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Pokemonis T.1 : La Pokeball perdue de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 13/01/2016 à 08:57
» Dernière mise à jour le 10/11/2016 à 12:27

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Action   Aventure   Présence de Pokémon inventés   Région inventée

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Chapitre 39 : La guerre qui s'approche
Ludmila



Il y a deux mois que j'avais quitté la base. Sachant qu'elle risquait d'être attaquée d'un jour à l'autre, je m'attendais à la retrouver sur le pied de guerre, les défenses à son maximum et les hommes armés et bien décidés à la protéger. Je fus amèrement déçue.

- Non mais qu'est-ce que vous avez glandé ?! M'exclamai-je après que Bétochef et son partenaire humain Jos Milton, les deux ingénieurs en chef de la base, m'eurent fait un rapport sur l'état de nos défenses. C'est le mur d'enceinte du premier niveau qu'il aurait fallu fortifier, pas le dernier !

- Le premier niveau est le plus solide, rétorqua Bétochef. Le cinquième a plus besoin de solidification, d'autant que ce sera là que seront postés nos Pokemon utilisant les attaques à distance.

- Si le premier niveau est détruit, les quatre au dessus le seront aussi, bougres de crétins ! L'Armée Impériale ne va pas attaquer en commençant par le haut ! Il lui faudra au contraire nous immobiliser vers le bas pour que nos défenses aériennes soient paralysées. Et c'est quoi, cette riche idée d'attribuer la défense au sol à nos Pokemon Acier, Roche et Feu ?

- Eh bien, c'est là que nous devons avoir la plus solide défense, pour protéger le noble Jartobylon des impériaux au sol, expliqua Jos.

Je me retins à grand peine d'assommer cet incompétent. Pourquoi diable Astrun lui avait demandé de gérer la défense de la base ?! Lui et son partenaire étaient sans doute de très bons ingénieurs mais ils ne comprenaient visiblement rien à l'art de la guerre.

- Vous pensez que Jartobylon va rester immobile quand les impériaux lui canarderont les pattes ? Demandai-je. Vous savez que le séisme qu'il provoque en marchant est dix fois supérieur à celui d'une attaque normale ? Et vous savez aussi que l'Acier, la Roche et le Feu, ça craint le sol ? Nos Pokemon ne pourront rien défendre du tout, car ils se feront avoir par celui-là même qu'ils étaient censés défendre !

Jos et Bétochef échangèrent un regard. Même moi, je pus le traduire en mots. Ça devait donner une phrase du genre : « Pourquoi elle est revenue nous faire chier celle-là ? On était si tranquille sans elle dans les pattes... ». Certes, il était vrai que j'avais tendance à me mêler d'à peu près tout dans la base, même si ce n'était pas mes domaines, mais en règle générale, mes... conseils avaient tendance à être bénéfique. J'étais douée, mais tous ces Paxen plus âgés que moi répugnaient à me prendre au sérieux, car leur fierté en prendrait un coup s'il s'avérait qu'une gamine comme moi faisait mieux leur boulot qu'eux.

- Écoutez, mam'zelle Chen, commença Bétochef, notre plan global de défense a été vérifié par m'sire Anthroxin, qui l'a approuvé. Si vous avez quelque chose à y redire, ce s'rait plutôt à lui d'causer.

- Anthroxin est un rat de laboratoire, grommelai-je. Qu'est-ce qu'il peu bien y connaitre en stratégie ?

- Sûrement plus de choses que toi, intervint Penombrice qui était resté derrière moi à écouter mes reproches d'un air mi-amusé mi-accablé.

Bien sûr, mon partenaire avait raison, et je le savais. Je n'aimais pas trop Anthroxin, à cause de ce qu'il avait pu faire par le passé contre les humains, mais tout le monde, même moi, s'accordait à dire qu'il était la personne la plus intelligente de toute la base. C'était un scientifique, mais ses connaissances s'étendaient bien au-delà. Il était vrai qu'il ne faisait jamais rien sans rien, mais je tenais à être au courant de ses projets.

