Epic Fail sur la capture de Celebi de Flageolaid

Luth se montre assez compréhensif, il me laisse raconter mon histoire plutôt que me provoquer en duel. Par chance, le sbire Rocket s’évanouit rapidement après que Venceslas ait relâché son étreinte. Cela me permet de garder quelques éléments pour moi.
Par exemple, je ne dis pas un mot au sujet de la bombe. On pourrait me trouver trop pragmatique, mais je reste persuadé que posséder un engin explosif sur soi peut toujours s’avérer utile.
A la place, je prétends que le sbire était là en repérage, dans l’optique de faire prochainement sauter le bâtiment.
De toute façon, le jeune adulte est tellement perturbé par l’annonce d’une invasion imminente de Johto que tout le reste perd vite de son importance.

Nombre de Masterballs gaspillées pour la capture de Celebi : 4

Luth ne me fait pas assez confiance pour me laisser chercher le précieux objet perdu à Acajou. En outre, il tient à me faire rencontrer de suite Peter et sa clique pour débattre des informations obtenues.
Avant de quitter la ville, nous laissons le sbire poseur de bombe dans une clinique où il recevra des soins sous la surveillance de trois policiers. Puis nous prenons le bus en direction de la Ligue.
Après l’Assaut sur Kanto, le Conseil des Quatre a dû déménager au nord d’Ebenelle, dans les vestiges d’un château antique, fait de pierres beiges, restauré et modernisé à l’occasion pour abriter les meilleurs dresseurs de la Ligue de Johto.
La forteresse en question se situe au pied d’un massif rocheux. On y accède en suivant une sinueuse route de montagne. Vue du ciel, elle forme un octogone presque parfait, en accord avec la symbolique numérique des Ligues.
Toute la partie ouest de la citadelle est encore en travaux, ce qui n’empêche pas de courageux dresseurs de venir défier l’élite de Johto.

Il est presque vingt heures quand nous atteignons le château. Usant de ses privilèges de Maître, Luth nous fait mener au restaurant du Conseil Quatre pour y dîner.
Pendant que nous goûtons à la plus exquise cuisine de la région, Peter est averti de notre présence. En effet, Luth a demandé à un serveur de lui apporter un mot. Quelques minutes plus tard, le serveur revient en nous informant que Peter souhaite s’entretenir avec nous immédiatement.
Le repas ainsi écourté, il ne nous reste plus qu’à nous diriger vers la salle secrète et souterraine où Peter tient conseil. Ce goinfre de Luth a pris son dessert avec lui, j’aurais dû faire pareil.

Une grosse porte métallique se referme bruyamment derrière nous. Nous nous dirigeons vers le centre de la pièce, qui baigne dans une agréable lumière dorée, et où se trouve une imposante table carrée en bois.
J’aperçois quatre personnages, trois assis à table et un dernier adossé à une colonne. Je m’intéresse d’abord à celui-là, car c’est le seul que je ne connais pas du tout.
La trentaine, des cheveux bleus mi-longs tirant sur le mauve, l’air calme et réfléchi, le mystérieux inconnu porte une chemise impeccable sous son long manteau brun hors de prix. A côté de lui, nous avons tous l’air d’être pauvres.
Quand je dis nous, cela comprend évidemment Luth et moi, mais aussi Koga, amputé du bras gauche, Aldo, qui fait presque ma taille en étant assis par terre, et Peter, toujours aussi kitsch avec sa cape.
Ce sera donc une réunion entre mecs. Quel ennui ! Et c’est Peter qui ouvre les hostilités :

« Si j’ai bien compris, vous repérez un individu louche, vous le suivez sans prendre en compte le danger qu’il peut représenter, pour ensuite l’interroger de façon musclée dans un lieu public. Vous êtes quelqu’un de téméraire, M. Trix !
- C’est Trisk.
- Vous comprendrez ma méfiance à votre égard, je l’espère. Ce n’est pas tous les jours qu’un individu lambda met en déroute un sbire de la Team Rocket. »

Il n’aura fallu que quatre phrases à Peter pour me gaver au-delà de tout pronostic. Il faut dire que le Maître des Dragons multiplie les points communs avec Ghetis : même préférence pour les vêtements atypiques, même attrait pour le théâtral et même gestuelle superfétatoire.
Bref, je le trouve pénible à supporter, en audio comme en visuel.
Je me doutais bien que Peter allait être plus sceptique que Luth, c’est pourquoi j’ai pris le temps de préparer un joli mensonge, enrobé de vérité, tandis que nous mangions.

