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A Guy and his Breathtaking Destiny de Drad



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» Auteur : Drad - Voir le profil
» Créé le 26/02/2012 à 22:02
» Dernière mise à jour le 02/08/2015 à 18:34

» Mots-clés :   Aventure   Humour   Présence de personnages du jeu vidéo   Présence de transformations ou de change

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XI - Appréciez le bruit de ses vagues
Les barrières de sécurité, franchement, à part être haut d'un mètre et indiquer STOP, ça ne sécurise relativement rien. Qui t'empêche de passer ? Personne. Le seul moyen pour t'en empêcher, c'est que ça te fasse sentir coupable, qu'une fois la barrière passée, tu te dises "merde, si ça se trouve, y a vraiment une vraie raison bien dangereuse et méchante pour qu'ils aient mis ces barrières... Oh mon Dieu mais qu'est-ce que j'ai fait je suis un hors-la-loi !" et que tu la repasses, pour revenir dans la légalité, en flippant. Alors que c'est qu'un truc en plastoc, qui plus est souvent pas attaché. Mais tu te sens quand même coupable, enfin si t'as vraiment l'âme d'un gentil (:D). C'est dingue.
Tout ça pour dire que, quand tu te retrouves à l'origine DERRIERE la barrière de sécurité, eh bah tu te sens pas coupable. T'as même plutôt l'impression d'avoir bravé les dangers qui étaient prédits par les écrits de la barricade, et de revenir victorieux dans le genre "c'était trop facile et minable, je préfère revenir, ça vaut pas le coup de rester". Donc, comme j'essaye de l'expliquer mais que je vois que je pédale dans la semoule comme un analphabète, Fire, Lilas, Bisou et moi-même avions passé les barrières de sécurité positionnées en travers de l'accès aux escalators. Nous gravîmes l'escalier mouvant stoppé à l'heure qu'il était, et un message sonore retentit dans le couloir montant vide :

- Chers voyageurs, votre attention s'il vous plaît. Suite à un problème technique indépendant de notre volonté, le trafic est interrompu sur la ligne Jaune entre Vaguelone et le Terminus Est. Merci de votre compréhension.

- Tu parles d'un problème technique ! rit Lézard entre deux bouffées d'oxygène, grimpant les hautes marches métalliques. Là, c'est du Destop qu'il faut !

- Fire, arrête, soupira tristement Lilas, qui sautillait de marches en marches, suivie de près par Bisou qui l'imitait en riant. Le pauvre doit souffrir le martyre à l'heure qu'il est, s'il est toujours en vie...

Le meneur rétorqua :

- Hey, c'est pas moi qui a envoyé un Pokémon qui était sur le point de tout faire péter ! T'en penses quoi, Frère Plume ?

J'étais essoufflé ; ma réponse fut saccadée par les frénétiques battements d'ailes à chaque bond pour l'allonger de quelques centimètres :

- J'en pense que... le gars qui a eu l'idée du Métro de Combat... n'était vraiment pas très... très malin, c'est tout.

Je m'arrêtai, repris mon souffle, puis poursuivis en prenant mon élan :

- Mais c'est triste pour le Wailord... et les dresseurs d'en face... Je me demande s'ils vont bien... même s'ils étaient assez excentriques.

Le Salamèche réajusta le Sac à Trésor autour de son épaule dans sa course, et conclut formidablement :

- Ouais, bof. En tout cas, on arrive en haut !

En effet, la chaleur se faisait de plus en plus forte, et les rayons du soleil pointaient de plus en plus. Nous atteignîmes le rez-de-chaussée ; un grand hall ouvert sur la vie et la ville extérieure se présentait à nous. Le temps que nos pupilles s'habituent à la lueur solaire, Fire bondit par-dessus les tourniquets avec classe, se ruant au dehors profiter de l'extérieur. Je voulus l'imiter mais, doué comme je suis, m'affalai et me pris les barres d'acier du portillon pivotant en plein dans les côtes (et ça fait mal). Lilas, quant à elle, passa tout à fait normalement par la porte de sortie justement prévue à cette effet, puis tint cette dernière à Bisou, avant de m'attendre en la retenant, afin que je puisse me remettre à respirer convenablement, pester contre le satané dispositif, et remarcher droitement et fièrement, avant de la remercier. Elle me fit l'expression d'un grand sourire, et, amusée par ma réaction :

- Y a pas de quoi !


Vaguelone. Quel bonheur, cette ville ! A peine sortez vous du hall de la gare souterraine du métropolitain que vous êtes fabuleusement ébloui par la lumière chaude du soleil d'été, éclat flamboyant qui baigne toute la baie touristique dans l'atmosphère inimitable des stations estivales. Nous débouchâmes dans le périphérique de la station littorale, à quelques rues du centre-ville plein de vie et festif en ce début de vacances. Face à nous, de splendides villas blanches sous le ciel bleu océan se succédaient, laissant un très raisonnable espace de verdure entre chacune ; les vacanciers bronzaient sur leurs terrasses, jouaient avec leurs enfants et leurs Pokémon dans le jardin. Au-devant, une route brûlante rayait grossièrement la bordure terrestre. Il y roulait tranquillement, en se croisant, hummers, pick-ups, décapotables et autres véhicules de riches ou modestes personnes, l'arrière ou coffre de la voiture bondé de bouées, serviettes, maillots de bain, jeux de plage et de valises dix fois trop pleines. Et, s'il y a de la place sur le toit, pourquoi ne pas prendre le kayak ? En contre-bas de cette route, s'étendant sur des kilomètres de long, la merveilleuse plage couleur sable, où gigotaient les bambins construisant des châteaux et se relaxaient les grands, que ce soit allongés sur les grains ou sous le parasol d'un coin de plage privé, un cocktail posé sur une table de pin à côté du transat. La mer raisonnablement calme et translucide, sans qui la plage ne serait que désert, mordait et se retirait de l'étendue de sable blanc continuellement dans la douce mélodie des vagues, s'évanouissant en glissant sur le sablon, puis le caressant à son retour, l'eau délicatement salée recommençant à s'échouer en fins rouleaux, dispersant l'enivrant parfum des mers infinies. Les gamins se jetaient en travers des remous marins, s'éclaboussaient entre eux gentiment ou s'imaginaient des aventures palpitantes à bord de leur bouée gonflable accompagnés de leur Pokémon ; les sportifs nageaient jusqu'à la bouée de démarcation, marquant la limite avec la zone où voguaient planches à voiles et grands kayaks, s'entraînant avec leur partenaires de combat ; d'autres encore profitaient seulement du temps magnifiquement apaisant, se rafraîchissant et profitant du doux bercement océanique, toujours en compagnie de leurs compagnons Pokémon. La Baie Vaguelone était un havre de paix, de repos et d'amusement pour nombre d'humains et de ces créatures, et, ne sachant même parfois si les enfants jouaient avec des Pokémon sauvages ou apprivoisés, ce tableau estival et détendu peignait formidablement bien l'épanouissement de tous et la symbiose humains - Pokémon, qui décompressaient joyeusement, loin du stress constant de la mégapole.

- Enorme ! s'exclama Fire, dont les yeux brillaient à la vue du coin de paradis.

Lilas était tout comme moi émerveillée, et contemplait le littoral éclatant tout de blanc nacré, de turquoise d'aigue-marine, de bleu saphir, de vert émeraude et de l'or stellaire de notre étoile et des dunes poudrées. Bisou était soudain tout excité, tout joyeux, et sautillait :

- Vouiiii ! Ze veux la mer ! Ze veux la mer ! Ze veux aller à la plaze ! Vouiiii !

Il tira la robe feuillue de Fragilady, les yeux pleins d'espoir :

- Allez, Tata La!

- Bisou, voyons, on n'est pas là pour ça !

