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Édition #53


Pokémon, un jeu de Pierre-Feuille-Ciseaux ?


Championnats du Monde de Pierre-Feuille-Ciseaux 2009, à Toronto

Cet article un peu particulier a pour but d'expliquer certaines méthodes de lecture des décisions adverses au travers de la comparaison avec Pierre-Feuille-Ciseaux, un jeu bien plus stratégique qu'on a l'habitude de le penser.

Feu, Plante, Eau et autres principes fondamentaux

Depuis plus de 20 ans, le classique schéma « Le Feu brûle la Plante, la Plante absorbe l'Eau et l'Eau éteint le Feu » est une thématique récurrente des combats Pokémon.
Ce fonctionnement, ouvertement inspiré du jeu de Pierre-Feuille-Ciseaux, n'est pourtant pas complètement exact. En effet, nombreux sont les exemples où un Pokémon pourtant désavantagé en type peut gagner son duel face à un autre (Par exemple, Carchacrok Jovial Life Orber outspeed Givrali et à l'OHKO avec Lame de Roc 75% du temps).

Les matches-up des Pokémon ne sont donc pas uniquement déterminés par leurs types, mais également par leurs stats, leur Talent et leur movepool.

Toutefois, une vérité importante demeure : Chaque Pokémon est avantagé face à certains et perd son duel face à d'autres. Autrement dit, chaque Pokémon « Feuille » possède son « Ciseaux » et son « Pierre ».

Ainsi, il n'est pas complètement faux d'affirmer qu'une partie de Pokémon se réduit souvent à rechercher des duels favorables. Pour ce faire, il va souvent être nécessaire d'anticiper le prochain mouvement adverse, afin d'agir en conséquence, exactement comme à Pierre-Feuille-Ciseaux.

"Pierre-Feuille-Ciseaux" ou "la stratégie là où l'on ne l'attend pas "

Avant de revenir, dans une troisième partie, à la stratégie Pokémon à proprement parler, il va être intéressant de se pencher plus en détails sur les subtilités de ce jeu minimaliste ancestral.

Pour les rares lecteurs qui n'en auraient jamais entendu parler, le jeu de Pierre-Feuille-Ciseaux (PFC) fait s'affronter deux joueurs qui choisissent simultanément un des trois signes susmentionnés. Ce jeu est souvent utilisé comme un moyen de trancher une situation au hasard.

Pourtant, à l'instar de nombreux jeux de stratégie, il y a de nombreux championnats de PFC, et les joueurs qui y font de bons résultats sont souvent les mêmes. Mais où est exactement la stratégie dans ce jeu ?

En réalité, l'esprit humain est conçu d'une telle manière que le choix entre les trois options n'est jamais complètement aléatoire, mais obéit toujours à une logique systématique plus ou moins consciente.
Un joueur expérimenté de PFC est capable, au terme de nombreuses manches, de repérer les schémas récurrents de ses adversaires et de les contrer. C'est pour cette raison que les affrontements de championnats comportent généralement plusieurs dizaines de manches.

Voici généralement comment se déroule une partie de PFC de compétition : Dans un premier temps, le joueur expérimenté va essayer de déterminer si son adversaire est un débutant ou non. Ce détail a son importance, puisqu'il est connu dans le milieu que les joueurs amateurs commencent statistiquement plus souvent par Pierre. Ainsi, l'expert affrontant un débutant utilisera souvent Feuille. Ce détail est également d'une grande importance, puisque le choix « Ciseaux » se révélera très judicieux lorsque l'on a conscience que l'on affronte un joueur expérimenté qui nous sous-estime. Malgré tout, le hasard est encore très présent dans la première manche, et la différence entre les bons joueurs et les moins bons se fera au cours de l'avancée de la partie.

Au terme de la première manche, le joueur gagnant va devoir essayer de déterminer comment va réagir son adversaire. Souvent, les joueurs inexpérimentés ont, après une défaite, le réflexe de réagir en changeant de choix à la manche suivante. Ainsi, après que le débutant, qui a choisi Pierre, a perdu contre la Feuille, il sera, se sentant « trahi » par la Pierre, tenté de changer de choix. Dès lors, il choisira probablement soit Ciseaux soit Feuille. Il convient donc, pour l'expert, d'opter pour Ciseaux et d'avoir, dès lors, une chance sur deux de gagner et une chance sur deux d'aboutir à une égalité.

