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Le Mystère de Rosalia de Yahen



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Informations

» Auteur : Yahen - Voir le profil
» Créé le 10/08/2025 à 01:56
» Dernière mise à jour le 06/09/2025 à 16:13

» Mots-clés :   Action   Johto   Présence de personnages de l'animé   Présence de personnages du jeu vidéo   Suspense

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Chapitre 3 : Au Bar des Deux Tours
Le soleil était déjà couché. Fatiguée après cette journée épuisante, Jenny sortit du commissariat en tenue de civile avec son Caninos. Alors qu’elle s’apprêtait à enfiler son casque de moto, Mortimer vint à sa rencontre.

— Comment ça s’est passée, aujourd’hui ? lui demanda-t-il.
— Pas terrible, répondit-elle en soupirant. Nous n’avons rien trouvé d’intéressant.
— Vous avez cherché du côté de la Team Rocket ?
— Elle semble avoir été dissoute depuis deux ans. Leur spécialité, c’est le vol et le braconnage. Ces évènements ne ressemblent pas à ce qu’ils font d’habitude.

Mortimer acquiesça. Les Pokémon spectres erraient toujours en nombre dans la ville sous la brume.

— Les gens en ont peur, même s’ils sont inoffensifs, expliqua Jenny en désignant un groupe de Fantominus à proximité. Ils se sentent en danger malgré tout.
— L’ignorance engendre la peur, dit sagement Mortimer.

Jenny haussa les épaules.

— Vous voulez boire un verre ? proposa le champion. Je sors du spectacle des sœurs Kimonos, elles me rejoignent au Bar des Deux Tours.
— Pourquoi pas ? répondit l’agent de police en souriant. Histoire de décompresser un peu.

Ils marchèrent un moment dans la rue principale. Les lampadaires peinaient à percer la brume dans la nuit.

— Vous êtes retourné voir leur spectacle ? Vous devez le connaître par cœur.
— Je me suis dit qu’un détail aurait pu m’échapper, expliqua Mortimer.
— C’était le cas ?
— Non. L’origine de l’incendie n’est pas précisée et l’identité des trois Pokémon ayant péri dans les flammes est inconnue.
— Et savoir cela permettrait de résoudre notre affaire ?
— Peut-être. En tout cas, Suicune semble être revenu.

Ils arrivèrent devant le Bar des Deux Tours. Au moment où Mortimer s’apprêtait à ouvrir la porte, Jenny le retint par le bras :

— Je vais être franche avec vous. Je pense que tout cela est une mauvaise blague. Il n’y a pas lieu de s’alarmer, il n’y a eu aucun mort. Aucun blessé.
— Quelqu’un ou quelque chose était dans les ruines après que les mystérieuses cloches ont sonné, répliqua Mortimer. Quant à la brume et aux Pokémon spectres…
— Je vous assure qu’on voit de tout dans la police. Du folklore, du spectacle ou de l’horreur. Certains sont prêts à tout pour faire leurs intéressants, croyez-moi.
— Mon instinct ne m’a jamais trompé, agent Jenny.

Elle sourit en baissant les yeux.

— Nous utilisons aussi l’instinct, au sein de la police. Mais à partir de preuves. D’éléments tangibles.
— Je suis sûr que vous faites un travail formidable, assura Mortimer.
— Merci.

Derrière le champion, cachée sous un arbre, une ombre furtive surgit et disparut presque instantanément.
D’un geste brusque, Jenny lâcha le bras de Mortimer, l’air effrayé.

— Jenny, vous allez bien ? s’inquiéta le champion.
— Qui va là ?! cria-t-elle en écartant Mortimer de son chemin.

Elle s’avança doucement, son Caninos grognant à ses pieds. Le champion resta silencieux, ne sachant que faire.
L’agent Jenny sortit sa lampe torche et courut à toute vitesse derrière l’arbre.
Personne.

— Vous avez remarqué quelque chose ? demanda Mortimer.

Elle s’accroupit au pied de l’arbre et éclaira une empreinte. L’herbe la contournant était raide. Électrifiée.

— Raikou, murmura-t-elle.
— Raikou ?! répéta Mortimer, ébahi. Ici ?
— Probablement, vu la taille et la silhouette que j’ai aperçue.

D’un geste vif, elle se releva.

— Je dois filer !

Sans plus attendre, elle s’enfuit dans la brume avec son Caninos.
Mortimer resta seul devant la porte du bar, se demandant s’il devait la suivre. Si Raikou était, lui aussi, revenu, le mystère s’intensifiait. Il fallait à tout prix soutirer des informations auprès des sœurs Kimono.
Il entra dans le bistrot presque vide. Une seule table était occupée par deux individus.
En reconnaissant Eusine, Mortimer faillit ressortir du bar, mais la personne face à lui le héla :

— Mortimer, mon ami, comment vas-tu ?