Je rappelai :

- Ouais, faut retrouver Ludwig ! On peut pas reprendre le métro sans lui.

- Mais... On y était, là, dans le métro, indiqua judicieusement le Salamèche. Pourquoi on n'a pas changé de ligne ? Pourquoi qu'on a passé les tourniquets et qu'on est sortis ?




[...]




J'avais envie de me noyer. J'étais resté dans l'optique de chercher Ludwig, et, effectivement, j'avais été trop borné dans cet esprit pour avoir des idées normales que tout le monde a mais dit un peu trop tard. Je baissai la tête, me pinçai le haut du bec et contins ma colère contre le fait que je sois abruti :

- Bon, on va se calmer, hein, puis aller chercher TRANQUILLEMENT Ludwig, et lui demander de nous ramener, parce que c'est pas qu'on a sept jours, mais on a une semaine. Alors on va se bouger CALMEMENT, et marcher SEREINEMENT à la recherche de l'autre con, okay ?

Nous nous mîmes donc à longer la côte, parcourant la route goudronnée en profitant du beau temps : faut dire qu'on n'en avait aucune idée, de l'endroit où Ludwig était. Au moins, on était paumés, mais paumés dans un joli endroit. Positive attitude.


Dix minutes que nous étions en train de marcher, que Bisou pignait pour aller à la plage, que Lilas essayait de l'apaiser sous le soleil torride, que le Pokédex signalait en boucle "Aucun spécimen détecté" ou alors lançait la description d'un Goélise à portée, que je répétais à Fire que ça marche pas sur les humains, et qu'il répétait que "on sait jamais", "t'façon, mon Jehnesaikte peut pas nous aider dans un endroit aussi densément peuplé, vu qu'il est un Pokémon "secret" " et que "au moins, il apprend des trucs sur la vie de Pokémon qu'il connaît même pas personnellement". Quand Lézard lança, relevant la tête de l'objet électronique :

- Hé, j'ai faim ! Pourquoi on mangerait pas ?

- Quelle fantastique idée révolutionnaire ! m'écriai-je, faussement admiratif. Il est effectivement coutume de manger lorsque l'on a faim.

- J'disais ça pour savoir si vous aussi, z'avez faim ! sourit sympathiquement le meneur, avec comme fond sonore les bruits de la plage.

- Je n'y vois aucun inconvénient, répondit Lilas en calmant tant bien que mal Bisou. Déjeuner nous fera faire une petite pause et permettra de faire le point !

Puis, au Polarhume insistant :

- On ira se poser sur la plage, d'accord ?

Gelé s'écria "OUIIII !" en sautillant et faisant rebondir sa goutte au nez. Je donnai mon avis en m'exclamant, levant les ailes au ciel :

- Bien sûr, quelle bonne idée ! C'est pas comme si on n'avait qu'une semaine pour me sauver et que chaque minute comptait !

Fire se justifia, me posant sa patte sur l'épaule amicalement :

- Hé, on sait même pas où se trouve ton pote humain ; si ça se trouve, on va le trouver en centre-ville ou sur la plage !

- Ouais, peut-être. T'as pas tort, voire même un peu raison.

Je mis mon aile sur mon ventre qui gargouillait, me rendant compte qu'effectivement, je crevais la dalle, et je posai une condition :

- Mais on peut pas manger autre chose que des Baies ou des Fruits ? Vous bouffez bien autre chose, non ?

Fire s'arrêta net, Bisou tourna sa petite tête mignonne pour suivre la conversation, et Lilas ne comprit pas et me questionna :

- Hein ? Qu'est-ce t'entends par là ?

Je lançai, comme si c'était une évidence :

- Bah, les Pokémon sont bien omnivores, non ?

- Omni-quoi ?

- Bon, pour des Pokémon comme toi, p'têt pas, souris-je, mais Fire, toi, t'as jamais bouffé un autre Pok...

Il me donna un (très) violent coup de coude dans les côtes et fit un grand sourire insistant :

- BON, arrête de dire n'importe quoi, Frère Plume, hm ? Hé hé hé... (Il tousse) Allons allons allons, Lilas, j'te propose d'aller trouver une place bien confortable sur la plage, pendant que Frère Plume et moi allons chercher les victuailles, hm ? Je n'ai plus rien à se mettre sous la dent dans le Sac à Trésor, et doit il y avoir un Magasin Kecleon dans c'te coin, non ?

Lilas acquiesça, un peu surprise de la réaction et de l'empressement de Fire, mais suivit le Polarhume qui se ruait vers la mer comme un dingue, et s'en alla tranquillement en étendant ses feuilles au soleil et ouvrant sa couronne fleurie en signalant :

- Ok les garçons, on vous attend là-bas ! Ramenez-nous un bon petit pique-nique !

Elle alla donc garder un œil sur Bisou en profitant de la chaleur, des rayons solaires intenses et de la petite brise marine. Fire lui faisait un grand sourire, moi je ne comprenais rien, puis le meneur de l'équipe de secours et d'exploration me tira par la patte, me traîna en se dépêchant de n'être plus à portée de vue. Il nous fit remonter vers le centre-ville.


Le centre-ville, l'était pas trop différent niveau architecture, la seule toute petite différence de rien du tout étant que les villas immaculées étaient remplacées par de bas immeubles moches. Ouais, en fait, ça change tout ; mais tout passe mieux sous le soleil, non ? Au niveau de l'ambiance, les quelques marchands ambulants au coin des ruelles pavées baignées par notre étoile animaient un peu plus, les magasins de souvenirs aussi cheaps et chers les uns que les autres parsemaient les rez-de-chaussée des immeubles gris mais petits, et l'odeur des barbecues et des pots d'échappements se faisait plus sentir. Des palmiers avaient été plantés le long des routes, et, parfois, une fontaine se trouvait au centre des ronds-points, diffusant un agréable clapotement d'eaux. Mais revenons à nos Wattouat :

- On peut savoir ce qu'il te prend ?!

Le Salamèche m'avait donc tiré dans une avenue, à l'ombre d'un pan de mur, et me chuchota comme si on était recherchés par les flics :

- Hé, t'es pas bien de parler de ça à Lilas ?!

- Mais... De quoi ? De manger ? De la viande ?

- Bah oui ! T'es malade ! Tu veux lui faire avoir une crise cardiaque ?!

Je fus quelque peu choqué :

- Parce que... Elle sait pas que les Salamèche sont omnivores ? Enfin, je veux dire, quasiment tous les Pokémon sont omnivores ; mais je veux dire qu'elle sait pas que toi, tu peux manger de la viande ? Comme beaucoup d'autres Pokémon ?

Il grinça des dents :

- Disons que j'me débrouille pour pas qu'elle le sache.

- Mais... Pourquoi ? C'est la vérité, non ?

Il avait l'air outré et incompris (j'le comprends) :

- Mais tu comprends pas ? Dés que j'ai légèrement abordé le sujet quand je l'ai rencontrée, elle avait pas du tout l'air au courant... T'imagines si elle me voit me jeter sur un Pokémon en pleine mission ? Nan... J'veux pas la choquer, et je tiens à elle.

Bizarre.

- Et... Comment tu fais alors ? demandai-je, curieux.

Il haussa les épaules :

- Bah je m'arrange pour me lever la nuit, et je vais chasser. Après, faut pas exagérer non plus hein, je suis pas carnivore, je mange des fruits et tout, et j'peux largement me contenter de ça.

Puis, avec un sourire rêveur et joyeux :

- Mais faut avouer qu'une bonne cuisse de Poichigeon, c'est excellent !

Il remarqua mon expression perplexe. Le Salamèche me considéra rapidement, et lança finalement d'un air enjoué :

- Si tu veux, on va chasser !

