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Rédemption [OS] de Nasca



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Informations

» Auteur : Nasca - Voir le profil
» Créé le 28/01/2012 à 12:52
» Dernière mise à jour le 06/10/2014 à 10:30

» Mots-clés :   Drame   Johto   One-shot   Présence d'armes   Romance

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Rédemption
- Tu devrais revenir sur ta décision, Dias. Cette opération n'est pas sans risque. Tu le sais mieux que quiconque !

Le dénommé Dias ne semblait pas écouter. Mal coiffé, il avait la mine des mauvais jours. Assis sur un tonneau, il caressait tranquillement son bouc tout en suivant du regard le Spectrum qui louvoyait dans la tente. La femme qui venait de lui adresser la parole tapa sur la table pour attirer l'attention de son auditeur.

- Si je t'ennuie, dis-le-moi ! cria-t-elle, furieuse. Tu sembles oublier que si quelque chose devait mal se passer, il y aura également des conséquences pour moi !
- Je t'écoutais, Anaïs, mais nous en avons déjà parlé des centaines de fois, rétorqua Dias avec nonchalance. Ma décision est prise, je sais ce que je fais. Alors ne perdons pas plus de temps et préparons ce voyage antérieur.

Le voyage antérieur. Un procédé qu'il avait inventé en collaboration avec Anaïs. Tout était parti de recherches sur l'attaque Dévorêve. Après plusieurs années d'études, ils avaient réussi à en comprendre le fonctionnement et à en inverser le mécanisme. Ainsi, et depuis lors, ils étaient capables de façonner des rêves de toutes pièces et de les faire vivre à n'importe quel individu. A l'heure d'aujourd'hui, cette technique est essentiellement utilisée pour faire revivre à un homme des souvenirs très précis de son passé. C'est ça que l'on appelle le voyage antérieur.

Dias se leva et s'approcha du lit de fortune qui trônait dans un coin de la tente. Son visage était grave. Il s'allongea et fixa le plafond de toile d'un regard vide. Il avait attendu ce moment depuis si longtemps. Dans sa main, il serrait un petit papier d'emballage froissé. Un Papillusion doré était représenté dessus, accompagné des mots « Doublon Noir », le nom d'une célèbre marque de chocolat. Dias soupira. Depuis ce terrible jour, il avait conservé ce papier auprès de lui.

Tandis que Dias s'installait, Anaïs avait déplacé un tabouret à côté du lit et s'était assise à côté de son ami alité. Elle savait qu'elle ne pourrait pas le convaincre de revenir en arrière. Mais pourtant...

- Tu sais, Dias, dit-elle en lui posant une main sur l'épaule. Pénélope est morte et aucun voyage antérieur ne pourra jamais te la ramener. Tu risques même de te réveiller avec un remord bien plus grand que celui qui t'habite aujourd'hui.

Dias regarda Anaïs un instant dans les yeux avant de détourner à nouveau son regard vers le toit.

- Je le sais bien. Mais ce voyage est devenu une véritable obsession. Il me corrompt, il m'empoisonne. Je suis incapable de penser à autre chose. Si je ne l'effectue pas, je finirais par devenir fou.

Anaïs baissa les yeux. Elle aurait tant aimé le convaincre. Durant tout un mois, elle avait tenté de le dissuader. En vain, malheureusement. Aujourd'hui, la meilleure chose qu'elle pouvait faire pour lui, c'était l'assister dans sa démarche. D'une voix autoritaire, elle demanda à son Spectrum de la rejoindre.

- Je sais que tu comptes utiliser le voyage antérieur non pas pour revivre une séquence de ton passé, mais bel et bien pour modifier ce passé afin de vivre une réalité alternative, annonça Anaïs. Dans ce cas-là, tu n'es pas sans savoir que les règles ne seront pas les mêmes que celles d'un voyage antérieur ordinaire.
- Oui, je sais ce que tu vas me dire. Pour me réveiller, je devrais faire en sorte que la fin de mon rêve artificiel coïncide avec la fin de mon véritable passé. Sans quoi, je tomberai dans un profond coma, récita-t-il.

