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» Auteur : Goldenheart - Voir le profil
» Créé le 16/10/2016 à 19:09
» Dernière mise à jour le 16/10/2016 à 19:21

» Mots-clés :   Drame   Kalos   Présence de personnages de l'animé   Présence de shippings   Suspense

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Chapitre 21 - When you're not here...
Malheureusement, c’est souvent quand elle n’est plus auprès de nous qu’on se rend compte à quel point on aime une personne.


~*~


- Sacha ?

Je reconnais cette voix qui m’appelle. Je sais que c’est elle. Je me retourne ; elle est juste derrière moi. Ses yeux d’un bleu pur et cristallin brillent d’un éclat joyeux.

- On voyagera toujours ensemble, n’est-ce pas ?

Je souris. La réponse est d’une évidence frappante. J’ouvre la bouche pour lui répondre ; soudain, des flammes se dressent entre elle et moi. Sa silhouette, suivie de celles de tous mes autres amis, disparaît, avalée par le brasier.

- Non ! Attendez, revenez !

Mon cri se perd dans le vacarme des flammes. Je veux courir ; mais je ne peux pas bouger.

Puis une faux rouge sang me transperce le torse.



~*~

Lâchant un cri terrifié, j’ouvris brusquement les yeux, et me redressai brusquement dans mon lit. Le corps en sueur, le cœur battant à cent à l’heure, je regardai frénétiquement autour de moi. Allongé à mes côtés sur les draps, Pikachu cligna des paupières avec un gémissement ensommeillé. Un coup d’œil par les rideaux entrouverts de la fenêtre m’apprit que l’aube était proche, à en juger par la teinte rosée du ciel.

Je soupirai tandis que mon pouls décélérait lentement. Encore ce rêve. Cela faisait maintenant trois jours d’affilée que je le faisais, et chaque nuit, je me réveillais en sursaut exactement comme maintenant. Et ce, toujours au même moment, lorsque cette étrange faux fonçait sur moi, et me…
Le corps parcouru par un frisson glacial, je portai la main à mon torse, comme si je m'attendais à y trouver le trou béant que je sentais à chaque fois que je me faisais transpercer en rêve.

- ALLEZ, DEBOUT LÀ-DED-

Genzo s’interrompit au moment où il me vit debout en train de m’habiller.

- Ah bah… ? T’es déjà levé gamin ? Bien, ça ! T’as déjà pris le rythme ?

J’aurais bien voulu lui répondre que cela n’avait rien à voir, que si j’étais déjà levé aux aurores, c’était à cause d’un stupide cauchemar qui me poursuivait depuis trois nuits. Mais rien que l’idée d’en parler me mettait de mauvaise humeur, alors je préférai me taire, ne voulant pas démarrer la journée sur de plus mauvaises bases. Genzo me regarda passer devant lui sans un mot, avant de hausser les épaules. Sans doute associait-il mon silence à un caprice d’adolescent… enfin qu’importe.

Je sortis au dehors ; le jour commençait à doucement pointer le bout de son nez. L’air frais de la nuit s’était déjà réchauffé sous les rayons naissants du soleil, et ce fut une brise tiède qui me caressa le visage.

Je sentis un regard sur moi ; les pattes repliées contre son corps, Pikachu me fixait avec insistance. Dans ses yeux, je lus sa question silencieuse : « Qu’est-ce qui ne va pas ? »

J’aurais aimé pouvoir lui offrir une réponse, mais la vérité était que j’ignorais moi-même ce qui m’arrivait. Cela faisait quelques temps que ce rêve, où je revoyais mes amis se faire consumer par les flammes, s’imposait à mon esprit la nuit. Et à chaque réveil, une fois les premières minutes d’effroi passées, c’était un profond sentiment de mélancolie qui m’envahissait.

Je sortis le pétale bleu de ma poche. Depuis mon arrivée ici, et le début de notre entraînement, j’avais pris l’habitude de le garder sur moi. Chaque fois que je posais les yeux dessus, je pensais à mes amis, que j’avais laissés sans nouvelles. Alors je me posais toujours les mêmes questions : où étaient-ils ? que faisaient-ils ? Étaient-ils à ma recherche, ou avaient-ils laissé tomber ? Allaient-ils seulement bien ?

Et curieusement, tandis que je me tourmentais l’esprit de toutes ces interrogations, un seul nom, un seul visage parmi les trois qui me manquaient revenait sans cesse dans mon esprit.

