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Aide-toi et le ciel t'aidera de Kydra



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Informations

» Auteur : Kydra - Voir le profil
» Créé le 10/10/2013 à 09:16
» Dernière mise à jour le 16/10/2013 à 15:58

» Mots-clés :   Aventure   Présence d'armes

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Chapitre 93 : Requiem
Le calme était entièrement retombé dans le bâtiment. Vassili attendait, avec une dernière lueur d'espoir. Il ne savait pas s'il survivrait même si on venait le sauver, mais au moins, son calvaire prendrait fin. Il imaginait à tout moment les bruits de pas arriver, puis des coups sur la porte et enfin, la silhouette de ses camarades. Son frère serait sans doute horrifié de le savoir dans cet état. Quand le bruit des pas résonna enfin, le cœur du prisonnier accéléra encore.

Un homme entra dans la cellule. Aussitôt, le combattant fut très déçu de voir l'équipement de l'armée et non un rebelle. Cependant, il s'étonna de cette arrivée : c'était la première fois qu'on arrivait seul pour ouvrir la porte. Le visage fermé, le militaire fixa les pieds de Vassili. Ses yeux étaient emplis d'une sorte de résignation, qui se mêla à de la tristesse quand il aperçut le prisonnier couché à ses pieds. Quelque chose le bouleversait profondément. Il sortit un pistolet de sa veste, d'un geste très lent. Il le laissa retomber en lâchant un léger soupir, le tenant le long de son corps. Il semblait réfléchir ou hésiter, sans jamais jeter un regard au prisonnier. Ce dernier se mit à genoux et releva la tête dans un effort considérable. La douleur envahit tout son corps. Il essaya de se lever, mais il sentit immédiatement qu'il ne le pourrait pas dès qu'il esquissa le premier mouvement. Il resta donc dans sa position, la tête droite. Malgré ses souffrances, il ne laissa pourtant rien transparaître dans ses yeux, qu'il fixa sur le soldat. L'homme ne sembla toujours pas réagir.

Finalement, il prit une inspiration. Une once de détermination se lut dans ses yeux. Il braqua l'arme, le bras tendu, vers Vassili. Il se décida même à le regarder. Le canon se trouvait à quelques centimètres de sa tête. Le rebelle avait la même détermination que lors de son face à face avec Aleph-Zéro. Sauf que contrairement à ce moment, il était sûr de détester la cause que servait celui qui le menaçait. Il n'attendait pas de deuxième miracle. Depuis sa torture, il s'était résigné à attendre la mort. Il n'avait plus peur de quitter ce monde, cela le soulagerait enfin des souffrances que son corps endurait depuis maintenant trop longtemps. D'ailleurs, il avait perdu la notion du temps et ignorait ce qu'était « longtemps »... Le bras se mit à trembler, devant une telle expression en apparence exempte de peur.

................- Baisse la tête, murmura le militaire qui peinait à cacher l'appréhension dans sa voix.

Il ne voulait même pas l'humilier, ni le faire se sentir inférieur. Il craignait juste de croiser son regard avec l'arme dans sa main... Il craignait la pitié. Son regard semblait traverser Vassili. On aurait dit qu'il peinait à fixer son attention. Le prisonnier ignorait complètement l'heure qu'il pouvait être, sans doute cependant qu'il devait être tard dans la nuit, puisqu'aux dires de Fred, le réveillon avait déjà bien été entamé. L'homme devait donc être fatigué, sans compter qu'un Noël sans aucune goutte d'alcool aurait étonné Vassili. A en croire l'expression hébétée du militaire qui se trouvait en face de lui, cette supposition se vérifiait. L'armée aurait assurément du mal à repousser un assaut si tous ses combattants se trouvaient dans le même état.

Vassili comptait bien lâcher son bourreau des yeux uniquement une fois qu'il ne pourrait plus le voir. Celui-ci allait le tuer, bien sûr... Au moins, il abrègerait ses souffrances, alors même qu'il retrouvait un peu d'espoir ! Pourtant, ils lui avaient fait tant de mal... Comment pouvait-on en arriver à un tel point ? Il en voulait aussi à Dimitri de s'être mis au même niveau que ces montres. Son propre frère avait réussi à faire subir la même chose à leurs ennemis. Jusqu'où était-il allé durant ses interrogatoires ? Il ne le saurait jamais, cela le dégoûtait... Pourtant, on n'avait pas vraiment hésité à le torturer, lui aussi ! Alors en un sens, ils récoltaient la monnaie de leur pièce. Personne ne s'était indigné du sort qu'on lui avait réservé. Même Fred, qui s'était montré compatissant, n'avait émis aucune protestation officielle... Il préférait maintenant en finir vite ; il n'était plus temps de se poser de telles questions. L'homme au regard vide ne semblait pourtant pas pressé. Les tremblements de son bras gagnèrent en amplitude. Il n'arrivait pas à se décider à faire feu.

