~Un moment redouté
Rose. Une Rose. Une Rose au destin exceptionnel. Une Rose au destin exceptionnel dont l'aventure a commencé dans le petit village de Bourg-Vallée, village départ de la région de l'Ocklida. Ces noms doivent vous dire quelque chose, bien qu'ils soient inédits. Cette région n'est qu'une infime partie d'un monde, un monde qu'on appelle le monde des Pokémon.
Cette histoire, c'est la destinée d'une Rose. Et ce matin là, Rose s'apprêtait à passer une journée qui lui rappelait la tourmente qu'elle avait vécu à ses dix ans, âge où elle est entrée à l'Ecole des Ranger de la ville voisine, Minohette.
Elle avait passé une nuit sans sommeil. Elle n'avait pas dormi, non pas parce qu'elle était insomniaque - elle dormait au contraire excellement bien - mais simplement parce que ce jour là, elle avait été désignée pour décerner les diplômes de Ranger et féliciter les nouvelles têtes.
Cependant, la fleur conservait un morceau de rêve, depuis cinq ans enfoui dans un coin de sa tête, un rêve qu'elle refusait de voir sombrer, et cet évenement le lui rappelait sans cesse. C'était celui de devenir une dresseuse de talent, et faire parti d'un Conseil des quatre, peu importe la région. Sa motivation, c'était celle d'être reconnue et de tisser un lien fort avec plusieurs pokémon qui la suivrait jusqu'au bout. Or, en étant Ranger, elle ne pouvait conserver qu'un pokémon partenaire, bien que ce soit celui qu'elle voulait - si celui-ci voulait bien d'elle. Mais même si cette envie de protéger les pokémon était très présente dans son coeur, elle ne voulait pas que quelqu'un d'autre décide pour elle de là où elle irait et quand elle irait. Elle voulait être maître de son destin et de ses actes.
Il en fût malheureusement autrement pour notre adolescente car, contre toute attente, le scientifique du village, le reconnu Professeur Orion, avait disparu, peu après l'anniversaire de ses dix ans. Ses assistants n'ont jamais révélé pourquoi le scientifique avait disparu ni quand il reviendrait. En revanche, le hasard a voulu qu'il ai disparu au même moment qu'un autre professeur, le professeur Sorbier de la région Sinnoh. Les deux professeurs avaient l'habitude de travailler ensemble mais disparaître aussi longtemps... Personne ne connaissait leurs intentions.
Même si la relève pour l'obtention des pokémon de départ était assurée par les assistants des professeurs, les parents de Rose avait préféré l'envoyer dans une Ecole Ranger en attendant qu'un Professeur revienne, au lieu de partir dans une autre région, seule. En contrepartie, l'Ecole des Ranger leur apportait la garantie qu'elle aurait une formation de qualité et donc, qu'elle pourrait mieux appréhender le terrain et les pokémon. La jeune fille avait au départ protesté mais de nature travailleuse, elle finit tout de même par s'intéresser à cela et ce fut une sorte de résignation qui imprégna son coeur.
Son rêve cependant était resté intact, et l'indécision la démangeait. Comment faire quand son avenir parait déjà tout tracé ? Ce n'était en aucun cas la vision que la fleur avait de la vie. Et sa vie, elle voulait la faire tel qu'elle le voyait.
Elle leur en voulait un peu mais elle savait que c'était bien le rôle des parents, de s'assurer que leur fille soit en sécurité. Elle fit donc une impasse là dessus et passait son temps à rêver sa vie, et elle la construisit, petit à petit, jusqu'à en avoir une idée précise : quels pokémon elle aurait, comment elle battrait... non, comment elle terrasserait ses ennemis à l'aide de son équipe, son ascension jusqu'au maître de la ligue de sa région, ses victoires rien que par l'amitié qu'elle aurait tissé avec ses compagnons...
Mais voilà, Rose avait quinze ans, et cela faisait quatre ans qu'elle était au service des pokémon et des habitants de l'Ocklida. Elle commençait à être habituée à cette insomnie annuelle, jour où son coeur battait avec amertume, où ses pas étaient guidés par l'obligation, et ses paroles dictées avec un automatisme déprimant.
N'allez pas croire que tout fut noir pour la Ranger pendant tout ce temps ! Non, elle s'était fait des amis dans sa classe et bien ailleurs grâce aux différentes interventions. Au bout de trois ans, elle finit par connaître un peu tout le monde dans la région qu'elle connaissait par coeur.
Elle connaissait aussi ce poids que l'on ressentait lorsqu'on était séparé de ses camarades de promotion, mutés dans d'autres régions tels que Fiore ou Almia. Mais elle connaissait également l'euphorie de les revoir, plus motivés que jamais. Et ils avaient tellement à se dire ! Cependant, un des principes des Ranger était que les interventions rythmaient leurs vies, et les retrouvailles étaient souvent abrégées par des missions d'urgence.
Après un dernier soupir, Rose se décida enfin à se lever, soulevant ses couvertures en frisonnant légèrement par le contact de l'air ambiant sur sa peau chauffée par les couvertures.