Fargas se leva et s’avança.

— Préoccupé, comme tu te doutes, répondit Mortimer avec un petit sourire. Que fais-tu ici ?
— J’allais partir, annonça le vieil homme. J’avais rendez-vous avec euh… avec Eusine.

Il sembla mal à l’aise.

— Voilà, il est là, dit-il simplement en le désignant maladroitement au fond de la salle, comme s’il avouait un péché. Mais je ne me mêle pas de vos affaires, rassure-toi…
— Comment rentres-tu à Écorcia ? demanda Mortimer pour changer de sujet.
— À dos de Ponyta, répondit-il avec évidence. C’est rapide et pas besoin de phare ! Et si on m’attaque, je saurai riposter.

Il donna un coup de poing en l’air en riant. Mortimer lui rendit son sourire et jeta un regard à Eusine qui fit mine de ne pas le voir.

— Je m'en vais, lui dit Fargas en sortant. Je te… Je vous laisse.

Il pressa l’épaule du champion en guise de soutien, lança un « au revoir » collectif et s'en alla.
Mortimer s’avança vers Eusine qui n’eut d’autre choix que de considérer sa présence :

— Quel drôle de hasard, s'exclama le jeune homme.
— Je n’aurais pas dit « drôle », répliqua Mortimer. Pourquoi restes-tu ici ? Fargas vient de partir. Tu attends quelqu’un d’autre ?
— Tu prends vraiment à cœur ta collaboration avec la police, remarqua Eusine en souriant. Oui, j’attends quelqu’un d’autre et : non, ça n’est pas toi.
— Qu’est-ce que tu voulais à Fargas ?

En haussant les épaules, Eusine fit claquer sa langue :

— C’est incroyable, Jenny t’a embauché dans ses rangs ou quoi ? J’ai le droit de voir un ami, non ?
— Tu quittes la ville pendant un an, en donnant des nouvelles au compte-goutte et tu reviens tout guilleret au moment même où des cloches inexistantes sonnent à minuit ! Pour moi, ça me semble déjà louche. Ne me dis pas que tu retrouves Fargas par pure amitié, je ne te croirais pas.
— Il m’a offert une Master Ball, lâcha Eusine.

Mortimer se décomposa et s’assit face à lui.

— Qu’est-ce que tu racontes ? demanda-t-il, plus agressif qu’il ne le voulait. Fargas n’a jamais créé de Master Ball !
— Il a eu un différend avec la Sylphe SARL, expliqua Eusine. Pour résumer : Ils ont toujours eu du mal à accepter qu’il produise des Balls avec des noigrumes. Ils désiraient son savoir-faire et sa méthode artisanale. Fargas a refusé, bien sûr. Ils cherchent alors à l’acheter en lui envoyant une Master Ball.
— Pourquoi il te l’a refilée ?
— Je lui ai demandé de l’aide pour attraper Suicune. Mais aucune de ses Balls ne peut améliorer mes chances de capture. Il m’a donc donné celle-ci, il n’en voulait pas.

Le champion le jaugea de haut en bas, d’un air dédaigneux. Presque jaloux de le voir toucher du doigt son but.

— Tu dois être content, te voilà prêt à réaliser ton rêve d’attraper Suicune.
— Oui… je pourrais rentrer.

Un silence lourd s’installa, Eusine fuyant le regard de Mortimer. L’éventualité qu’il revienne n’était plus envisageable depuis un moment. Malgré ses sentiments, le champion avait accepté avec difficulté l’idée qu’il soit loin de lui.
Soudain, la porte du bar s’ouvrit et les sœurs Kimono entrèrent bruyamment :

— Quel brouillard à couper au couteau ! commenta l’une.
— On ne voit pas à plus de deux mètres devant nous, ajouta l’autre.
— Heureusement que la maison n’est pas loin, dit une troisième.
— Tu as bien fermé le théâtre ? demanda Tamao.
— Oui, voici les clefs, répondit la plus jeune, un Évoli dans les bras.

Elle les lui tendit et son regard croisa celui du champion.

— Mortimer ! s’exclama-t-elle avec une grande joie en posant à terre son Pokémon.

Le champion se leva en souriant. La cadette, âgée d’une douzaine d’années, lui sauta dans les bras et le serra vivement.

