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Projet Triple 3 de Ramius



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Informations

» Auteur : Ramius - Voir le profil
» Créé le 13/06/2020 à 11:10
» Dernière mise à jour le 13/09/2020 à 19:22

» Mots-clés :   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de personnages du jeu vidéo   Présence de Pokémon inventés   Terreur

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Chapitre 13 : Engagements
Alors j’ai une bonne nouvelle. Avec des gens tout autour r de la salle, mon Alakazam y voit un peu plus précisément. Donc je confirme : la chimère est encore en 216. Impossible de voir ce qu’elle fait mais vous l’avez piégée. cl

— T’as entendu ça, Conan ? Magnez-vous le train !

Eh, on était à l’autrre bout de la base !

— J’avoue, aie un peu de respect pour les vieux. Bon, surface ! On vous rapportera le cadavre du Pokémon, promis !

— Faîtes attention à vous quand même. Je m’inquiète sur sa puissance. Elle a détourné un Vibrobscur r du Démolosse de Sylviane, si j’ai bien compris ?

— Oui mais il l’avait lancé en urgence et à l’aveugle, ça devait être moins puissant.

— Même. C’est une attaque redoutable et ça m’inquiète r vraiment qu’un Pokémon âgé de moins d’une semaine arrive à détourner ça avec de simples Ball’Ombre. r Tombez-lui tous dessus en même temps.

— Chef, oui chef !


— Toujours en retard, Conan !

Riez pas, je prends les paris ! Dix contre r un que c’est mon Rhinastoc qui abat la sale bête !

— T’emballes pas trop, il est un peu lourd pour elle !

Pariez si vous voulez, mais soyez gentils de ne pas vous laisser distraire.

— Pas de problème patron, on se garde juste réveillés. Vous allez voir que dans trente secondes on est tous sur les nerfs en train de vider nos chargeurs.

— Si vous le dîtes. N’oubliez pas r de viser avant d’appuyer sur la gâchette, quand même.

— Haha !

— On appelle ça une queue de détente, patron ! La gâchette c’est la partie métallique qui met le feu à la poudre !


— Ça mérite une blague salace ça.

— On est là ! Allez-y, ouvrez cette fichue porte !

Et bonne chance.

— Merci patron !

— Gnnn mais tu vas t’ouvrir, saleté…

— Nan mais cherche pas, il a l’air cassé.

Défoncez la porte. Ça sera pas la première fois que ça arrrive dans cette base, hein Auguste !

— La 216 est juste une porte coulissante norrmale, pas la peine d’utiliser des attacques à distance.


— Vu. Colossinge, explose-moi cette porte ! Et fais gaffe, y’a un monstre derrière.

— Siinge !

— À la une, à la deux, et et il le fait avant que—

— Co !?

— Purée c’est quoi ça encore ?

— Ça se répand, çaaATTENTION ÇA VIENT DANS LE COULOIR !!

Décrrivez-le-moi !

— Recule, recule bordel !

— Une espèce de brouillard noir opaque !

— De l’encre dans l’air !

— Ça pue !

Alors kr reculez-vous ! C’est une Explonuit, la chimère doit en avoir saturé r la salle. Reculez et dissipez-la avec des attaques lumineuses !

— J’y vois plus rien, j’y vois plus rien !

— Flash ! Jusqu’à ce que t’en aie plus !

— Y’a quelque chose ! Y’a quelque chose dans le brouillard !

— Où ça ? Où ça !

— Luminocanon !

— Ne tirez pas, on n’y voit rien ! Ne tirez pas !

— Putain mais où sont les murs !

— Au secours !

Auguste agrippa le talkie-walkie comme si sa vie en dépendait.

***
Les Flash de Migalos éclairaient une zone de deux mètres de diamètre, et faiblissaient au bout d’une minute. Conan avait donc vingt minutes : largement le temps de trouver cette chimère, de la tuer et de remonter à la surface où il aurait amplement mérité une journée de sommeil.

Plus facile à dire qu’à faire. Migalos avait dû grimper sur le dos de Rhinastoc pour que tout le monde tienne dans son halo lumineux, et le Dresseur fixait nerveusement les ténèbres qui commençaient à quelques centimètres à peine du canon de son fusil.

Conan se considérait comme un prédateur. Il avait survécu à un accident de moto, avait repris la moto dès qu’il avait pu, avait retrouvé la voiture qui l’avait percuté et avait donné une leçon à son conducteur. Ce qui lui avait valu une vendetta. Cela avait duré quelques mois, jusqu’à ce que l’autre comprenne que la Team Rocket soutiendrait son Sbire s’il en avait besoin, et abandonne.