Anaïs hocha la tête. Elle attrapa une pile de documents et les présenta à Dias.

- Durant ton voyage, je te ferai la narration de ce qui s'est vraiment passé, lui dit-elle. Ca te permettra de savoir où tu te situes dans ton rêve et, surtout, de savoir quand est-ce qu'il se termine.

La jeune femme pouvait ressentir l'impatience de son ami, mais il était primordial qu'elle lui répète toute la procédure à suivre. Elle prit cette fois un objet enveloppé dans un linge et le posa sur le lit. Dias l'attrapa délicatement et défit l'emballage de tissu. Il y avait une dague à l'intérieur. Les traits du chercheur se crispèrent.

- Si tu la tiens, elle t'accompagnera dans ton rêve. Cela te permettra de-...
- Je le sais !

Il l'avait coupé sèchement. Anaïs s'y attendait et ne s'en contraria pas. Elle se leva et s'approcha du Spectrum. Elle lui murmura quelques ordres et retourna s'asseoir. Le Pokémon Spectre tira la langue malicieusement puis vint se placer au-dessus de Dias.

- Puisque tout est prêt, nous allons commencer. A tout à l'heure, Dias.

Au signal de la jeune femme, le Spectrum plongea le chercheur dans un profond sommeil. La seconde d'après, les yeux du Pokémon se teintèrent une inquiétante lueur bleue. Preuve que le voyage antérieur avait débuté. Anaïs soupira. Elle attrapa les feuilles posées à côté d'elle et commença à lire à haute voix.

Autour de Dias, le paysage était flou, difforme et entouré d'une brume aux tons pastel. Il était impossible de reconnaître le moindre détail. Petit à petit, les choses se précisèrent. Le ciel d'abord. Puis des gradins de fortune. Dias se trouvait au milieu d'un champ, encerclé par des dizaines de supporters frénétiques. Il tenait dans sa main une Pokéball. Et en face de lui, se dressaient un Golemastoc et son dresseur. Un duel ? Le chercheur se plaqua une main contre le front. Il avait du mal à réfléchir. La transition vers le voyage antérieur était bien plus déstabilisante qu'il le pensait. Comme pour répondre à sa détresse, la petite voix d'Anaïs résonna dans la tête de Dias.

« C'était il y a onze ans, sur la route 34. Tu sais, celle située au sud de Doublonville. Un tournoi de rue s'était organisé sur le pouce, au cours de la journée. Tu t'étais inscrit avec la certitude de gagner. Les choses s'étaient bien agencées. Ton Airmure et toi aviez atteint la finale sans trop d'effort. Le dernier match allait commencer. Tu étais si confiant, si arrogant que tu t'étais même permis de te moquer de ton adversaire et de son Golemastoc avant le début du combat. »

La narration d'Anaïs permit à Dias de reprendre ses esprits. Ca y est, il se rappelait précisément ce qui allait se passer. Et s'il souhaitait altérer son passé, il fallait qu'il réagisse tout de suite. Il rangea sa Pokéball. Le public fut le premier surprit par ce geste. Dias se dépêcha de se justifier.

- J'abandonne, déclara-t-il. Je renonce au match, Joan a gagné.

Comme pour protester à cette annonce, un brouhaha s'éleva dans l'assemblée. Le dénommé Joan s'avança pour se mettre à côté de son Golemastoc.

- Attends, tu veux dire qu'après nous avoir copieusement insultés, mon Pokémon et moi, tu te retires sans combat ?

Dias hocha la tête. Joan eut un rire nerveux.

- Tu veux dire que, tout d'un coup, tu as eu peur de perdre ? Tu veux t'épargner cette humiliation après ton incroyable numéro de vantardise ?