- J'irai lui parler, dis-je. Anthroxin est peut-être ingénieux à sa façon, mais il n'a pas la vision d'ensemble d'un militaire.

- En ce cas, je te supplie de bien me faire partager tes si vastes connaissances, fit une voix moqueuse à l'entrée de la salle. Des connaissances accumulées, je n'en doute pas, au cours de tes innombrables années d'expérience.

Reconnaissant la voix, je grimaçai, tandis que Jos et Bétochef parurent soulagés. Je me retournai calmement pour faire face à Anthroxin. On avait toujours eu des relations compliquées, lui et moi. Quand j'étais plus jeune, il me faisait peur, avec son look global franchement pas sympathique. C'était compréhensible pour l'enfant que j'étais alors, mais en réalité, il n'y a pas Pokemon plus gentil et aimable qu'Anthroxin dans toute la base. C'était également lui qui pratiquait les accouchements de toutes les femmes Paxen depuis des décennies, donc il était un peu comme un second papa pour tout le monde ici. Mais pas pour moi. Même s'il m'avait mise au monde, je ne pouvais pas m'empêcher de le voir comme un ex-impérial, qui plus est une ancienne Etoile Impériale, qui, en plus, avait empoisonné la race humaine dans sa totalité.

Je savais bien sûr qu'il était des nôtres, maintenant. Un Paxen loyal et irremplaçable. C'était grâce à lui que notre rébellion avait tant progressé, notamment grâce à la création des bâtons Desgen pour combattre les Pokemon de l'Empire. Aussi bien sûr, je prenais toujours garde à ne pas laisser s'échapper mon animosité à son égard. Mais ça n'empêchait pas qu'il me saoulait à toujours avoir raison, avec son air de professeur, et de toujours me rabaisser avec son sens de la répartie bien connu.

- Les humains vivent peu de temps, mais ils apprennent vite, contrairement à vous les Pokemon, répliquai-je. Tu as participé à combien de bataille, au juste ?

C'était une question rhétorique. Anthroxin ne participait jamais aux combats. Du moins pas en première ligne. Il restait toujours à l'arrière pour tenir la stratégie, enclencher des pièges ou distribuer de nouvelles armes.

- Il y a participer aux batailles, et il y a voir la bataille, répondit Anthroxin. Ceux qui se battent ne voient que l'adversaire en face d'eux, tandis que ceux qui observent le déroulement voient la bataille dans son ensemble.

Évidement, ce fichu Pokemon savant avait toujours réponse à tout. C'était aussi pour ça qu'il me tapait sur le système.

- Et c'est ta vision d'ensemble qui t'a donné comme brillante idée ce plan défensif à la noix ?

- Je serai ravi de discuter avec toi de notre stratégie de défense en cas d'attaque, très chère Ludmila, mais je crains d'avoir un emploi du temps chargé. Je te cherchais pour une chose en particulier. Ton Chendesgen est terminé.

Avec sa main extensible et qui avait un visage à l'identique de celui de son corps principal, Anthroxin me remit un bâton aux formes élégantes, dont la pointe était aux couleurs de la famille Chen, jaunes et vertes, comme sur mon médaillon. Je le pris avec une sorte de vénération. J'avais commandé à Anthroxin un bâton Desgen amélioré que j'avais imaginé, juste avant de partir pour Ferduval. Une arme qui serait propre aux membres de la famille Chen, le bâton Desgen ultime. Astrun avait approuvé, disant que ça serait un symbole fort pour les Paxen. Je l'avais totalement oublié.

- Le métal est en alliage d'acier et de Sombracier, me dit Anthroxin. J'en avais une petite quantité en réserve. Il est donc plus solide que les Desgen classiques, et plus léger aussi. S'il est bien utilisé, il peut être capable de transpercer la carapace de la plupart des Pokemon Acier. Ah, et l'amélioration que tu m'avais décrite est opérationnelle. Il te suffit d'appuyer sur le bouton en bas. Ça activera un champ magnétique qui repoussera une large gamme d'attaques spéciales. Ça a une autonomie de quelque minutes seulement, donc prends garde.