J'avais faim. TRES faim. Les fruits, c'est sympa. Mais je ne mangeais que ça depuis trois jours, et seulement quelques uns une fois par jour. Allez savoir si je suis rassasié ou non ; depuis trois jours je ne pense qu'à retrouver ma vie d'avant. Sans parler des jours avec Zekrom, où les repas ne fleurissaient pas... S'imaginer un bon petit plat, un bon steak... Désolé pour les végétariens. Et pour les Pokémon de type Plante pas au courant. Et pour ceux qui ne s'imaginent pas forcément la réalité. Mais, après mûre réflexion, je répondis :

- Pourquoi pas ?

Il me fit grand sourire, s'approcha, et, fier de pouvoir m'instruire, il passa sa patte avant autour de mon cou, pointa de son autre patte l'horizon (donc, pour le coup, les poubelles qui se trouvaient là) et m'entraîna plus loin vers le centre de la ville :

- Allons-y !



Rien à faire. Je restai dubitatif :

- Mais... T'es sûr que ça va bien se passer ?

- Pourquoi ça se passerait pas bien ?

- J'sais pas... J'ai jamais vraiment attaqué de Pokémon pour le bouffer...

- Tu verras, c'est vachement... Chut ! Y en a un là ! Vas-y !

- Mais... Je fais quoi ? Comment ? Quand ?

- T'inquiète ! C'est naturel !

- Sauf que moi, je suis un humain de nature !

- Pas pour le moment, faut croire ! Allez !

Il m'empoigna, me jeta sur le tronc de l'arbre ; je me le pris, mais réussis à y planter tout de même mes griffes avec une vaillante maladresse. Nous étions au pied d'un palmier dans un coin de rue de Vaguelone, les passants nous regardaient curieusement mais continuaient leur chemin. Qu'ils le continuent ! Un bruit de battement d'ailes entre les feuilles longues et fines du sommet de l'arécacée avait fait réagir ainsi Fire, et mon devoir était maintenant de grimper et de chopper le Pokémon piaf du haut de l'arbre. Je retirai brusquement mes griffes droites, les plantais plus haut, puis fis de même avec les griffes gauches, me hissant ainsi, technique qui, ma foi, était EXTRÊMEMENT pourrie car t'arrachant à moitié tes griffes des ailes et demandant un effort considérable au niveau des abdos. Bref, après moultes tensions et poussées monumentales, et surtout car l'Oiseau au-dessus de ma tête n'était pas prêt de bouger, j'atteignis les branches vertes palmées sous les acclamations chuchotées de Fire. Je passai courageusement mon bec au dessus des ramifications, complètement vidé de mes forces, et me trouvais face à un Hélédelle. C'était plus gros et plus impressionnant que dans mes souvenirs (faut dire qu'avec cette taille que je me tape...). Le Pokémon se retourna , et me salua d'un "Bonjour !" amical.

- Heu... Bonjour... bredouillai-je.

- Vous... Vous voulez de l'aide pour monter peut-être ?

La bouille de piaf du Héledelle me souriait gentiment et le Pokémon altruiste tendait son aile, prêt à m'aider. Et j'étais censé manger ça ? Je balbutiai comme un con qui s'est foutu dans une situation pas possible :

- Heu... Hem hem... Non, ça ira... Excusez-moi, mais... Vous avez déjà mangé un Pokémon ?

Hélédelle fut soudain surpris, éclata de rire, se retourna, picora quelque chose derrière lui, tourna le bec vers le mien, et, tout sourire, me tendit dans sa mâchoire un Chenipan tout crevé et à moitié éventré, si ce n'est percé et sanguinolent de partout par les violents et récents coups de bec.
Je ne pus réellement retenir les Baies Prine qui remontaient de mon estomac. J'aime pas la réalité.


Ça faisait quinze minutes que j'attendais le Salamèche, parti "faire le boulot à ma place, vu que j'étais visiblement pas né pour être un Pokémon". ÉVIDEMMENT QUE NON, NANAB, J'SUIS UN HUMAIN, À LA BASE ! Mais pourquoi est-ce que c'est si compliqué, à la fin ? Personne ne devrait avoir ce genre de problèmes... Se réveiller, comme ça, en Pokémon... Si jamais je retrouve l'abruti de connard de merde qui m'a fait subir tout ce que j'ai subi, je lui prend sa tête, l'éclate contre le mur, le transforme en Magicarpe, et l'enferme à la Pension la plus proche après lui avoir fait bouffer par les branchies un Wailord. Mais quel connard ce type, QUEL CONNARD !! Je donnai un grand coup de pied contre le mur, me fis mal, et m'affalai par terre. J'en avais plein le cul plumé de toutes ces conneries. Je jetai nonchalamment et désespérément (pour ne pas dire tristement) un coup d'œil à la grand-place qui se trouvaient juste à côté du pan de mur contre lequel j'attendais relativement patiemment. Au centre, comme un peu partout dans Vaguelone, une grande et majestueuse fontaine d'eau claire, entourée sans trop de palmiers verdoyants, longeant un terrain pour les matches Pokémon. Le tout sous un soleil éclatant ; c'était sublime et ça me remontait un peu le moral. Justement, ce jour-là, des Dresseurs de tout horizons étaient au rendez-vous, patientaient autour du stade. Je me demandai ce qu'ils pouvaient bien attendre, là, comme ça, à trépigner et à parier qui allait "la" battre. Et, soudain, arrivant de derrière la fontaine, je LA vis.

- Hé ! gueula Fire tout fier de son travail, j'te ramène ton steak cuit, sans os, sans gras, et sans tendon ! Tu peux me remercier d'être aussi fin connaisseur en la matière et d'être un type Feu ! Hé... Tu m'écoutes ?

Je l'entendis déposer un truc plutôt flasque à mes pieds, mais je ne détournai pas le regard de la Dresseuse attendue par tous, tous qui étaient justement en train de l'acclamer et de s'extasier devant son style imparable. Fire s'approcha de moi, et assista également à l'entrée en scène triomphale de la personne en question :

- Hm hm...

Puis, à mon égard, voyant ma berlue :

- C'est qui ? Tu la connais ?

Je soufflai, anéanti par les sentiments qui se bouleversaient en moi :

- Un peu que je la connais. C'est la Championne de la Ligue Sinnoh, Cynthia. Ma mère.

- Ta... TA MÈRE ?! Mais... Mais c'est une humaine !

J'en ai marre de ceux qui comprennent rien à rien. Pendant que ma mère avait accepté de relever le défi d'un dresseur et envoyait au combat Carchacrok, en faisait balancer sa parfaite chevelure blonde, je rappelai brutalement sans me retourner vers Lézard :

- Ecoute, je suis - enfin j'ETAIS - un humain y a même pas quatre jours. C'est normal que ce soit ma mère. Vu que c'est une humaine. J't'aurais dit en pointant le Carchacrok que c'était mon père, là, ça aurait été problématique. Vu que je suis un humain. Pigé ?

Effectivement, le gamin à casquette qui allait défier ma mère avait lui aussi un Carchacrok ; le match s'annonçait mouvementé. Je n'avais aucune réponse de la part de Fire concernant mon rappel, et c'était sans doute tant mieux. Je le regardai du coin de l'œil, et le vis fouiller dans le Sac à Trésor puis sortir en trombe le Pokédex, tremblant presque d'excitation. Il l'ouvrit précipitamment, puis le dirigea vers les deux Pokémon Dragon/Sol qui se faisaient face, se foudroyant du regard, balayant de leur queue avec fougue le sol sablonneux, donnant des coups menaçant avec leur unique griffe de chaque patte, et jouant l'intimidation en rugissant, présentant leur gueule garnie, et jouant avec leurs ailerons, les inclinant différemment, se préparant à combattre :

- Carchacrok, le Pokémon Supersonique. Ses crocs incurvés vers l'arrière ne laissent aucune chance à sa proie de s'en sortir. On dit que lancé à pleine vitesse, il crée des lames de vent avec ses ailes pouvant trancher un arbre. De plus, les écailles sur son corps couplées à sa forme aérodynamique et son physique digne d'un véritable jet lui permettent de planer à une vitesse proche de celle du son, si son élan fut suffisant.