En attendant, Conan s’était forgé des nerfs d’acier. Il n’avait pas hésité quand les ténèbres avaient envahi le couloir ; il avait sorti ses Pokémon, armé son fusil, et s’était précipité dans la noirceur et la puanteur de viande en décomposition. Et maintenant, il fouillait la salle 216. Son plan était simple ; si la chimère était là, il la trouvait avant qu’elle ne le trouve et il l’abattait. Pas besoin d’un plan compliqué avec des yeux que la fatigue faisait picoter.

Plus facile à dire qu’à faire… Il sentait l’angoisse monter dans sa poitrine, comme une boule qui enflait et lui écrasait les poumons. Comme quand il respirait par intraveineuse. Il était là, à scruter l’ombre, à attendre de trouver son ennemi en parcourant la salle en long et en large, et il tremblait. Lui qui s’amusait à courir sur des bras de grues et à faire l’ange dans la neige torse nu, il tremblait ! Une honte. Heureusement que personne n’était là pour voir ça.

Mouvement.

Le coup de feu claqua aussi sèchement dans ces ténèbres que n’importe où ailleurs. Rhinastoc se retourna, effrayé ; le mouvement rapprocha Migalos des ombres, révélant une tête de Pokémon.

Ce n’était pas l’Abomination. Conan ne baissa pas son arme pour autant.

Le Pokémon avança dans la lumière de l’Insecte. Une tête arrondie, grande gueule, dents pointues, corne et grandes oreilles. Un Nidoking. Conan ne le reconnut que quand la lumière révéla la cicatrice en forme de poinçon sur son torse blanc. C’était le Nidoking de Jorian, dont l’autre chef de bande était d’ailleurs fier comme un paon.

Qu’est-ce que tu fais là, toi ?

Le Pokémon Perceur par un grognement grave. Rhinastoc, pas très content d’être en face d’un autre Perceur que lui, rétorqua d’un grondement menaçant en le regardant dans les yeux, ce que Conan savait être un geste de défi. Lui-même l’avait évité. Quand son Pokémon eut une réaction de recul, il jeta un coup d’œil rapide.

Le Nidoking rugit. Un rugissement de défi autant que de souffrance. Ce qui inquiéta Conan, parce qu’il avait de bonnes raisons de souffrir : ses yeux étaient crevés. Le Dresseur n’eut pas la réaction de son Pokémon. Il avait vu des blessures assez graves sur son propre corps pour ne plus être choqué par des orbites vides et entourées de sang séché. Il prit sa voix la plus rassurante ; les Nidoking étaient des Pokémon très auditifs, et celui-ci ne se fiait plus qu’à ses oreilles ; s’il reconnaissait Conan, qu’il avait affronté deux ou trois fois, il pourrait peut-être le calmer.

Ooh… Dis-moi, tu m’as l’air d’en avoir vu de toutes les couleurs… Écoute ma voix, écoute-moi parler…

Les oreilles du Perceur se braquèrent sur lui, et pendant un instant, il donna l’air de s’apaiser. Quant à Rhinastoc, bien entraîné, il la bouclait. Il savait que le Pokémon d’en face était dangereux, et faisait confiance à son maître pour le gérer. Il avait défié ce Nidoking en duel plusieurs fois et savait que s’il devenait fou furieux, il causerait de sacrés dégâts.

Je t’ai tiré dessus, je crois, poursuivit Conan en articulant soigneusement et en détachant les syllabes. Je suis désolé, tu m’as fait peur…

Ça avait l’air de marcher, le Nidoking écoutait de toutes ses oreilles et ne présentait plus aucun signe d’agressivité ; puis un spasme le secoua brièvement. Il s’immobilisa totalement.

Ça va ?

Sans prévenir, le Perceur attaqua.

Rhinastoc s’interposa, et reçut le coup de corne dans ses plaques pectorales. Le Nidoking furieux lui allongea un énorme coup de patte à la tête, qu’il encaissa sans broncher. Au corps-à-corps, le type Roche avait l’avantage ; c’était à distance qu’il se faisait battre à chaque fois.

Le Nidoking ne brisa pas le corps-à-corps. Quelque chose, Conan ne savait pas quoi, avait déclenché sa furie ; il encaissait sans broncher toutes les taloches que lui assénait Rhinastoc, et ripostait par des frappes vicieuses. Ce dernier avait beau se battre avec hargne, il gardait un peu de mesure ; trop souvent, il s’était laissé surprendre par des attaques à distance portée au corps-à-corps.