Ma colère contre Anthroxin fondit comme neige au soleil alors que je tenais le Chendesgen entre mes mains comme s'il s'agissait du plus fabuleux des trésors. Cela faisait longtemps que je n'avais pas tenu un bâton Desgen, et celui-là était le plus impressionnant que j'ai jamais vu, en plus d'avoir été fait sur mesure uniquement pour moi. Avec ça, je me sentais prête à foncer sur une armée d'impériaux.

- Il est... magnifique, avouai-je. Merci, Anthroxin.

- Prends en soin, me conseilla le Pokemon. Je ne pourrai pas en faire un second, car je n'ai plus de Sombracier. Tâche de le transmettre à tes descendants. Qu'il incarne la force et la volonté des Chen pendant longtemps.

Je fronçai les sourcils en quittant la pièce avec Penombrice. Je me demandai si ce n'était pas Astrun qui lui avait dit de me dire ça en me donnant le bâton. J'étais peut-être parano, mais il me semblait qu'à chaque fois que je voyais mon cher cousin, ses yeux me lançaient un message subliminal du type « Fais des gosses, fais des gosses, fais des gosses ! ». J'en voulais un peu à mon père de ne pas s'être remarié après ma mère et de n'avoir pas pu me donner un frère. Ça aurait été alors lui qu'on aurait emmerdé sans arrêt pour qu'il perpétue la lignée, et non moi. Je n'avais pas oublié que je m'étais promise d'enfin me pencher sur cette question de la descendance si jamais je rentrai à la base en vie. C'était d'autant plus prioritaire qu'on risquait d'être attaqué à tout instant.

Astrun et les autres voulaient que je tombe enceinte, puis que je quitte la base vers une base annexe, cachée, où je pourrai donner naissance à ce futur héritier de la famille Chen, qui perpétuerait la rébellion Paxen si jamais la base sur Jartobylon venait à tomber. Je savais que c'était mon devoir. Je savais que c'était ce que mon père aurait attendu de moi. Tout cela, je le savais fort bien, et ça m'horripilait. La raison est toute simple : je suis quelqu'un de très égoïste. J'étais consciente de ce défaut, mais je ne faisais rien pour l'arranger. Et parce que j'étais égoïste, je refusais catégoriquement de partir alors que le combat et la guerre approchaient. Ce n'était même pas un problème de mec. Ça, c'était la partie facile. Il suffisait de quelque verres d'un alcool fort, d'un Paxen de préférence assez jeune et beau gosse, et puis hop, magique, un bébé dans le ventre le lendemain ! Les Paxen se ficheraient totalement de qui serait le père, du moment que je serais la mère.

Si je ne l'avais pas fait jusque là, c'était justement parce que je ne voulais pas être plus couvée que je ne l'étais déjà, et être handicapée pour me battre à cause de mon ventre. Cette histoire de famille commençait à me courir sur le système. Astrun n'avait qu'à prendre le nom de Chen pour lui-même. Après tout, il avait autant de sang Chen que moi. Ça aurait été bien plus facile. Ce n'était qu'un foutu nom... Inconsciemment, je me rendis compte que j'étais en train d'effleurer mon médaillon du bout des doigts. Il était encore un peu noirci suite à la destruction de la Vallée des Brumes. Flabébé l'avait-il gardé jusqu'au bout ? Y songer de nouveau me fit serrer les poings. J'étais triste, mais plus encore en colère contre l'Empire, et plus particulièrement cette pourriture de colonel Tranchodon. Je lui ferai payer. Pour Flabébé, mais aussi pour Dame Sol. Et je ne pouvais pas lui faire payer en état en gestation.