« A vrai dire, je ne suis pas une personne lambda, répliqué-je. Il m’est arrivé d’offrir mes services aux Forces de Police Internationales. C’est d’ailleurs à leur demande que je me trouve ici, à Johto.
- Je pensais que ces lavettes de flics avaient abandonné Kanto après leur dernier échec ! raille Aldo d’une voix grave et sonore.
- Du calme, intervient Peter. M. Trix, pouvez-vous nous apporter la preuve de ce que vous avancez ?
- Il y a dix jours, j’ai aidé les FPI à démanteler la troisième mouture de la Team Plasma. Je portais le nom de code Lividex et me trouvais sous les ordres de l’agent Vifulysse, le protégé de Beladonis. Ce dernier s’est lancé à la poursuite de la Team Glamour, mais avant de quitter Unys, il m’a demandé de venir enquêter à Johto après ma mission. Il sentait que la Team Rocket allait bientôt passer à l’action.
- Je vois, dit Peter en se prenant le menton dans un geste ridicule. Nous pouvons donc contacter la Police Internationale pour vérifier votre identité. Cela ne vous pose aucun problème ?
- Bien au contraire. Profitez-en pour leur indiquer que Lysandre et Elsa-Mina sont impliqués dans les méfaits de la Team Glamour. »

A Kalos, je n’ai pas transmis cette information à GDE de crainte que les deux psychopathes ne s’en prennent à lui et à Jazz.
Peter lance un regard interrogateur à l’homme aux cheveux bleus. Celui-ci hoche la tête de façon affirmative. Le visage de Peter se détend un peu.

« J’ai contacté la clinique d’Acajou, le sbire que vous avez attrapé est toujours inconscient. Pouvez-vous, M. Trix, nous donner, le plus précisément possible, les informations que ce malfrat vous a révélé ?
- Je vous en prie, appelez-moi Lividex (puisque vous éprouvez manifestement des difficultés à aligner un s et un k à la suite). Quant à ce sbire, il m’a divulgué trois informations importantes. Premièrement, la Team Rocket compte perpétrer plusieurs attentats pour déstabiliser Johto. Deuxièmement, l’invasion de la région est planifiée pour le mois prochain, une fois Johto affaiblie.
- Nous devons donc mobiliser nos forces pour prévenir toutes les attaques que Giovanni lancera contre nous ! s’exclame Koga qui fait enfin entendre le son de sa voix. Quand le sbire se réveillera, je l’interrogerai personnellement pour obtenir de lui les lieux des prochains attentats.
- Soit. Quelle est la dernière chose que le malfrat vous a dévoilé ?
- La Team Rocket possède une installation permettant de produire des Masterballs en quantité importante, réponds-je.
- Je suis sûr que Giovanni souhaite attraper plus de Pokémon pour nous écraser ! intervient Luth dont la voix fluette tranche avec le baryton viril des trois autres.
- J’en doute, rétorque Peter. Avec sa créature invincible, il n’a pas besoin de Pokémon basiques. Mais peut-être espère-t-il capturer des Pokémon légendaires ?
- Ou simplement provoquer une petite crise économique. »

Pouf, silence de plomb !
Luth, Peter, Koga et Aldo se tournent vers moi et me fixent avec insistance. Ils semblent à la fois surpris et choqués, comme si je venais de faire l’apologie de l’inceste.
Ce quadrige de Bourrinos ne comprend pas grand-chose à la vie, dès lors que l’on ne parle plus de combat Pokémon. Il faut bien avouer que je réfléchis à la question depuis plus longtemps qu’eux.
Le mystérieux gentleman friqué en profite pour s’installer à la table, dans une attitude décontractée en totale inadéquation avec la situation. Et juste pour cela, il mérite tout mon respect.

« C’est pourtant simple, explique l’homme aux cheveux bleus, une grosse partie de notre économie est basée sur l’élevage des Pokémon. Pokéballs, Potions, Repousses, ces articles sont vendus par milliers tous les jours à travers le monde. Or, si des Masterballs sont disponibles à bas prix, tout le modèle économique s’écroule.
- C’est d’autant plus vrai que la Team Rocket n’est pas une entreprise, ajouté-je. Elle peut vendre à perte sans s’inquiéter, puisque de toute façon son objectif est la déstabilisation de l’économie.
- Si le dresseur moyen peut capturer des Pokémon en un seul lancer de Ball, sans avoir à affaiblir l’adversaire, les ventes des autres capsules risquent de dégringoler très vite, poursuit-il. Il y aura également un impact sur les ventes d’objets curatifs, quoique moindre, et probablement des retombées environnementales importantes !
- Cela fait trois ans que la Team Rocket a conquis Kanto. Mais elle n’a pas cherché à envahir les régions adjacentes jusqu’à présent, cela signifie donc que Giovanni redoute d’être vaincu, car il ne profite plus de l’effet de surprise et que le reste du monde est ligué contre lui.
- La meilleure façon pour lui de parvenir à la domination de la planète est de semer le trouble dans les régions qu’il ne contrôle pas encore et qui se situent hors de sa portée. Quoi de mieux que l’économie et l’écologie pour y parvenir ? »

Il y a quelque chose de jouissif à étaler ainsi son intelligence devant les meilleurs dresseurs de Johto, sans que ceux-ci ne puissent exprimer autre chose que : « Beuh… ».
A en juger par le sourire qu’il affiche, le type aux cheveux bleus partage entièrement mon avis. J’ai l’impression que je vais bien m’entendre avec lui.
Peter prend la pose du leader viril qui réfléchit. Cela consiste à reculer d’un pas tout en croisant les bras, puis à expirer bruyamment. Il va de soi que, durant toute la durée nécessaire à réaliser les trois mouvements précédemment décrits, les sourcils de Peter se sont lentement froncés afin de donner plus d’intensité à sa réflexion.
Oh, comme il a l’air de penser sérieusement ! Et tout le monde le regarde avec attention. J’ai beau me moquer, difficile de résister au charisme d’un vrai chef.
Ca y est, il se lance :

