Chapitre 1
Chapitre 1 : Une arrivée plutôt mouvementée.
Un vortex s'ouvrit sous moi et m'aspira. Je me sentis étiré, rétréci, et tordu en tous sens. Soudain, au fond du long tunnel coloré de rose, les couleurs de Palkia, je vis une lumière vive qui m'éblouit et se rapprocha de moi à toute allure à mesure que je tombais. Elle s'approcha, s'approcha encore, pour finir par m'engloutir complètement. La lumière diminua d'intensité, mais, avant d'avoir pu ouvrir les yeux, un choc sourd me prit à la tête et se répercuta dans tout mon corps. Je sombrai dans l'inconscience.
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Lorsque je me réveillai, encore la tête dans les astres, je vis, après que ma vue eut arrêté de tanguer et d'être flouée, des milliers de visages curieux penchés sur moi. Non, pas des milliers, en fait. Plutôt une dizaine. Dont celui d'une adulte vêtue de blouse blanche, sûrement une infirmière. J'entendis des voix murmurer :
- Vous êtes sûre qu'il n'est pas en train de délirer, madame ? Pendant son sommeil, je l'ai entendu prononcer plusieurs fois le nom des Pokémon légendaires de notre région, dit l'un.
- Il nous regarde sans rien dire… Madame, vous pensez qu'il est devenu sourd à cause du choc ? demanda un autre.
- Du calme, les enfants, c'est ce que nous allons vérifier tout de suite. Dit l'intéressée. Combien vois-tu de doigts, jeune homme ?
Je mis quelques instants à rassembler mes esprits et quelques instants encore avant de comprendre que c'était à moi qu'elle s'adressait.
- Hein ? … Euh… Deux ? Non, quatre ?
- Il n'est pas sourd, c'est déjà ça, soupira l'infirmière. Par contre, reprit-elle, il a l'air d'avoir souffert, en se cognant à ce rocher. Mais, puisqu'il entend, mes prescriptions pour son rétablissement ne seront que du repos, du repos et encore du repos. Toutefois, si quelque chose d'anormal venait à se produire, si tu ne te sentais pas bien pendant les jours prochains, prévient immédiatement les urgences. C'est un miracle que tu aies subi si peu de dégâts, mais reste vigilant. Allez, maintenant, zou, rentre chez toi !
Je restai au lit, abasourdi.
- Alors qu'attends-tu, vas-y, pars !
Alors, mon moment de surprise passé, je pris la tête la plus triste que j'aie jamais faite et je murmurai, entre deux sanglots factices :
- C'est que je… Je n'ai pas de maison…
- Oh, bon Arceus ! Mon pauvre ! Mais, cette école est bien faite aussi pour les internes, je crois… Je trouverai un arrangement avec le proviseur. S'exclama l'infirmière, attendrie.
Cette fois, mes talents d'acteur avaient joué en ma faveur. Visiblement, le camouflage d'Arceus s'était activé au moment où j'avais pénétré dans ce monde. Sa prévoyance à toute épreuve m'étonnerait toujours, on pouvait bien lui accorder ça. Après tout, je suppose qu'il fallait être organisé et même perfectionniste dans le rangement lui-même pour pouvoir régir notre univers tout entier.
J'étais donc arrivé directement dans une école. Je pensais d'abord visiter le centre spatial d'Algatia en premier, rien que pour en apprendre plus sur les connaissances des humains à propos de cet univers qui est le mien. Mais bon, une école est toujours la bienvenue pour étudier leur comportement, leurs relations vieux-jeunes, et, plus important : la potentielle menace ou le potentiel bienfait peut-être apportés par la nouvelle génération. Ah, ce qu'ils se reproduisaient vite, ces humains. Je n'avais pas le temps de les suivre !
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On allait bientôt ouvrir le collège et me montrer ma chambre. En attendant, je profitais du temps qu'il me restait pour visiter le reste de la ville. Une grande ville que celle d'Agatia, ma foi, mais pas plus que Poivressel. Je flânai dans les avenues pavées, tout en jetant des regards discrets aux passants et par les fenêtres des habitations, essayant tant bien que mal de voir au travers des rideaux, pour en savoir plus sur leur mode de vie, leurs relations familiales, ect… Sans oublier d'évaluer leur potentiel niveau de nocivité. Pour l'instant, je ne détectai rien d'alarmant. Mais je restai méfiant.