- T'as le visage typique de celle qui pense à quelque chose de désagréable, nota Penombrice.

- Connerie, répliquai-je. Mon visage est toujours pareil.

- Oui, pour le commun des mortels, il est toujours renfrogné, acquiesça mon partenaire. Mais depuis le temps, j'ai appris à distinguer tes grimaces et leur donner un sens précis.

Je réfléchis à un truc ; quelque chose que j'ignorais sur Penombrice et que je n'avais jamais eu l'idée de lui demander en quatre ans de partenariat.

- Dis voir... Y'a un truc que je t'ai jamais demandé... Tu as des enfants, toi ?

Penombrice s'arrêta de marcher, momentanément surpris par la question.

- Ah, c'est encore cette histoire de gosse qui te préoccupe ? Non, je n'ai pas d'enfant. Les Pokemon spectres sont des esprits. Ils ne se reproduisent pas, du moins pas au sens où tu l'entends. T'expliquer serait un peu trop compliqué... et gênant.

- Tant mieux, car ça ne me dit rien d'en savoir plus. Mais toi, tu crois que je devrais faire ce qu'Astrun et tous les autres me disent ? Me trouver un mec et devenir une pouliche pour les Paxen ?

Penombrice haussa les épaules.

- Je suis ton partenaire Pokemon, mais ce n'est pas à moi à te dire ce que tu dois faire de ta vie privée.

Je ricanai.

- Vie privée ? Je n'ai pas de vie privée. Aucun Chen n'a jamais eu de vie privée ici. Leurs vies appartenaient aux Paxen, et étaient bâties en fonction de leurs besoins.

- C'est faux, répliqua Penombrice. Ton père a épousé ta mère par amour, et a refusé de se remarier après sa mort, même pour engendrer plus de Chen, et même si c'est ce que tout les Paxen attendaient de lui.

Je le savais fort bien, oui. Mais je n'étais pas mon père. Braev Chen avait toujours eu cette force de caractère qui le poussait à faire toujours ce qu'il voulait sans se soucier de l'opinion des autres. C'était pour ça qu'on l'avait tant admiré. On disait de moi que j'étais pareille, aussi indomptable que lui. C'était faux. J'avais certes mon caractère - et à en croire les autres, il n'était pas facile - mais je vivais de l'opinion des autres. J'ai été modelé depuis toute petite pour ça : servir la cause Paxen. Même si je ne manquais jamais de critiquer les décisions d'Astrun et de l'engueuler, j'ai toujours suivi ses ordres, tout comme je le ferai toujours de ceux de Cernerable, ou du Premier Fondateur si jamais il revenait ici. Tout comme je l'ai fait avec ceux de Dame Solaris, même si j'étais rarement d'accord. J'étais une soldate. Je pouvais gueuler très fort, mais je savais obéir. Mon père, c'était le contraire. Il ne s'énervait jamais contre personne, mais il faisait toujours ce qu'il voulait. Et même avant d'être chef des Paxen. Si un ordre venu de plus haut ne lui plaisait pas, il n'en tenait pas compte, tout simplement. Il avait toujours dit ce qu'il pensait, quitte à blesser les autres. Et surtout, il avait toujours été honnête avec lui-même. Je n'étais pas Braev Chen, et je ne le serai jamais.

- Je peux pas désobéir à Astrun, dis-je enfin. Il n'a pas été jusqu'à me l'ordonner officiellement, mais si je m'éternise trop, il ne tardera pas.

- Sans doute, admit mon partenaire. Je sais que la gestation et la maternité te paraissent handicapantes, mais elles ont du bon aussi. Toutes les mères que je connais ici, qu'elles soient humaines ou Pokemon, ne regrettent en rien d'avoir eu des enfants. On ne peut comprendre l'amour maternel qu'après l'avoir expérimenté. Tu seras sans doute émerveillée en tenant ton propre enfant dans tes bras, à tel point qu'on ne reconnaîtra plus la Ludmila grincheuse habituelle.

