Chapitre 2 : Remise du premier pokémon
Le soleil printanier émergeait à peine au-dessus des cimes des platanes, mais contrairement à d'habitude, je m'étais levée avant lui. Je n'avais presque pas dormi, le ventre noué.
J'avais été très évasive avec ma mère à propos des éléments de la veille, ne voulant pas trop en révéler. Au cas-où les choses tourneraient mal avec le professeur Sorbier, je ne voulais pas lui donner de faux espoirs. La désillusion n'en aurait été que plus forte et plus amère.
En ce moment, je courais donc comme une folle dans la rue, en direction de l'orée boisée qui cernait le bourg. Contrairement à d'habitude ou je trottais à mon rythme, je traversais les rues à grande vitesse, sautant pour éviter une flaque d'eau stagnant dans un nid-de-poule. Je sentais l'épuisement gagner mes poumons brûlants, mais je m'en moquais, tant mes sentiments se mêlaient entre exaltation et appréhension, me portant toujours plus loin.
La route s'estompa lentement, se muant en une piste, à mesure que je quittai la ville. La végétation devint plus touffue, avec des amas de ronces chargées de mûres sucrées. Perdue dans mes pensées, j'avisai le sentier sauvage menant vers la ville voisine. A force de courir, je ne m'étais presque pas rendu compte que j'avais déjà quitté le village. En regardant rapidement ma montre, je me rassurai en constatant que j'étais en avance.
Pourtant, à ma grande surprise, le professeur Sorbier était déjà présent à la croisée des routes. Le vieil homme à la blouse blanche scrutait le ciel avec passion, ne m'ayant pas encore aperçue. Le savant à la blouse ravaudée portait un sac en bandoulière assez large, dont le contenu était très intriguant, je devais bien l'avouer.
- Bonjour professeur, saluais-je en soufflant fortement. Désolée du retard ...
- Bonjour … Elizabeth, se souvint-il après quelques secondes d'hésitation. Rassures-toi, indiqua t-il en consultant sa montre, tu es un peu en avance. Dès que ton ami sera là …
Tandis qu'il commençait à vouloir énoncer ses idées, un cri nous attira. Une silhouette parut à l'horizon, filant comme un Lineon sous cocaïne. C'était Robin, bien évidemment. Au moment ou il quitta la rue de la mairie et bifurqua sur la route principale, j'eus presque l'impression d'entendre le mur du son être violemment brisé. Le blond freina au dernier moment, se présentant devant nous … sans que la moindre goutte de sueur soit visible sur son front.
Il sourit, finalement arrivé pile à l'heure.
- Bien, vous voilà tous les deux, nous salua le vieux chercheur. J'ai plusieurs choses à vous dire et je ne vais pas y aller par quatre chemins. Suite à votre petite escapade risquée de la veille, j'ai été troublé par vos deux personnalités, je dois bien l'avouer. J'ai donc contacté quelques connaissances hier soir et j'ai le plaisir d'être le premier à vous annoncer que … vous êtes désormais tous les deux officiellement enregistrés comme dresseurs.
Je me sentis surprise, un peu stupéfaite par la rapidité avec laquelle il avait réussi à nous obtenir les fameuses cartes tant prisées. Il avait du faire appel à des contacts privilégiés et à des gens importants pour accélérer le processus.
- Vrai ? bégaya Robin. Vrai de vrai ?
Le professeur sourit, hochant de la tête. Robin poussa un cri de joie qui meurtrit mes tympans, au point que je serrais les dents en une expression assez laide à voir. Ce grincement s'avéra encore plus criard que ses standards déjà élevés, mais je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir, tant je trépignais moi-même d'allégresse.
- Il nous reste quelques démarches à faire à mon laboratoire, renseigna t-il, mais je peux vous confier votre premier pokémon dès maintenant. Ce ne sont pas des pokémon usuellement distribués aux débutants, mais nous n'avons pas encore fait éclore les œufs du prochain set. D'autres problèmes de pénuries nous ont mis dans une situation complexe, alors vous devrez composer avec ceux-ci.
Le savant barbu ouvrit sa mallette, nous présentant trois pokéballs. Robin se pencha dessus, les yeux ronds. Il semblait presque figé, comme s'il comprenait l'importance et la solennité de ce moment. Son regard trahissait son incrédulité et son excitation.
