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De la terre sur les mains (OS) de Eliii



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Informations

» Auteur : Eliii - Voir le profil
» Créé le 15/01/2017 à 17:49
» Dernière mise à jour le 15/01/2017 à 17:49

» Mots-clés :   Absence de combats   Humour   One-shot   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Trou noir terreux
Je ne me sens pas bien du tout. Genre, vraiment pas bien, comme si je m'étais fait successivement écraser par un troupeau de mammochons, une horde de rhinocornes en colère et, tiens, pourquoi pas, un convoi d'une quinzaine de six tonnes ! Après tout ça, je vous laisse un peu imaginer l'état dans lequel je me trouve. Enfin, c'est ce que je dis, mais en vérité, ça n'est pas tout à fait ça ; il faut toujours que j'exagère, c'est plus fort que moi, je dois être atteint d'une maladie, du type l' « exagérite aigüe ». Vous devez vous en douter, je ne suis certainement pas un as en ce qui concerne la médecine, puisqu'une telle maladie n'existe absolument pas.

Pour en revenir à mon état physique, en réalité, j'ai l'impression d'agoniser terriblement mais sans avoir réellement mal — enfin, je me comprends, c'est ce qui importe. Les murs tanguent autour de moi, comme si je m'étais subitement décidé à tourner sur moi-même comme un gamin de quatre ans ; tout est flou, les meubles comme les visages, et je crois que je vais bientôt tomber dans les pommes. Enfin, peut-être, je n'en sais absolument rien. Et puis ce sac à dos de merde qu'on m'a fait enfiler pèse lourd sur mes épaules. Mes vertiges commencent à s'accentuer, j'essaie de lâcher un mot, n'importe quoi, un juron, mais aucun son ne sort de ma bouche. Génial, vraiment, et le plus beau c'est que j'ai choisi de me fourrer dans cette embrouille tout seul ! Il faudrait que je revoie un peu mes projets, la prochaine fois que je partirai en vacances ; ne surtout pas se laisser tenter par des offres louches, jamais !

Mes sens commencent à défaillir, je perds peu à peu pied, comme si une une main me tirait hors de la réalité. Je me sens chanceler, puis après, plus rien, comme si je ne touchais plus le sol ; ma vue se brouille de plus en plus, jusqu'à ce que le noir complet m'envahisse. Je parviens encore à entendre des bribes de sons et de voix, qui n'ont pas le moindre sens, mais qui me maintiennent accroché au monde, au tangible, au réel. Plus pour longtemps, car tous les bruits finissent eux aussi par m'abandonner, de même que l'odeur persistante de café qui embaumait la pièce. Et enfin, le goût sucré des baies que j'ai avalées un peu plus tôt me quitte à son tour. Mes sens me laissent tout seul, livré à moi-même dans le noir, le silence, le rien. J'avoue être très perplexe ; est-ce qu'on m'a jeté un sort, ou quoi ? Ce n'était pas censé se passer comme ça ! Enfin, je crois, parce qu'à la vérité je n'en sais rien du tout.

Sans raison, je me mets à penser à ma famille. Ah, cette belle brochette de cons qui m'ont suggéré de partir en vacances parce que je me tue trop au travail ! Peut-être qu'ils ont raison et que je suis aussi attaché à mon boulot qu'un Kokiyas à la queue d'un Ramoloss — n'y voyez aucun sous-entendu graveleux, c'est la première comparaison, métaphore ou quelle que soit la figure de style qui me vient à l'esprit pour décrire mon rapport au travail. Mais ça ne veut pas dire qu'il faut me faire quitter ma région pour m'envoyer à quelques centaines de kilomètres. Surtout si c'est pour me faire arnaquer par un crétin qui n'a pas du tout attiré ma méfiance avec son attraction pourrie. Je suppose que rouler dans la farine un type qui s'appelle John Smith, alias le nom le plus générique d'Unys, était trop alléchant pour ne pas tenter le coup. On se fout de la gueule des gens ordinaires, maintenant, où va le monde !

J'oublie bien vite ma stupide famille pour songer à ce qui m'importe vraiment. Mes Pokémon, qu'est-ce qui va leur arriver ? Est-ce qu'ils sont encore dans mes Pokéballs ? Est-ce que j'ai encore ces balles sur moi, d'ailleurs ? Peut-être bien que leur attraction stupide n'est qu'un prétexte pour détrousser les touristes insouciants. Enfin, ça aurait pu, mais je doute qu'ils puissent encore se pavaner ouvertement si c'était le cas, puisque la police internationale traîne dans les environs, à ce que j'ai entendu. A moins qu'ils aient des méthodes bizarres, genre l'effacement de la mémoire de la victime, et que ça leur permette de s'adonner à leurs petites activités illicites tranquille pépère. J'en tremble rien que d'y penser.

Enfin, j'en tremblerais si je n'étais pas en partie inconscient. Je ne sais même pas dans quel état je suis ! Je peux penser normalement, mais je ne sens pas mon corps, je ne vois rien, je n'entends rien... Un peu plus et je vais commencer à croire que je suis mort ; j'espère qu'aucune lumière blanche ne va subitement apparaître, me révélant au passage que je suis à l'intérieur d'un long tunnel, parce que je me mettrais clairement à flipper. Déjà que je m'inquiète à outrance pour Elvis — mon Crikzik, ne jugez pas mes goûts musicaux — et Donald — mon Manglouton, ne faites pas attention à son appellation curieuse —, je crois que je vais bientôt me mettre à pleurer ! Ah bah non, suis-je bête, ça non plus je ne peux pas le faire !