Le chercheur tiqua à la provocation. Il aurait tant aimé le remettre à sa place. Mais il n'avait pas le temps. Il ne devait surtout pas répéter les mêmes erreurs. Il reprit son sang-froid et se contenta de quitter l'arène avec le désir de n'adresser ni un mot ni un regard à quiconque. Les huées et les rires moqueurs du public rendirent son départ plus pénible encore. Il savait que tout cela n'était qu'un rêve. Mais il sentait son ego se tordre, hurler de douleur. Ca lui paraissait si vrai.

- Et n'oublie pas de prendre le lot du perdant au passage ! Tu l'as bien mérité, lança Joan dans un gloussement.

Dias se figea momentanément à l'entente de ces mots. Le lot du perdant. Le chercheur se hâta d'oublier tout ça. Bientôt, ce mauvais moment serait derrière lui. Il pressa le pas et retourna à Doublonville.

« Le match avait débuté. Ton Airmure s'était envolé en répandant un tapis de picots pointus au sol. Ton mouvement d'ouverture fétiche face au Pokémon terrien. Mais ton adversaire connaissait ta stratégie. Joan avait ordonné à son Golemastoc de ne pas bouger et de t'attaquer à distance. Des Laser Glace avaient jailli des mains du Pokémon Spectre en direction de ton Airmure. Mais ton Pokémon était agile. Il les avait évités et avait riposté avec une dangereuse Lame d'Air. Le Golemastoc avait encaissé le coup de plein fouet. Mieux : il avait même perdu l'équilibre et s'était écroulé sur les picots. La victoire te tendait les bras. »

Ce jour était loin d'être anodin. Car c'était celui de la Saint-Valentin. Arrivé en ville, Dias fit une halte au marché. Un maraîcher l'arrêta et lui proposa d'acheter une boîte de chocolats. Le chercheur tiqua. Il écarta rapidement ses pensées et refusa poliment. Il acheta à la place un bouquet d'Orans rouges en fleurs. Sans plus tarder, il se hâta de rejoindre le Parc Naturel, situé au nord de Doublonville.

« Le match s'était étendu, mais tu étais maintenant prêt à porter le coup de grâce. Sur tes ordres, ton Airmure avait pris de l'altitude. Quelques secondes plus tard, il s'était abattu cruellement sur sa proie. Un sourire s'était dessiné sur le visage de Joan. Entendre son prochain ordre t'avait fait l'effet d'un coup de poignard. « Poing de Feu ». Le Golemastoc s'était retourné brutalement. C'était trop tard pour Airmure. La main enflammée du Pokémon s'était violemment écrasée contre le thorax de ton champion. L'élan avait rendu le choc plus violent encore. Airmure s'était écrasé lourdement au sol. Tu avais perdu. »

La nuit se profilait lorsque Dias arriva enfin aux abords de la fontaine du Parc Naturel. Il prit son inspiration et s'approcha. Une jeune femme était assise sur un banc. Elle remarqua la présence du chercheur et se leva pour aller à sa rencontre. Elle était furieuse.

- Tu avais promis que nous passerions la journée ensemble, Dias ! Lorsque j'ai entendu qu'un tournoi de rue s'organisait, j'ai espéré que tu n'y participerais pas. Mais tu es trop égoïste. Tu te moques de ce que je peux ressentir. Tu te moques de savoir que je t'attends ici depuis des heures !

Dias se mordit les lèvres. Il tendit son bouquet à la jeune femme. Elle refusa son cadeau.

- Je m'excuse, Pénélope, marmonna-t-il. C'était peut-être un peu tard, mais j'ai déclaré forfait pour te rejoindre. J'ai renoncé à ma finale. Les moqueries du public et de Joan sont ma punition pour mon égoïsme.
- Tu serais parti alors que tu étais en finale contre Joan ? Je ne te crois pas, Dias, répliqua Pénélope, la voix toujours enveloppée d'une fureur palpable.
- Demain, tu entendras les gens en parler et tu sauras que je n'ai pas menti. Alors, s'il te plaît, pardonne-moi.