- J'ai rien contre le fait d'avoir un gosse, expliquai-je. Le problème, c'est tout ce qui va avec. Tu crois que c'est le moment maintenant, alors que l'Empire doit parfaitement savoir où nous nous terrons ? Tu me vois me battre avec un ventre qui a triplé de volume, ou avec un môme dans les bras ?

- Nous sommes des Paxen. Nous risquons chaque jours de mourir. Ça n'a jamais empêché quiconque de tenter de vivre sa propre vie.

- Et puis, y'a aussi le fait de trouver un garçon, continuai-je. Astrun dirait que n'importe qui ferait l'affaire, et c'est sans doute vrai, mais moi ça me dérange ! Je ne suis pas une de ces esclaves femelles des grandes cités de l'Empire qu'on envoie se faire engrosser à bout de champs par des inconnus ! Je ne veux pas de n'importe qui comme père de mes enfants !

- Jamais Astrun ne te forcerai à copuler avec quelqu'un que tu ne désires pas, dit simplement Penombrice.

- Je t'ai déjà dis de ne pas utiliser ce terme, fis-je avec un tressaillement.

- Oui, c'est vrai, les humains aiment dire ces choses là avec plus de délicatesse, s'amusa Penombrice.

Je me souvenais que, de tout temps, la gène des humains au sujet de la sexualité l'avait toujours particulièrement amusé.

- Mais tu sais, poursuivit-il, tu peux faire cela avec beaucoup de monde. Il suffit, je pense, que tu t'entendes bien avec lui. Ça doit exister, même dans ton cas désespéré. Ou alors, tu attends peut-être le grand amour ?

- Dis pas de connerie, sifflai-je. Ça n'existe pas, ça...

Et pourtant, ça avait bien existé pour moi, il y a deux ans. L'image d'un jeune homme aux cheveux blonds flamboyants et aux yeux mauves rieurs me vint à l'esprit. Je la repoussai sans ménagement, en me traitant d'imbécile. Il est parti. Parti ! Il était temps pour moi de passer à autre chose. Ma radio qui se mit à sonner me permit de m'extirper de ces douloureux souvenirs.

- Chen, j'écoute, dis-je.

- Viens vite aux Cavernes, me dit la voix d'Astrun. On a capturé un soldat impérial qui savait où nous trouver, et qui veut nous parler.

J'haussai les sourcil. Généralement, quand un Pokemon impérial tentait d'entrer dans la cité-tour de Jartobylon sans y être autorisé, on le tuait, tout simplement. Faire des impériaux prisonniers étaient dangereux. Mais celui-là voudrait nous parler ? En quel honneur ?

- J'arrive, dis-je.

Penombrice et moi, nous descendîmes jusqu'au premier niveau. Les Cavernes étaient un réseau de grottes qui se trouvait en sous-sol, juste entre le dos de Jartobylon et le premier niveau de la cité. Il y avait là les fondations de la base, et on s'en servait pour y entreposer nombre de trucs. C'était aussi là justement qu'on gardait au secret les personnes qu'on ne voulait pas voir sortir. Astrun et Cernerable étaient là, avec quelques autres, comme Zoulouf Crocs d'Acier, le chef de la sécurité de la base. Bien retenu par notre duo de Paxen Pokemon combat, Judokrak et Karaclée, il y avait un imposant Pandarbare en tenue d'officier impérial. Un Pandarbare qui m'était familier.

- Toi... t'es le second de Tranchodon, hein ?

J'avais toujours mon Chendesgen entre les mains, et mes doigts me démangeaient, comme s'ils ne rêvaient que de le tester contre lui.

- Astrun, c'est l'un des salauds qui ont tué Dame Sol et qui ont éradiqué la Vallée des Brumes, dis-je à mon cousin. Il faut le buter direct !

- Il est venu ici de lui-même, et s'est laissé capturer, répondit Astrun. J'aimerai écouter ce qu'il a à dire. Mais tu peux être sûre qu'il ne repartira pas d'ici.

