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Les contes de Rapsode l'Aède de Feather17



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» Auteur : Feather17 - Voir le profil
» Créé le 28/07/2020 à 22:58
» Dernière mise à jour le 28/07/2020 à 22:58

» Mots-clés :   Conte   Hoenn   Humour   Poésie

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L'oeuf de la Vie
À un des commencements, il n’était que ténèbres et silence absolu. Comme l’existence ne connait aucun déséquilibre, du Néant jaillit son opposé le Tout. Les deux êtres absolus s’apprivoisèrent durant des millénaires, et des millénaires durant ne purent se départager. Comme le premier considérait les ténèbres comme son territoire et le second comme son ennemi, il décida au bout de plusieurs éternités qu’il était temps de mettre un terme à cette invasion. Cependant, le Tout n’était point de nature à être vaincu. Sans être supérieur capable de les départager, le Néant et le Tout décidèrent de coexister sans se menacer l’un l’autre.
Toutefois, leur cohabitation donna naissance, bien malgré eux, à un troisième être. Ni inférieur, ni supérieur, ni même égal, ce troisième être nommé Équilibre leur permit d’exister sereinement. Et de l’Équilibre du Néant et du Tout apparut la Vie.
Elle était si petite, si frêle, si fragile. Si les humains eussent vécu à cette époque, ils l’auraient décrite comme un minuscule orbe lumineux. Ah ! comme les Téras se seraient moqués d’eux, ces créatures si faibles d’esprit qu’ils eussent été incapables de reconnaitre en la Vie la forme d’un œuf. L’œuf de la Vie n’était toutefois point un orbe aux formes parfaites. Étiré vers le haut et bosselé, il possédait une écaille lisse si noire qu’elle ne pouvait refléter la lumière. Des craquelures de son écaille, l’œuf gardait prisonnier un éclat si pur qu’il attira bien vite les convoitises.
Alors, afin d’empêcher ce précieux cadeau de la paix de tomber entre des pattes malintentionnées (1), l’on nomma une créature fabuleuse gardienne du trésor. Elfe futé, le téra s’en disparu au cœur d’une forêt incartable (2) afin de s’enquérir de sa mission. Jamais la Vie n’eût trouvé pareil protecteur car, à présent à l’abri des menaces les plus terribles, elle put se développer à foison.
Ainsi, durant des millions de nuits, et d’autres milliers d’années, la vie apparut sur Cosmos, se développa et se propagea. Issue des océans, elle colonisa les terres avant de régner sur les cieux (3). Formée du néant, elle devint le tout (4), et la vie sur Cosmos trouva un équilibre inaltérable. Jusqu’à ce que l’homme, par le biais de son insatiable curiosité, mette en péril ce qui en avait résulté, et qui fut nommé bonheur.