La voix de Fire trembla alors, ce qui me fis me retourner, et je vis ses yeux étincelants et pleins de passion :

- Et en plus... Il... Ils savent voler !

Je souris :

- Fabuleux Pokémon, n'est-ce pas ?

Et, en me tournant vers le lieu du match, fier d'avoir la Championne de Sinnoh comme maman :

- Ma mère en est très fière, Carchacrok est assurément la meilleure de toute son équipe. Elle a passé tellement de temps à l'entraîner ! Et puis, elle est formidablement jolie, tu trouves pas ?

Et je fus choqué. Mais qu'est-ce qu'il m'a pris de dire ça ?! Je ne me posai pas plus de questions, et voulus me recentrer absolument sur le match. Voir ma mère, ici... dans un moment pareil... Elle est toujours aussi gentille et attentionnée ! La dernière fois que je l'avais vue, c'était le mois dernier...
Les deux fantastiques Pokémon combattaient ardemment, ma mère ordonnait parfaitement, le gamin combattait courageusement. Les Carchacrok lançaient Dracocharge pour l'une et Tunnel pour l'autre, ils se fightaient dans ce décor paradisiaque, acclamés par la foule en délire. Cynthia était prête à en finir :

- Tu t'entends formidablement bien avec ton Carchacrok, qui a dû s'entraîner durement ! Vous avez dû en surmonter, des épreuves, unis comme vous l'êtes !

Le gamin la remercia, puis elle ajouta, d'un air cachottier et amusé, faisant virevolter sa mèche:

- Mais j'ai également mon lot de surprises ! Allez, ma belle ! Draco Météor !

Carchacrok se stoppa net dans son élan, se positionna face à l'autre, rugit en se redressant et déployant ses bras ailés, et un tourbillon d'aura dorée de puissance illumina sa poitrine. Elle s'apprêtait à balancer la sphère puissante vers les cieux ensoleillés afin qu'elle explose en météores, quand le gamin à la casquette s'égosilla :

- Ah ha! Mais moi aussi j'ai plus d'un tour dans mon sac ! Carchacrok, attaque Attraction !

S'en suivit dans le camp adverse une pose de beau gosse qui montrait ses atouts virils, apparaissant majestueusement entre les raies de lumière céleste. Le Supersonique de ma mère fut comblée littéralement, tombant littéralement sous le charme et aux pattes de l'autre, stoppant net son attaque. Et puis j'ai envie de dire qu'avec la parité des espèces, c'est d'autant plus super efficace. Cynthia fut étonnée pour le coup, puis heureuse de se retrouver face à un dresseur "plein de surprises". Bref, elle avait beau conseiller à son Pokémon femelle de résister tant bien que mal, le Carchacrok du gamin en profita pour achever celui de ma mère avec une Dracogriffe critique. Pas si faible que ça, ce gamin, tout compte fait. Je sortis alors mon esprit du match et mes yeux tombèrent sur le morceau de viande un peu trop cuite au barbecue, couverte de sable. On n'est pas à ça près, hein ? Je l'empoignai, la dévorai hardiment, plantant mes crocs dans la chair, et ce fut du pur bonheur. J'avais tellement faim ! Je me tournai pour remercier Fire, engloutissant mes bouchées l'une après l'autre :

- Hé, franchement gars, t'es super ! Merci hein ! Mais au fait, c'est quoi comme Pokém...

Fire avait disparu. Je me retrouvais seul, à côté du stade, sur cette grand-place rayonnante, avec mon morceau grillé de Pokémon inconnu entre les griffes.


Je m'étais un peu senti coupable de quelque chose avec cette viande dans les pattes, alors je l'avais avalée rapidement. Et puis, j'avais faim. Bref, une fois que j'eus fini de manger, je décidai de retourner à la plage. Comment ? Aller voir ma mère ? Pourquoi ? Vu l'état dans lequel j'étais, elle ne serait pas plus rassurée pour le moment. Je me tournai une dernière fois vers maman, vers Cynthia, qui félicitait le gamin à casquette, malgré la défaite aux manches suivantes de ce dernier. Sa gentillesse et son sourire radieux... Maman... Je serrai contre ma poitrine la clochette couleur argent qui pendouillait à mon cou. Je baissai la tête, et contemplai la couleur rouge et le petit logo Poké Ball jaune innocent de la Compèt Ball. Puis, l'image de mes serres, griffant la fine couche de sable sur les pavés en arrière plan. Les odeurs de la ville, de l'été et des littoraux chatouillaient mes narines, une brise fraîche m'ébouriffait mes plumes rouges, jaune sable et bleues, les rayons stellaires étaient chaleureux et puissants. Le lointain bruit envoûtant des vagues s'écrasant contre les rochers et la plage de sable blanc... Étrangement, ce son me rappela le passé. Ces moments avec ma famille, mes Pokémon... Les mots doux et encourageants de ma mère, l'enthousiasme et l'entraînement avec mon père, leur soutien au chevet de Boskara... L'évolution... Puis... S... Son... I... Il... Il s'en est allé... Ma défaite à la Ligue Hoenn... Ma peur de voyager... Les cadeaux de ma mère qui rentraient à la maison pour deux jours... Son sourire radieux... Son parfum et ses encouragements, même lorsqu'elle est à une distance considérable... Sa fierté d'être ma mère... Les nettoyages de piscines avec ce cher Lovis le Teigneux... Sa bonne humeur et son entrain... Sa présence lors de mon match final... Sa fierté d'être mon père... Moi qui... Moi qui me vantais d'être son fils... Je... N'étais.. Je n'étais qu'un... Qu'un...

J'empoignai encore plus puissamment la clochette fêlée, la plaquant contre mon cœur, et fermai mes yeux, mouillés. S'il vous plaît... Faites que... Que tout s'arrange... Que personne ne soit blessé... Faites que... S'il vous plaît... Que tout se passe bien...

- Ça se passera comme ça doit se passer.

C'est reparti.

- Toi, la voix de mes deux, j't'ai rien demandé.

- Hé, ho, calme-toi, hein, j't'ai rien fait !

- Nan, mais tu commences sérieusement à me les briser ! rétorquai-je.

- C'est pas mon problème si t'es un sensible et que tu galères pour prendre un avion ! T'as une mission, tu l'accomplis et tu te la fermes !

Je m'éclatai alors les cordes vocales, et hurlai ainsi, les yeux fermés :

- J'EN AI MARRE DE TOI ! TU TE PRENDS POUR QUI, À VENIR T'INCRUSTER DANS MA TÊTE ? JE ME DÉBROUILLAIS PARFAITEMENT BIEN TOUT SEUL ! TU ME SERS À RIEN, ET TU TE PERMETS DE VENIR ME DONNER DES ORDRES !? T'ES PEUT-ÊTRE DANS MA TÊTE, MAIS T'ES PAS MOI ! JE DÉCIDE MOI SEUL DE CE QUE JE DOIS FAIRE, JE DÉCIDE MOI SEUL DE CE QUE JE PEUX FAIRE, JE DÉCIDE MOI SEUL DE CE QUE JE VEUX FAIRE ! LE LIBRE-ARBITRE EXISTE ENCORE, À CE QUE JE SACHE ! TU SAIS, CE TRUC QUI TE PERMET DE DÉCIDER DE TON DESTIN ! ET SI JE DÉCIDE DE NE PAS ACCOMPLIR CETTE PUTAIN DE MISSION, TU PEUX RIEN FAIRE POUR ME FAIRE CHANGER D'AVIS ! J'EN AI MARRE DE DEVOIR COURIR POUR SAUVER JE NE SAIS QUOI DE JE NE SAIS QUI ! J'AI REIN DEMANDÉ À PERSONNE, JE SUIS UN GARS COMME TOUT LE MONDE ! SI LA PLANÈTE DOIT CREVER, C'EST PAS A MOI DE LA SAUVER ! LE MONDE EST AINSI ! S'IL DOIT DISPARAÎTRE DEMAIN OU DANS DEUX CENT MILLE ANS, QU'IL DISPARAISSE ! AU MOINS, J'AURAIS PLUS DE PROBLÈMES !!