— Salut Eri, dit simplement Mortimer d’un air distrait. Quand est-ce que je te vois sur scène, avec tes sœurs ?
— Dans deux mois, répondit Tamao en s’asseyant près d’eux. Mais il faudra qu’elle choisisse l’évolution de son Évoli.
— On va pouvoir enfin avoir un doublon, dit l’une des sœurs. Si tu veux une Pierre Feu pour ton anniversaire, tu me remplaceras et je pourrais commencer à planifier mes prochaines vacances !
— Oh non, j’espère qu’elle demandera une Pierre Foudre, lança une autre en faisant la moue.

Toutes les filles Kimono avaient pris place autour d’Eusine et Mortimer.

— Je peux te passer une Pierre Plante si tu envisages un Phyllali, proposa une autre sœur.
— Laissez-la tranquille, dit gentiment Tamao. Ne lui mettez pas la pression.

Mortimer se tourna vers Eri en la prenant par l’épaule :

— Tu as déjà une petite idée ? lui demanda-t-il.
— Oui, avoua la jeune fille d’un air triste. Mais c’est impossible.
— Pourquoi ça ? dit Tamao.
— J’aimerais qu’il évolue en Spectrali !

Des rires fusèrent autour de la table.

— Spectrali ? Mais c’est quoi ?
— Que vas-tu encore inventer !
— Ça n’existe pas, un Spectrali.

Devant les moqueries de ses sœurs, Eri se renfrogna et se mit à bouder, son Évoli sur ses genoux. Mortimer était perplexe et ne comprenait pas ces échanges.

— Elle est amoureuse des Pokémon spectres, lui expliqua Tamao en souriant.
— Elle est surtout amoureuse de Mortimer, lança une des sœurs en éclatant d’un rire cristallin.

Eri rougit en fronçant des sourcils.

— Mêle-toi de ce qui te regarde, toi ! répliqua-t-elle.
— Eri ! dit Tamao d’un air autoritaire.
— Quoi ? répondit la cadette avec défi. Arrête de te prendre pour Maman, c’est bon !

Pour alléger l’atmosphère, Mortimer lui adressa un clin d’œil complaisant :

— Moi aussi, je suis amoureux des Pokémon spectres. Je te comprends. Ils sont incroyables et pleins de mystère. Ils ne m’ont jamais déçu.

Eri sourit et caressa son Évoli, satisfaite. Tamao lui jeta un regard méfiant avec une pointe d’inquiétude.
Sans subtilité, Eusine se racla la gorge, ce qui fit se retourner toute l'attention vers lui.

— On commande ? lança-t-il joyeusement.

Mortimer n’était pas partisan à l’idée de partager un moment avec lui, mais il devait interroger les sœurs Kimono. Montrer davantage d’hostilité en public ne relevait pas de son caractère pudique, aussi il acquiesça d’un signe de tête.
Autour de tisanes chaudes et de bières fraiches, chacun commenta le spectacle joué par les sœurs ce soir-là. Elles préféraient éviter le sujet des évènements récents. Au cours d’une conversation animée sur le moment où Pyroli avait failli brûler le costume de scène de sa dresseuse, Mortimer en profita pour se pencher vers Eusine :

— C’était elles, que tu attendais ? chuchota-t-il.
— Tu n’es pas le seul à enquêter, rétorqua Eusine en lui lançant un clin d’œil.
— Que sais-tu ? renchérit Mortimer, d’un air morne.
— Des choses… répondit le jeune homme en se redressant.

Vexé, le champion tenta de reprendre la discussion des sœurs, cherchant à savoir quand il pouvait les interroger sans paraître trop formel ni brusque.

— Dans votre spectacle, il y a toujours des questions sans réponses, quand même, lança Eusine en souriant.

Un silence s’installa. « Il a du culot, celui-là », pensa Mortimer.

— C’est-à-dire ? lui demanda doucement Tamao.
— Eh bien, par exemple, on ne sait pas qui étaient ces trois Pokémon décédés dans l’incendie de la tour, avant qu’ils deviennent Suicune, Entei et Raikou.
— Ce n’est pas bien grave, répondit une des sœurs. L’histoire est la même et, quels que soient ces Pokémon, ce qui est arrivé était tragique.
— Tragique, oui, reprit Eusine.

Mortimer l’observa attentivement, prêt à intervenir. Il ne pouvait pas se permettre de laisser cet empoté saboter son enquête sous prétexte qu’il n’a aucune diplomatie ni patience.