Pénélope ne répondit pas. Dias baissa les yeux. Il était profondément amoureux de cette fille. Il s'en rendait compte maintenant. Un choc l'extirpa de ses réflexions. Pénélope s'était blottie dans ses bras. Elle pleurait. Dias la serra contre lui et lui caressa les cheveux. Il n'avait jamais ressenti pareil sentiment. Il ferma les yeux. Ce moment, il désirait en profiter aussi longtemps qu'il le pouvait.

« Tu n'avais jamais eu aussi honte de ta vie. Ton égo avait volé en éclats. La haine se lisait sur ton visage. Et ce lot de consolation que l'on t'avait offert était la preuve de ta défaite. Une boîte de chocolat « Doublon Noir ». Tu ne l'avais pas jeté. Tu étais trop occupé à ruminer ton humiliation. La nuit était tombée. Tu avais décidé de rejoindre le Parc Naturel. Pénélope devait t'y attendre en fin de matinée. Tu étais certain qu'elle ne t'y attendait plus. Mais comme poussé par une force invisible, tu t'y étais quand même rendu. »

Dias et Pénélope s'étaient assis sur l'herbe. C'était l'été et les nuits étaient douces. Main dans la main, ils contemplaient le ciel. Les étoiles semblaient tellement plus nombreuses ce soir-là. Dias savourait le moment, mais il savait que tout cela n'était qu'éphémère. Il passa doucement derrière Pénélope et l'enlaça. L'initiative du chercheur surprit la jeune femme.

- Qu'est-ce qui t'arrive aujourd'hui ? Tu parais si différent, nota-t-elle.

Dias ne répondit pas. Le rêve touchait à sa fin. Il le savait. Dans sa tête, la voix d'Anaïs résonnait toujours. Il savait quels seraient ses prochains mots. Il ne voulait pas les entendre. Mais il n'avait pas le choix.

« Pénélope t'attendait. Elle était furieuse et s'en était violemment pris à toi.

- Tu avais promis que nous passerions la journée ensemble, Dias ! Lorsque j'ai entendu qu'un tournoi de rue s'organisait, j'ai espéré que tu n'y participerais pas. Mais tu es trop égoïste. Tu te moques de ce que je peux ressentir. Tu te moques de savoir que je t'attends ici depuis des heures !

Sans un mot, tu lui avais tendu ta boîte de chocolats. Elle l'avait prise. Puis, d'un coup, elle te l'avait lancé à la figure.

- Tu crois que je ne sais pas comment fonctionne un tournoi de rue ? avait-elle hurlé. Tu comptais vraiment m'offrir ça pour te faire pardonner ? Tu es un égoïste, Dias. Et, en plus de ça, tu es un perdant ! Cette boîte de chocolats le prouve ! Tu croyais vraiment que j'allais accepter ça ? Le symbole de ta défaite ? Tu me croyais si naïve ?!

C'était la pique de trop. Ton sang n'avait fait qu'un tour. Tu es parti en la poussant violemment au passage. Dans ta colère, tu avais oublié qu'il y avait des escaliers à côté d'elle. Elle était mal retombée. Lorsque tu t'en es rendu compte, il était déjà trop tard. La vie l'avait déjà quittée. »


La voix d'Anaïs se tut. Une larme roula sur la joue du chercheur. C'était un accident. Il ne voulait pas lui faire du mal. Il se calma. Ce voyage antérieur lui avait permis de vivre l'espace de quelques minutes ce qu'il n'avait pas pu vivre. Et tout ça, à cause de sa bêtise. Mais il fallait se réveiller maintenant. Et pour ça, il fallait que son rêve rejoigne la réalité. Il desserra l'étreinte exercée par sa main droite et la glissa doucement dans une de ses poches intérieures. C'est là qu'il avait rangé la dague qu'il avait emmenée avec lui. Il inspira profondément.

- Me réveiller, hein ? chuchota-t-il à lui-même.

Il ferma les yeux. Deux secondes passèrent. Seuls les plus attentifs purent entendre quelque chose retomber sourdement sur l'herbe.