« Serena… »


~*~

Serena sursauta violemment, réveillée par un étrange sentiment. Elle avait eu l’impression d’entendre quelqu’un prononcer son nom. Mais elle eut beau regarder autour d’elle, personne ne faisait attention à la jeune fille assise sur ce banc depuis plusieurs heures, les yeux perdus dans le lointain. Elle soupira. Sans doute avait-elle rêvé…

Une sensation de caresse sur son bras lui fit rouvrir ses yeux fatigués. Evoli, qu’elle avait laissé sortir, se blottissait du mieux qu’elle pouvait contre elle. Attendrie, Serena prit la petite renarde dans ses bras. Malgré le temps passé au sein de leur groupe, Evoli était toujours très effrayée lorsqu’elle s’aventurait dehors, notamment dans les lieux publics. Régulièrement, quand l’occasion lui était donnée, la jeune fille exerçait son Pokémon à s’habituer à la foule.

Mais il ne fallait pas se leurrer. C’était moins pour Evoli que pour elle-même que Serena avait laissé la petite renarde à l’air libre, au beau milieu de cette gare où tant de personnes se pressaient. Elle avait cruellement besoin de compagnie, aujourd’hui plus que jamais.


Avril Lavigne – When you’re gone

Caressant distraitement la douce fourrure de son Pokémon, Serena contempla le pétale qu’elle tenait au creux de sa paume. Son esprit, inconscient du vacarme qui régnait sur le quai, naviguait au loin. Elle songeait à Lem et Clem ; la jeune artiste s’en voulait toujours d’être partie sans rien leur dire. Alors que c’était précisément ce qu’elle reprochait à Sacha.

Sacha… Le jeune garçon était celui qui occupait la plus grande place dans les pensées de Serena. Bien sûr, au vu des sentiments très particuliers qu’elle nourrissait pour lui, il n’y avait à première vue rien d’étonnant à cela.

Mais cette fois-ci, cela n’avait rien à voir avec d’habitude. Jamais Serena n’aurait cru que son cœur puisse éprouver une telle peine. Même lorsqu’elle s’était disputée avec ses Pokémon, il y a longtemps, elle ne s’était pas sentie aussi… vide. Oui, c'était exactement cela. Vide. Il y avait comme un vide en elle, qu'elle ne savait comment combler.

Sacha lui manquait, c’était un fait. Mais ne lui avait-il pas déjà manqué durant huit années de sa vie, depuis leur séparation à la fin du stage d’été où ils s’étaient rencontrés pour la première fois ? Elle avait bien tenu jusque-là sans problème, non ? Alors qu’est-ce qui avait changé ?
Au fond d’elle, Serena connaissait la réponse. Ce qui avait changé, c’était le regard qu’elle portait sur Sacha. Il n’était plus uniquement le garçon modèle dont elle gardait un souvenir nostalgique ; il était devenu un élément fondamental de sa vie. Elle l’admirait pour son courage et sa personnalité altruiste. Peut-être même ses sentiments allaient-ils encore au-delà de la simple admiration… ? Voilà une certitude que la jeune fille avait énormément de mal à avouer, bien qu’elle en eut conscience…

Un jingle musical retentit soudain, la tirant de ses pensées.

« Mesdames, messieurs, le train à destination de Bastiques est annoncé voie C. Ce train dessert… »

Serena n’attendit pas la fin. Elle se leva et, Evoli dans les bras, se rendit sur la voie annoncée. Quelques secondes plus tard, la rame s’arrêta se face d’elle et de plusieurs autres voyageurs, lesquels se pressèrent sitôt que les portes automatiques furent ouvertes, jouant des coudes afin de se procurer ce qu’ils estimaient être la meilleure place.

Serena, elle, prit le temps de vérifier une dernière fois le pétale qu’elle gardait dans sa main. Il pointait dans la même direction que le nez de l’appareil : vers le sud. Satisfaite, elle s’engouffra dans la voiture, juste avant que les portes ne se referment. Le train s’ébranla, et quitta la gare de Mozheim avec un sifflement.


~*~

Le paysage défilait à toute allure, n’apparaissant plus que comme une vague tâche mêlant le vert des arbres à l’ocre de la terre et au gris des rochers.
Assise à l’écart des autres passagers du wagon, Serena contemplait mélancoliquement toutes ces couleurs qui se succédaient trop vite pour que son œil puisse les associer à quelque forme concrète.