Il était une fois, un jeune prince désireux d’en connaître davantage sur sa lignée. Il consulta toutes les bibliothèques de son royaume, interrogea tous les savants de ses terres, et enquêta auprès de toutes les mémoires de son pays. Rien ne le satisfit : ni l’historique complet de ses ancêtres, ni les informations les plus détaillées sur les milliers d’humains qui étaient passés sur Cosmos avant lui. Car le jeune prince cherchait à satisfaire son égo qu’il appela « curiosité », à anoblir son statut qu’il nomma « penseur », et à faire respecter ses questionnements qu’il baptisa « sciences ». Ainsi, quittant tout, femme, enfants et sujets, s’en alla sur les chemins ce naïf penseur en quête de réponses sur les origines de son existence. Du tout, il fit le néant, bien décidé à déséquilibrer l’ordre de l’univers en partant sur les traces de la Vie. Car c’était de cela qu’il était hanté : plonger son regard dans l’éclat interdit de la Vie.
Le voyage de l’inconscient penseur dura des nuits, des semaines, des mois et des années. Traversant les montagnes les plus enneigées, les déserts les plus torrides, et les lacs les plus profonds, il s’était juré de ne point cesser ses recherches sans mettre la patte sur le contenant qui enfermait la Vie. Le pauvre penseur ne se doutait point qu’à moins d’une faveur de la part de son protecteur, il pourrait passer l’entièreté de son existence à ratisser la Jungle d’Enn (5) sans qu’il ne trouvât le moindre indice quant à sa localisation.
Néanmoins, sa détermination attira tout de même l’attention du protecteur fabuleux. Une fin de nuit (6), s’assurant que l’œuf de la Vie fût en lieu sûr, le protecteur fabuleux s’enquit d’assouvir son propre besoin de curiosité, cette nouvelle émotion qui était apparue en lui au gré de ses nombreuses observations du monde humain. Il s’approcha discrètement de la couche du penaud penseur et l’examina de plus près. Jamais il n’avait rencontré pareil homme : sa détermination n’avait d’égal que sa fougue, et dans ses yeux se lisait sa volonté inébranlable de comprendre le sens de la vie. Comment pouvait-il être si crédule ? se demandait le protecteur fabuleux. Comme si un humain pouvait comprendre un être qui lui était supérieur.
Cette innocente ingénuité chez le sot penseur attendrit le protecteur fabuleux qui laissa sa garde s’estomper. Limité, mais rusé, le penseur cessa sa fausse sieste et domina le protecteur fabuleux de tout son être. Piégé, le protecteur fabuleux se retrouva à la merci de l’humain. Celui-ci fêta sa victoire sans discrétion : tant d’années à chercher son passé qu’il pouvait à présent danser devant son futur. Alors, rassasié, il contraint le protecteur fabuleux de lui délivrer la Vie afin qu’il en comprenne enfin le sens.
Bien en peine, le protecteur fabuleux l’emporta dans un voyage au cœur du passé, à la rencontre du Néant et du Tout, où le victorieux penseur put observer l’Équilibre créer la Vie. De ce spectacle, il n’en comprit le moindre sens. Pis, le passé ne lui étant point hospitalier, car, de fait, la Vie n’était point encore née, celle du penseur lui fut retirée.
Lorsqu’ils furent de retour du voyage millénaire, le protecteur fabuleux s’horrifia à la vue des conséquences de cette incartade dans la protection de la Vie. L’œuf de la Vie s’était fissuré, et sa paroi protectrice laissait à présent s’échapper une partie de l’éclat qu’il contenait. Dans un dernier regard curieux, le penseur fut irradié par l’éclat interdit de la Vie qui s’empara de son cœur, craquelant sa propre peau, éteignant la lumière qui s’y trouvait prisonnière. Alors, le corps du penseur gît jusqu’au bout de l’éternité, une dernière lueur de satisfaction dans ses yeux éteints. Ainsi, une vie fut nécessaire pour réparer la protection de l’œuf.
Le protecteur fabuleux s’en retourna enfin à sa mission immortelle. S’envolant dans les cieux avec l’œuf de la Vie, il disparut dans le Néant et le Tout protéger l’Équilibre de la Vie.


Notes de M. Marco


1. des pattes malintentionnées : si l’on s’en fie au sens littéral de cette proposition, qui dit pattes, di animal ou téra. Dans cette phrase, Rapsode l’Aède nous confie donc que la vie doit être protégée des animaux, en règle générale. Je reviendrai sur cette interprétation plus en détail dans mes commentaires, plus bas.

2. incartable : de l’ancien Hoennois, signifie « qui ne peut pas être localisé sur une carte ». La traduction moderne de ce terme, suite à l’invention du Pokénav, serait « non-géolocalisable ».

3. Issue des océans, elle colonisa les terres avant de régner sur les cieux : d’aucun trouverait la ressemblance frappante avec le conte « La légende de Cosmos », où trois êtres légendaires sont à la tête du royaume des océans, des continents et des cieux. Mon avis d’expert littéraire me pousse à croire que Rapsode l’Aède nous fait ici un clin d’œil à ses autres écrits, faisant revenir ses trois êtres légendaires comme une espèce « d’Easter Egg ». D’ailleurs, le terme anglais de ce que nous appelons « clin d’œil » fait mention d’un œuf. Coïncidence ? Évidemment.

4. Formée du néant, elle devint le tout : cette citation n’est pas sans rappeler les théories physiques de la matière et de quoi cette dernière est formée. La matière est, en effet, un ensemble d’atomes dont les particules (le Tout) gravitent dans le vide (le Néant). Il n’est pas étonnant que Rapsode l’Aède évoque ces connaissances physiques. En effet, rappelons qu’il a vécu au sein de la Grèce Antique avec comme modèle de la pensée le philosophe Anaxagore de Clazomènes qui est l’auteur de la célèbre maxime « Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau » (plus connue aujourd’hui sous la forme « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme »), à l’origine des théories matérialistes et atomistes. Rapsode l’Aède ne fait que puiser dans son passé afin d’attribuer à la Vie, personnage de son conte, les caractéristiques atomiques de la matière.

