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Une Légende s'éveille... de Ramius



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» Auteur : Ramius - Voir le profil
» Créé le 16/03/2019 à 10:58
» Dernière mise à jour le 22/03/2019 à 15:17

» Mots-clés :   Hoenn   Mythologie   Organisation criminelle   Présence de personnages du jeu vidéo

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Bonus : Le Serviteur
Le Lien remua, s’agita. Tira. Il insista jusqu’à ce que le corps émerge du Non-Être. La Conscience en prit le contrôle.


Le corps vit son esprit absorbé par la Conscience avant d’avoir pu penser à nouveau, pour la première fois depuis cent mille jours. Ses perceptions s’étendirent, ou plutôt la compréhension qu’il en avait, à mesure que la Conscience prenait possession de lui. Bientôt, Elle se plongea dans sa mémoire pour l’analyser.


Comme toujours, Elle fut rapide et ne s’attarda pas. Le corps avait à peine pu savourer cet instant fugace pendant lequel il avait partagé l’omniscience divine. Il eut l’équivalent d’un soupir mental : les outils n’étaient pas voués au bonheur. Il prit connaissance de la série d’instructions que la Conscience avait laissée derrière Elle.


Les Humains vont à nouveau augmenter l’inadéquation de leurs actions (type : proie massacrée ; cible : espèces KGR-8587). Fais croître ta force pendant deux milliers de jours (taille : 6c) et détruis-les une bonne fois pour toutes. N’hésites pas à inonder d’ Type eau 6G l’ensemble des territoires de Pokémon #383, il n’a que trop prodigué de sa bienveillance aux Humains.


Une fois encore, le corps s’émerveilla de la perspicacité de la Conscience. Elle était infiniment plus vaste que lui, et donc capable de corréler en un regard des données apparemment sans rapport. À partir de ces cent mille jours de nage sans but, au gré des courants, que la mémoire du corps avait enregistré automatiquement, la Conscience avait prédit tous les avenirs possibles, approfondi les plus probables sur des années, et défini le moyen d’influer dessus pour les rendre compatibles avec ses buts, quels qu’ils soient. C’était prodigieux.


Le corps ouvrit sa bouche en grand et commença à absorber l’eau et le sel pour en faire plus d’existence.


***
Le Pokémon #130 battit respectueusement de sa queue puissante et partit vers le port humain, obéissant à l’injonction du corps. Celui-ci se dirigea ensuite vers la zone d’action, car il était temps d’agir. Les navires des Humains devaient tous être détruits, afin de rendre ces méprisables créatures — peut-être indignes du nom même de créatures — vulnérables au Déluge.


Le corps avait quelques minutes de nage devant lui avant d’arriver sur la zone, et aucune action requérant sa pensée. Il se laissa aller à sa mémoire.


Cela faisait deux mille cinquante-trois jours que la Conscience lui avait ordonné de grandir. Désormais, sa masse modifiait les courants quand il fendait les flots. Il percevait sa propre puissance, brûlante de rage et de violence ; mais il la contenait, car le Déluge ne devait pas se produire maintenant.


Cependant, le plus grand changement qui l’avait affecté, avec sa croissance au centuple, était l’intelligence. Ses réseaux nerveux pouvaient s’étendre sur un volume un million de fois supérieur à celui d’autrefois. Il se sentait totalement différent – et se sentait différemment aussi, chaque sensation, chaque pensée, étant interprétée par cent fois plus de neurones. Les autres créatures marines lui obéissaient totalement grâce à cette intelligence, dans laquelle elles reconnaissaient sa propre dimension divine. Lui-même savait que ce n’était rien, comparé à la Conscience. Mais cette intelligence restait savoureuse.


Il sentit, dans les remous de l’eau, la présence de sa cible. Il accéléra. Bientôt, ses yeux immenses identifièrent le paquebot. Il commença à libérer une partie infime de son pouvoir, obscurcissant le ciel au-dessus du soi-disant Colosse. Et lorsqu’il l’atteignit, il pleuvait à verse.