Pandarbare haussa ses solides épaules.

- Je n'aurai rien à raconter au colonel Tranchodon qu'il ne sache déjà. Si j'ai pu vous trouver, lui aussi le peut. C'est d'ailleurs pour ça que je suis là. Pour vous avertir. Le colonel compte vous attaquer sous peu. Il aura avec lui une trentaine de cohortes, soit 50.000 Pokemon.

Silence, où chacun dans la pièce mesurait le poids des paroles du Pokemon. Puis le Zoulouf, avec son franc parlé habituel, lui demanda :

- Et pourquoi tu nous dit ça, l'impérial, hein ? Tu comptes nous faire peur ? Ou tu nous débites des conneries ?

- Que vous ayez peur m'indiffère, humain, rétorqua Pandarbare. Et je dis la vérité. Libre à vous de me croire ou non, mais vous serez bien forcé d'admettre la réalité quand cette armée va arriver, ce qui ne serait trop tarder. Le colonel est parti de Koruuki, la base centrale du Général Légionair, il y a deux jours. Il devrait être là demain. On se doutait depuis longtemps que vous vous cachiez à l'intérieur de la cité de Jartobylon. Son Excellence le Général Légionair a décrétée que ça avait assez duré. Le statut de Pokemon Merveilleux de Jartobylon ne vous protégera plus.

- Et pourquoi votre aimable colonel Tranchodon a pris la peine de vous envoyer nous dire tout cela ? Demanda Cernerable. Est-il si sûr de sa victoire qu'il veut que nous sachions ce qui nous attend ?

- Le colonel ne m'a pas envoyé, rétorqua Pandarbare. Je suis ici de mon propre chef. Mon acte est une trahison envers l'Empire.

- Tiens donc ? M'amusai-je. Tu vas nous dire que tu veux rejoindre les Paxen ?

- Je veux juste connaître la vérité.

- La vérité ?

- La vérité sur le Seigneur Xanthos !

Ses yeux patibulaires semblèrent s'illuminer quand il prononça ce nom.

- Depuis toujours, je suis un fervent partisan du Seigneur Xanthos, et l'un de ses plus grands admirateurs, avoua Pandarbare. Quand il a trouvé la mort par votre faute, j'ai été dévasté, et je vous ai haï de toute mes force. Mais nous avons découvert cet hologramme du Seigneur Xanthos, dans ce lieu impie où la Pokeball de l'Empereur se trouvait... Le Seigneur Xanthos identifiait Sa Majesté l'Empereur comme son ennemi, et appelait à l'éliminer ! Je n'y ai pas cru mes oreilles... Tout ce qui m'avait été enseigné, tout ce en quoi j'ai cru depuis toujours s'est effondré en un instant !

- Xanthos et Daecheron ont passé leur temps à tromper leur monde, dit Cernerable.

- J'ignore quels furent les dessins du Seigneur Xanthos, admit le commandant impérial, mais je sais une chose : c'est lui qui a libéré les Pokemon de l'oppression passée des humains. C'est lui qui a fait de nous la race dominante. C'est lui qui nous a accordé intelligence et longévité. Le Seigneur Xanthos est et restera mon dieu, mort ou vivant, et ce à jamais.

Je tins ma langue, mais l'envie de dire deux trois trucs sur son fameux dieu était forte. Xanthos n'a jamais rien été de plus qu'un humain cinglé qui a juste bénéficié de pouvoirs paranormaux pour maintenir son règne. Il était loin, très loin d'être un dieu.

- Mais le colonel Tranchodon, poursuivit Pandarbare, quand il a entendu le message, il nous a ordonné de le détruire et de n'en parler à personne.

- Bien évidement, dit Astrun. Les autorités impériales ne tiennent pas à ce que le peuple sache que l'humain qu'ils vénéraient souhaitait tuer leur Pokemon Empereur.