A ce moment du jeu et, détail intéressant, quelle qu'ait été l'issue relativement aléatoire des deux premières manches, le joueur habitué va commencer à développer un avantage en observant comme son adversaire a réagi à la victoire (ou défaite) de la première manche. A-t'il maintenu son choix pour tenter de gagner encore de la même manière (ou en se disant que nous allions changer et qu'il pouvait jouer en confiance le même symbole) ? Ou bien a-t'il changé de symbole ? Si oui, pour lequel ? Ce schéma intuitif que l'adversaire a dévoilé a d'immenses chances de se reproduire. Il faut le noter intérieurement et continuer les manches en se rappelant que (par exemple) « Après avoir perdu avec Pierre, il a décidé de jouer Ciseaux ».

Ce schéma de réaction est très semblable à la méthode utilisée pour tenter de lire le jeu de son adversaire à Pokémon.

Application pratique

Le combat commence. Go, Simiabraz ! L'adversaire envoie Noacier.

Que faire ? Si le Noacier lead de l'adversaire prévoit de poser Piège de Roc, Boutefeu aura l'OHKO avant qu'il n'ait eu le temps de bouger.
Mais voilà, l'adversaire possède un Prédastérie dans son équipe et, s'il décide de switcher, le Boutefeu tombera à l'eau (sans jeu de mots!) et, dans ce cas, il vaudrait bien mieux en profiter pour placer soi-même Piège de Roc.

Alors, que décider ?

Cette situation est classique et survient à de nombreuses reprises à chaque combat, quel que soit le métagame et le format. Combien de fois s'est-on dit « Si seulement je pouvais savoir quelle attaque il va lancer, ce serait tellement plus simple ! » ?
Et bien, il y a un autre jeu dans lequel ce sentiment est omniprésent : Pierre-Feuille-Ciseaux.

Nous allons donc analyser cette situation au travers du raisonnement de PFC présenté dans la deuxième partie de l'article. Comme à PFC, les premiers tours seront assez hasardeux puisque l'on ne connaît pas encore la manière de jouer de l'adversaire. Essayons donc de la deviner, dans un premier temps. Que ce soit en tournoi IRL ou en match Showdown/Coin Combats, le nombre de victoires ou le classement de l'adversaire sont généralement de bons indicateurs pour se faire une idée du niveau adverse.
Dans notre exemple, nous serons en match OU sur Showdown, à la côte 1500. A ce niveau, sans que nous soyons face à l'un des meilleurs joueurs du serveur, il est plus que possible que l'adversaire comprenne la menace qui plane sur son Noacier et essaye de chercher, lui aussi, à faire le move le plus efficace. Switcher pour Prédastérie présente pour lui le risque de nous laisser placer les PdR mais cette éventualité est bien moins grave que de se faire OHKO son propre poseur de PdR : Le switch est donc la solution statistiquement la plus intéressante pour lui.

Va-t'il la suivre pour autant ? A plus haut niveau (et c'est là que tenter de deviner le niveau du joueur adverse est important), la question se poserait, puisqu'un adversaire talentueux saurait que l'on est en train de se dire « Switcher est statistiquement moins risqué pour lui, donc il va le faire » et ferait peut-être l'inverse exprès.

Nous choisissons de lancer Piège de Roc. Que l'adversaire switche bel et bien ou reste et pose finalement ses PdR, nous gagnons dans tous les cas une information très importante que beaucoup de joueurs font l'erreur de ne pas remarquer : Nous venons d'apprendre comme réagi l'adversaire face à la prise de risque en général et dans le duel Simiabraz/Noacier en particulier. Naturellement, cette information est encore relativement peu fiable, puisqu'il est possible que l'adversaire se dise, plus tard, si ce duel se représente, (en supposant qu'il soit resté la première fois) « J'ai eu beaucoup de chance de ne pas me prendre Boutefeu, et de placer mes PdR, je ne vais pas reprendre ce risque ». Mais cet autre move sera aussi une information qui, associée avec des dizaines d'autres permettra de dessiner les contours du schéma de pensée de l'adversaire, du nombre maximal de fois qu'il prend un risque d'affilée, etc. Exactement comme à Pierre-Feuille-Ciseaux !

Toute cette théorie paraît très lourde et quelque peu artificielle. Elle l'est. Mais c'est après avoir compris comment l'anticipation fonctionne qu'il est possible d'assimiler les cheminements d'idées et les déductions présentées précédemment pour, au final, être capable de les appliquer de manière intuitive et efficace au cours d'un match.

C'est tout pour cet article assez spécial, n'hésitez pas à nous dire si vous l'avez trouvé suffisamment clair et si vous voudriez revoir d'autres articles de ce type dans le futur, ou si vous préférez les analyses plus pratiques !

Par Gourmont
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