Le corps lança de l’ Type eau 6G. Rien de très puissant, juste assez pour découper l’acier du navire. Ces Humains et leurs constructions fragiles… Quand la structure fut assez disloquée à son goût, le corps l’entraîna au fond de l’océan. Pour cette première attaque, il ne permettrait pas qu’il y ait de survivants.


***

Quand le corps passa au-dessus du secteur NER-4675/B, il sentit l’allégresse qui s’en échappait. Les algues qui vivaient là se sentaient à nouveau en sécurité, et avec elles tous ceux qui vivaient autour. Ils avaient confiance dans son statut de sauveur. Ils savaient qu’il ne les laisserait pas à la folie des Humains. Le corps lança un appel. Des créatures accoururent de partout. Elles se rassemblèrent autour de leur dieu, et l’écoutèrent les informer de la suite des évènements.


Les Humains ont réagi comme prévu. Aujourd’hui, ils lancent leurs flottes à l’assaut, contre vous. Suivez-moi, et demain, ils pleureront sur leur sort ! Je pars les anéantir. Si vous êtes présents, vous aurez l’occasion de venger vos souffrances.

Il se détourna et s’élança vers cette ville d’où le Pokémon #130 avait vu sortir les Humains, avec dans son sillage des milliers d’habitants des flots, qui profitèrent de sa masse énorme pour se laisser porter : ainsi, ils arriveraient reposés sur les lieux du combat.


Mieux valait ne pas aller trop vite, cependant, car certains pourraient se faire distancer tout de même. Il s’écoula donc plusieurs heures avant que leur armada ne découvre une première proie humaine. Le corps lui asséna un coup de tête, sans même prendre la peine d’y injecter de l’essence d’ Type acier 6G, et laissa son escorte mettre en pièces l’équipage qui fuyait son navire. Il ne fit rien non plus pour empêcher un appel à l’aide par la radio, qu’il sentit passer au-dessus des flots.


Lorsque le massacre fut terminé, il conduisit ses troupes vers le reste de la flotte humaine, qui, comme il l’avait voulu, faisait mouvement vers lui. Le corps laissa les créatures se placer devant lui. Il ne comptait pas participer au combat, seulement inverser le rapport de force en faveur de ses fidèles, qui le méritaient bien. Il invoqua quelques miettes de sa force pour soulever la mer.


Ses perceptions s’étendaient jusqu’aux Humains dans leurs vaisseaux. Il sentit leur surprise, à avoir perdu un éclaireur, mais aussi la certitude qu’ils avaient d’être invulnérables. Il goûta leur jouissance perverse quand ils enflammèrent les eaux pour repousser les assaillants. Il apprécia bien plus leur peur grandissante quand ils virent sa tempête se lever. Il se délecta de la terreur des quelques survivants dont il avait ordonné la sauvegarde.


***

Trente jours s’étaient écoulés. La panique des Humains, sur leur île au milieu des mers, était perceptible à des centaines de kilomètres. Les armées du corps avaient désormais suffisamment d’entraînement pour traquer et couler leurs navires, sans pitié, et lui-même n’intervenait plus que contre les plus gros. Ses plans se déroulaient sans problème.


Il était en train de se laisser dériver tranquillement, devant le port humain d’où venaient tous les problèmes, et apparemment, il allait pouvoir en intercepter un. Un navire était en train de gagner le large. Le corps sentit une exaltation puissante à son bord, ainsi qu’un malaise diffus. Il s’approcha, restant toujours assez loin sous l’eau pour être invisible, et interdisant à l’eau de laisser passer le bruit de sa présence.