Conan hésita. Il tenait un fusil. Il pouvait abattre le Nidoking d’une balle dans la tête. À courte distance, et alors qu’il était occupé à tabasser son Pokémon lent comme une carriole de légumes, le Dresseur était sûr d’atteindre la tête et peu importaient ses nerfs fatigués. Il devrait peut-être tirer plusieurs fois, la tête de Nidoking étant aussi solidement cuirassée que le reste de son corps, mais il pouvait l’avoir.

Le Nidoking souffla un Lance-Flammes directement sur la tête de Rhinastoc, qui fit le dos rond et recula. Migalos sauta sur le côté pour éviter l’attaque. La lumière changea. Conan n’était plus aussi sûr de son coup ; et puis ce Nidoking était un Pokémon de la Team. Furieux ou pas, il n’était pas censé le tuer.

Rhinastoc rentra la tête, baissa sa propre corne et chargea. Le coup parvint à renverser Nidoking sur le dos ; un nouveau jet de feu jaillit, illuminant confusément un mince chemin dans les ténèbres et allant lécher le mur. Puis le sol trembla ; une Telluriforce faucha le type Roche, l’envoya par terre pendant que le type Poison se relevait difficilement.

Un Pokémon sain d’esprit souffrait. Conan se jeta presque sur le Nidoking, braquant son fusil sur son œil le plus proche de lui, et tira. Un sursaut le parcourut ; il tourna son regard aveugle vers l’humain. Il semblait plus désorienté que souffrant, le claquement du coup de feu ayant rabattu ses oreilles en arrière.

Puis il tomba. Ce ne fut pas une chute propre : il s’affala d’un bloc, de tout son long, sans le moindre spasme post-mortem. Rhinastoc lui jeta un regard dépité, avant de rouler sur le côté pour se relever. Il ne comprenait pas la raison de toute cette violence.

T’inquiète pas mon grand, le consola Conan. Moi non plus j’aime pas ce que je viens de faire.

Rhinastoc se pencha pour renifler le cadavre. Il afficha une moue perplexe.

Après vérification, dit Conan en l’imitant. Il sent vraiment le pourri, pour un Pokémon qui était en pleine forme hier soir.

C’était étrange. Sans doute un mauvais coup de cette Abomination ; les camarades de chambrée de Jorian avaient signalé que ses Pokémon étaient portés disparus. Cependant, un autre élément attira l’attention de Conan. Ça sentait vaguement l’ozone. Une odeur qu’il connaissait bien puisqu’il ne supportait pas les aliments brûlés.

Il ordonna à Migalos de se rapprocher, et de venir éclairer le mur. Le Long-Patte obéit, content d’avoir à nouveau l’attention de son Dresseur, et s’approcha de la paroi d’acier. Avant de reculer, à son tour.

Un mince filet de fumée noire s’échappait d’une portion de mur noircie par les flammes. Et pas de fumée sans feu : les Lance-Flammes du Nidoking devaient avoir atteint des câbles électriques. Conan jura, puis se saisit du talkie-walkie qui pendait à sa taille — en ayant une brève pensée pour Ladislas, Mia et Emma, qui n’avaient aucun moyen de signaler leur présence sinon crier. Il espérait qu’ils s’en sortaient mieux que lui.

Surface, et sous-sol si quelqu’un m’entend, ici Conan. Je suis entré dans la salle 216 ; pas de trace de la chimère, mais j’ai trouvé un Pokémon de Jorian, son Nidoking. Il m’a attaqué et j’ai dû l’abattre, mais je crois qu’il a mis le feu à la base au passage.

***
Elle avait entendu des coups de feu, elle en était sûre. Deux, mais pas en série. Il y avait facilement eu quelques minutes entre les deux, si elle pouvait à sa perception du temps. Mais qui avait tiré ? Était-ce la même personne ? Comment savoir.

Démolosse voulut frotter sa tête contre sa jambe, pour la réconforter, mais s’arrêta au dernier moment. Il avait encore oublié qu’il était en feu.

Sylviane sourit quand même. La proximité de son Pokémon était réconfortante. Il ne possédait pas d’attaques lumineuse, alors il s’était enflammé lui-même, en se servant de son Talent Torche. C’était un tour assez classique, mais qui demandait de l’entraînement pour être maîtrisé : le Pokémon devait alimenter la flamme avec ses propres attaques, mais sans les utiliser.

Les ténèbres, épaisses, ne se laissaient pas percer facilement. Même en se tenant au plus près de Démolosse, Sylviane n’avait qu’à tendre la main pour la perdre de vue. Elle trouvait ça presque plus effrayant que de ne rien voir ; là, elle avait quelque chose à scruter, d’où n’importe quoi pouvait émerger. Mais la chaleur dégagée par son Démolosse lui rappelait qu’il était à ses côtés. Ce n’était pas du luxe : le sous-sol avait beau être maintenu à une température confortable en temps normal, ces ténèbres avaient l’air de le refroidir, et assez rapidement.