5. la Jungle d’Enn : chronologiquement appelée « Jungle d’Enn », « Jungle de l’Est », « Forêt de l’Est », et à présent « Ressources Naturelles Protégées de Cimetronelle », il s’agit de l’actuelle forêt épaisse au climat humide sur la Route 119. Rapsode l’Aède mentionne cette forêt car elle était tellement épaisse et large de circonférence qu’elle était réputée comme le cercueil des curieux qui s’y aventuraient. Ne dit-on pas d’ailleurs, toujours aujourd’hui, « tu peux aller fouiller la forêt » à quelqu’un à qui on ne veut pas réaliser un service ?

6. une fin de nuit : c’est-à-dire, un matin.

Commentaires de M. Marco


Le jour où j’ai découvert le manuscrit de la version originale du conte « L’œuf de la Vie » marque un tournant spectaculaire dans ma vie. À l’époque — je vous parle d’un temps qui n’existe que dans les souvenirs des vieillards les plus résistants de notre monde —, j’étais encore un tout jeune garçon sur les bancs de l’école. J’étudiais la littérature classique à l’Université de Lavandia et j’avais comme sujet de thèse l’étude de textes bibliques fondateurs des religions Titanesques de Hoenn, contenu et résultat de laquelle m’échappe totalement aujourd’hui. Une partie de mon travail était centré sur la recherche de nouveaux manuscrits en lien avec ces religions. C’est en découvrant le texte « L’œuf de la Vie » dans une collection nationale à l’étranger que j’ai compris à quel point Rapsode l’Aède, auteur très peu étudié à l’époque, pouvait apporter pas mal de réponses quant à la compréhension de l’histoire de notre région.

Ce qui m’a paru le plus impressionnant était la différence presque totale du conte originel de sa version racontée oralement. A posteriori, après un demi-siècle de travail sur les textes de Rapsode l’Aède, je reste persuadé qu’il s’agit du conte le plus transformé de sa bibliographie. Et pour cause, toutes les parties ayant disparues traitent du sujet mystique et philosophique. Ne reste dans la version orale que l’aventure du personnage humain et sa rencontre avec le protecteur. Au fil de mes études, j’ai pu identifier certaines raisons de la disparition de la partie la plus profonde du texte de Rapsode l’Aède : la censure durant la période d’obscurantisme a fait effacer du folklore la dimension religieuse, l’effondrement de l’Empire a enfui la dimension philosophique dans les contrées de l’incompréhension (il faut dire qu’à l’époque, la pensée en elle-même a connu un stagnation), et enfin, le puritanisme de notre société actuelle censure sociologiquement tout contenu violent, au grand dam des amoureux de la littérature.

Pour se plonger plus en profondeur au cœur de l’analyse de ce conte, je désire commencer par le sujet le plus brûlant : le titre. « L’œuf de la Vie » est bel et bien le véritable titre de ce conte, narrant une allégorie de la vie qu’il faut protéger plutôt que de vouloir la menacer. Quiconque maintient l’idée selon laquelle le véritable titre serait « Le Cadeau de la Paix » n’a rien compris à l’histoire, ni même ne l’a lu une seule fois dans sa vie. Je remercie donc le Professeur Kosmo, dont nos querelles ont été malheureusement étalées dans la presse ces dernières années par des journalistes peu scrupuleux, d’être revenu du côté des intellectuels raisonnés en jetant enfin un coup d’œil au texte.

Comme dit précédemment, « L’œuf de la Vie » est une métaphore à comprendre sur notre existence, et non pas un réel contenant qui enfermerait je-ne-sais quelle réponse sur notre existence. Beaucoup de personnes se sont mises à croire à cette légende jusqu’à en fabriquer des religions les plus farfelues les unes que les autres ; la dernière en date mettant en scène un prophète protégeant la vie de ses fidèles par son sacrifice. Quiconque aura lu ce conte avec une attention particulière aura compris que les morales sont, en effet, métaphoriques et nombreuses.