De temps à autres, la jeune fille détachait son regard de l’extérieur pour le poser sur le pétale rose, qu’elle conservait toujours précieusement au creux de sa paume. La petite feuille brillait doucement d’un léger éclat rosé, et vibrait imperceptiblement sous ses doigts, tournant en parfaite synchronisation avec le train quand celui-ci amorçait un virage.

« Si j’ai raison et que ce pétale réagit à celui de Sacha, alors c’est qu’il n’est pas loin. J’ai dit que je le retrouverai et je le ferai. Seulement, qu’est-ce je vais bien pouvoir lui dire ensuite ? Est-ce que lui demander de revenir dans le groupe suffira vraiment… ? »

Serena secoua brièvement la tête, préférant ne pas y penser. Elle aurait tout le temps d’y réfléchir le moment venu, se dit-elle.

Pelotonnée sur les genoux de sa dresseuse, Evoli leva de grands yeux inquisiteurs sur cette dernière. Ces derniers temps, Serena était souvent perdue dans ses pensées, et affichait sans arrêt ce même air mélancolique, voire peiné. La jeune Pokémon s'en étonnait ; Serena lui avait toujours parue si souriante, si enjouée… Pourquoi était-elle si triste ? Était-ce à cause de ce garçon ami avec Pikachu ? Evoli savait que Serena parlait souvent de lui, quand elle se retrouvait seule avec ses Pokémon. La petite renarde n'arrivait pas trop à comprendre ce qui attirait tant sa dresseuse chez cet humain, un peu trop bruyant et excité à son goût…
Néanmoins, voir Serena dans cet état l'attristait beaucoup. Comment pourrait-elle faire pour lui redonner le sourire, ce sourire qui lui allait si bien au visage ?

Evoli n'avait jamais été confrontée à ce genre de situation. Ayant toujours vécu seule dans la forêt, les concepts de sociabilité, de complicité, et même d'amitié lui étaient parfaitement étrangers. Serena disait qu'elles étaient amies. Alors Evoli ne devait-elle pas faire quelque chose pour remonter le moral de Serena ? Sûrement que si. Le problème était qu'elle ne savait absolument pas quoi.

Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était finalement de rester aux côtés de sa dresseuse, et ne pas la laisser seule. Oui, c’était certainement le mieux qu’elle puisse faire…

Tout à coup, une ombre passa dans le champ de vision d'Evoli. Instinctivement, la renarde se dressa sur ses pattes, prête à se cacher s'il le fallait. Mais en regardant à travers la paroi transparente, elle ne vit rien d'autre que le paysage qui se mouvait comme par magie, comme c'était le cas depuis qu'elle et Serena étaient montées dans cet énorme serpent de fer.

Avait-elle rêvé ? Evoli voulut s'en convaincre, cependant un sentiment de danger la tiraillait, l'empêchant de plaquer les poils de sa fourrure.

- Evoli ? Qu'est-ce qui ne va pas ?

Serena avait remarqué la soudaine nervosité de son Pokémon. Evoli regardait fixement par la fenêtre, le poil hérissé, et les oreilles rabattues. De l’autre côté du wagon, un Caninos se mit à japper nerveusement. Tandis que sa dresseuse tentait de le calmer, le Chacripan d’un autre passager s’agita à son tour, et monta sur le dossier du siège devant lui, effrayant par-là même le Feuillajou d’un jeune garçon. Dans toute la rame, les Pokémon se mirent à japper, grogner, miauler. Certains tentèrent même de s’échapper de bras de leurs propriétaires, qui peinaient à les maîtriser. Cette agitation soudaine acheva de terroriser Evoli, qui se réfugia dans les bras de Serena. Cette dernière fut étonnée de voir tous les Pokémon devenir aussi excités en même temps. Qu’avaient-ils senti que les humains ne pouvaient percevoir ?

Soudain, dans un horrible crissement métallique, le train freina brusquement, projetant ses passagers vers l'avant. Serena rattrapa juste à temps Evoli, avant d'atterrir sur le siège d'en face – fort heureusement pour elle inoccupé.

- Qu'est-ce qui se passe ? s'écria-t-elle.