Alors qu'il allait saisir la pokéball, je vis son visage se tordre de dépit. Il se recula et eut la galanterie de me laisser choisir la première. Ca lui en coûtait de refréner son excitation, je le savais parfaitement.
Le choix était difficile, puisqu'il s'agissait de trois pokémon assez rares à l'état sauvage.
J'hésitais.
Je me mordis la lèvre, les doigts tremblants.
C'était si difficile ! Je devais choisir mon premier partenaire, le pokémon qui allait m'accompagner. J'avais longuement étudié la stratégie et la table des types, mais à ce moment, mon esprit se vida de toute considération de ce genre. Mes pensées s'embrouillaient et tout flottait. Je tendis mon bras à l'instinct.
Une des pokéballs m'attira particulièrement, comme un appel. C'était comme une résonance en moi, comme si mes pensées … non, comme si mes émotions m'étaient renvoyées en écho.
A l'aveuglette, je refermai les doigts sur la pokéball contenant Tortipouss. Le fait de caresser l'orbe bicolore était comme un rêve.
Mon choix était fait !
Robin se rua sur la mallette et hésita bien moins longtemps que moi. Il choisit Ouisticram et la table des types me revint en tête.
Je déglutis, mais je ne pus m'empêcher de songer que ça lui irait bien. Le pokémon feu bondissant était vraiment similaire à lui, rempli d'énergie, mais je n'aimais pas qu'il ait choisi un pokémon dont le type était avantagé par rapport au mien. Une part de moi se demandait s'il ne l'avait pas tout bonnement fait exprès, il aimait bien être le premier et me battre à tous nos jeux.
Maintenant que j'avais choisi, ma première action fut d'appuyer sur le bouton au centre de la pokéball, pour faire émerger le pokémon. La petite tortue jaillit d'un éclat de lumière, se matérialisant sur l'herbe.
Tortipouss était un petit pokémon, dont les grosses pattes émergeaient de sa carapace ronde et encore un peu molle. Sa petite bouille à moitié endormie sortit lentement de l'orifice, ses yeux marron s'ouvrant lentement sur le monde. Il regarda autour de lui quelques instants et s'intéressa bien vite à l'herbe appétissant qu'il foulait.
- Il est adorable ! émis-je avec un grand sourire.
J'étais absolument radieuse et sous le charme. Il était si petit et si mignon, avec son regard timide et presque naïf. Sa pousse s'agitait faiblement sous le léger vent et lui donnait un petit je-ne-sais-pas-quoi de trognon.
Doucement, j'avançai ma main vers lui, hésitante, craignant de le brusquer. Je plaçai mes doigts près de son bec, pour qu'il s'habitue à ma présence. Je voulais qu'il s'adapte à moi à son rythme, sans me montrer trop agressive. Tortipouss gratta l'herbe avec ses membres antérieurs, légèrement réticent avant d'avancer avec lenteur. Il renifla la terre, avant de humer mes doigts rendus moites par l'émotion. Il effleura mon majeur un instant, avant d'ouvrir le bec pour mordre une feuille de pissenlit.
- Vos pokémon sont jeunes, nous rappela le professeur. Ils ne connaissent pas le monde et auront besoin de soin et d'éducation. Votre responsabilité en tant que dresseurs est immense. C'est un lourd fardeau.
Je hochai doucement de la tête, avant de poser de nouveau mon regard sur la tortue placide. Je caressai doucement sa tête, grattouillant l'arrière de son crâne, obtenant en retour un petit sifflement à mi-chemin entre un croassement et un pépiement.
- Je pense que … je vais te nommer Amazonas.
Je n'avais guère d'inspiration et … même des années plus tard, je pense que je n'en aurais toujours pas beaucoup. J'ai choisi ce nom en rapport avec une lointaine forêt tropicale, faisant référence aux masses de plantes qui y croissaient.
Tortipouss ferma les yeux, ravi de ce petit câlin. C'est comme s'il aimait autant le surnom que mon contact physique. Mon pokémon avait l'air d'apprécier ma présence et il semblait heureux. Finalement, mes craintes à propos de la première rencontre étaient infondées.