Je fonçai alors droit devant moi, me pris violemment un mur, et me frappai le crâne violemment contre la paroi :

- SORS DE MA TÊTE ! TA GUEULE ! LAISSE-MOI TRANQUILLE ! JE VEUX REDEVENIR MOI ! JE VEUX VIVRE !

Puis j'eus un effroyable mal de crâne ; bordel de putain de merde. Je chus sur les pavés bancals contre le mur blanc, à l'ombre, me recroquevillant et me tenant fermement en hurlant à la mort ma boîte crânienne. Je pleurais ; ma vision eût beau être embrumée, je distinguai la foule de badauds qui m'encerclaient, ayant assisté à tout. Je ne voulais plus rien. Je voulais être libre.

- Poussez-vous ! Poussez-vous ! C'est pour Unys News ! Toujours là pour un scoop !

Des voix quelconques se mêlant s'approchaient, et les flashs soudains à répétition des appareils photos commencèrent alors. Des caméras, des perches, tout m'entourait, et des questions fusaient :

- Excusez-moi ! Le Pokémon ! Oui, vous ! Pourquoi parlez-vous?

- Pourquoi criez-vous donc ainsi ?

- De quelle mission s'agit-il ?

- Qui est dans votre tête ?

- Vous êtes envoyé pour sauver la planète ? Par qui ? De quoi ?

- Vous vous sentez comment après ces déclarations ?

- Est-ce qu'on va bientôt tous mourir ?

- Vous êtes extraordinaire de savoir parler ! Avez-vous d'autres capacités ?

Je m'égosillai, chialant et me sentant violemment emprisonné et chétif :

- ALLEZ TOUS VOUS FAIRE FOUTRE !

Quand une voix divinement réconfortante résonna :

- Vous n'avez pas honte ? Laissez-le !

Les passants et les journalistes s'écartèrent en rouspétant, avant de se remettre à prendre des photos en rafales de la grande dame blonde habillée de noir : ma mère. Elle se pencha sur moi, me réconforta avec des mots doux :

- N'ai pas peur, ne t'inquiète pas... Laisse-toi faire, je vais te porter à un endroit un peu plus convenable et confortable, d'accord ? sourit-elle. Tout va bien se passer.

Elle me prit dans ses bras, se retourna, et lança à tout le monde, colérique :

- Espèces d'égoïstes ! Personne n'a bougé pour l'aider ! Allez voir sur la plage si j'y suis, tiens !

Elle m'emporta alors à travers Vaguelone, descendant vers la plage, en me parlant calmement. Ses mots doux, son parfum, son soutien, ses cheveux blonds sur mes yeux... Maman...




"Tu sais... Ne t'en fais pas. Tu vas avoir un enfant, réjouis-toi ! Avec un gentil et très beau mari et ton titre de Championne, tu n'as vraiment rien à te reprocher en ce qui concerne ta condition. Alors, ne pleure pas, et sois heureuse. Elève-le comme il se doit. Il aura sa vie, la vivra pleinement, aura ses joies et ses peines, découvrira la dure réalité du monde dans lequel il vit, choisira de lui-même son destin, et, un jour, il saura. Que ce soit par toi ou par une tierce personne, sache qu'il le saura. Quand ce jour sera venu, soit forte. Mais je ne me fais pas de souci, le problème ne vient pas de ta confiance en toi - car je sais que tu en es bourrée - mais il vient de la réalité. Ton fils devra connaître la vérité. Vous vous aimerez toujours, lui et toi, et ce, quoi que le monde entier puisse dire. C'est la réalité, et c'est ainsi. Personne ne pourra nier ce qui est."

"Tu... Tu en déjà as parlé aux autres ? A tes collègues ? A personne d'autre ? Tu as eu la saine réaction de venir m'en informer, même si j'étais déjà au courant, je dois dire. Oui, je savais que ça allait arriver. Ne me regarde pas comme ça, voyons... Ceci devait arriver. Et puis, je m'en doutais un peu ! C'était ton destin ! Boah, arrête, ça crevait les yeux, que vous vous aimiez ! Réjouis-toi, tu vas devenir père ! Tu te rends compte ? Toi, avoir un enfant ! C'est une grande première ; ça se fête ! Sois-en fier et arrête donc de pleurer ! Ce que tu as vécu était certes une grande étape dans ta vie, j'en conviens, mais il faut aller de l'avant. Il faut que tu profites de ce qu'il t'arrive... Tu te rends compte les jaloux que tu vas faire au boulot ? Aux réunions ? A moins que, et je le comprendrais, tu ne souhaites pas en parler. Bien ; je savais que tu réagirais ainsi. Sache également que nous sommes toujours là pour toi, mon cher ami, si tu souhaites parler, et être accompagné dans ta nouvelle étape de vie. Allons ! C'est ton fils, après tout ! Je suis certain qu'il sera fier d'avoir un père comme toi. Tu verras, il s'en vantera à chaque fois qu'il se présentera ! J'en suis certain !"




Je sentis le sable entre mes plumes et la chaleur du soleil sur ma peau écailleuse. Les embruns, la fraîcheur de l'océan et l'odeur du sel me titillèrent le bec, les appréciables bruits des vagues qui roulaient à quelques mètres étaient d'une douceur incroyable et je me sentais étrangement mieux. Ma tête me faisait un peu moins atrocement mal que lors de ma dernière chute, et j'avais prié pour que ma dernière heure ne soit pas venue. Elle ne l'était pas, fallait le croire. Je rouvris les yeux, et me trouvais sur la plage de Vaguelone, avec le temps toujours aussi radieux et le paysage couplé à l'ambiance toujours aussi splendide. A peine eus-je le temps de me remettre d'un autre rêve bizarre que Lilas se jeta à moitié sur moi :

- CHRIS ! Tu es enfin réveillé ! J'avais cru que... Que tu étais...

Je remarquai alors qu'elle avait ses yeux dorés qui suintaient. Je blaguai gentiment :

- Hé, tu vas quand même pas pleurer pour un pauvre piaf dégarni et couvert de sable ?

Elle m'aida à me relever, et je remarquai qu'elle et Bisou (qui semblait sécher après une petite baignade) mangeaient des Pommes et des Baies. Les vacanciers pas loin me regardaient, étonnés, et pour ceux déjà au courant, il me pointaient du doigt en disant "c'est le Pokémon qui parle et qui doit nous sauver mais qui est protégé par Cynthia alors faut pas aller le voir". C'était TRÈS énervant, ces gens qui vous tournent autour et vous épient de loin, mais un truc me turlupinait encore plus : Fire n'était pas là.

- Qu'est-ce... Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Comment je suis arrivé là ? Où est Fire ?

Le Fragilady m'expliqua calmement :

- Je vous attendais pour le repas, quand j'ai vu Fire revenir en courant avec les fruits et les Baies... On a... heu... Discuté un peu, puis il est reparti... Quasiment une minute après, j'ai remarqué une humaine qui descendait vers la mer avec toi dans ses bras. Je t'ai reconnu immédiatement, et je lui ai demandé de te laisser avec nous. Elle m'a demandé si je te connaissais, et j'ai acquiescé. Et tu t'es réveillé ! sourit-elle finalement.