Les autres passagers, secoués, s'interrogèrent à leur tour. Dans le même temps, les Pokémon présents dans le train redoublèrent de cris aigus et effrayés.
Une voix grésillante s'éleva alors des haut-parleurs :

« Mesdames, messieurs, suite à un obstacle obstruant la voie ferrée, le train sera stoppé pendant plusieurs minutes, le temps de dégager la voie… »

L'assemblée accusa la nouvelle. Des murmures tantôt inquiets, tantôt indignés s’élevèrent, avant d’emplir la rame entière. Ajoutés à cela les gémissements de plus en plus pressants des Pokémon, le brouhaha devint tellement intense que Serena eut du mal à entendre la suite du message :

« …nous sommes désolés de ce désagrément. Veuillez rester calmes et ne pas quitter le train sans autorisation. Notre personnel fait tout son possible pour régler le problème rapidem-AAAAH !!!! »

Un cri terrifié, suivi d’un larsen à vous déchirer les tympans, interrompit le message. Un silence choqué tomba entre les passagers. Même les Pokémon se turent.
Puis une violente explosion retentit, et ébranla le train.

Serrant Evoli contre elle pour ne pas la laisser s’échapper, Serena entendit quelqu’un hurler :

- Au feu ! Les wagons sont en feu !

Parce qu’ils étaient curieux – ou sceptiques, qui sait ? – certains passagers passèrent la tête par la fenêtre pour le vérifier. Et en effet, les wagons de devant, ainsi que la locomotive, étaient dévorés par les flammes.

Puis soudain, une déflagration souffla la porte de la rame, emportant avec elle les quelques personnes qui avaient eu le malheur de se trouver derrière.
Par réflexe, Serena se recroquevilla sur le sol, sous la fenêtre qui explosa à son tour, ainsi que toutes les autres, projetant des débris de verre partout entre les sièges. Les cris et hurlement de terreur fusèrent, alors qu’une nouvelle explosion secouait le wagon. Bien vite, un vrombissement bien particulier se fit entendre ; Serena comprit de quoi il retournait lorsqu’une vague de chaleur frappa son visage. Les flammes avaient atteint son wagon.


Pokémon Donjon Mystère 3 Soundtrack - Combat contre Noctunoir !


Partout dans la rame, ce fut la panique. Les passagers se bousculaient pour échapper au brasier. Certains, plus altruistes, aidèrent ceux qui avaient été emportés par la porte à se redresser, malgré leurs terribles blessures.

Serena ne savait que faire ; son cerveau affolé peinait à trouver un moyen pour elle de s’échapper. A cela s’ajoutait l’épaisse fumée noirâtre qui s’échappait des sièges calcinés, et qui lui irritait les poumons. Si elle n’agissait pas rapidement, elle et Evoli allaient finir étouffées…

Soudain, tout près d’elle, un dard aiguisé perfora la cuirasse de métal du train. D’autres suivirent, et la jeune fille s’écarta à temps pour éviter d’être blessée par les projections d’écrous et autres morceaux de tôle déchiquetée. Ce qu’elle vit la terrifia : un essaim entier de Dardargnan fit face aux passagers désabusés, s’engouffra par la brèche ainsi créée par leurs dards. Il y eut des cris, des ordres lancés aux Pokémon Eau et Feu afin d’éteindre l’incendie et repousser ces nouveau agresseurs.

Lorsqu’un des Pokémon Insecte fonça sur elle, Serena libéra un bras pour se saisir de la Pokéball de Roussil. La renarde de feu dispersa les guêpes d’un Lance-Flammes bien placé.

- Roussil, prends garde à ne pas endommager le train ! l’avertit Serena en apercevant la tôle fondue par endroits.

Son Pokémon opina du chef, quoiqu’avec une légère réticence. Il n’était déjà pas très aisé de combattre dans un espace aussi restreint qu’un wagon rempli de passagers, pour la plupart tous blessés. Serena en avait conscience, mais il fallait bien se défendre face aux Pokémon Insecte…

Soudain, quelqu’un hurla sur sa droite. Horrifiée, Serena crut à un cauchemar.

Mais c’était bel et bien des personnes vivantes qui se déplaçaient au cœur des flammes, qui enflaient à vue d’œil. Bras en avant, les yeux vitreux et les vêtements brûlés et déchirés, ils aviant l’air de véritables zombies.