La première serait la plus simple : la curiosité est un vilain défaut. J’en veux pour preuve le protecteur fabuleux contaminé par la curiosité des êtres humains et se faisant ainsi voler l’œuf qu’il protège, ayant pour résultat désastreux la mort du penseur. L’on peut aussi voir en ce conte le message suivant : il ne faut pas faire du tort à la vie si l’on ne veut pas que la vie nous fasse du tort. De fait, ne trouverions-nous pas une allégorie du meurtre et du suicide dans les actes du penseur ? En voulant voler la vie du protecteur (au sens littéral du terme, « voler l’œuf pour qu’il lui appartienne », au sens figuré « assassiner »), le penseur s’ôte la vie par ses propres actions. Si cette théorie est légèrement alambiquée, un troisième message pourra vous convaincre : il vaut mieux partager la vie que de la restreindre. En effet, le protecteur a passé son existence entière durant des millénaires à protéger la vie afin qu’elle se déverse sur le monde, se déploie, et fasse naître les êtres vivants. Il s’agit d’un résultat positif : lorsqu’on se préoccupe de la vie et qu’on la protège, elle se déploie. À l’inverse, restreindre la vie comme l’a fait le penseur, en se l’appropriant afin d’assouvir des besoins individuels (la connaissance dans ce cas-ci), la vie disparait (pour l’humain qui s’y attaque, en tout cas).

Cette dernière compréhension du texte a souvent été un prétexte pour des scientifiques amateurs de développer des théories tournées autour de l’entente des peuples. Certes, l’entente entre les peuples est primordiale. Cependant, je ne m’attaque pas à cette idéologie, mais plutôt à la manière fallacieuse avec laquelle le texte de Rapsode l’Aède est traité. Je le dis une dernière fois : non, ce conte ne fait pas l’apologie de l’entente cordiale entre les peuples. Si vous le pensez, c’est que vous ne vous êtes fié qu’à sa version orale qui est une affreuse manipulation des propos de Rapsode l’Aède. De plus, le titre est bel et bien « L’œuf de la Vie » et pas « Le Cadeau de la Paix » comme vous le prétendez. Ce terme n’apparait qu’une seule fois dans le texte originel. Merci de ne plus me faire perdre mon temps avec vos analyses médiocres. Et je réitère ma proposition au Professeur Kosmo de reprendre les études de ce texte avec plus de concentration.

Car, si bien des interprétations de ce conte ont foisonné dans la littérature scientifique depuis sa découverte (faite par moi, je ne saurai résister à cette autosatisfaction), il en est une qui a mis tout le monde d’accord. Le protecteur fabuleux est, d’avis général, un Celebi. Pokémon fabuleux, « elfe » vivant dans les forêts, indomptable et rarement visible (l’on ne compte statistiquement qu’une rencontre par siècle avec ce Pokémon), Celebi est capable de voyager dans le temps et est décrit par le Pokédex du Professeur Chen comme « protecteur de la nature ». Il ne fait aucun doute que le « protecteur » « fabuleux » « de la vie » n’est autre que Celebi lui-même.

S’il est impossible de savoir si Rapsode l’Aède l’a rencontré au cours de sa vie où il s’est inspiré des légendes de son temps, il nous est tout de même possible de comprendre le fameux voyage du penseur lorsqu’il s’empare de son œuf. Il nous est dit dans le texte que le penseur désire « comprendre le sens de la vie », après quoi Celebi l’emmène dans un voyage décrit comme suit :

« [l]e protecteur fabuleux l’emporta dans un voyage au cœur du passé, à la rencontre du Néant et du Tout, où le victorieux penseur put observer l’Équilibre créer la Vie. De ce spectacle, il n’en comprit le moindre sens. Pis, le passé ne lui étant point hospitalier, car, de fait, la Vie n’était point encore née, celle du penseur lui fut retirée. »

En effet, Celebi remonte le temps en compagnie de l’humain afin de lui offrir des réponses, c’est-à-dire au moment de la création de la vie. Évidemment, l’humain ne comprend pas ce qu’il a sous les yeux : le Néant, le Tout, et l’Équilibre sont décrits comme des êtres supérieurs, n’appartenant pas au même plan de réalité que les êtres vivants. C’est alors que nous retrouvons un des passages les plus intelligemment écrits de l’histoire de la littérature allégorique : étant donné que l’homme est témoin de la naissance de la vie, c’est qu’il est remonté dans le temps à l’époque où la vie n’existe pas. Par conséquent, il ne peut être vivant. Voilà donc le destin de l’humain scellé : la vie lui est ôtée. Au passage, nous avons un bel aperçu de ce qu’est le « sens » de la vie pour Rapsode l’Aède : du passé vers le futur, l’on vit, du futur vers le passé, l’on ne vit pas encore (l’on meurt donc). Rapsode l’Aède, non content de nous piquer de son humour, serait-il en train de nous prévenir de la menace que consiste les voyages dans le temps ? A-t-il lui-même subi quelques conséquences dramatiques suite à une rencontre avec Celebi ?

