Peine Perdue
Ce texte se situe dans la période post-Sinnoh. Sacha et Ondine sont ensemble depuis quelques temps. Accompagnés par des amis, ils pique-niquent au bord d'une rivière.
Je me repose, le dos appuyé contre un chêne, et j'observe Sacha et Ondine, qui sont allongés côté à côté sur la nappe de pique-nique, au bord du ruisseau. Un peu plus loin, Pierre est étendu sur l'herbe, endormi. Son visage est illuminé par le soleil de l'après-midi, et un sourire se dessine sur ses lèvres. Une fois de plus, je me demande pourquoi il est toujours célibataire. Combien d'échecs sentimentaux a-t-il essuyé ? Pourtant, il ne manque pas d'atouts. C'est un beau garçon, doublé d'un fin gourmet, d'un éleveur hors pair… Il a tout pour plaire. Mais il ne déclenche pas chez moi la mystérieuse étincelle que Sacha allume en moi. Je ne saurais dire depuis combien de temps j'ai réalisé (ou admis ?) la vraie nature de mes sentiments à son égard. Tout ce que je sais, à présent, c'est que je n'imagine même pas envisager un autre garçon. Malgré la solidité de sa relation avec Ondine (une relation qui est d'ailleurs merveilleuse, je dois l'admettre), je l'aime profondément.
Quant à Ondine… Eh bien, comment m'empêcher de la considérer comme une rivale, une barrière qui me sépare de Sacha ? Une telle réaction paraît inévitable, et pourtant, j'apprécie énormément Ondine. Malgré des débuts un peu tendus, nous avons toujours entretenu de très bonnes relations. Je comprends aisément pourquoi Sacha est si attaché à elle. Elle est toujours très douce, très sereine, mais elle sait pétiller et aussi faire preuve d'une volonté de fer et d'une détermination hors du commun. Fidèle en amour comme en amitié, c'est une personne formidable. C'est la raison pour laquelle ma jalousie envers elle ne peut éclater. Comment pourrait-on nourrir des sentiments négatifs à son égard ?
Alors, je me résigne, je les observe tous les deux, enviant Ondine à chaque seconde. Mais je ne peux pas, je ne veux pas briser leur couple. Cela ferait du mal à Sacha, or l'amour que je lui porte passe par une volonté de le voir heureux, qu'importe le prix à payer.
Ce qui ne m'empêche pas de l'admirer avec mélancolie…
Pierre s'est levé. il vient vers moi, s'assoit près de moi, contre le chêne, et passe un bras autour de mes épaules. Par coïncidence, Sacha fait la même chose avec Ondine.
– Encore à ruminer tes sentiments ? me demande-t-il à voix basse.
Il est le seul à connaître mon secret, mon confident, la personne en qui j'ai le plus confiance.
Je ne réponds pas.
– Nous en avons déjà discuté en long, en large et en travers. Tu ne peux pas ignorer tes sentiments, ni maîtriser tes émotions. Mais tu dois tu faire une raison, et tu le peux. D'ailleurs le processus a déjà commencé, n'est-ce pas ?
Je hoche la tête, puis baisse les yeux, contemplant une jeune pousse de chêne à mes pieds.
– Essaie de penser à autre chose, profite de la vie, je sais que tu peux le faire. Tente de dominer tes sentiments, car c'est peine perdue, Régis.