Deuil de Pikiwaii

Moumoute alla directement au salon, s'installer dans son confortable panier. Il était exténué. Cela ne lui était plus arrivé depuis longtemps d'ainsi jouer. Il avait perdu l'habitude d'autant bouger et de courir. Il avait mal. Même couché, son corps lui faisait mal. Tout cela n'était plus de son âge.

Il regarda les images au mur, il en était plein partout. Sa Hermine les appelait "photos". Il les observait tous les jours, mais ne s'en lassait pas. Il aimait bien se souvenir. Surtout de la maison où il avait grandi avec sa petite Hermine, et où il avait vu grandir Caty. Et de sa lande aussi. Il repensa au "déménagement" du matin. Au fond de lui, il espérait, mais c'était sûrement quelqu'un d'autre. C'était sûrement impossible. Ce n'était pas grave, sa Hermine était heureuse. Cela suffisait à son bonheur. Le mouton s'endormit dans son panier.

Moumoute se réveilla. Il faisait nuit. Il avait dû beaucoup dormir. Hermine était à son étrange machine qui transformait sa laine en fil. Il l'avait toujours vu faire cela. Après, elle prenait le fils et en faisait beaucoup de balle très amusante, mais il valait tout de même mieux éviter de jouer avec. Hermine appelait les balles "pelote". Puis avec deux bâtons très fins elle transformait les pelotes en vêtements. Souvent, elle mettait les pelotes ou le vêtement dans de l'eau et ils ressortaient colorés. Mais toujours la même couleur. Les humains faisaient des choses bizarres, avec des résultats mystérieux.

Moumoute bailla et s'étira doucement. Il avait quelques courbatures. Sa chère Hermine l'entendit. Il se leva et alla lui faire un câlin. Il aimait les câlins. Elle lui parla. Il se sentait bien. Il comprit "manger". C'était le moment d'aller dans la cuisine. Sa petite maîtresse faisait beaucoup de choses avant de manger. Elle chantait aussi. Il répondait. Ça le rendait joyeux. Sa Hermine lui avait appris beaucoup de chanson au fil du temps. Aujourd'hui, il n'y avait pas eu beaucoup de chanson. Hermine mangeait ce qu'il y avait dans une boîte. C'était sa boite préférée. Il reconnut l'odeur.

Elle mit enfin la nourriture dans son assiette. Il avala tout rapidement. C'était bon. Hermine le gronda. Il l'entendait à sa manière de parler. Mais c'était gentil. Elle l'appela Goinfrex. Il avait vu beaucoup de pokémons différents, mais jamais celui-là. Il l'imaginait très gros, tout rond et tout le temps en train de manger. Hermine prit un chiffon et lui essuya le museau. Il avait dû se tâcher, il ne faut pas se tâcher. Surtout qu'il venait juste d'être lavé. Moumoute aurait bien encore mangé. Il regardait intensément sa Hermine. Elle l'avait vu, elle savait ce qu'il voulait. Elle savait toujours ce qu'il voulait. Mais elle finit son repas et ne lui donna pas plus à manger. Moumoute était déçu.

Sa petite maîtresse mit plein de choses sur le plateau. Elle allait regarder la télé. Moumoute vit qu'elle prit ses gâteaux préférés. Ceux que Facteur avait ramenés ce matin. Cela faisait longtemps qu'il n'en avait pas eu. Le mouton se dirigea tout content dans le salon. Il laissa sa Hermine s'installer dans son fauteuil pour ne pas la gêner. Il alla chercher son panier et le poussa tout contre le fauteuil pour s'installer. Sa petite Hermine lui glissa quelques petits gâteaux. Il avait toute la soirée pour les manger doucement.

Hermine lui parla gentiment. Il ne comprit pas, mais il acquiesça joyeusement. Le mouton posa sa tête en mâchonnant un gâteau. Il ne devait pas dormir. C'était à lui de réveiller sa Hermine quand il serait trop tard. Il regarda la boîte à image lui aussi. Il ne comprenait rien, mais cela le fascinait. Malgré son épaisse couche de laine, il percevait la douce main de sa Hermine sur lui. Il se sentait bien. Il grignota, mais finit par s'endormir d'aise.

Il se réveilla en sursaut, pris d'une étrange angoisse. C'était le moment d'aller dormir dans la chambre. Quelque chose n'allait pas avec sa petite Hermine. Elle dormait bizarrement. Moumoute appela sa petite Hermine. Elle était peut-être malade. Il appela toute la nuit. Elle ne se réveilla pas.

Moumoute ouvrir les yeux embués. Il faisait jour. Sa tête était posée sur les genoux de sa Hermine. Elle avait encore plus mauvaise mine. Elle était toute pâle et froide. Il refusait d'y croire. Tout allait bien se passer. Sa Hermine était juste malade ! Elle allait se réveiller ! Elle avait juste besoin d'aide. Il avait besoin d'aide.