S’il y avait eu des coups de feu, on pouvait espérer que quelqu’un avait tiré sur l’Abomination. Sylviane savait que le Migalos de Conan avait Flash ; il avait peut-être trouvé et abattu le Pokémon artificiel. Elle le lui souhaitait.

Elle-même prenait la fuite. Ou au moins, elle essayait. Sans rien y voir, c’était compliqué. Elle devait faire très attention en se déplaçant sur les tapis roulants des couloirs ; une source de tension supplémentaire. Et la Sbire ne supportait plus toute cette tension. Elle n’avait pas d’armes et un Pokémon un peu mal en point comme s’il était enrhumé ; alors traquer le monstre, non merci. Elle espérait que les autres Sbires arriveraient à avoir cette sale bête. Et elle s’enfuyait. C’était ça ou craquer.

Si elle ne se trompait pas, elle devait avoir atteint l’escalier. Ça devait être la prochaine porte sur sa droite ; plus que quelques pas et elle pourrait retourner à la surface. Enfin.

Mais elle s’était déjà trompée deux fois. Les numéros des salles étaient inscrits juste en-dessous du plafond : quand les néons du couloir les éclairaient, ils étaient facilement lisibles, mais la flamme de Démolosse peinait à seulement les atteindre. Une seule façon de vérifier où elle était : ouvrir la porte. Elle activa le panneau de commandes, à l’aveugle.

À peine la porte entrouverte, Démolosse se faufila à l’intérieur pour le rendre mieux visible. C’était un dortoir.

Sylviane s’adossa à la porte, dépitée. Elle allait encore devoir s’épuiser les yeux à déchiffrer les jeux d’ombre au-dessus de la porte pour savoir où elle était. Elle devrait encore passer une éternité, ou pas loin, dans ces satanées ténèbres. Elle en aurait hurlé de rage ; mais la boule d’angoisse qui lui serrait la gorge ne laissa passer qu’un couinement dépité. Et puis elle crevait trop de sommeil pour hurler.

Démolosse jappa gentiment, lui apportant le peu de réconfort qu’il pouvait. Elle se retint une nouvelle fois de le caresser. Et puis il se détourna, avec un grognement menaçant. Il devait avoir senti quelque chose.

Un sifflement courroucé lui répondit. Quelque chose à mi-chemin entre le cri d’une bouilloire et le crissement d’une porte aux gonds rouillés. Quelque chose qui venait de l’intérieur du dortoir, de l’un des lits. Quelque chose que Sylviane n’avait que trop entendu cette nuit-là. Elle jura.

L’Abomination émergea de sous une couverture — la Sbire sut immédiatement que quoi qu’il puisse se passer, elle n’arriverait jamais à se re-coucher dans un lit de cette base.

Dans la pénombre projetée par les flammes de Démolosse, le Pokémon artificiel prenait des airs de Saquedeneu obèse. Un nœud d’ombres dans les ombres. Cela ne sembla pas plaire au chien, qui l’éclaira en l’arrosant d’un Lance-Flammes soutenu.

D’abord, la chimère ne riposta pas ; elle resta simplement immobile, dans le lit qui s’embrasait. Puis elle sembla prendre conscience de ce qui lui arrivait, et riposta avec son propre Lance-Flammes. Pas un Lance-Flamme, se rendit compte Sylviane quand l’attaque eut repoussé celle de son Démolosse : ces flammes violacées, qui crépitaient beaucoup plus vite qu’un feu normal, indiquaient un Dracochoc. Mais où est-ce que l’Abomination était allée apprendre ça ?

Les deux Pokémon baissèrent le rythme de leurs flammes à peu près au même moment, à bout de souffle. Quelques flammèches aux tons froids vinrent éclabousser Démolosse, tandis que son propre feu baignait une fois de plus cette chimère qui n’avait pas l’air de s’en soucier. Sylviane y voyait mieux, maintenant ; les quatre lits brûlaient, repoussant les ténèbres vers le couloir.

La Sbire ne tarda pas à les rejoindre, effrayée par ce combat sur lequel elle n’avait aucun contrôle. Démolosse lui aurait obéi si elle lui avait donné des ordres, mais elle était trop épuisée, le brasier lui agressait les yeux, elle avait trop chaud et trop froid et elle était terrifiée.