- Détruire un message du Seigneur Xanthos, quel qu'il soit, est une hérésie, insista Pandarbare. J'ignore quelle est la vérité, mais le colonel Tranchodon tient à la cacher au peuple. Voilà pourquoi je suis là. J'ai toujours suivi les enseignements du Seigneur Xanthos. Ce dernier a affirmé que l'Empereur était le principal ennemi de ce monde, et qu'il voulait le détruire. Même si cela me bouleverse, je ne peux pas accuser le Seigneur Xanthos de menteur. Que savez-vous que j'ignore ? De grâce, dîtes-le moi ! Vous pouvez bien me tuer ensuite, mais je veux savoir !

Je n'ai jamais ressenti la moindre pitié envers un impérial, et ce n'était pas prêt de changer. Toutefois, je pouvais comprendre ce que devait ressentir Pandarbare. Sa foi était ébranlée, et il se demandait si tout ce pourquoi il s'était battu n'était qu'un mensonge. Si jamais demain les Paxen découvraient qu'en fait, Régis Chen avait été le méchant de l'histoire et que Xanthos était bel et bien le sauveur du monde, je ne savais pas trop comment je réagirais. Astrun dit la vérité à Pandarbare. Il lui dit comment Xanthos avait été tué lors de la bataille de Balmeros, à cause de la trahison de Daecheron. Depuis bien longtemps, Daecheron attendait une occasion de se débarrasser de son ancien dresseur, pour régner seul. Pandarbare secoua la tête.

- C'est... c'est impossible... Vous mentez !

Pour un impérial fidèle, accepter cette vérité était effectivement difficile. Je lui dis alors ceci :

- C'est moi qui ai tué Xanthos. J'avais alors quatorze ans, et je savais même pas le tiers de ce que je sais aujourd'hui sur le combat. Tu vénères Xanthos, non ? Tu penses vraiment qu'une gamine armée d'un couteau puisse parvenir à vaincre un mec comme lui sans circonstances spéciales ?

Ce n'était pas dans mes habitudes de me rabaisser, mais en l'occurrence, dire ceci n'était que pure vérité. Sans l'intervention de Daecheron qui avait criblé la base de Xanthos de tirs, je n'aurai strictement rien pu faire. Mon argument parut faire mouche. À l'instant, le visage de Pandarbare reflétait la confusion la plus totale.

- Si... si cela est vrai, alors Sa Majesté est mon ennemi, dit-il enfin. Mais je ne peux pas vous croire sur parole. Je rechercherai des preuves de vos dires. Et quoi qu'il en soit, même si cela se vérifie, je ne serai jamais votre allié. Quoi qu'ait fait l'Empereur, c'est vous qui avez assassiné le Seigneur Xanthos. Alors, si vous voulez me tuer directement, faites-le et qu'on en parle plus !

Ça me dérangeait qu'un impérial demande qu'on le tue. Généralement, ils imploraient plutôt qu'on leur laisse la vie sauve, ce qui faisait bien sûr que j'avais aucun scrupule à les achever.

- Le but des Paxen n'est pas le meurtre de tous les impériaux, répondit Cernerable avec sa sagesse habituelle. Notre but, c'est le vivre ensemble. Pour y parvenir, nous devons éclairer l'Empire sur la réalité des choses. C'est ce que nous avons fait avec toi, mon jeune ami. Nous ne gagnerons rien à te tuer. Réfléchis à ce que nous t'avons dis, et à ce que Xanthos a dit dans son message. Alors, tu pourras penser et agir par toi-même, ce que Daecheron a toujours interdit à ses sujets pour mieux les contrôler. Quant à nous, nous ferons de notre mieux pour survivre. Ludmila, donne l'alerte générale dans toute la base. Le colonel Tranchodon arrive.

Je ne me fis pas prier. Même si ce combat pouvait signifier la ruine totale et définitive des Paxen, en mon fort intérieur, j'étais heureuse. Tranchodon venait à moi de lui-même.