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Un sbire à Alola de Flageolaid



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Informations

» Auteur : Flageolaid - Voir le profil
» Créé le 17/10/2016 à 12:03
» Dernière mise à jour le 21/11/2016 à 17:21

» Mots-clés :   Alola   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo

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Chapitre 6 : It ain’t over till it’s over
Il n’y a pas trente-six raisons si je suis resté un sbire toute ma vie. Ce n’est pas une question de malchance ou de manque d’ambition. Je suis le genre de mec qui flippe, anxieux à mort, même si j’essaie de passer pour un type relax, détaché. Les gens comme moi aiment se sentir en sécurité. En un sens, être sbire vous offre une position confortable. Noyé dans la masse, au plus bas échelon possible, aucune responsabilité ne vous retombe vraiment dessus.
Tandis que les sbires de la Team Skull me menaient vers l’échafaud, j’enviais leur statut de pion interchangeable. Chacun portait son foulard sur le visage, de façon à dissimiler son individualité et sa culpabilité. Cela me rappelait la Team Galaxie, on ne distinguait même plus les hommes des femmes à cause des perruques.

Si je devais mourir ce soir-là, j’espérais revenir me venger en pokémon spectre. Oui, me réincarner en ectoplasma – même si le verbe utilisé n’a aucun sens ici – pour terrasser la Police internationale et la Team Skull à grands coups de ball’ombre ! J’avais la trouille, mon esprit s’imaginait tant de choses ridicules.
Il faut dire que la scène culminait dans ses effets dramatiques : plus nous grimpions vers le sommet de cette falaise, plus le soleil descendait vers l’océan. Prévoyaient-ils de me jeter à l’eau lorsque s’éteindrait le dernier rayon du jour ? A cette simple pensée, mon cœur faillit s’emballer.
Ce ne fut qu’une fois arrivés en haut que les cris commencèrent à se faire entendre. La Team Skull au grand complet s’était réunie pour assister à ma punition. J’ignore comment Guzma avait fait pour rassembler aussi vite plusieurs centaines de sbires ou pour leur intimer le silence jusqu’à mon arrivée. Mais puisque j’étais là, ils pouvaient brailler, hurler, beugler comme des damnés et leur chef les encourageait par de grands gestes avec ses bras. La foule forma bientôt un cercle imparfait au centre duquel trônait Guzma, un rictus sur les lèvres.
Je ne cherchai pas Linus du regard. Je savais qu’il était là, quelque part, perdu au milieu de cette foule impersonnelle, en plein conflit intérieur. Nous n’étions pas suffisamment proches pour qu’il tente quoi que ce soit et il demeurait un sbire au fond de lui, il ne s’opposerait jamais au groupe. De toute façon, je ne lui en voulais pas, je comprenais bien sa position. En revanche, je m’intéressai aux membres éminents de la Team Skull.
Apocyne se tenait derrière Guzma, les bras croisés, les sourcils froncés, dépassant de quelques centimètres la plupart des sbires présents. Elle ne criait pas, tout en appréciant quand même le spectacle. On aurait dit qu’elle se tenait prête à intervenir en cas d’imprévu. Quant à Gladion, il brillait par son absence. J’imagine qu’il ne se mélangeait pas à la plèbe sbirifiée pour ce genre d’évènements.
On ôta les liens qui m’entravaient les mains et on me poussa sans ménagement au milieu de la foule, face à Guzma qui me regardait d’un air méprisant à travers ses lunettes asymétriques. Il fit signe à la foule de se taire.

« Je t’aimais bien Jasper, commença-t-il.
- J’ai du mal à y croire.
- Ne complique pas les choses, veux-tu.
- Guzma, combien fois devrais-je vous dire que je ne suis pas une balance ! hurlai-je. Ce flic m’a piégé, c’est après lui que vous devriez courir !
- J’ai rêvé les gars ou ce traître vient de nous donner des ordres ? »

La foule de sbires s’adonna une fois de plus à un concert de cris hystériques mêlés d’injures. Guzma eut plus de difficulté à les faire taire.

« As-tu d’autres ordres à nous donner, sale traître ? lança-t-il, provocateur.
- Je ne suis pas un traître. Vous m’avez dit de me casser, vous vous souvenez ?
- Alors c’est ça. Tu n’as pas supporté d’être refusé parmi la Team Skull, donc tu es allé cafter à la Police Internationale !
- Non ! Bon sang, j’ai été piégé ! Pff… Je ne comprends même pas pourquoi je m’essouffle à vous faire entendre raison. Vous vous en moquez de toute façon, vous n’êtes qu’une bande d’attardés en jogging !
- Espèce de crevure, tu vas nous le payer ! Et puisque tu t’en prends à l’honneur de la Team Skull, je vais faire ça dans les règles de l’art.
- Wesh, ça veut dire quoi, boss ? demanda un petit nouveau dans la foule.
- Ca veut dire que je vais d’abord l’écraser dans un combat de pokémons et qu’après… on verra, répondit Guzma en arborant son plus malveillant sourire. »