J'avais l'impression qu'elle me cachait quelque chose. Je la questionnais :

- Mais... Comment tu m'as reconnu ?

Elle répondit du tac au tac avec un air enjoué :

- Un Pokémon comme toi, ça ne s'oublie pas ! Tu es tellement...

Puis elle s'arrêta net, comme si elle se sentait soudain honteuse, et était pétrifiée par mon regard insistant et curieux de connaître la suite :

- Oui ? Je suis tellement ?

Et elle se retourna soudain, toute rose fuchsia :

- Non, rien. Mais, Bisou, voyons, mange plus proprement ! Oh là là, ces enfants je vous jure, faut tout leur apprendre... Je t'ai sans doute reconnu avec ton Ruban Joie, ton objet bizarre et ta sphère blanche autour du cou !

- "Sans doute" ?

Elle ne répondit pas, et resta le dos tourné, à trifouiller Bisou sans réelle raison. Je changeai de sujet, moi qui n'aime pas vraiment mettre les gens dans des situations embarrassantes ET être dans des situations embarrassantes :

- Hum, hum, et, heu, Fire ? Il va bien, au moins ?

- Oui, oui, fit-elle sans se retourner avec une petite voix.

Mais j'insistai :

- Nan, il va pas bien.

Et elle aussi :

- Si, si...

- Nan.

- Si.

- Nan, j'te dis.

- Si, je te dis !

- Lilas ?

- Quoi ?

- Dis-moi.

- De quoi ?

- Qu'est-ce qu'il va pas avec Fire ?

- Fire ? C'est qui déjà ?

- Te fous pas de moi.

- Je ne me fous pas de toi. Oh, là, un Goélise !

- Change pas de sujet ! Arrête de te foutre de ma gueule !

- Mais je ne me fous pas de ta gueule ! Je ne me le permettrais jamais !

- Mais si, la preuve, tu te le permets !

- Jamais !

- Tu viens de te le permettre ! Alors arrête de te permettre ça ! C'est très agaçant !

- Si je puis me permettre, je trouve que tu te permets un peu trop de décider pour les gens ce qu'ils doivent se permettre. Permets-moi donc de m'excuser, mais si quelqu'un se permet de se moquer de quelqu'un en ce moment, c'est toi, et non moi, car moi, je ne me permets pas de permettre des permissions à tout va aux gens. Je ne me le permettrais jamais.

Elle commençait sérieusement à me courir sur le haricot. Je me retins de ne pas balancer une Cru-Aile, puis, avec un large sourire :

- Lilas, ma très chère, aurais-tu l'amabilité de me répondre à la question: what's wrong with Fire ?

Elle fit un grand sourire également, avant de me répondre joyeusement :

- Ça brûle !

PUTAIN DE BORDEL DE MERDE DE...

- Je pense tout de même avoir le droit de savoir, rétorquai-je en croisant les ailes, jugeant qu'il serait préférable de ne pas s'énerver. Après tout, je fais partie de votre équipe, et je vais soit mourir dans une semaine, soit redevenir humain, et dans les deux cas, je ne pourrais plus vous comprendre mot à mot. S'il y a un problème avec notre cher meneur d'équipe de secours et d'exploration, j'aimerais en être informé et/ou le régler dans les meilleures conditions, c'est-à-dire celles actuelles.

Elle déchanta rapidement, et réfléchis longuement, d'un air attristé. Franchement, ça devait être grave à tel point de garder ça secret, et de prendre cet air...

- Tu sais, j'en ai eu des problèmes, et c'est pas celui d'un Pokémon comme Fire qui va me ruiner ! ajoutai-je en riant. Alors, il est où ?

Elle se tourna vers le reste de la plage, et soupira, en me montrant avec une de ses feuilles :

- Il s'est assis sur le rebord entre le trottoir et la plage, à la limite, là-bas. Il est amoureux.



[...]



- Bah c'est fantastique ça ! m'exclamai-je, riant. C'était ça son problème ?! Eh bah dis-donc, vous vous compliquez la vie ! Je vais aller lui parler, moi !

Et je me dirigeai rapidement vers le Salamèche assis sur le rebord, là-bas, que je distinguai finalement. Lilas voulut me rattraper, mais elle se devait de rester avec Bisou. Elle se contenta de soupirer, et je l'entendis faiblement murmurer je ne sais quoi.


J'étais remonté jusqu'à la route, et je m'approchais du dos du Pokémon Lézard, assis sur le rebord, son appendice caudal enflammé qui se balançait légèrement au vent. Il avait le regard tourné vers l'horizon, et discutait avec le Pokédex dans les pattes :

- Œuf Pokémon.

L'engin interactif répondit :

- Un Œuf Pokémon est un œuf de Pokémon. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ?

- Alors... Comment faire un œuf de Pokémon ?

- Faites pas genre que vous savez pas.

Fire s'irrita :

- Je le sais très bien, comme faire un Œuf Pokémon ! Mais c'est pour enchaîner sur un autre sujet !

- Lequel ? Dites toujours. Sachez juste que pour évoluer...

Le meneur soupira :

- Je le sais, faut qu'on remplisse une condition. C'que j'te demande, c'est des infos, ok ? Sur... Ah hem... L'amour entre deux Pokémon.

- Veuillez préciser. L'amour en tant que sentiment ou en tant que coït ?

- En tant que sentiment.

- Entre deux Pokémon donc ?

- C'est ça. T'as bien des données là-dessus ? quémanda Fire.

Je décidai de faire mon entrée à ce moment oportun :

- Hey ! Salut Fire !

Il sursauta, au bord de la crise cardiaque, manquant de faire tomber le Pokédex, qu'il rattrapa de justesse. Pendant que l'outil électronique pour dresseurs donnait la traduction de "Fire", le Salamèche cria :

- NAN MAIS ÇA VA PAS ?! T'AS FAILLI ME FAIRE AVOIR UN INFRACTUS !

- On dit "infarctus"...

- M'EN BRANLE ! QU'EST-CE TU FOUS ICI ?!

Je bondis sur le rebord en pierre à ses côtés, et, regardant l'horizon également :

- Je viens te dire qu'être amoureux, c'est pas dramatique !

Il détourna la tête dédaigneusement, évitant mon regard et mon visage joyeux :

- Peuh ! Qu'est-ce t'en sais, toi ?

Je souris, m'avouant également à moi-même :

- J'en sais que... Je suis amoureux, moi aussi !

Il me dévisagea alors brusquement, et s'exclama :

- Sérieux ?! Toi ?!

- Bah oui... Enfin, je crois... Disons qu'on t'apprend pas vraiment ce que c'est qu'être amoureux, mais je pense que je le suis. Ce qui est dommage, c'est que je ne risque plus jamais de la revoir... Mais je sais qu'elle existe toujours !

Puis, à son adresse, et toujours aussi souriant, je déclarai :

- Elle s'appelle Julie.

Il n'avait pas l'air de comprendre mes précédentes explications, mais restait quand même impressionné et ne disait mot. Je demandai :

- Bah quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ?

Lézard prit la pose de gars pensif, et, avec un sourire narquois et narcissique :

- Non, rien... C'est juste, que, comparé à moi, je vois vraiment pas ce qu'une fille te trouverait...

Connard.

- OH, ÇA VA, HEIN ! J'TE SIGNALE QUE J'ÉTAIS DIX FOIS MIEUX EN HUMAIN !

Puis je me calmai :

- Bref, c'est quoi le problème ?

Fire contempla l'horizon, les vagues qui se jetaient sur la plage, en cet après-midi d'été, mit son visage orange et reptilien au soleil, et soupira :

- C'est... C'est compliqué. Pour toi, j'en sais rien, mais pour moi, pour nous, ça l'est.