Sa tête lui rappela qu'elle n'avait presque pas dormi et des maux accompagnèrent son réveil. Elle décida de les ignorer, tout comme ses pensées qui la tourmentait depuis la veille.
Grâce à sa permission, accordée par le chef des Ranger de la base de Minohette, elle put aller dormir chez elle la veille, et en profiter pour passer du temps avec ses proches pendant le week-end.
Sachant ça, elle avait remercié maintes fois son chef, car les permissions étaient rares chez les Ranger. Elle n'était cependant pas dupe au point de croire que c'était de la pure compassion. Elle savait que c'était parce qu'elle n'avait fait que travailler depuis quelques mois, entre les missions et les quêtes - sortes de missions demandées par les habitants - mais surtout parce qu'elle n'habitait qu'à quelques kilomètres de la base, au cas où on aurait besoin d'elle.
Elle fit son lit au carré, comme elle l'avait appris dans son internat, vérifia que tout était en ordre dans sa chambre, prit ses habits de Ranger préparé la veille, et fit un saut à la salle de bains. Elle en profita pour prendre une douche rafraîchissante, histoire de mieux se réveiller, et de remettre de l'ordre dans ses cheveux, ébourriffés par les retournements à répétition dans son lit.
Elle soupira de contentement et enfila son uniforme de Ranger, commun à toutes les régions. Le rouge et le noir dominait dans les couleurs de la tenue mais elle était principalement pratique et résistante, faite pour tous les types de terrain, à part peut être les régions glaciales... Expérience frigorifiante dont Rose avait fait les frais, un jour où elle avait dû se rendre à Frimapic, dans la région de Sinnoh... Et ce n'était pas la pauvre Pijoka qui aurait pu faire quoi que ce soit pour elle !
A peine avait elle fini sa toilette que le pokémon pointait déjà le bout de son bec à travers la porte pour dire bonjour à la Ranger. Enfin, elle lui fit surtout la fête, car contrairement à elle, le pokémon adorait ce jour. Elle l'adorait pour une seule et simple raison : ce jour là, c'était un jour de congé, et cela suffisait amplement au pokémon pour vénérer ce jour béni.
Rose fut résignée à utiliser la solution ultime : préparer un petit-déjeuner copieux au pokémon afin de la calmer. C'était tout un art ! Il fallait d'abord le lui dire mais aussi donner tous les détails tels que la fumée du pain croustillant, sortant tout juste du four, la couleur éclatante du miel d'Apitrini déposé sur une tranche de ce fameux pain, la saveur d'un lait d'Ecremeuh trait le matin même... Et tout cela, servi sur un plateau digne d'une reine !
Le Pijako - surnommée Pijoka, il y a longtemps de cela par le petit bout de chou qu'était la fleur en ce temps là - ne se fit pas prier une seconde de plus et ficha la paix à Rose. Cette dernière tint sa promesse et partit tout d'abord traire l'Ecremeuh chez les voisins. Elle devait de toute façon le faire et ceux-ci leur donnait une bouteille de lait en contrepartie de ce travail. Mais le simple fait de savoir que ça faisait plaisir à Pijoka lui apportait aussi un peu de bonheur et de satisfaction.
Elle sortit tout doucement de la maison, le soleil se levant à peine à l'horizon, malgré qu'il fut quelques peu caché par le terrain montagneux qu'était Bourg-Vallée. Elle connaissait son village par coeur et savait que le doyen devait encore dormir, c'est pourquoi elle entra chez lui sur la pointe des pieds afin d'accéder à sa ferme où les Ecremeuh étaient déjà en train de brouter l'herbe fraîche, sur lesquelles elles aimaient boire l'eau de rosée.
Elle s'attela à son travail matinal avec une vitesse prise par l'habitude, puisqu'elle y avait droit chaque matin, ramenant la bouteille de lait pour le petit-déjeuner à la base pour la partager avec tout le monde.
La base était devenu une seconde famille pour la jeune fille, mais elle n'en oublia pas non plus son Ecole où elle rendait visite de temps en temps à ses anciens professeurs et pour faire découvrir aux étudiants la vie d'un Ranger. Ces visites lui rappelaient souvent qu'elle n'avait pas pu réaliser son rêve, mais elles lui servaient aussi à mieux accepter son métier. En effet, comment se plaindre de ce que l'on fait alors que tous les yeux des étudiants brillent d'envie rien qu'en voyant l'ombre d'un Capstick ? Elle ne devait pas le montrer, et cette amertume grandissante s'était en partie transformé en fierté malgré tout.
La fleur sortit de sa rêverie quand ses tympans vécurent un mauvais moment et la rendirent sourde, quelques secondes. L'Ecremeuh qu'elle venait de traire lui fit comprendre d'un long bêlement qu'elle n'était pas d'accord pour que l'on massacre son corps, aussi Rose lachâ les pis et s'excusa auprès du pokémon. Perdue dans ses pensées, la Ranger en avait oublié tout le reste.