Amazonas me semblait doux et assez indolent, à bien y regarder. Son regard se portait sur ses alentours immédiats, intéressé par les plantes les plus proches de lui. C'était sans doute du à son jeune âge, il explorait et découvrait tout un nouveau monde.
Robin semblait également avoir un bon contact avec son Ouisticram. Le petit primate bondissant était monté sur l'épaule de son nouveau maître et il avait du mal à tenir en place. Comme son dresseur, à bien y réfléchir.
Je souris, caressant mon pokémon, ne voulant pas rompre ce moment et cet échange. J'appréciais cette complicité, prenant le temps d'établir le contact avec le petit pokémon.
Je pris une feuille du bout des doigts, la présentant à Amazonas. Il arrêta de regarder autour et se focalisa sur le repas gratuit.
- Le comportement de ton Tortipouss est très courant, témoigna le professeur. Beaucoup de pokémon herbivores sont prompts à la facilité. Ils se dirigent vers la source de nourriture la plus proche et la plus facilement accessible pour limiter leurs efforts.
- C'est pour économiser leur énergie, c'est ça ? voulus-je savoir.
L'enseignant hocha la tête, approbateur.
Alors que j'étais toujours assise, à taquiner mon gourmand compagnon, le soleil fut éclipsé. Une ombre nous couvrit, car Robin se plaça devant moi, souriant.
- Nous avons chacun un pokémon et nous sommes enfin devenus des dresseurs. Tu sais ce que ça signifie ? L'heure à sonné ! annonça t-il, théâtral. J'ai toujours voulu dire ça. Elizabeth Noyer … je te défie !
Il avait prononcé mon nom et mon prénom, ce qu'il ne faisait jamais en temps normal. Il était vraiment sérieux.
Je regardais Tortipouss, cessant mes caresses. Le petit herbivore me fixa, comme s'il était déçu que ça s'arrête. Il regarda le blond, avant de retourner la tête vers moi. Je pus presque lire dans ses yeux qu'il trouvait ça ennuyeux de devoir lutter et d'interrompre le câlin.
- Il va falloir se battre, soupirais-je en me relevant, époussetant ma jupe tout en songeant qu'il me faudrait une tenue plus propice aux voyages. Est-ce que tu veux le faire ? Te sens-tu prêt ?
La tortue coassa, me regardant dans les yeux. Un lien de confiance s'était établi entre nous, alors qu'il trottait sur la terre poussiéreuse, faisant face au primate.
- Attaque Lance-Flamme ! hurla immédiatement Robin en tendant le bras.
Son petit pokémon le regarda, confus. Son maître sautilla, les lèvres en cul de poule, imitant un souffle, postillonnant sans produire le moindre effet.
- Amazonas, Charge, suggérais-je en hésitant.
Tortipouss courut, avec une rapidité étonnante pour un pokémon ayant une telle morphologie. Il donna un coup de tête maladroit, repoussant Ouisticram.
Le singe se redressa rapidement et se rua sur la tortue, sortant les griffes. Une expression hargneuse déforma ses traits, furieux d'avoir été ainsi blessé. Par instinct, Tortipouss se replia dans sa coquille. Le jeune pokémon feu s'échina, mais ses forces étaient trop faibles. Il égratigna à peine la carapace de plaques molles. Tortipouss resta quelques minutes à l'abri, inquiet de ressentir les impacts, mais attendant que le singe ne s'essouffle.
Ouisticram était énergique, mais il ne savait pas encore ménager cette vitalité. Il était déterminé, mais dut se rendre à l'évidence qu'il ne délogerait pas la petite créature qui attendait patiemment dans sa coquille.
Dès que Ouisticram montra un signe de faiblesse, ralentissant ses coups en expirant plus longuement, je saisis l'occasion et ordonnai à Amazonas de réitérer la précédente attaque.
Le placide pokémon fit sortir sa tête, donnant un coup avec sa tempe, projetant Ouisticram plus loin. Malgré sa petite taille, les frappes de mon pokémon étaient puissantes pour un petit bonhomme. Le singe recula sonné, mais son regard était toujours encore déterminé.
C'était évident qu'il ne lâcherait pas facilement, il ne capitulerait pas après deux coups. Il fallait admette qu'avec Robin, ils s'étaient vraiment bien trouvés.