Ces bêtes étaient imprévisibles, primaires et aux comportements rustres et violents. Elles étaient proprement infréquentables. Sans parler de leurs essais désespérés de ramener une personne condamnée à la vie, qui, dans le fond, si on supprime les équipements informatiques, ne diffèrent pas beaucoup de ceux d'il y a quelques milliers d'années. Mais que leur fallait-il donc pour comprendre qu'un mort est mort ?
Si leur intelligence se développe à une vitesse phénoménale, on ne peut qu'affirmer le contraire de leurs réactions brusques. Moi, par exemple, en la même durée de temps, j'ai appris à laisser mes sentiments de côté pour prendre des décisions cruciales. Mais, à quoi bon les comparer à moi ? Ils ne sont qu'humains, après tout. Et l'humanité est l'incarnation même des erreurs. Mais aussi la seule espèce à en tirer autant profit -mis à part les pokémons légendaires, bien sûr, car nous ne commettons jamais d'erreurs-.
Plongé dans mes pensées, je ne remarquai pas la première marche de l'immense escalier tout de marbre qui franchissait la colline et je trébuchai. Je me rattrapai immédiatement à la rampe. J'avais de bon réflexes, sous cette forme, c'était déjà ça…
Une fois que je vis le marbre lustré de l'escalier, je ne pus en détourner le regard. En effet, la pierre était tellement briquée que je pouvais apercevoir mon reflet dedans. C'était bien la première fois que je voyais mon image dans ce qui s'apparentait plus ou moins à un miroir, depuis l'activation de mon camouflage. Je n'étais ni grand ni petit, ni gros ni maigre, en un mot j'étais banal et apte à me fondre dans la masse… Si je n'avais pas les cheveux verts aux pointes noires et les iris jaunes, reliques de ce que j'étais vraiment. Mais bon, cela passerait sûrement inaperçu aux yeux peu avertis des humains.
Puis, finalement, je relevai la tête pour continuer ma visite. Lentement, je marchai. Puis, le vent tourna et je sentis une odeur de sel et de mer m'arriver aux narines. Et là, je me mis à courir. Je filai sur les marches aussi vite que je le pouvais, si bien que j'avais presque l'impression de voler. J'arrivai en haut de l'escalier, essoufflé. Je m'apprêtai à m'arrêter pour reprendre mon souffle, et je relevai la tête. À quelques mètres de là, en haut de quelques autres marches (ah, maudites marches !), un promontoire s'avançait sur la mer.
Sans prendre le temps de complètement récupérer, je m'élançai sur les escaliers et gravis les dernières marches qui me séparaient de ce que je voulais voir à toute allure. Je serais tombé si les constructeurs de cette ville n'avaient pas pensé à monter des barrières. La vue me coupa le souffle. On voyait un ciel magnifique qui se confondait avec la mer en perpétuel mouvement. L'eau s'abattait sur la plage de sable fin, puis se retirait, et revenait avec plus de ferveur encore, s'attaquant cette fois aux rochers de la côte, qui subissaient sans rien dire. On ne l'aurait pas remarqué à l'œil nu, mais, lentement, ils s'érodaient, souffrant en silence. Plus loin, on voyait l'ombre d'une grotte, et, plus près, on remarquait avec moquerie les personnes en bas, qui s'agitaient à toute heure de la journée, semblables à des milliers de fourmis. Je connaissais cette vue. Je l'avais déjà vue, alors que le village en était encore à ses débuts. J'aurais dû y prêter plus attention, mais je voyais cela tous les jours. À n'importe quel endroit du globe, c'était la même chose. Comme à la tour maîtrise, à Kalos.
Si je l'avais fait, j'aurais pu constater avec bonheur le passage du temps sur ce lieu, qui restait et resterait toujours éternellement beau. Sans que je le remarque, des larmes avaient commencé à couler de mes yeux, saisi comme je l'étais de la magnificence du lieu. J'avais beau rester pragmatique quand il s'agissait de l'avenir d'une espèce, je ne pouvais rester insensible à la majesté impérieuse de ce lieu qui semblait me défier ouvertement comme s'il disait « Viens, Rayquaza, essaie donc de m'amocher, pour voir ». Alors, je vis le soleil à l'horizon, rouge comme l'enveloppe d'une baie fraigo gonflée de l'intérieur et illuminée par une bougie (et donc, transformée en lampion), je vis le ciel orangé comme une baie mepo, et je me dis qu'il était temps de rentrer, sinon je ne pourrais pas profiter de ma chambre autant que je le voudrais.