Je voyais bien qu'il ne voulait pas en parler. Le Pokédex signala qu'il allait se mettre en mode veille si on l'utilisait plus, je lui dis de se la fermer, il se mit en mode veille. Je cherchai, mais ça tombait quasiment sous le sens : il était parti lorsque le Carchacrok - femelle - de ma mère s'est fait battre, il a dû avoir une désillusion lorsqu'elle est tombée à terre, et voilà. Ça explique la sortie soudaine du Pokédex, et tout le reste. J'le comprend, elle est plutôt attirante, pour un Pokémon. En plus, si je me souviens bien, je crois qu'ils sont dans le même groupe d'œuf... Deux Pokémon du groupe "dragon". D'où le questionnement du Pokédex sur les œufs. Je souris gentiment :

- C'est Carchacrok ?

Il se crispa soudain, rougis malgré sa teinte de peau, et hocha la tête, avant de se ressaisir et d'adopter de nouveau une mine de couleur habituelle.

- Et alors, c'est quoi le problème ?

- Tu le vois vraiment pas ?

- Bah non. C'est normal.

- Ah oui ?

Je haussai les épaules :

- Bah oui, elle est attirante, t'es pas moche, vous êtes dans le même groupe d'œuf, tu...

Il rectifia, soupirant et avouant, quelque peu honteux :

- Nan, c'est l'autre. L'autre Carchacrok.




[...]




Ah, c'est donc ça.

- Ok, et alors ? rassurai-je en souriant amicalement. Je vois toujours pas où est le problème.

Il fut outré :

- Tu vois pas ou est le problème ?! Lui, c'est un mec, et moi aussi, j'te rappelle.

- Et alors ?

- Et alors ? Fais pas le gars aussi compréhensif ! En tant qu'être humain, ça ne te choque pas ?

Je haussai les épaules :

- Bah non. Chez les humains, ça a longtemps été mal considéré par beaucoup, mais de nos jours, c'est largement accepté. Même s'il y a des abrutis qui l'acceptent toujours pas, la plus grande majorité est tolérante... Enfin, à mon avis. Pourquoi ? Ça devrait me choquer ?

Fire rétorqua, furieux :

- Parce que ça l'avait dérangé, le dresseur que j'avais eu ! Tu crois que c'est pourquoi qu'il m'a abandonné ? Nan, c'est parce qu'il m'acceptait pas comme je suis ! Quand il a découvert ça...

- Comment il l'a découvert ? Sans trop d'indiscrétion...

Lézard soupira :

- Au point où j'en suis... Disons que les attaques Attraction provenant d'une femelle ne marchaient pas sur moi, et celles provenant de mâles oui. J'ai été trahi par ça...

Je lui posai mes griffes sur son épaule, et le réconfortai :

- Tu sais, t'as pas à être inquiet. Tu es comme ça, et c'est tout ! C'est au contraire une preuve que les Pokémon soient des êtres évolués, si certains comme toi sont homosexuels. Ça signifie que les Pokémon peuvent avoir une préférence... Tu sais, les préférences sexuelles, c'est au même titre que tes goûts gustatifs, de couleur, ou même musicaux, cinématographiques... Et ça, c'est un signe que les Pokémon ont des préférences, et c'est bien !

Il me regarda bizarrement à l'entente du mot "cinématographiques". Mais bon, au final, il n'était pas convaincu :

- Le problème, c'est que chez les Pokémon, c'est plutôt mal vu.

Je pensais à ma dernière visite quelque peu mouvementée dans une Pension Pokémon.

- Ah oui ? J'en ai pas eu l'impression. C'est-à-dire ?

Le Salamèche soupira tristement :

- C'est-à-dire que... Qu'on est relégué de la société, si tu veux. Et par sa famille. Je te raconte pas comment j'ai été perçu dans la vallée Dracaurifique. J'ai voyagé et quitté Johto avec ce dresseur avec l'intention de voyager dans une région plus accueillante avec quelqu'un de plus tolérant, mais j'me suis trompé. A mon arrivée à Unys, j'ai de suite aimé l'idée de monter une équipe de secours et d'exploration, alors j'ai rencontré Lilas qui fuyait sa dresseuse. Par chance, il s'est avéré que Lilas était un formidable Pokémon, dans le sens où elle est incroyablement tolérante et ouverte d'esprit. On s'est racontés nos calvaires, puis on s'est mit d'accord sur le fait de se serrer les coudes et de monter l'équipe des W.T.F. pour protéger tous ceux qui sont en danger, et découvrir de nouveaux horizons. Au moins, avec toi, on n'est pas déçus sur le dernier point !

Je l'interrompis, ayant peur d'avoir entendu ce que j'avais entendu :

- Attends, attends... Lilas fuyait sa dresseuse ?

Il tourna la tête très sérieusement vers le Fragilady qui se baignait avec Bisou ; les deux Pokémon riaient aux éclats en s'éclaboussant et s'amusant dans le joie et la bonne humeur :

- Ouais... Il s'est avéré que sa dresseuse était une grosse malade... En gros, elle battait Lilas si elle n'arrivait pas et ne faisait pas ce qu'elle lui ordonnait constamment. Donc Lilas est devenue plus discrète, plus méfiante, plus fragile. Tu vois le genre ?

Je fus scandalisé :

- Mais bordel, c'est quoi ces dresseurs de merde ? Y a encore des imbéciles dans le genre à cette époque ? J'te jure que, si j'les rencontre un de ces jours, j'te les massacre !

Fire regarda l'horizon une nouvelle fois. Je contemplai également ; la beauté de l'océan, les enfants qui jouaient gaiement, les vacances dans toute leur splendeur, la chaleur du soleil, les embruns, le frisson de la brise marine, le bruit des rouleaux et des cris des enfants, couplé à celui de la ville derrière nous, et des moteurs de voitures... Puis le meneur des We Tackle at Foes me demanda sans détourner son regard de notre vue sur la plage :

- Tu... Tu penses vraiment que c'est pas grave ?

- Pourquoi ça serait grave, j'te le demande ! ris-je. Allons, ressaisis-toi, et sois fier de ce que tu es ! Tu peux être certain qu'au moins moi, j'te trouve tout ce qu'il y a de plus normal ! J'vais pas te considérer autrement qu'avant juste parce que t'aimes pas le bleu !

Je bondis sur le sable en contrebas, et, faisait signe à Fragilady qu'on venait la rejoindre, j'assurai à Fire :

- Vous êtes les Pokémon les plus sympathiques que j'ai jamais rencontré ! Vous m'avez secouru et pris en charge dés que vous m'avez vu, et - même si c'était difficile de vous convaincre, mais je le comprends - vous m'avez cru sur le fait que j'étais un humain auparavant. Et vous m'aidez à aller au bout de ce que je dois faire, alors que vous auriez pu rester bien tranquillement chez vous ! Nan, franchement, Fire, vous êtes géniaux, et jamais je vous oublierais, mes... partenaires ! conclus-je en par un clin d'œil.

Fire bondit sur le sable, à mes côtés, et, rempli d'une joie incroyable qui s'observait de par les sécrétions de ses glandes lacrymales, me dévisagea longtemps, prêt à chialer. Il se jeta alors dans mes bras, me gratifiant :

- Merci ! Merci infiniment, Frère Plume ! T'es le pote que j'aie jamais eu ! Franchement ! Merci, merci !