Deux hommes parlaient à la proue du navire. Ils parlaient de lui. Intrigué, le corps roula sur le côté, et pointa un œil vers eux, vers le ciel-au-dessus-des-eaux. Il était furieusement tenté de détruire ce navire, ce simple baleinier, ici même : il était encore visible depuis le port, et cela démoraliserait certainement les Humains restés sur le territoire de Pokémon #383. Furieusement…


Mais au fil de la conversation entre les deux hommes, cela lui passa. Ces fous voulaient l’attaquer ! Ils étaient sur son propre territoire, entourés de créatures qui leur étaient hostiles, à bord d’une coque de noix minable, et ils étaient aussi sûrs d’eux que des conquérants ! Le corps décida de leur donner une bonne leçon.


Il entendit le plan des deux hommes, et en conçut le sien. Il jouerait avec eux pendant une bonne dizaine de jours, les laissant s’enfoncer dans le désespoir, puis consentirait à leur donner les survivants qu’ils souhaitaient. Après quoi, il les attirerait à lui, en leur faisant sentir leur infériorité, et les écraserait. Ceux qui retourneraient là d’où ils venaient – et le corps avait bien l’intention de les y ramener lui-même s’il le fallait – réduiraient en miettes les dernières traces de combativité des Humains, lui permettant de relâcher l’ Type eau 6G du Déluge sans la moindre interférence…


***
Le Pokémon #503 fut soufflé par la chaleur de l’ Type eau 6G-qui-était-presque-du-Type feu 6G. La vapeur l’emporta, inerte, vers la surface. Voilà pour lui apprendre à s’acoquiner avec les Humains ! Le corps n’éprouva aucune pitié pour lui. En revanche, il fut satisfait quand il sentit l’horreur des Humains à la surface, sur le récolteur comme sur le baleinier qui s’approchait. Cela était bien. Il remonta.


Pour en terminer avec le récolteur, il lui asséna un coup de tête. Contre un vaisseau aussi gros, s’imprégner de l’essence de l’ Type acier 6G était indispensable. Ces choses étaient autrement plus lourdes que les coquilles de noix que les Humains-combattants utilisaient. Mais lui restait le plus fort, et le navire glissa sur son crâne lisse. Cela aussi était bien.


Le corps plongea ensuite, en se rapprocha du petit navire. Il ne masqua pas le bruit de sa présence, pour ne pas dévoiler déjà cet atout. À la place, il influa sur l’esprit des Humains avec ses propres pensées, pour les focaliser les uns sur les autres. Quand il les relâcha et qu’ils le virent, leur surprise fut plaisante à voir ; puisse cela doucher leur arrogance ! Il ne lui restait plus qu’une dernière chose à faire.


Ces Poké Balls qu’ils comptaient utiliser sur lui étaient quelque chose de nouveau. Il n’en avait jamais entendu parler, et devait savoir s’il pouvait les négliger, ou même les utiliser contre eux. Il poussa contre l’esprit de l’Humain qui était les plus en avant, et le fit lancer une des sphères qu’il tenait.


La sensation d’aspiration fut très étrange pour lui. Cela semblait à la fois facile et contre-nature. Sans doute les Humains avaient-ils dévoyé le pouvoir des créatures pour faire cela. Un vice de plus qu’il convenait d’éradiquer. Une fois que le corps fut pleinement assimilé par la minuscule sphère, il entreprit de s’en libérer. Il fut à la fois déçu et satisfait par la faiblesse de l’outil : à peine avait-il fait jouer ses muscles qu’il était déjà libre. Mais il y avait un problème. L’eau autour de lui était aussi lourde que dans les abysses.


Il comprit que la sphère ne l’avait pas rendu à sa grandeur normale, et que c’était en train de se produire. Quand ce fut fini, il regarda autour de lui, pour vérifier qu’il avait retrouvé sa taille. C’était bien le cas, et il remarqua un autre détail.