« Koga, à quand remonte notre dernier contact avec la Résistance ?
- Cinq semaines.
- D’après les éléments rapportés par Lividesk, comment estimez-vous notre connaissance de la situation à Kanto ? demande Peter en se tournant vers le gentleman trop détendu.
- Je dirais lacunaire. Les renseignements fournis par la Résistance sont trop axés sur les rapports entre la Team Rocket et la population pour nous permettre d’analyser les forces réelles de l’ennemi.
- Alors il faut envoyer des espions sur place ! tonne Aldo en martelant la table du poing.
- En effet, nous n’avons pas le choix, approuve Peter, pourtant peu emballé par cette idée.
- Je suis volontaire ! s’exclame Luth, enthousiaste.
- Voyons Luth, tu sais bien qu’il s’agit d’une mission dangereuse…
- Vous vous souvenez de la fois où je vous ai tous battu d’une traite sans soigner mes Pokémon ? Et de la fois suivante ? »

Luth sait frapper là où ça fait mal, on dirait ! L’amertume de Peter, Koga et Aldo apparaît sur leurs visages, figée dans un rictus de déplaisir.
Le Maître des Dragons n’a d’autre choix que d’accepter la participation de Luth à cette mission. D’ailleurs, il sera accompagné par le mystérieux gentleman. Ce dernier proteste, mais Peter sait le caresser dans le sens du poil.
Vantant ses facultés d’observation et d’analyse, Peter lui démontre que, sans sa présence, la mission ne peut qu’aboutir à un échec. Luth en remet une couche avec moins de subtilité, mais cela suffit au type aux cheveux bleus.

« Et toi, Lividex, tu nous accompagnes ? m’interroge le jeune homme.
- Si vous me le permettez, je n’y vois aucun inconvénient.
- Vraiment ? s’étonne Peter. Est-ce un ordre de Beladonis ?
- Non. On va dire que c’est à mettre sur le compte de ma témérité !
- J’accepte votre présence, Lividesk, mais sachez que Luth vous gardera à l’œil ! Je ne vous fais pas encore confiance. »

Cela ne me dérange pas, en revanche si tu pouvais arrêter d’écorcher mon nom ET mon surnom, Péteur, ce serait cool ! Merci.
Quoi qu’il en soit, je viens de gagner un aller simple pour Kanto. Une fois sur place, je devrai me faufiler dans les locaux de la Team Rocket et y dérober un maximum de Masterballs.
Ensuite, je n’aurai qu’à me servir de la bombe pour faire un trou dans le mur encerclant la région et m’enfuir en direction de Sinnoh. Voilà pour ma mission officieuse.
Par contre, l’officielle consiste à prendre contact avec la Résistance basée à Kanto et à espionner les magouilles de la Team Rocket. Des opérations de sabotage pourraient s’avérer nécessaires.

Luth s’arrange pour que je sois logé pour la nuit. On m’offre une petite chambre très confortable avec vue sur le lac Colère.
Le lendemain, Peter m’annonce qu’il a contacté la Police Internationale. Après confirmation de mes dires, il accepte de m’accorder sa confiance, mais je vois bien qu’il ne peut s’empêcher d’être méfiant.
Je me doute bien qu’il n’a pas pu converser avec Beladonis, personnage central sur lequel se base mon mensonge.
Peter me transmet également les remerciements de Tcheren pour le tuyau sur la Team Glamour. Et il parait que GDE me cherche. Ce n’est pas à Kalos qu’il me trouvera…
A neuf heures, mes deux compagnons d’infortune et moi prenons place à bord d’un van à destination de Bourg Geon. Luth m’apprend que nous partirons de là pour rejoindre Kanto par la mer.
Je n’ai pas encore les détails du voyage, mais je comprends qu’il s’agit d’une méthode utilisée plusieurs fois pour se rendre à Kanto et y revenir. La région n’est donc pas aussi fermée qu’on ne voudrait le croire.
Au cours du trajet, nous bavardons un peu. Surtout Luth et moi, l’autre gars aux cheveux bleus n’alignant pas plus de deux syllabes.
Le jeune homme m’explique que Koga a perdu son bras lors de l’Assaut, trois ans auparavant. Il me raconte également que certains champions d’arène de Kanto travaillent pour la Team Rocket, notamment le Major Bob et les jumelles.
Car dans cette réalité, Morgane a une sœur jumelle, nommée Sabrina. Toutes deux occupaient le titre de championne de Safrania, avant de trahir la région et rejoindre les Rockets.
Enfin, j’apprends une information essentielle, cruciale, une chose que j’aurais pu connaître la veille si le respect des règles de politesse prévalait sur l’urgence d’une situation de crise : le nom du type à la chevelure bleue.
Il s’appelle James. C’est raccord avec une mission d’espionnage.