Le carillon retentit. Sûrement le monsieur avec toujours les mêmes vêtements qui amenait du papier. Moumoute passa près du fauteuil. Il sentit la main d'Hermine sur son dos. Elle était si dure. Elle était juste malade. Il s'approcha de la fenêtre. Trop haute. Moumoute réunis toutes ses forces, se redressa et tambourina maladroitement contre la vitre en criant.

Après une éternité, Facteur finit par s'approcher. Il le vit. Mais il partit. Moumoute ne comprit pas. Il pleurait. Il retourna près de sa Hermine, posa sa tête sur ses genoux et ne bougea plus.

Beaucoup de personnes avaient fait beaucoup d'allées et de venues. Moumoute s'était recroquevillé dans un coin. Jamais il n'aurait pu imaginer que les humains lui enlèverait sa Hermine. Il avait bien essayé de les en empêcher. Mais il n'avait pas réussi. Il voulait rester avec elle. Il voulait veiller sur elle. Ils avaient toujours été ensemble. Ils n'avaient jamais été séparés. Même quand Christian, l'homme qui lui avait volé sa Hermine, était venu vivre avec eux, ils étaient restés ensemble. Il voulait être avec elle pour toujours. Mais les humains la lui avaient enlevée.

Une humaine et un nanméouïe se tenait près de lui. C'était à peine s'il avait remarqué leur présence. Il finit par s'endormir de chagrin et d'épuisement.

Moumoute se réveilla dans un lieu inconnu. Il eut peur. Il appela sa Hermine. Un nanméouïe répondit. Il s'effraya, appela plus fort, chercha à partir, se rendit qu'il était enfermé. Il paniqua. Le nanméouïe entra doucement et tenta de le calmer. Petit à petit, Moumoute cessa de s'agiter et se recroquevilla. Nanméouïe lui expliqua gentiment.

Il se trouvait dans un centre pokémon. Elle s'appelait Nanméouïe et travaillait ici, avec sa maîtresse, Joëlle, pour prendre soin des pokémons blessés. Elles étaient des infirmières. Lui, allait rester ici quelque temps. Jusqu'à ce que soit retrouvée la famille de sa maîtresse ou quelqu'un d'autre, pour prendre soin de lui. En attendant, elles prendraient soin de lui. Elle l'assura que tout allait bien se passer, qu'il n'avait pas à s'inquiéter.

Moumoute n'était pas content. Il n'était pas blessé. Il n'avait pas besoin de soin. C'était sa Hermine qui avait besoin de soin. Elle était malade. Et lui, il devait être avec elle. Il devait veiller sur elle, comme elle l'avait toujours fait pour lui. Elle avait besoin de lui.

Nanméouïe lui dit. Hermine était morte.

Moumoute se referma sur lui-même. Il nia catégoriquement l'évidence. C'était impossible ! C'était un mensonge ! Sa Hermine était juste malade. Elle viendrait le chercher. Si elle ne pouvait pas Caty viendrait. Ils iraient voir Hermine ensemble. Et sa Hermine se rétablirait. Nanméouïe resta un long moment avec lui. Elle tentait de le réconforter, mais la toison du mouton était devenue un mur impénétrable. Nanméouïe dut sortir. Moumoute ne bougea pas de toute la journée. Il ne mangea pas non plus. Nanméouïe et Joëlle s'inquiétèrent beaucoup pour lui.

Moumoute se réveilla. Il se sentait vraiment très mal. Combien de temps c'était écoulé ? Une nuit ? Plusieurs ? Aucune ? Il ne savait pas. Il se sentait sec. La faim lui faisait terriblement mal. En se retournant, il remarqua des assiettes. Il se précipita dessus. Eau et nourriture furent englouties. Hermine n'était pas venue. Elle était vraiment morte ? Nanméouïe l'avait dit. Il se sentit bizarre. Ou plutôt il ne ressentit rien.

Moumoute dormait peu, se réveillait sans arrêt. Il revoyait sa Hermine dans son fauteuil. Si pâle. Si froide. Ça le réveillait. Il se sentait mal à chaque fois et n'arrivait pas à se rendormir. Il était très fatigué. Il avait perdu toute notion du temps. L'humaine lui laissait beaucoup à manger. Il engloutissait tout. Il avait tout le temps très faim. Elle et Nanméouïe venaient souvent. Il réagissait peu à leur présence. Il bougeait encore moins.

Hermine n'était pas venue le chercher. Elle ne viendrait jamais. Elle était morte. Caty non plus n'était pas venu. Il était tout seul désormais.