Démolosse s’en sortirait bien tout seul. Il avait entamé un duel avec l’Abomination, Ball’Ombre contre Vibrobscur ; les attaques fusaient des deux côtés, affaiblissant la lumière du feu. Malgré l’affinité de types, le Chien n’arrivait pas à prendre l’avantage.

Pendant un instant, Sylviane se dit qu’avec la chimère bloquée par son combat contre un des Pokémon de la base qui l’avait le plus prise en grippe, elle aurait peut-être l’occasion de s’échapper pour de bon. Sortir de cette fange valait bien d’abandonner Démolosse à lui-même… Mais la terreur la paralysa. Et si elle se perdait encore ? Elle serait dans de beaux draps, tiens.

Démolosse parvint à envoyer une Vibrobscur dans les yeux de l’Abomination, d’une frappe vicieuse qui contourna le barrage de Ball’Ombre. Le Pokémon chien jappa de satisfaction, comme pour se moquer de son adversaire — laquelle sifflait de rage, des lambeaux de ténèbres collés aux yeux.

Un petit éclat argenté prit naissance entre ses mandibules ; il éclata soudainement, répandant une lumière crue, dont les teintes argentées se troublaient d’un rosâtre écœurant. Sylviane se couvrit les yeux, par réflexe, mais le Pouvoir Lunaire infligea quand même une violente démangeaison à la rétine.

La Sbire tituba dans le couloir, aveuglée, sans savoir où elle était. Il lui sembla entendre un feulement de rage de son Démolosse. Elle se plaqua les mains sur les yeux et s’adossa à un mur, tremblante. La douleur diminuait ; mais retrouverait-elle la vision ? Elle se laissa lentement glisser au sol. Elle ne savait pas quoi faire. C’était trop.

Quand elle ouvrit enfin les yeux, il lui sembla qu’une éternité s’était écoulée. Elle avait les membres ankylosés comme si elle avait passé la nuit allongée sur ce sol d’acier. Et elle réalisa que c’était sans doute le cas : le néon accroché au plafond fonctionnait à nouveau, il envoyait une fontaine de lumière blanche sur sa silhouette prostrée. Elle se reprit, et fit de son mieux pour se relever malgré la fatigue qui l’écrasait.

Deux choses lui sautèrent aux yeux. La première, c’était le mur de ténèbres qui bloquait le couloir à quelques mètres d’elle. Elle était dans une sorte de zone purifiée ; la faute à l’attaque Fée de cette satanée Abomination ? Mais d’où tirait-elle toute cette couverture de types ?

La seconde fut un petit éclat de métal flottant sur un lambeau de noirceur, qui passa littéralement sous son œil et la fit reculer brusquement.

L’Abomination avait-elle défoncé un autre mur ? Ce truc ressemblait à ceux qui parsemaient le couloir devant sa cage au deuxième sous-sol, la salle 101’. Mais on était au troisième sous-sol, les machins flottants ne pouvaient pas avoir fait tout le trajet jusque-là !

Dans un sursaut de lucidité, Sylviane vérifia le numéro de la salle au-dessus de la porte. Salle 109.

C’est pas possible… murmura-t-elle avec effroi. C’est un cauchemar…

Elle était au troisième sous-sol, pas au deuxième. Elle n’avait monté aucun escalier, comment pouvait-elle être au deuxième sous-sol ? La chimère l’avait-elle transportée jusque-là ? Un frisson de terreur pure, primale, la secoua à cette pensée.

Un râle d’agonie s’échappa de la salle. Sylviane se figea. Était-ce son Démolosse, ou l’Abomination ? Elle n’aurait su le dire. Elle scruta l’encadrement de la porte, craignant que quelque chose en sorte et souhaitant que tout ça soit terminé.

Une patte noire, prolongée par quelques petites griffes rouges, vint se poser sur le sol du couloir. La Sbire déglutit, avec difficulté tant sa gorge était serrée. Le membre dégoûtant n’avait pas l’air de vouloir bouger ; elle commença à reculer, lentement et prudemment. Vers les ténèbres.

La chimère se décida à sortir dans le couloir quand elle eut laborieusement parcouru un mètre.

Tu n’es pas réelle, lui annonça Sylviane sur le ton d’une excuse. Tu ; tu n’es qu’un cauchemar. Tu—

Sa voix se brisa, sous le coup de la peur. L’Abomination agita ses mandibules, puis déroula une longue langue rose et sombre, qui s’enroulait autour d’elle-même comme un tentacule.

Dans un éclair de lucidité effroyable, la Sbire se rendit compte qu’elle n'était pas juste fatiguée, non, elle devit être en train de devenir folle. Mais ce n’était pas grave, car elle n’aurait jamais le temps de l’être. Elle éclata d’un rire nerveux, gêné.