- La fille… marmonna l’un d’entre eux. Livrez-nous la fille…

Serena sentit son sang se figer. « Qu’est-ce qu’il a dit… ? »

Tout à coup, elle sentit une poigne sur son bras. Son cœur faillit lâcher lorsqu’elle croisa le regard vide d’une femme lui agrippant le bras. Serena se dégagea brusquement, et recula autant qu’elle put, Roussil jouant de son bâton pour repousser ceux qui tentaient déjà de s’approcher de la jeune fille.

« Mais qu’est-ce qui leur prend ? » Serena n’eut pas le loisir de se poser la question plus longtemps. Avisant la porte qui conduisait au wagon suivant, elle appela Pandespiègle à la rescousse. Sitôt sorti de sa balle de fer, le petit panda pulvérisa la porte d’une puissante attaque Cogne. Serena en profita pour prendre la fuite, suivie par Roussil et Evoli. Pandespiègle prit le temps d’ériger une Lame de Roc au milieu du chemin, espérant ralentir leurs poursuivants, qui s’avéraient ne plus être uniquement les Dardargnans.

Pantelante, Serena fut partagée entre le soulagement de pouvoir de nouveau respirer et l’horreur de la situation. Certes, ils avaient échappé à l’incendie, mais c’était loin d’être le cas des autres passagers du wagon. Quelle tragédie ! Si seulement…

Puis dans un éclair de lucidité, Serena se rendit compte que le wagon dans laquelle elle venait d’atterrir était désert. Elle était pourtant certaine que le train était bien plus rempli que cela quand elle était montée…

Son regard tomba alors sur le dernier être qu’elle souhaitait voir ici. Si sa gorge était toujours en feu, ce fut bien un frisson glacé qui étreignit la poitrine de Serena.

Face à elle, le Sépiatroce eut un rictus mauvais, accompagné d’un croassement moqueur.

Pétrifiée, Serena n’osait plus bouger. Protecteurs, Roussil et Pandespiègle se placèrent immédiatement devant elle, tandis qu’Evoli, plus timorée, se cachait derrière les jambes de sa dresseuse.

- C-c’est toi qui a attaqué le train ? réussit à articuler Serena. Ces Dardargnan, cet incendie… C’était toi ? Mais pourquoi ?

Pour toute réponse, le Sépiatroce poussa un cri sinistre. Aussitôt, des dizaines de Dardargnan surgirent en brisant de nouveau les fenêtres de leurs dards acérés. Roussil et Pandespiègle dispersèrent les assaillants avec respectivement Lance-Flammes et Vibrobscur. Plusieurs petites explosions secouèrent la rame, avant qu’une nouvelle nuée de Pokémon Guêpoison ne reparte à la charge, sur ordre du Sépiatroce.

« Il a dû hypnotiser ces Pokémon ! » comprit Serena tout en commandant à Roussil de lancer Déflagration. « Et les personnes de tout à l’heure également… Mais pourquoi ? »

Si cette question continuait de tourmenter Serena, elle n’en resta pas moins déterminée à vaincre cet affreux Pokémon, qui semblait bien décidé à s’en prendre à elle.

- Puisque tu veux te battre, alors allons-y ! le défia-t-elle. Pandespiègle, Vibrobscur !

Le rayon noir balaya les derniers Dardargnan encore présents dans le wagon, les faisant tomber comme des pierres sur les sièges de cuir. Repérant une ouverture pour atteindre Sépiatroce, Serena envoya Roussil à la charge, avec Lance-Flammes. La pieuvre se prit l’attaque de plein fouet, avant de subir plusieurs Cogne de la part de Pandespiègle.

En voyant ses camarades se démener ainsi, Evoli ne voulut pas être en reste. A la grande surprise de Serena, la petite renarde assena une formidable attaque Météores au Pokémon Psy, qui prit la fuite dans le dernier wagon.

- Bravo, Evoli ! la complimenta Serena. Merci à vous tous !

Satisfaits d’eux-mêmes, les Pokémon de Serena jubilaient, lorsqu’un croassement sinistre, qui pouvait s’apparenter à une sorte de rire, retentit. La jeune fille se mordit la lèvre ; il était encore trop tôt pour crier victoire.

Une silhouette se profila à l’autre bout du wagon. Croyant au retour de Sépiatroce, Roussil et les autres se raidirent, prêts à l’assaut.

- Mais… ? Non attendez ! s’écria soudain Serena.