Je végète encore un moment qui me paraît long, mais à vrai dire j'ignore totalement combien de temps a pu s'écouler depuis mes vertiges et mes nausées, un peu — ou beaucoup — plus tôt. C'est alors que l'inespéré arrive ! Je sens à nouveau mon dos ! Ce n'est pas grand chose, mais compte tenu de ma situation plutôt inexplicable, c'est déjà un énorme pas en avant. Le seul bémol étant que mes lombaires me font atrocement souffrir. Cette fois, le troupeau de mammochons, les rhinocornes et les six tonnes sont effectivement de sortie, j'ai l'impression que ma colonne vertébrale est en petits morceaux qui se désagrègent petit à petit comme des morceaux de sucre dans du café. Oui, mes comparaisons sont toujours aussi foireuses, merci de vous en inquiéter.

Après un retour partiel dans mon corps — parce que bizarrement, je ne sens que certaines parties —, mon odorat me revient, et j'aurais de loin préféré qu'il s'abstienne. Il règne ici, où que je sois, une odeur perturbante que je ne parviens pas à identifier. Sûrement parce que je n'ai jamais senti quoi que ce soit de tel auparavant. Qui sait, c'est peut-être l'haleine d'un Ponchien, et j'espère sincèrement que non ! Il ne manquerait plus qu'une langue baveuse me caresse le visage, et... erk, j'en ai des maux de ventre — métaphoriquement parlant pour le moment — rien que d'y penser !

Je finis par me dire que tout va s'arranger, puisque deux de mes sens me sont en partie revenus ; je ne tarde pas à sentir de nouveau mes mains, qui touchent quelque chose de... terreux, sablonneux peut-être. En tout cas, c'est tout sec au toucher, et je n'apprécie pas du tout. J'ai une folle envie de me passer les mains sous de l'eau froide, parce que je me rends compte que ce que je touche est plutôt chaud. Pas au point de me faire mal, mais chaud quand même, et bon sang, je déteste la chaleur !

En y songeant, je crois que j'ai des envies de meurtre. Ou du moins, quelque chose qui s'y apparente, parce que mes poings se crispent instinctivement. J'ai toujours eu un don pour passer inaperçu et pour éviter les ennuis, mais cette fois-ci, le malheur m'a mis un gros coup de pied au cul. Ce putain de vieillard avec son sourire de sorcière édentée, je le retiens ! Si ça ne tenait qu'à moi, je lui enfoncerais volontiers un couteau de cuisine en plastique dans le ventre, juste pour voir sa mine dégoûtée quand il se rendra compte de la façon merdique dont il crèvera ! Mais je n'ai aucune arme semblable en ma possession, et ce vieux salopard est pour le moment hors de vue — parce que je ne vois rien, quoi, enfin bref, trêve de plaisanteries foireuses.

Les secondes, les minutes, ou les heures, je n'en sais rien du tout, passent, et rien de nouveau ne se produit. Je suis dans une dimension à l'extérieur de l'univers, ou un truc bizarre et inexplicable dans le genre ? Je n'ai jamais été très doué dans tout ce qui concerne la physique, la mécanique quantique et les autres trucs incompréhensibles qui expliquent des choses sur notre monde, que j'ai étudiés pendant une longue année à l'université — avant de me reconvertir dans la finance, voyez comme mon charisme a dégringolé en moins de deux.

Et si je mourais ici, dans ce trou noir terreux ? Je me glace d'effroi à cette pensée. Mourir dans un endroit pareil, sans rien, sans personne ? J'aurais au moins voulu avoir mes Pokémon à mes côtés lorsque ce jour arriverait... Non, il faut que j'arrête de me persuader que je vais crever de cette façon ! Allez, positive, sombre crétin, pour une fois dans ta vie, vois la vie en rose... Merde, voilà que j'ai une chanson de Kalos dans la tête ; sors de là, Edith Piafabec, c'est une propriété privée !

Je n'ai pas le temps de penser à autre chose ; toutes mes sensations me reviennent d'un seul coup. Il y a de la lumière, mais je ne discerne encore rien ; une odeur de terre et de fer rouillé ; j'entends des sons durs, comme des fracas métalliques à un rythme régulier ; le goût sucré des baies est de nouveau là.

Mes yeux s'habituent à la lumière, et je peux enfin voir ce qui m'entoure, avec un certain soulagement. Je suis dans un genre d'immense couloir naturellement creusé dans la roche. Des lanternes sont accrochées par endroits, permettant d'illuminer ces souterrains sombres. En essayant de bouger, je sens que je ne suis pas debout, mais à moitié affalé au sol, les mains dans la terre sablonneuse. Sentant une présence à proximité, je lève les yeux vers un type énorme. Je ne plaisante pas, on dirait que sa bedaine pèse aussi lourd qu'un Wailmer — j'aurais peut-être dit Wailord si j'avais voulu être méchant. Il se gratte la barbe de sa main gantée, et me sourit.

« Toi, c'est la première fois que tu testes l'Explorakit, fiston ! C'est vrai que c'est dépaysant, au début ! »

Puis il part dans un éclat de rire assourdissant. D'accord, je crois qu'aujourd'hui, tout le monde est vraiment décidé à me prendre pour le dernier des cons. Quand j'aurai trouvé comment retourner dans mon monde — parce que j'ai vraiment l'impression qu'il s'agit d'un monde parallèle, même si c'est complètement faux —, je lui secouerai un peu les puces, à ce vioque qui s'est bien payé ma tête. Il aurait pu m'expliquer comment cet « Explorakit » fonctionne, au moins...