Elle prit les seaux, rentra à l'étable et les versa avec précaution dans plusieurs bouteilles de verre qu'elle rangea soigneusement en rang dans les compartiments appropriés, prit la bouteille qui lui revenait et écrivit un mot pour le fermier afin de lui expliquer que le travail était fait, n'oubliant pas de lui souhaiter une bonne journée.
Avant de repartir, elle passa dans le seul commerce du village, camouflé en chalet et dont l'enseigne en bois massif était rustique.
Elle entra par la porte électrique encadrée de deux poutres de bois, décoratives, commanda du pain frais du matin, un bocal de miel et discuta tranquillement avec la jeune femme qui admirait le travail que la jeune fille effectuait.
S'étant assurée que rien d'anormal ne s'était produit dans les environs, elle paya ses courses et s'en alla après avoir prononcé les civilités de rigueur, requinquée par ce dialogue satisfaisant.
La fleur remonta chez elle, dans la maison qui était située le plus haut dans le village, tout proche de la parois surnommé "Le Mur du monde" puisqu'il était si haut qu'on n'en voyait presque pas le sommet.
Pour l'anecdote, la maison fût construite contre l'avis du maire des deux villes, le maire de Minohette et de Bourg-Vallée de l'époque, jugeant l'endroit trop dangereux pour y construire une habitation. Les ancêtres de la jeune fille avaient cependant insisté et eurent gain de cause en signant un simple bout de papier, leur signifiant que tout accident était à la décharge du Maire et de toute enseigne concernée. Pourquoi ils avaient insistés, seuls les parents de Rose le savait, mais pour leur demander, c'était une autre paire de manches...
La Rose savait très bien que ceux qu'elle considérait comme ses parents, ne l'étaient pas. Elle avait été adoptée à un âge beaucoup trop précoce pour qu'elle s'en souvienne, et ses parents adoptifs lui avaient fait doucement comprendre que sa maman et son papa n'étaient pas ceux qu'elle croyait mais des personnes qui leur avaient confié leur fille pour des raisons qui leur étaient inconnues. Pour leur prouver leur bonne volonté, les vrais parents leur avaient laissés le choix d'habiter dans cette maison où de déménager. Les parents adoptifs, trop pauvres pour assumer un enfant, avaient acceptés ces cadeaux tombés du ciel et se firent la promesse de tout faire pour que cette enfant ait une vie, la meilleure et la plus saine qui soit. Ce qui les avait évidemment conduit à inscrire Rose dans l'Ecole des Ranger, même contre son avis.
Alors qu'elle allait ouvrir la porte d'entrée, Pijoka tabassait littéralement la baie vitrée donnant sur la cuisine salon-salle à manger et lui ouvrit habilement la porte pour qu'elle entre plus vite.
La Ranger fit un petit souffle moqueur du nez et secoua doucement la tête de gauche à droite en souriant. Cette Pijoka, quand on lui promettait quelque chose...
Elle entra et prépara le festin du pokémon, nettement plus gros et plus soigné que son pauvre jus de baie et sa tartine même pas tartiné... Ce jour n'était vraiment pas l'idéal, autant pour la tête que pour l'estomac.
Elle fit donc manger son pokémon partenaire qui se régala de ces délices rares. Rose mettait un point d'honneur à ce que ses ennuis n'atteignent pas les autres, et cela lui réchauffa le coeur de voir Pijoka de si bonne humeur, ce qui la fit sourire.
La jeune fille, une fois le petit déjeuner rangé et la vaisselle faite, vérifia si ses parents dormaient encore, et soupira avec un air moqueur en les voyant dormir comme des bébés. Elle les enviait aussi d'une certaine façon, ça ne lui aurait pas fait de mal non plus de pouvoir dormir !
Rose laissa un deuxième mot à l'attention de ses parents en leur disant qu'elle aurait beaucoup de choses à faire et qu'il ne fallait pas l'attendre pour manger.
Pijoka se laissa aller et lâcha un petit rot de contentement en tâtant son ventre lisse et rebondi, assise sur une des chaises de la salle à manger. La Ranger rigola un peu et se retint de rire franchement en voyant la difficulté de l'oiseau pour voler dans sa direction. Elle l'aida quand même à se percher sur son épaule et sortit par la porte d'entrée, vérifiant qu'elle avait bien tout en main.
Elle ferma la porte, cacha la clé dans un endroit qu'elle et ses parents seuls connaissaient et descendit le village, tout en pente, jusqu'aux hautes herbes, croisant par la même occasion les Lainergie et Wattouat du voisin, dormant encore.
La Ranger manqua de réveiller tout le monde en se faisant aboyer par un Caninos, qu'elle calma en envoyant un Poffin de sa fabrication, sous l'oeil jaloux de son pokémon. A part ces quelques pokémon matinaux, pas un Chaglam dans les environs, les pokémon tout comme les humains dormaient encore même si les rayons du soleil commençait à en titiller certains.
Elle se retourna pour admirer son village, prise d'une nostalgie soudaine puis repris son chemin et atteignit les hautes herbes.