« C’est pas vrai ! Il n’a pas fait ça ?! »

Des dizaines de personnes, de tous genres et de tous âges, avancèrent lentement à sa rencontre. Les bras tendus devant eux tels des somnambules, ils marchaient d’une manière trop lente pour ne pas être excessive, marmonnant toujours les mêmes mots :

- Capturez la fille… Capturez-la…

Effrayée, Serena songea à faire demi-tour, mais d’autres passagers-zombies se dressèrent sur son chemin, le corps à demi brûlé pour certains. A leurs côtés cheminaient les Pokémon que Serena avaient aperçus dans son wagon, le regard aussi vitreux que celui de leurs propriétaires. Grognant d’un air menaçant, Pandespiègle joignit les pattes pour préparer une nouvelle attaque Vibrobscur.

- Non, Pandespiègle ! se récria sa dresseuse. Ne les attaque pas ! Ces gens sont innocents !

L’air tourmenté, le panda choisit d’obéir à Serena, non sans pousser un cri d’avertissement.
Serena recula autant qu’elle put, mais finit bien vite acculée à la fenêtre. Pendant ce temps, les passagers zombies se rapprochaient, de plus en plus.

« Quel lâche, ce Sépiatroce ! » fulmina-t-elle. « Comment ose-t-il se servir de ces personnes comme de purs boucliers ? » A plusieurs reprises, ses Pokémon voulurent passer à l’offensive ; mais toujours Serena les retenait d’agir. Hors de question de blesser plus de personnes. Ils n’étaient que des victimes dans cette affaire…

Sauf qu’à présent, ils essayaient tous de la capturer, et qu’ils y arriveraient bientôt si Serena n’agissait pas très vite. La jeune fille remarqua alors la trappe située au-dessus de sa tête. L’une de ces trappes que l’on pouvait trouver dans les trains et qui menaient au toit du wagon. Elle eut une idée.

- Écoutez-moi, les amis ! Il est temps de montrer ce qu’on sait faire !

Ses Pokémon comprirent le message, et opinèrent. Evoli, sur un signe de Serena, s’élança la première, et lança Reflet. Bien qu’hypnotisés, les passagers parurent perturbés par le nombre croissant de copies d’Evoli. Roussil enchaîna alors quelques pas de danse, en faisant tournoyer sa branche ardente tel un bâton de majorette, faisant reculer les « zombies ». Serena et Pandespiègle la suivirent, leurs mouvements en parfaite coordination. Le petit panda prit appui sur les mains de Serena, qui le propulsa en l’air. Une attaque Cogne plus tard, et la trappe volait en éclats. Par un habile saut, Roussil rejoignit à son tour l’extérieur, avant d’aider sa dresseuse à monter. D’un bond gracile, Evoli survola les passagers impuissants et atterrit sur l’épaule de sa dresseuse, laquelle put enfin sortir à l’air libre.

Une fois sur le toit de l’appareil, Serena manqua d’être déséquilibrée par le vent incroyable qui soufflait. A demi accroupie pour ne pas tomber, elle eut une vue d’ensemble sur le paysage qui les entouraient.

La peur et l’impuissance se refermèrent sur elles telles des griffes acérées.

Le train avait été stoppé au beau milieu d’un viaduc. En contrebas, on pouvait apercevoir une étendue d’eau d’une largeur impressionnante, cernée d’une forêt de conifères dense.
N’ayant aucun Pokémon Vol ou Psy avec elle, Serena était clairement dans une impasse. Comment allait-elle s’échapper d’ici… ?

Lorsqu’elle jeta un œil à ses Pokémon, Serena se rendit soudainement compte que l’un d’entre eux manquait à l’appel.

- Hé, où est passé Pandespiègle ?

Au même instant, une vague d’énergie noire frappa près d’eux, déséquilibrant la jeune fille et ses deux renardes. Serena reconnut le fautif : c’était justement Pandespiègle ! Le petit Pokémon les regardait toutes les trois d’un œil vide de toute émotion. Le cœur de Serena manqua un battement.

« Non ! Il s’est fait hypnotiser ! » Horrifiée, elle aperçut le Sépiatroce surgir derrière son Pokémon, le bec tordu en une grimace moqueuse.

- Pourquoi tu nous attaques ? Qu’est-ce que tu nous veux ?