Vassili finit par penser que finalement, il aurait une belle mort, même si ni très épique, ni glorieuse... Il avait réussi à ne jamais craquer pendant les interrogatoires et il avait fait tout ce qu'il avait pu jusque-là pour servir ses convictions. Il était fier de ce bilan. Finalement, il était rassuré que ce fût à ce moment que tout allait se terminer. Il n'aurait jamais pu supporter un nouvel interrogatoire : à chaque fois, il se demandait s'il n'allait pas révéler des informations... Par contre, il n'était pas fier de ne pas avoir su contenir ses supplications. Il avait pleuré, crié et imploré, il s'était lui-même humilié pour obtenir un sort à peine plus clément que celui qu'il aurait eu en se rebellant. Heureusement, cela, personne ne le saurait sans doute, seul le résultat serait connu... Allait-on faire de lui un héros ? Il en doutait, mais de toute façon, il ne souhaitait plus rien d'autre que mourir.

Maintenant, son histoire allait se terminer. Le bras qui tremblait en face de lui en était le témoin. Il aurait quand même préféré mourir au combat, ou après la victoire, plutôt que seul dans une cellule miteuse. Il eut une dernière pensée pour les Pokémon, Aleph-Zéro et les autres. Il était heureux de savoir qu'ils n'avaient pas été capturés en même temps que lui. Il s'en serait extrêmement voulu s'ils avaient été encerclés eux aussi à cause de lui. Il se demandait ce que deviendrait Eclair-de-Liberté... Il espérait qu'il se remettrait de sa disparition et qu'il arriverait enfin à trouver une certaine émancipation dans sa vie. Il valait mieux qu'il fût seul, de ce point de vue. Peut-être resterait-il avec les humains... Dans ce cas, il lui souhaitait un meilleur dresseur que lui ! Quant à Newton, il n'avait vraiment pas de chance, mais au moins, il n'avait pas eu l'occasion de trop souffrir psychologiquement. Quand la guerre serait enfin gagnée – il ne voulait penser à aucune autre issue possible – il aurait aimé qu'Aleph-Zéro retrouvât une vie sauvage. Après tout, c'était tout ce qu'il semblait souhaiter depuis le début !

Le jeune homme ne voulait pas presser la queue de détente. L'ordre d'exécuter ce rebelle lui avait été donné par son supérieur. En tant que soldat, il se devait d'obéir, mais il n'osait pas : il avait pitié, il avait peur, il ne se sentait pas bien. Il avait demandé à ce qu'on envoyât un autre ; l'ordre avait été maintenu. Malgré sa position, dominant le rebelle, le regard de celui-ci était très impressionnant, il n'osait pas l'affronter. Il n'avait jamais donné la mort de cette manière et cela le rebutait vraiment. Il avait imaginé tuer un ennemi, un combattant. Il s'attendait presque à le voir l'insulter ou tenter de le frapper... Puis, maintenant qu'il était face à cet homme, il ne retrouvait rien de cela. Il s'agissait d'un mourant, à la mine absolument horrible. Il n'avait rien d'un guerrier... Il ne semblait pas du tout menaçant. Tout désir de vengeance envers l'ennemi qu'il avait pu nourrir dans le couloir pour lui donner du courage s'était envolé.

La détonation ne venait toujours pas et le soldat semblait de plus en plus inquiet. Il avait peur de se sentir l'âme d'un assassin. Le soldat allait se décider, quand il imagina la scène qui allait se jouer. Il avait vu des morts, dans les combats. Les membres déchiquetés, les organes éparpillés, les têtes explosées... C'était ce qu'il allait voir en direct : l'action de la balle sur le corps du prisonnier, mais sans l'adrénaline. Il allait devoir affronter cette vision en face de lui. Il ne pouvait pas se résoudre à le faire. Il n'osait pas tuer un homme de sang-froid. Dans le fracas des combats, c'était bien plus facile, d'autant plus que c'était lui ou son adversaire. L'homme en face de lui était agenouillé, il avait à peine la force de lever la tête pour le regarder. La perspective du cerveau qui se répandrait lui donna un haut le cœur : on lui avait donné l'ordre de tirer dans la tête. Il baissa l'arme au niveau de la poitrine. Ce geste le soulagea un peu dans son désarroi, il prit une inspiration.

Vassili n'en pouvait plus d'attendre son heure. Il voulut parler pour accélérer les faits, quitte à donner du courage à son assassin. Au même moment, l'homme ferma les yeux. Il stabilisa l'arme avec sa deuxième main, sans grand effet, elle tremblait tout autant que l'autre. Puis enfin, il pressa la détente. La balle, tirée à bout portant, traversa la poitrine. Le corps du prisonnier eut un mouvement brusque de recul, sous l'effet de l'impact. Quelques gouttes de sangs mouchetèrent le sol gris, derrière la victime. L'inspiration de Vassili se bloqua pour se terminer en un sifflement, alors qu'il retombait sur sol dans un bruit de choc étouffé.

Il ne ressentit pas la douleur immédiatement.