L’eau qu’il avait déplacé avait fait du mal aux Humains… Voilà qui était intéressant. Ils auraient des difficultés à appliquer leur plan. En revanche, le corps était irrité par cette invention humaine. Il n’était pas étonnant que des créatures obéissent aux Humains si ces derniers utilisaient d’un tel instrument de torture contre elles en permanence…


***

Le corps était satisfait du moral des Humains. Ils avaient compris beaucoup de choses en le suivant, et lui les avait aveuglés tout du long. Ces teigneux avaient tout de même réussi à le suivre, car ils entendaient le bruit. À présent, il avait assemblé une petite armée de créatures, dont il avait caché le bruit aux Humains, et il était temps de disparaître à son tour. Il laissa également le brouillard se lever.


Alors qu’il organisait ses fidèles en cercle, le corps perçut la rage des Humains. Leur indécision, leur doute, mais surtout leur rage de vaincre, qui les ferait persévérer jusqu’à leur mort. C’était intéressant ; un comportement plutôt atypique. Les Humains avaient tendance à être fatalistes ou futiles ; ceux-là voulaient vivre. Il décida de les défier. Leur défaite n’en serait que plus amère. Il s’avança, et les menaça de sa masse. Et ils répondirent.


t-t-T-K-KLANK-sh…


Pendant un instant, le corps fut aveuglé par le bruit. L’ensemble du relief alentour (les milliers de créatures, et à des kilomètres en-dessous, le fond marin) s’éclairèrent, illuminés par le sonar des Humains comme l’Astre illuminait les terres de Pokémon #383. Ils n’avaient pas besoin de tant de puissance… mais après tout, il convenait de répondre puissamment à un défi. Le corps ordonna à son armée de se disperser, et prépara son essence d’ Type eau 6G.


Les Humains ne restèrent pas inactifs : leurs esclaves le bombardèrent de foudre Type electrik 6G et d’essence de Type plante 6G. Des gouttes d’eau dans l’océan. Le corps sentit une pointe de consternation. Toute cette faiblesse était lamentable. Il déclencha sa propre attaque.


Le temps qu’il l’achève, les esclaves étaient déjà presque tous sur lui. L’un d’eux s’acharnait sur sa nageoire – vainement : il lui restait plusieurs mètres de peau à traverser avant de tomber sur quoi que ce soit d’important. Ce qui le surprit plus, fut la réaction des Humains : l’un d’eux était joyeux d’avoir été balayé par l’ Type eau 6G.


Le corps sentit soudain une attaque plus puissante, au niveau de son crâne. Il n’aimait vraiment pas les créatures d'essence Type vol 6G. Toujours en train de chercher les embrouilles, ceux-là. Il délogea l’impudent qui s’était posé sur son crâne ; mais dans le même temps, il sentit une douleur dans son autre nageoire. Le Pokémon #319 avait réussi à atteindre la chair ? Il était moins faible qu’il n’y paraissait. Le corps ne l’en balaya pas moins.

Ceci fait, il reporta son attention sur un esclave (un Pokémon #130) qui tentait de ramener aux Humains le Pokémon #581 tombé à l’eau. Hors de question de laisser l’impudent s’en tirer. Il déchargea sur eux un peu de foudre Type electrik 6G. Pas trop : les esclaves n’étaient pas libres de leurs actions, il aurait été inadéquat de les tuer.


Juste après, une nouvelle douleur au crâne se signala à lui. Ses éons d’existence lui avaient appris à traiter la douleur comme la simple information nerveuse qu’elle était, et cependant il sentit poindre avec celle-ci une certaine… gêne. C’était étrange. Pourtant, il ne s’attaqua pas à la cause de la douleur tout de suite : quelque chose avait retenu son attention. C’était –


Une douleur fulgurante enflamma son œil droit. Encore une saleté ailée ! Il tenta de l’abattre par la Type glace 6G, mais il n’avait plus qu’un œil pour viser, et le Pokémon #169 était agile. Il se permettait même de préparer une autre attaque ! Le corps n’avait pas l’intention de laisser passer cela. Il –


Rage. Une rage dévastatrice qui emporte tout sur son passage comme les torrents déchaînés de l’ Type eau 6G du Déluge. Brûlante comme les incendies de Type feu 6G que seul Pokémon #383 pouvait causer. Aussi aveugle que la Type roche 6G immuable. Une rage qui ne laisse rien derrière elle, rien que le souvenir de sa présence et la honte de s’être laissé aller à une telle perte de contrôle.