Un combat de pokémons ? Je m’étais préparé à cette éventualité. A vrai dire, je l’espérais de toutes mes forces, je possédais une arme secrète capable de me sortir de cette horrible situation. Il me suffisait de gagner le duel psychologique, or j’avais eu le temps de cerner mon adversaire au cours de la journée. Je pouvais l’écraser sans avoir à combattre réellement.
Autour de nous, la foule des sbires hurlait de plus en plus fort. Guzma s’éloigna de quelques pas et détacha une hyper ball de sa ceinture. Un migalos agressif en jaillit, me menaçant de son dard frontal. Guzma s’accroupit à côté, après m’avoir montré qu’il possédait cinq autres pokéballs. A cause du brouhaha des sbires, je vis ses lèvres bouger sans entendre le moindre mot, mais le regard mauvais qu’il me jeta fut suffisamment explicite. Réprimant un soupir, j’envoyais George au combat.
Capturé peu de temps avant la chute de la Team Flare, je n’avais jamais combattu avec lui. J’envisageais pourtant un avenir radieux à ses côtés, surtout après l’erreur que Guzma venait de commettre.
Malgré ma détermination à ne pas perdre, j’hésitai un instant. La stratégie que je comptais déployer n’avait pas que des avantages. Dans cette bataille, j’allais perdre mon nom, mon honneur, plus aucun dresseur ne combattrait contre moi à Alola, mais tant pis. La survie avant tout.
Je serrai les dents, les poings, les fesses, tout. Et puis le tumulte de la foule masqua les ordres que je donnai à George. Seul le brave embrylex entendit mes mots. Ce ne fut qu’une fois qu’il déterra du sol ces implacables rochers pointus que la clameur des sbires commença à s’éteindre. Les pierres effilées se mirent à flotter autour du migalos et de Guzma. Celui-ci ôta ses lunettes et écarquilla les yeux tel un dément, comme pour mieux voir, se relevant lentement et portant sa main à la bouche. Tout autour de nous, le silence dévora les derniers cris, alors que le soleil disparaissait derrière la ligne d’horizon. Voilà l’effet que produisait l’utilisation de piège de roc !!!
Je sentis bientôt les regards épouvantés de l’assistance, j’étais devenu un monstre à leurs yeux, un dresseur impitoyable, dépourvu de toute moralité, de tout respect pour ses adversaires, le genre de type qu’ils craignent plus que leur boss ou que la police. Il fallait être d’une mesquinerie sans pareille pour oser se servir de cette effroyable attaque.

Les embrylex n’apprennent pas naturellement piège de roc. En prison, je partageais ma cellule avec un maître des capacités arnaqueur récidiviste. Il me persuada de le laisser enseigner des capacités étonnantes à mes pokémons. C’est ainsi que Matt apprit poing-éclair et George piège de roc. Il me prévint toutefois de l’effet néfaste de cette dernière attaque sur la réputation d’un dresseur. Je pus l’observer en direct.
J’ignorais les commentaires des sbires effrayés ; mon regard resta braqué sur Guzma et uniquement lui. Il réfléchissait, sans doute passait-il en revue ses options. Il pouvait encore combattre et en cas de victoire, son succès n’en serait que plus retentissant. Par ailleurs, toute défaite lui serait entièrement excusée, à cause du piège de roc. Même l’abandon lui était pardonné. Il demeurait une seule question en suspens : voulait-il prendre le risque de se faire battre par une crapule de mon envergure ? J’eus bien vite la réponse.
Usant de son médiocre jeu d’acteur, Guzma se jeta par terre, se prit le ventre entre les bras et commença à pousser de petits cris de douleur. Ses larbins s’alarmèrent.

« Yo, boss tu vas bien ?
- Ha, je sens que mes tripes vont exploser ! gémit Guzma.
- T’as pas digéré ton kebab ?
- Han, c’est la sauce samurai…
- Je dois avoir la gastro, poursuivit Guzma. Tu as de la chance, Jasper, je ne suis pas en état de te faire la peau !
- Ziva, y se passe quoi, là ? demanda un sbire placé au dernier rang.
- Le boss a mal au bide.
- Excuse de sac.
- Wesh, il est ballonné !
- Tu t’en sors bien Jasper, mais je te préviens, tu as jusqu’à demain midi pour quitter Alola, me menaça le chef de la Team Skull avant de cracher un gros mollard verdâtre. Après, je te jure que ta vie deviendra un enfer.
- Allez, bye ! fit Apocyne en rassemblant les troupes.
- Adieu. »

Les sbires se précipitèrent pour porter Guzma jusqu’à leur planque. En très peu de temps, cet attroupement de plusieurs centaines d’individus s’évanouit dans la nature. Avant de disparaître Apocyne me jeta un long regard dont je ne parvins pas à déchiffrer la signification. Etait-ce du mépris, de la colère, de la pitié ? En un sens, je m’en moquais Seule importait ma survie.
Quand ils eurent tous déguerpis, George vint se coller contre ma jambe. Je posai la main sur le sommet de son crâne pour le féliciter pour cette grande victoire, la première d’une longue série, je l’espère. Puis il regagna sa super ball, me laissant seul, tremblotant, dans le froid et le silence de la nuit. Je n’osai savourer cette pseudo victoire par un cri de joie, craignant de m’attirer de nouveaux ennuis. Je redescendis la falaise et passai les heures suivantes assis sur une plage déserte à observer les étoiles et la mer.