Inutile. Le Pokémon Psy ne semblait pas disposé à discuter. D’un mouvement du tentacule, il invectiva Pandespiègle à attaquer. Avant que Serena puisse réagir, Roussil bloqua l’assaut de son camarade à l’aide de sa branche. Reprenant vite sur elle, Serena profita du court instant où le panda fut secoué par son atterrissage pour le rappeler dans sa Pokéball. Le rayon rouge aspira Pandespiègle à l’intérieur de la balle, qui remua légèrement, avant de s’immobiliser complètement. Mais Serena n’avait pas le temps de pousser un soupir de soulagement. Déjà le Sépiatroce revenait à la charge, appelant un nouvel essaim de Dardargnan.

« Bon sang, mais à ce rythme, on ne va jamais s’en sortir ! » A l’aide de Roussil et d’Evoli, la jeune fille réussit à repousser les assauts à répétition des Pokémon Insecte. Seulement, ces derniers revenaient toujours plus nombreux, et les renardes commencèrent à fatiguer.

Puis soudain, dans un moment d’inattention de sa part, Sépiatroce attrapa Roussil par le bras, et lui lança Hypnose à bout portant. Serena s’en rendit compte et réussit à rappeler Roussil dans sa balle de fer avant que l’Hypnose ne termine son effet. Déçu, le Sépiatroce ne s’arrêta pas pour autant et darda un œil intéressé sur Evoli.

« Pas question que je le laisse avoir mes Pokémon ! » Serena pointa sa Pokéball sur Evoli. La renarde s’en aperçut, et protesta.

- Je suis désolée, Evoli, mais je dois le faire. Je ne veux pas qu’il t’hypnotise…

Evoli cria, l’air désespéré. Pourquoi Serena refusait-elle de comprendre ? Roussil et Pandespiègle étaient hors-jeu. Désormais, il ne restait plus qu’elle pour la protéger ! Elle était restée cachée bien trop longtemps, il fallait qu’elle se batte, maintenant !

Une attaque Dard-Nuée venant sur leur gauche les surprit toutes les deux. Serena se jeta sur Evoli, et roula dangereusement vers le bord du wagon. Secouée, Evoli, lança de petits glapissements inquiets.

- Ça va, je n’ai rien…

En vérité, Serena se sentait à bout de forces, autant physiquement que moralement. Elle était coincée, encerclée de toutes parts par des Pokémon féroces prêts à tous pour la capturer, sans aucun moyen de se défendre ni de s’échapper.

Lorsque Sépiatroce s’approcha, triomphant, Evoli se dégagea des bras de sa dresseuse, et fit face à l’armée de Pokémon, ses petits crocs découverts en un grognement à peine perceptible. Serena fut à la fois émue par le courage du jeune Pokémon, qui se dressait seule contre tous, malgré ses pattes flageolantes et ses yeux larmoyants.

- Arrête, Evoli… murmura Serena. ne fais pas ça, je ne veux pas qu’ils te fassent du mal…

Ces mots ravivèrent un souvenir particulier dans l’esprit de la jeune fille, à l’instant même où elle les prononça.

Evoli, malgré sa peur, se démenait pour l’aider. Mais Serena ne voulait pas qu’elle se mette ainsi en danger ; elle voulait la protéger…

« Alors c’est ça… C’est ça que Sacha a ressenti quand il est parti ? Est-ce que c’est cette même impuissance qu’il a éprouvée face à l’Homme Masqué ? » D’un seul coup, tout devint plus clair. Et un sentiment de résolution naquit en Serena.

- Je suis désolée, Evoli…

Le rayon rouge fusa et, dans un dernier cri désespéré, Evoli s’en retourna dans sa Pokéball. Croyant à une reddition de la part de sa proie, le Sépiatroce, sourit d’un air plus que satisfait.

Sauf qu’il ne s’attendait certainement pas à ce qui suivit.

Serena se leva. Et courut.

« Maintenant je comprends… Ce n’est pas toujours facile de protéger ceux que l’on aime… sans leur faire de la peine. »

Elle prit son élan. Et sauta.

Le vent emporta son béret, et s’engouffra dans ses vêtements, dans ses cheveux. L’espace d’un instant, Serena se sentit presque aussi légère que l’air qui sifflait à ses oreilles.

Puis elle chuta, droit vers le fleuve. Elle entendit le cri de Sépiatroce. Les Dardargnan se lancèrent à sa poursuite. Mais ils étaient trop lents, et trop faibles pour braver le courant ascendant qui montait de la vallée.
L’eau se rapprochait de plus en plus.

Alors Serena ferma les yeux, et attendit l’impact.