Ce qui est certain, c’est que ledit « penseur » est sévèrement critiqué, lui aussi. Rapsode l’Aède exècre tous les êtres humains qui se hissent au-dessus des autres en prétextant des capacités exceptionnelles. À son époque, les scientifiques sont plutôt des philosophes penseurs qui, par essais, erreurs et par des cheminements de pensée, cherchent la Raison et la Vérité. En critiquant fermement les « penseurs » (relever tous les adjectifs négatifs à son encontre dans le texte peut-être un jeu ludique pour les enfants), Rapsode l’Aède nous montre à nouveau qu’il est persuadé qu’il existe une force supérieure régissant les lois de la physique (qu’il connait partiellement), et qu’il ne faut en aucun cas essayer de comprendre cette force, cet « équilibre ». Car, de toute manière, nous ne pouvons la comprendre étant donné qu’elle reste en dehors de notre champ de perception humaine.

J’en viens ainsi à une des plus grosses controverses de ma carrière d’essayiste (pour ceux que cela intéresserait encore). Certains (pseudo-)scientifiques et analystes auront vu dans l’utilisation de l’expression « des pattes malintentionnées » une volonté pour Rapsode l’Aède de montrer que le danger sur la vie provient des téras, c’est-à-dire des Pokémon. Ainsi sont nées tout un tas de théories fachistes ces trente dernières années qui prônent l’éradication des Pokémon, vus comme une menace. Mon propos n’étant pas de répandre mon mépris abject sur de telles idéologies, j’en reste là sur ce sujet immonde. Cependant, ces intégristes auront oublié la deuxième expression utilisée dans le texte plus loin : « sans mettre la patte sur », se référant à l’humain. Dans ce contexte, mes détracteurs les plus fachistes y ont vu une misanthropie exacerbée chez Rapsode l’Aède qui considère les êtres humains comme des animaux. De cela, il n’en est rien, car avec un peu d’esprit, l’on arrive facilement à comprendre l’allégorie cachée derrière ces expressions.

En effet, il ne s’agit que d’une métaphore liant les humains aux Pokémon, et en réalité à tous les autres êtres vivants. Rapsode l’Aède met tous les êtres vivants, sans exception, sur le même plan de réalité. Il forme ainsi comme une espèce de règne animal où la compréhension du monde peut être partagée car elle se réalise au travers de mêmes champs de perception de la réalité. De cette manière, il dissocie ce « plan animal » à ce que j’appelle le « plan supérieur », celui où l’on retrouve tous les êtres supérieurs qui sont devenus des mythes et légendes depuis : les Titans, les Trois Frères, le Néant, le Tout, l’Équilibre, la Vie, etc. Tous ces « êtres supérieurs » ne peuvent être compris par les êtres du « plan animal » car ils ne font pas partie de la même réalité. En d’autres termes, aucune perception animale ne pourra rendre compte de la réalité du « plan supérieur ». Autrement dit, pour les plus intellectuellement démunis de mes contradicteurs, l’expression « la patte » utilisée pour les téras et les humains lient les deux espèces dans une réalité qui ne peut pas percevoir les réalités supérieures, les êtres supérieurs comme les dieux, ou ce que l’on appelle de nos jours les « Pokémon légendaires ». L’on reconnait bien là l’influence de l’académie de Platon sur la manière dont Rapsode l’Aède conceptualise le monde.

Il me semble m’être beaucoup étendu sur la question de l’analyse littéraire de ce conte, probablement parce qu’il a été un des virages les plus saisissants de ma carrière et de ma vie d’homme. Je note tout de même la qualité stylistique incomparable de ce conte par rapport au reste de l’œuvre de Rapsode l’Aède. « L’œuf de la Vie » restera à jamais un conte que je chérirai jusqu’à mon dernier souffle, gardant l’espoir naïf d’un jour pouvoir plonger mon regard dans « l’éclat interdit de la Vie » et y déceler son véritable sens.