Et voilà, je regarde mes pieds nus posés sur le sable et je meure de faim. J’ai vendu mes chaussures à un type un peu ivre ressemblant au professeur Chen quelques heures plus tôt pour obtenir tout juste de quoi me payer la traversée de l’océan. Je me rendrai bientôt au port le plus proche pour quitter Alola, peut-être pour toujours. En attendant, je pense à l’avenir. Mon avenir opaque et incertain…
Je songe aux mots de Linus, ai-je le talent nécessaire pour devenir champion d’arène ? Juste avant de prendre la mer, j’avais entendu dire que Blanche, une championne de Johto, comptait déménager à Unys et cherchait un remplaçant. C’était peut-être ma chance ?
Ou pas. Il faut croire que j’ai trop d’amertume en moi pour ces bêtises. J’en reste donc à mon premier plan : je vais monter ma propre Team, fort de mon expérience. Ce sera un refuge pour tous les humains bourrés de défauts et nous capturerons des légendaires, juste pour prouver que ce n’est pas l’apanage des gamins à casquette ! Mieux, nous nous emparerons de la Ligue Pokémon pour que chaque sbire soit Maître de la Ligue durant un jour, à tour de rôle. Ainsi, tous les nullos auront leur heure de gloire !
En outre, je sais exactement pour quelle raison les autres Teams se sont effondrées. Ou plutôt, pour quelle raison les autres boss n’ont pas été à la hauteur. Alors je sais que cela peut passer pour un détail, mais ce n’en est pas un. C’est hallucinant ! Que ce soit Giovanni, Arthur, Ghetis ou je ne sais qui, pas un seul ne possédait un tyranocif dans son équipe. Pas un seul. Quand on s’affirme en tant que grand méchant à la tête d’une organisation tentaculaire dépourvue de morale, le moins que l’on puisse faire c’est de posséder le pokémon de type ténèbres le plus impressionnant qui soit. N’ai-je pas raison ?
A moins que ce ne soit la fatigue et la faim qui ne me fassent dire une belle flopée d’idioties ? Je ne sais plus. En tout cas, je ne compte pas rentrer à Johto. D’ici quelques heures, je prendrai le premier bateau en partance d’Alola, qu’importe sa destination. Et là-bas, je me ferai connaître. D’une façon ou d’une autre.
Ceci dit, j’ignore si on me laissera embarquer au vu de mon accoutrement. Pas rasé, pas lavé, les cheveux en bataille, le visage miné par la fatigue, le tee-shirt sale et les pieds nus, je ressemble vraiment à un clochard ! Du moment que je paie, j’espère que tout ira bien.

Oh ? Un concombaffe ? Dire qu’il se tenait à trois mètres de moi durant tout ce temps et que je ne l’ai même pas vu à cause de l’obscurité. Il ne me reste que deux pokéballs dans mon sac, mais je peux quand même tenter de ramener un souvenir d’Alola avec moi. Après tout, en dépit de la montagne de problèmes rencontrée au cours de ce bref séjour, j’ai bien aimé ces quelques jours à Alola !


FIN





Notes concernant les surnoms des pokémons de Jasper :

Matt (Mangriff) : aucune inspiration, j’ai choisi un prénom commençant par un M, car il y a un M sur le torse de Mangriff.

Bram (Nosferalto) : vient de Bram Stoker, l’auteur de Dracula.

George (Embrylex) : vient de George Sand, romancière française du XIXe siècle, car Tyranocif invoque une tempête de sable (sandstorm en anglais) en entrant sur le terrain.

Guy (Luxio) : vient de Guy Lux, producteur de jeux TV français, et de Guy l'Eclair, non français de Flash Gordon.

Will (Melancolux) : parce que Mélancolux ressemble à une lampe à huile (lampe à Will). J’aurais pu en faire un Funécire et l’appeler Louis, il se serait bien entendu avec le suivant.

Jean (Maraiste) : vient de Jean Marais, acteur français.

Hercule (Canarticho) : vient d’Hercule Poirot, personnage de fiction créé par Agatha Christie, tout simplement parce que Canarticho se bat avec un poireau (je le verrai bien avec un bulbe de fenouil pour sa forme Alola).