Le corps pensa à nouveau. La situation avait évolué. La honte attendrait : son aileron dorsal était en danger. Les deux Pokémon #625 qui s’acharnaient dessus étaient forts, beaucoup plus qu’ils n’auraient dû. Le corps déploya une souplesse dont il n’avait plus fait usage depuis près d’un million de jours, et fouetta son propre dos avec sa queue. Il n’aimait pas retourner sa force contre lui-même, mais contre des cibles si petites et si dangereuses, il n’avait pas le choix.

Problème suivant. Le corps s’élança vers le Pokémon #365, qui risquait de le geler par la Type glace 6G. Il ne serait pas compliqué à vaincre, avec sa faiblesse contre l’ Type eau 6G-qui-était-presque-du-Type feu 6G. Le corps dédoubla son esprit, affectant une petite partie à l’élimination du Pokémon #365 et une bien plus grande à analyser la situation. Elle posait problème.


Il y avait tout d’abord ce détail qu’il avait perçu. La grande fraction-esprit le décortiqua : il venait du Pokémon #134. Celui-ci n’attaquait pas : il soignait. Et un Pokémon #184 faisait de même sur le navire : il était en train de s’occuper des deux Pokémon #625. Il fallait les éliminer en priorité. La fraction-esprit élabora un plan pour surprendre le Pokémon #134. Le Pokémon #184, lui, serait plus simple. Un peu de foudre Type electrik 6G suffirait, si elle était bien placée.


Ensuite, la fraction-esprit analysa le combat en lui-même. Les créatures esclaves des Humains étaient bien plus puissantes qu’elles n’auraient dû — qu’elles ne devraient pouvoir. Il y avait là inadéquation. Leur capacité à travailler en commun démontrait un entraînement rigoureux ; néanmoins, cette explication était insuffisante.


Le présent se rappela à la fraction-esprit. L’autre fraction-esprit avait terminé ce pourquoi elle avait été générée : elle demandait maintenant la réunification. Il fallait reprendre le combat.


Le plan pour neutraliser les soigneurs se déroula sans problème. Se sachant sans doute vulnérables, les esclaves tentèrent d’attaquer en force. Le corps refusa cette futilité. Sur son injonction, l’eau le laissa tomber, plus bas dans l’abysse. Les esclaves réagirent rapidement : ils tentèrent de l’attirer sur le Pokémon #746b, qui n’était pas une bonne proie : il pouvait se disperser comme l’eau. Le corps lui injecta donc de l’essence de Type poison 6G puis pourchassa le Pokémon #319.


Alors qu’il s’apprêtait à rattraper celui-ci, il vit l’Humain-joyeux sortir une de ces sphères rouges. Voulait-il enfermer à nouveau le Pokémon #319 ? Cette idée perturba un instant le corps. Une prison pouvait-elle être un refuge ? Et pourquoi l’Humain faisait-il cela ? Il aurait été plus rentable, plus efficace, d’user la créature jusqu’à la corde ; tenait-il à elle ? Décidément, le corps ne cessait pas d’être surpris. Les Humains avaient évolué, indéniablement. En mal, mais peut-être aussi en bien.

Il s’interposa entre le navire et le Pokémon #319, pour l’assommer en paix. Ce faisant, son dos fut lardé d’attaques à distance, et on lui avait encore sauté dessus. Cela devenait irritant.

