Introduction
Introduction
Je dormais bien tranquillement et si profondément que l’on aurait presque pu voir une bulle sortir de mes narines, quand une voix sortie de nulle part, profonde, forte et autoritaire me réveilla. Son ton était si grave que je devins alerte au moment où je fus tiré de mon sommeil. Seulement, je n’étais pas encore réveillé quand elle avait commencé à parler, aussi je n'avais pas bien saisi le début de la phrase. La voix, visiblement contrariée que je ne lui prête pas une attention suffisante, se racla la gorge et répéta, sur un ton tout aussi formel cependant, prouvant la parfaite maîtrise de ses émotions :
- Je disais donc, « J'aimerais m'entretenir personnellement avec toi, Rayquaza, car je souhaiterais te confier une mission de la plus haute importance. Viens me voir immédiatement dans mon bureau. »
Tiens donc, une « mission de la plus haute importance » ? N'était-ce pas ce que le maître Arceus disait à chaque fois ?
Soudain, la voix, énervée et si puissante qu'elle fit trembler dangereusement l'espace distordu qui me servait de foyer comme si son propriétaire était là -ce qui n'était pas le cas- me rappela à l'ordre :
- Et au pas de course, sinon je te destitue de tes fonctions !
Je me levai en grommelant intérieurement, et je me dépêchai, toujours à moitié somnolent, de me présenter à l'endroit énoncé. Il n'était jamais bon de faire attendre le maître, si l'on ne voulait pas en prendre pour son grade. Ou pire.
Quand je me présentai, essoufflé, devant le maître, celui que tout le monde nommait Arceus, celui-ci me dit, du haut de toute sa supériorité (et du haut de toute sa prétention également) :
- Te voilà, enfin ! J'ai failli me mettre en colère !
Je frissonnai. Les colères du maître étaient terribles. Et, quand on le mettait vraiment en rogne, on prenait le risque de disparaître complètement de ce monde. Purement et simplement. Sauf si il avait besoin de nous, pour une de ses affaires de, je cite, « la plus haute importance ». Autant dire qu'il avait des choses plus « importantes » à régler, comme s'occuper de sa petite personne et de son orgueil démesuré, et qu'il ne supportait pas de risquer de s'abîmer un bout de patte en déviant une météorite, par exemple (eh oui, le pokémon qui s'en était occupé, la dernière fois, c'était un mew). Dans ce cas, on récoltait un sursis, mais rien de plus.
Puis, sans plus me laisser le temps de réfléchir davantage, il continua :
- Cette fois, il s'agit d'une mission d'espionnage. Je voudrais que tu ailles sur terre en prenant une apparence humaine, le temps qu'il faudra, pour que je puisse décider de la détruire ou non.
Ah, effectivement. Cette fois, c'était plus important que d'habitude. D'autant plus qu'il parlait là d'annihiler complètement le seul monde où il avait laissé se développer une civilisation avancée mais à la puissance qui laissait à désirer. En bref, le seul lieu où l'on pouvait avoir quelque peu de divertissement. Même si on n'en éprouve pas vraiment à voir ces fourmis occuper leur quotidien, c'est quand même mieux que de parler aux mêmes personnes, tout le temps, en ayant quasiment les mêmes conversations. C'était quand même incroyable, cette durée de vie si limitée et cette diversité dans leurs caractères. C'était cela qui faisait leur charme. On ne pouvait en trouver deux identiques, chose qu'Arceus a voulu illustrer en créant les spindas (même si, pour le coup, les différences entre humains ou entre les pokémons autres que les spindas sont plus subtiles, et souvent présentes dans le caractère de chacun). Je n'étais pas spécialement pour la destruction d'une chose si diversifiée, de ce point de vue là, mais il n'y a qu'à voir ce qu'ils font de cette terre qui les porte. Ce comportement me répugnait au plus haut point, et j'étais clairement pour leur extermination. Mais Arceus semblait vouloir savoir autre chose, qu'il n'était (bien évidemment) pas disposé à aller trouver lui-même.
Alors, il parla, me sortant immédiatement de mes divaguations.
- Je suis disposé à te prêter un peu de ma puissance pour que tu puisses aller constater par toi-même leur état d'avancement, le risque que leurs projets d'explorations stellaires peuvent faire planer sur nous -pour l'instant, les illusions tiennent bon, mais pour combien de temps encore ?- et leur mode de vie, ainsi que leurs coutumes. Je veux m'assurer qu'ils me vénèrent comme il se doit, et qu'ils ne fassent pas souffrir les fidèles compagnons qui les guident et les protègent, leurs pokémons. Je compte sur toi.
Je n'en revenais pas. Et il allait me laisser là-bas ? Vraiment ? Je voulus exprimer mon indignement et mon incompréhension par un simple mot :
- Mais…
- Il n'y a pas de « mais » qui tienne. Dit-il de sa voix froide et cassante. Ta mission prend effet à cet instant.
Je voulus ajouter quelque chose, mais, d'un mouvement de sa patte, il me projeta dans un monde dont je ne voulais plus entendre parler.