Le primate courut en zigzag, titubant à moitié, parvenant à porter un coup sur le bec de Tortipouss. La tortue l'encaissa, avant que je lui demande de riposter. Mon ordre arriva en même temps que son réflexe et Amazonas repoussa l'adversaire. Le milieu de son crâne percuta le ventre mou du singe, qui tomba au sol, épuisé.
- Reviens, ordonna Robin en rappelant son pokémon éreinté.
Il avait l'air déçu, mais en même temps si ravi de ce combat. C'était son premier duel, un premier cap dans sa carrière.
- Ouah, c'était génial ! s'écria t-il en rangeant sa pokéball, me regardant avec des étoiles dans les yeux. Mais tu verras, on fera une revanche !
Je hochai la tête, approbatrice. J'attrapai Amazonas pour le caresser, saisissant ma pokéball d'une autre main.
- Tu as été excellent, complimentais-je en caressant sa bouille. Repose-toi mon petit.
Le professeur Sorbier toussota, nous regardant avec un sourire approbateur.
- Bon les jeunes, maintenant que vous avez eu votre petit combat, suivez-moi au laboratoire. Mon assistant nous attend.
Il se tourna vers Robin, plissant ses sourcils broussailleux.
- N'as-tu rien oublié, jeune dresseur ? suggéra t-il en s'arrêtant, le fixant étrangement.
Robin réfléchit et eut une illumination. Il farfouilla dans le bordel sans nom qu'il osait qualifier de sac, pour en sortir quelques billets froissés qu'il me tendit. J'acceptai les 500 pokédollars, qui représentaient des mois d'argent de poche pour lui.
Une des règles les plus importantes lors des combats légaux était que les duellistes déterminaient une somme en début de combat et que le vainqueur empochait la mise. C'était l'une des sources de financement les plus importantes pour les dresseurs talentueux et j'espérais pouvoir gagner davantage très bientôt.
Nous suivîmes le professeur jusqu'à la ville voisine sans encombre. Il fallait admettre que cet homme avait une très bonne condition physique pour son âge. Il sautait et enjambait les obstacles sans problème, nous laissant surpris. Ses voyages et escapades l'avaient aidé à rester athlétique, sans compter qu'il passait peu de temps dans son laboratoire, préférant de loin l'observation sur le terrain.
Après deux heures de bonne marche, il atteignit son laboratoire le premier. Il fut accueilli par un scientifique en blouse qui le salua, ainsi que par son assistant. Ce dernier devait avoir à peu près notre âge, supposais-je en le voyant.
- Bonjour Etienne, salua t-il en regardant son collègue qui lui présentait un rapport d'étude. Tout ça m'a l'air excellent, vos résultats vont nous permettre d'enfin pouvoir boucler ce dossier.
Il embrassa le jeune garçon avec davantage de familiarité, le tenant par l'épaule en se tournant vers nous.
- Je vous présente mon petit-neveu, Lucas. Il est dresseur et est devenu mon assistant depuis peu. Il m'aide actuellement dans mes recherches sur la modification et l'adaptation de la faune locale, face à des espèces invasives.
Le garçon aux cheveux tirant sur le roux nous sourit timidement. Robin lui serra la main vigoureusement, tandis que je me contentais d'une légère révérence de la tête.
Le professeur Sorbier se dirigea vers un placard rempli de cartons et de dossiers, pour en sortir une boite de papier kraft. Il retira la protection de papier bulle, la déchirant pour en sortir deux petits casiers, ornés du sceau de la ligue pokémon. Ces boîtes contenaient le kit du dresseur débutant, que les officiels distribuaient à chaque débutant.
- Dresseurs, déclara t-il d'un ton plus officiel et plus solennel, vous allez commencer votre carrière. Vous recevez chacun cinq pokéballs, un pokédex servant également de document de recherche nominatif, une carte de dresseur personnelle et un extrait du règlement officiel de la Ligue Pokémon. A partir du moment ou vous signez votre carte et le récépissé, vous acceptez toutes les prérogatives d'un dresseur et surtout ... vous acceptez de vous plier au règlement officiel. Il n'y a plus de retour en arrière.
Je pris le stylo plume qu'il sortit de la poche de sa blouse, signant avec soin le document officiel, ainsi que la carte argentée. J'étais moche sur la photo, avec la tête d'une poupée sans expression, mais je pense que c'était le cas de tout le monde.