Il refoula cette dernière pensée (rien ne devait être irritant) et envoya de l’ Type eau 6G sur le navire, ce qui fit passer ses assaillants par-dessus-bord. Dans son élément. Il se débarrassa du Pokémon #466 sur son dos et attaqua les esclaves qui barbotaient. Deux, d’essence de Type plante 6G, n’eurent pas le temps de réagir ; le troisième, un Pokémon #462, était sorti de l’eau, et le foudroya à nouveau d’essence Type electrik 6G. C’était lui qui le faisait le plus puissamment, en plus. Agacé non, calme, le corps riposta avec de l’ Type eau 6G-qui-était-presque-du-Type feu 6G. Le Pokémon #462 retomba dans l’eau.


Les Humains étaient dans une situation difficile, désormais. Le corps s’élança vers ses derniers adversaires, des créatures d’essence Type vol 6G. Dont ce Pokémon #169. Il convenait de ne lui laisser aucune chance. Le corps opta pour une attaque large, à base d’essence de Type glace 6G. Les trois esclaves chutèrent avec une facilité déconcertante.


Le corps se retourna vers le navire. Les Humains n’avaient plus aucun esclave capable de se battre. Cela avait été plus long à obtenir que prévu, mais ils étaient vulnérables. Il eut l’équivalent d’un sourire mental.


Puis il sentit à nouveau cette sensation d’aspiration. Une sphère avait volé vers lui, à une distance impossible. Ces ingénieux malfaisants avaient trouvé le moyen de l’attaquer de loin… Le corps se libéra d’une secousse. Mais aussitôt, il fut de nouveau enfermé. Les Humains avaient-ils donc tout prévu ? Mais après tout, c’était sans importance. Plus ils espéraient, plus ils perdraient. Le corps relâcha son pouvoir.


Il le fit par saccades, par intermittences. C’était tout ce que la technologie des Humains lui permettait ; mais cela ne semblait pas vraiment gênant. L’océan lui obéissait. L’eau devenait de l’ Type eau 6G, elle se préparait. Il lui transmettait sa propre volonté de déchaînement. Et le pouvoir jaillit.


Le corps évalua sa création d’un œil impitoyable. C’était terriblement petit. Finalement, ces sphères l’avaient déstabilisé. Il devrait trouver un moyen de s’entraîner quand il aurait submergé le monde. Ce qu’il venait de faire était misérable : un million de jours plus tôt, lors de son dernier combat contre Pokémon #383, il avait produit des déferlements bien plus conséquents, avant même le Semi-Retour-Conscience.


Les perceptions du corps lui amenèrent une information surprenante. Un Humain était resté debout. Le joyeux, justement. C’était assez impressionnant. Le corps décida de faire un effort de mémoire : cet Humain s’appelait Arthur-exilé-mais-encore-apprécié-de-la-lignée-des-Teach-perpétuée-depuis-vingt-mille-jours. Peut-être l’aiderait-il à se réincarner en Type spectre 6G.


Arthur lui lança une sphère. Avec beaucoup de hargne. C’était vraiment un teigneux. Oui, il ferait un bon Type spectre 6G. Le corps répliqua avec de la foudre Type electrik 6G. Il reçut une invective et une sphère en retour. Ça n’avait pas l’air de marcher. Le corps envoya donc une minuscule vague d’ Type eau 6G. Il perçut en retour une vague de joie de la part d’Humain-Joyeux. Ce type était-il increvable ? Le corps décida de le vérifier. Il s’élança vers le navire.


Malgré le risque qu’ils représentaient pour lui, Arthur ne cessa pas ses propres tirs. Lorsqu’ils le déséquilibrèrent, et que le corps put combler la distance qui le séparait du baleinier, Arthur continua de le braver. Le corps focalisa son regard sur l’Humain ; et celui-ci le soutînt. Il avait peur… Il avait peur, mais il refusait de se laisser abattre par la peur… Le corps décida de le secouer encore un peu. Il plongea, sans prendre la peine d’invoquer l’essence de l’ Type acier 6G. Ce n’était pas nécessaire, pour une cible si petite. Il remonta et —


Douleur ! Douleur atroce, paralysante, douleur qui s’engouffre à torrents dans son crâne (ouvert ?) enflammé d’une morsure de glace, douleur qui supprime tout, douleur à laquelle on ne peut que céder, douleur qui emporte la raison froide, douleur qui s’impose partout et remplace la pensée. Douleur.