Et flash! , le voilà, le moment que l'on attendait tous. Un crépitement mystérieux suivi d'un bruissement particulier se fit entendre, au même moment, le Salamèche qui me tenait dans ses bras rayonna d'un éclat flamboyant sous le soleil de Vaguelone. Je m'écartai doucement, presque hypnotisé par cette lueur blanche bleutée qui faisait se développer en quelques secondes le Pokémon Feu. Son corps éclatant voyait ses pattes antérieures devenir plus musclées et plus robustes, son tronc se muscla et se grandit, ses pattes avant se virent posséder de plus grandes et larges griffes et se développèrent également. Une corne lui poussa à l'arrière de la tête, son visage prit de nouvelles formes, devint plus mature et plus viril. Sa queue, elle, grandit formidablement, et la flamme en son bout grossit et tripla d'intensité. Il fut ainsi deux fois plus grand qu'il y a quelques secondes ; le Salamèche évolua en Reptincel, le Pokémon Lézard devint le Pokémon Flamme. La lueur se dissipa, laissant tout le loisir à Fire d'exploser sa joie de l'évolution. C'était malin, j'me sentais tout petit maintenant. Heureusement que y avait Bisou, tiens.


Nous rejoignîmes tous les deux Lilas, qui fut enchantée à l'idée de l'évolution de Fire ; ils faisaient maintenant la même taille, soit dépassaient légèrement le mètre. Le meneur était surexcité, il crachait des flammes à tout va, et Lilas avait beau lui dire de faire tout de même attention, elle s'amusait à être aussi enjouée que lui et à l'imiter (sauf qu'elle crachait pas du feu, hein, elle faisait genre. Soyons réalistes). Bisou aussi était drôlement content, et répétait "Tonton Fre grand ! Tonton Fre grand maintenant !" en dansant joyeusement autour des deux secouristes. Bref, c'était la joie, et je souriais, content que tout le monde aille bien.


Fragilady accompagna Polarhume se baigner, et Reptincel et moi restâmes sur la plage à les attendre. Reptincel, car l'eau et lui, ça fait deux, et moi...

- Pourquoi tu vas pas te baigner ? demanda-t-il, étendu de tout son long au soleil. C'est une journée parfaite, profites-en !

Je contemplai la mer. Ces vagues, ces rouleaux... Ce bleu... Ce bleu profond... L'image du spécimen non identifié que j'avais rencontré au large de Volucité cette nuit de voyage avec l'Etoile d'Unys me revint alors subitement à l'esprit ; j'agitai horizontalement le bec :

- J'ai pas très envie. Et puis, faut retrouver Ludwig !

- Tiens, c'est vrai, j'l'avais oublié, lui... geignit nonchalamment le Pokémon Flamme en passant ses pattes avant sous sa tête. Tu l'as vu ?

- Non... J'me demande où qu'il est barré... répondis-je en cherchant du regard un dresseur lui ressemblant.

Et, soudain :

- AAAAAHHHHHH ! FUYEEEEEEEEZ ! DES SHARPEDOOOOO !

Tout le monde se redressa soudain, et se tourna vers la cohue soudainement formée, composée des baigneurs et des adeptes de la plage. Les dresseurs déboulaient hors de l'océan en portant leurs Pokémon blessés, la populace hurlait à la mort, ce fut la panique totale. C'est alors que je remarquai des ailerons par CENTAINES s'amasser et foncer droit vers la plage, créant des remous impressionnants et une démence complète des vacanciers. Chacun se bousculait dans l'eau, se piétinait, se prenait des coups, que ce soit de pied, de genoux, de poings ou de bouées et de petits bateaux en plastique en tout genres, se relevait, et retombait violemment à terre dans les éclaboussures d'eau salée et de sable mouillé. Lilas et Bisou étaient en plein dedans, nous ne les distinguâmes plus.

- LILAS ! BISOU !

Fire et moi nous ruâmes à l'encontre des gens qui hurlaient, et fûmes vraiment puissamment frappés et éjectés par la foule prise de folie, et égoïste. Nous parvînmes plus mal que bien à atteindre les premiers flots entre les habitants et touristes qui s'égosillaient et criaient à la mort, mais Fire freina en dérapant sur le sable :

- Gaaah ! J'peux pas aller plus loin ! LILAAAS ! BISOOUU ! GROUILLEZ-VOOUUS !

Puis, à mon égard :

- Vite, vas-y !

- Moi ? Mais je... Enfin, l'eau...

- PAS DE MAIS ! VA LES AIDER !

Je vis les deux Pokémon au large, en sérieuse difficulté, Lilas avait l'air blessée, et Bisou semblait commencer à se noyer. Mais autre chose attira mon attention, un truc d'autant plus ÉNORME qu'il faisait péter les cordes vocales de tout Vaguelone, et la station estivale toute entière devint folle de peur et fuyait : à l'arrière de la nuée de Sharpedo qui s'approchaient à une vitesse astronomique, un bout d'horizon bleu se détachait et s'avançait de plus en plus vers la baie, grossissant au fur et à mesure. Un véritable mur d'eau, un gargantuesque raz-de-marée allait s'abattre droit sur Vaguelone. MAIS POURQUOI ICI, MAINTENANT ?! POURQUOI TOUT COURT, BORDEL ?! Je me jetai alors à l'eau, après un saut que je ne serais pas prêt d'oublier, et nageai du mieux que je pouvais, battant vigoureusement et sans réfléchir réellement les ailes et les pattes arrières. Je me défonçai totalement les articulations, j'avais l'impression de perdre mes bras, mon corps s'alourdissait avec mes plumes gonflées d'eau, mes yeux se remplissaient d'eau salée, ma gorge aussi, je crachais à foison l'eau par le bec et les narines et j'avais effroyablement peur ; allez savoir si c'est le désavantage lié à mon type, si c'est mon apparente hydrophobie ou la tension présente, mais c'était totalement inhumain de faire ce que je faisais. Soudain (QUOI ENCORE ?), le ciel se remplit de cumulonimbus noirs d'orages en même pas dix secondes, et de pharamineux éclairs foudroyèrent le ciel sous une pluie battante. Le violent changement de météo, le raz-de-marée, les Sharpedo, ma peur flippante de l'eau et ma dévastatrice agilité à nager... FORMIDABLE TOUT ÇA ! Je perçus alors Lilas avec Bisou, qui flottaient et dérivaient, ce dernier s'accrochant très difficilement aux quelques feuilles de Chef-Fleur : Lilas, en bonne plante, flottait, mais Bisou, c'était une autre histoire. Le Polarhume chialait, buvait la tasse, s'étouffait, toussait fortement à gorge déployée, puis s'égosillait de plus belle. De nombreuses brasses animées par le désespoir et la peur plus tard, je les atteignis, et c'est à ce moment que la baie fut transpercée par les Sharpedo qui traçaient à tombeau ouvert. Entre le fracas des éclairs, le battement de la pluie et les hurlements des habitants presque plus perçus, j'entendais des cris de la part des Pokémon Brutaux, ce qui indiquaient qu'ils fuyaient la vague de cinquante mètres de haut qui nous surplombait déjà, dans un grondement sourd. Lilas, Bisou et moi-même fûmes frappés par la nuée de Sharpedo, et un coup violent me fis lâcher contact avec les deux Pokémon que j'étais censé sauver. Je fus entraîné sous la surface, et coulai à pic, retenant le peu d'oxygène que j'avais emmagasiné. Les deux corps inertes du Fragilady et du Polarhume flottaient à la surface, arrosés par le déluge ; je les voyais s'éloigner, je me voyais couler, les Sharpedo s'entassaient sur le rivage, je ne voyais quasiment que de l'eau sombre et grise, illuminée toutes les secondes par les éclairs. Dans le silence infini dans lequel j'étais plongé, l'océan entier se souleva alors, je me sentis remonter de plusieurs mètres soudainement, et le raz-de-marée se recroquevilla, la lame culminante du rouleau commença à s'échouer. Je hurlai, vidant mon corps et mes poumons de tout mon oxygène, dans une colonne de grosses bulles. J'entendis un tintement délicat. Je scintillai. Je ressentis une incommensurable puissance dans ma trachée. Il y eut une explosion cataclysmique.