Qu’était-il arrivé à ce monde pour que ces hommes et ces femmes se régalent devant ce spectacle de cruauté ? Pourquoi ces gens étaient-ils si… malsains ?

— Attention ! prévînt Lacrya, à l’intention de son propre groupe.

Le rhinoféros, après avoir blessé gravement quelques personnes et en avoir fait fuir certaines à l’autre bout de l’Arène, s’était retourné vers eux. Et Lyco était placé en plein milieu de la trajectoire que semblait vouloir prendre le monstre.

Il croisa le regard du pokémon avec crainte. Il n’y lut rien. Rien, si ce n’est une haine infinie et une rage insatiable.

Le monstre rugit et se rua vers lui. Le sol trembla à son approche. Lyco resserra l’emprise de ses mains sur son katana.

Puis, répondant uniquement à son instinct de survie, il se jeta sur le côté au dernier moment, en sentant l’haleine du Rhinoféros contre sa nuque.