Il fuit la douleur. La douleur devait être fuie. Elle oblitérait même la honte terrible de la défaite face à ses propres nerfs, elle ordonnait et le corps obéissait. Il n’y avait plus aucun processus mental capable de penser, de bâtir des plans, de les faire exécuter. La douleur dominait tout. Elle annihilait le souvenir des douleurs précédentes. Rien n’avait jamais égalé cela. S’il avait pu penser, sans doute aurait-il regretté cette attaque mal préparée. Mais il n’y avait aucune pensée, rien que la douleur.



***

Cent millions de Liens furent relâchés. Cent millions de Liens qui avaient été sollicités cinq Battements du Cœur plus tôt — une éternité — furent connectés. Cent millions de mémoires nouvelles se désagrégèrent instantanément, réduites à des fragments minuscules par la vastitude de la Conscience. Cent millions de milliards de fractions-esprits bâtirent des hypothèses, échafaudèrent des plans, corrélèrent leurs données, décidèrent de cent millions de lignes d’action. Une seule subit une erreur de fonctionnement. Elle appela à elle plus de puissance. L’erreur fut trouvée : un serviteur avait résisté au Lien. La Conscience prêta encore un peu plus de puissance pour provoquer un Lien instantané. La mémoire réfractaire se vit allouer une fraction-esprit conséquente pour son analyse.


Cette fraction-esprit se sentit sortir du grand bain bouillonnant de la Conscience. Elle s’attela à sa tâche au plus vite, bien qu’elle sût que d’ici à la fin de cette tâche, la Conscience aurait pensé un tel volume de données que la fraction-esprit devrait se réadapter. Quelques Battements du Cœur de perdus ; tant pis.


Le serviteur était habité par des états mentaux complexes. Une grande culpabilité d’avoir failli à sa tâche. La honte d’avoir été dominé par plus faible que lui. La honte de sa résistance instinctive face au Lien — et les dégâts provoqués par le Lien forcé. La connaissance confuse de son désalignement avec la Conscience, de son anomalie.


Il avait résisté aux ordres. Il s’était pris d’affection pour une cible — une espèce inférieure ! Il avait échoué dans une tâche simple. Tout cela était inacceptable, et maintenant ses états et processus mentaux étaient corrompus. La fraction-esprit soupira devant l’ampleur du travail nécessaire. Elle envisagea un instant de balayer totalement ce corps, de nier l’existence de cette matière qui avait bafoué la Conscience. Elle se rappela avec un temps de retard que seul l’Origine/Noyau/Cœur/Centre/Base pouvait invoquer ce pouvoir. Dommage, elle adorait y participer.


Elle enterra la mémoire sous une couche de données aléatoires et fragiles, ne laissant qu’une information. Puis elle réinitialisa le schéma mental de base et réécrivit les données mémorielles utiles. Enfin, elle imprima ses ordres au fer rouge dans la mémoire du serviteur. Après quoi elle remonta le Lien et retourna à la Conscience.


***

La Conscience avait laissé des ordres.


Retourne à ta masse par défaut, va au secteur RSX-1942/BGD et entres-y dans le Non-Être. Un Humain te réveillera (fichier : Arthur Teach) avec l’Orbe Bleu. Rends-toi alors au secteur KRX-1003/LLP (nom secondaire : grotte Origine) et entames-y le Retour-Conscience. Notre puissance et notre volonté achèveront nos plans.


Le corps consulta sa mémoire, puis entama la procédure de décroissance.