— Je n’ai trouvé aucune réponse à cette question, voyez-vous, dit Eusine de son air joyeux. Je me sens si proche de rencontrer Suicune et, pourquoi pas, de le capturer. Ces cloches, ses empreintes à l’entrée de la ville, pour moi, c’est un signe. Et le comprendre m’aiderait peut-être à le dénicher. Pourtant, comme vous le savez peut-être en tant qu’expert de Suicune, je me suis longuement documenté…
— Et alors ? reprit la dresseuse de Pyroli sur la défensive. Tu pensais qu’un spectacle pouvait t’apporter des éléments inconnus des documents historiques ?
— Non, peut-être pas le spectacle en lui-même, reconnu Eusine. Mais ses autrices-interprètes, oui.

Personne ne dit mot. L’ambiance était aussi tendue que les cheveux de Tamao coiffés en chignon.

— Il est tard ! s’exclama vivement Eri en regardant son Pokématos. Maman va s’inquiéter, il faut rentrer !
— Calme-toi, lui dit une de ses sœurs. Elle sait que tu es avec nous…
— Eri a raison, coupa froidement Tamao en se levant. Nous devons partir.

Mortimer bouillit intérieurement. Eusine avait tout fichu en l’air avec son manque de tact. Il ne savait vraiment pas s’y prendre, pensa-t-il. Ni avec les artistes, ni avec les femmes…, ni avec les hommes non plus.
Sans protester, elles obéirent à leur ainée, les sœurs Kimono se levèrent et saluèrent les deux jeunes hommes en remerciant Mortimer d’être venu au spectacle. Celui-ci les regarda sortir une à une du bar avec une pointe de déception.

— Toujours aussi délicat, toi, reprocha-t-il à Eusine.
— Tu espérais faire mieux ? rit le jeune homme. Les Kimono ont la réputation d’être assez secrètes. Elles n’allaient rien nous dévoiler.

Ne lui laissant pas le loisir de terminer sa phrase, Mortimer se leva à son tour et rattrapa Tamao par le bras devant la porte.

— Attends, lui dit-il en observant ses sœurs s’éloigner.
— Qu’est-ce que tu veux ? demanda-t-elle sur la défensive.
— Réponds-moi : avez-vous une idée de ce qui a déclenché l’incendie il y a cent cinquante ans ?

Tamao lui adressa un regard interdit.

— Mortimer, qu’est-ce qu’il te prend ? D’abord, Eusine, puis toi…
— Tamao, tu viens ? la héla une de ses sœurs au loin.
— Réponds simplement par oui ou non, reprit le champion avec douceur.
— C’est le retour d’Eusine qui te perturbe à ce point ? lui demanda-t-elle.
— Quoi ? Non ! L’évènement de cette nuit, les cloches, le brouillard… c’est plus important que…
— J’arrive ! coupa Tamao à l’adresse de ses sœurs.

Elle se dégagea de l’emprise de Mortimer en lui offrant un regard suspicieux et inclina sa tête pour le saluer :

— Tu n’as pas lieu à t’inquiéter, tout ça aura probablement disparu bientôt. Dors bien.

Tamao s’éloigna sans plus attendre avec la manière traditionnelle des Kimonos, comme si elle glissait sur le sol. La brume l’enveloppa, laissant Mortimer seul devant le bar.

— Tu n’as pas eu plus de réussite que moi, n’est-ce pas ? demanda Eusine, qui l’avait rejoint, avec une pointe d’espièglerie.
— Détrompe-toi, répliqua le champion. Qui ne répond à une question fermée détient une information qui dérange.

De retour chez lui, Mortimer se doucha pour se rafraîchir les idées. Ses Pokémon prirent leurs places dans leur endroit favori de la maison. Fantominus préférait la cave, ses Spectrum dans le grenier pour jouer, et enfin, Noctunoir et Ténéfix dans le salon pour surveiller la maison. La présence d’autres Pokémon spectres dans les rues ne leur disaient rien qui vaillent et tous deux souhaitaient monter la garde. Cela n’était pas pour déplaire à Mortimer.
Seul Ectoplasma dormait dans sa chambre depuis le départ d’Eusine. Son fidèle compagnon, bien qu’éternel silencieux, ne s’était jamais trop éloigné de lui. S’il ne pouvait consoler l’absence, il savait que, par sa simple présence, il apportait du réconfort à son maître.
S’ébouriffant les cheveux avec une serviette, Mortimer sortit de la douche et bâilla à s'en décrocher la mâchoire. La nuit allait lui faire du bien.
Soudain, un bruit familier dans la pénombre. Les cloches.

— C’est pas vrai ! s’exclama vivement le champion en courant vers la fenêtre.

Les douze coups sonnèrent, déchirant le silence sur la ville de Rosalia.
Cette fois, elles semblaient plus menaçantes.
Comme un avertissement.