Enthousiaste, j'accrochais les pokéballs à ma ceinture, avant de ranger ma carte avec le pokédex, dans le boîtier ou se trouvaient les compartiments pour conserver mes badges. Certains les arboraient sur leur veste, mais je ne pensais pas que ça m'irait. Je n'étais pas du genre à me vanter de mes exploits … et je ne voulais pas risquer de les perdre ou de les endommager.
Mes yeux se posèrent sur le livre à la couverture brune, ressemblant à une imitation de cuir, orné du sceau de la ligue et d'une pokéball. Le règlement était strict et son non-respect pouvait mener à un retrait de la licence de dresseur.
Je feuilletais quelques pages, distraite.
« Décret 14-1-6-2 sur la protection de la biodiversité locale du 6/1/24 : Interdiction faite aux dresseurs de prélever plus d'un spécimen par route/chemin/aire, telle que définie par la liste géographique officielle. [...] Tout contrevenant se verra sévèrement sanctionné d'une amende de 15 000 pokédollars et d'une peine pouvant aller jusqu'à 6 mois d'emprisonnement. »
Je connaissais cette loi, avec même l'addendum, qui imposait la capture du premier pokémon rencontré, afin d'éviter la chasse aux spécimens rares, pratique qui mettrait en péril certaines espèces. En fonction de l'espèce capturée de façon frauduleuse, on pouvait se retrouver avec la révocation de sa licence, voire même avec une peine de perpétuité.
« Les dresseurs débutants de Catégorie 1 se voient limités en terme d'achat d'objets auprès des commerçants agréés par la Ligue Pokémon. Ils ne peuvent pas garder plus de trois pokémon sur eux. »
Je savais tout ça, j'avais potassé une bonne part du règlement durant les jours précédents, en particulier les règlements spécifiques pour les débutants. Les tribunaux étaient intraitables avec les inconscients.
- Rappelez-vous que 40% des retraits de licence de dresseurs ont lieu moins d'un an après l'obtention de cette dernière, prévint le professeur. Je vous ai fait confiance et je n'aimerais pas que vous fassiez partie de ceux étant révoqués par une décision de la cour d'Unionpolis.
C'était une menace sous-jacente. Le professeur avait engagé sa responsabilité en nous obtenant ces cartes. Se montrer indigne de sa confiance pourrait nuire à sa réputation et il n'hésiterait pas à se désolidariser de nous, si nous agissions de façon irresponsable.
- Nous ferons attention, professeur, tentais-je de le rassurer. Vos conseils, votre expertise et votre soutien nous est précieux.
Je repris le livret, m'intéressant à d'autres entrées du sommaire.
« Liste des espèces dont la capture est interdite aux dresseurs de catégorie 1 et 2. […] Liste des espèces interdites à la reproduction en fonction de la catégorie ... »
Je ne m'attardai pas longtemps à tout lire, me bornant à placer un petit marque page, pour me rappeler de consulter la liste des interdits quand je serais au calme.
- Oh, tu rêves ? m'interpella la voix de baryton de l'assistant.
Lucas me fixait, souriant. Cela faisait trente secondes qu'il tentait de me tirer de ma réflexion.
- Désolée. Je pensais, tentais-je de m'excuser. Je vérifiais juste quelque chose.
Le professeur nous fit d'ultimes recommandations, cette fois-ci davantage tournées sur la sécurité et les préparatifs à faire pour un voyage serein. Il nous souhaita finalement bonne chance, nous raccompagnant à la porte.
Lorsqu'il nous salua et que je refermai le portillon de son centre de recherche, je réalisait que nous avions commencé notre aventure.
Le soleil était encore haut dans le ciel, mais je ne voulais pas commencer mon voyage ainsi. Je voulais y mettre les formes.
- Je vais dire au-revoir à maman, décidais-je en resserrant la bretelle de mon sac à dos. Je ferais mon départ demain matin.
Je regardais Robin, qui hocha la tête, bien qu'il était pressé de partir à l'aventure.
Demain matin, il m'attendrait à la sortie du village, j'en étais certaine.
Il serait prêt aux aurores et ferait inévitablement une remarque sur ma lenteur, j'en étais également certaine.