Ghost Trail : La Piste du Fantôme de Auraman

- Ce n'est pas possible ! Non, pas possible ! s'écria Luìs Erhiam en frappant son bureau violemment du poing. Vous vous rendez compte à quel point votre échec va nous coûter cher ? La municipalité nous réclame cinq cent mille pokédollars pour les dommages occasionnés dans le boulevard de l'Empereur ! Cinq cent mille ! Jérémie Collin, votre stupidité dépasse les bornes ! Mais le pire, c'est que cette crétinerie à toute épreuve a failli vous tuer, vous et Magna ! Au final, vous n'avez même pas pu arrêter Lugulabre ! Bon sang, vous étiez deux ! DEUX !

Jérémie baissait la tête et gardait le silence. Gaël, lui, fixait Erhiam gravement. Le jeune homme de vingt-sept ans avait eu une chance folle en sortant indemne du carambolage occasionné pendant la fameuse nuit. Il avait des cheveux bruns mi-longs, des yeux marrons et un visage amical. Il était assez extraverti et se faisait de fait des amis facilement. Pourtant, il aurait mieux valu qu'il se gardât d'adresser la parole à Jérémie Collin, quand il avait été engagé à Ghosteria.
Le métier de chasseur de spectres n'était pas des plus faciles, et travailler avec une personne pareille se révélait souvent handicapant. Dans tous les sens du terme.

- Bref, puisque la responsabilité vous revient, à vous et à Magna, je vais être obligé de prendre des mesures radicales. A partir d'aujourd'hui, je ponctionne de moitié votre salaire jusqu'à ce que la dette soit épongée.
- Mais vous pouvez pas faire ça ! s'écria soudainement Jérémie, en relevant la tête. Comment on va faire pour payer notre loyer ?! Et puis, vous n'avez pas le droit !
- Si vous n'êtes pas content, vous pouvez toujours quitter cette boîte, mais sachez que je vous collerai un procès et vous devrez rembourser tout de même. Et comme vous n'en aurez pas les moyens, vous serez collé au trou pour un bon moment. Maintenant que les choses sont claires, je vous conseille d'aller travailler. Plus vous réussirez de contrats, meilleur sera votre salaire, alors si vous voulez manger ce mois-ci, je vous conseille de filer. Magna, vous restez ici. J'ai à vous parler.

Jérémie poussa un long soupir et quitta la pièce d'un pas lourd. Gaël le regarda partir, puis sa vision accueillit de nouveau Erhiam, le PDG de Ghosteria. C'était un homme d'une quarantaine d'années, mais qui avait déjà des cheveux gris courts. Il avait un visage long et fin, était mal rasé et portait un costume gris qui lui allait parfaitement. Pour l'occasion, il avait retroussé ses manches jusqu'aux coudes, révélant des bras musclés.

- Magna, vous savez que je vous considère comme l'un des meilleurs éléments de Ghosteria. Le Président de la Fédération Anti-Spectres également. Mais je ne comprends pas comment vous avez pu échouer dans ce contrat. Ce Lugulabre était dangereux, c'est vrai, mais vous auriez pu l'arrêter, j'en suis certain. Le problème vient de Jérémie Collin, encore une fois, n'est-ce pas ?
- Oui, soupira Gaël. Il m'avait appelé parce qu'il n'arrivait pas à vaincre le spectre. Il est vrai que Jérémie a commis une grave erreur en montant dans sa camionnette. Mais je ne pense pas qu'il ait voulu mal agir. Ce Pokémon n'était tout simplement pas de son niveau.
- Oh je vous en prie. Il a reçu la même formation que vous, mais c'est chaque fois pareil ! Il finit toujours par causer des problèmes. Et cette fois, il a dépassé les bornes. Cependant, j'admets que j'ai peut-être été un peu dur avec lui. Mais je ne peux pas revenir sur ma décision... Ghosteria n'a pas les moyens de dépenser cinq cent mille pokédollars ! Ou plutôt elle les a, mais nous risquons la faillite. En plus, la Fédération Anti-Spectre refuse de nous aider. Et si nous ne payons pas, c'est le tribunal.
- Que pouvons-nous faire, alors ? Nous n'allons jamais nous en sortir avec si peu d'argent...
- Eh bien, je n'ai pas vraiment de solution à vous proposer, à part de piocher sur votre salaire. Du moins, pour l'instant. Quoi qu'il en soit, vous pouvez partir. Vous aussi devriez commencer tout de suite à travailler si vous voulez avoir une chance de survie.

Gaël le salua, dépité, puis il quitta la pièce. En fermant la porte, il soupira et jeta un œil au couloir vide et sombre. Les locaux de Ghosteria étaient situés dans le centre-ville de Norande et étaient repérables facilement : un grand bâtiment de cinq étages, avec le logo géant en forme de feu follet violet fixé à la façade avant et l'écriteau « Ghosteria » juste en dessous. Il y avait de nombreuses vitres sur la façade, mais les couloirs n'en bénéficiaient pas, ce qui expliquait la faible visibilité que l'on avait à l'intérieur, malgré les quelques néons qui éclairaient faiblement depuis le plafond.
Le jeune homme respira un grand coup et décida de suivre le « conseil » de Luìs Erhiam. Il s'aventura donc dans le couloir et emprunta les escaliers qui menaient à l'étage inférieur.

Quand il arriva dans la salle n°3, Jérémie s'y trouvait déjà et il contemplait le tableau d'affichage électronique qui regroupait les différentes missions à terminer dans la semaine. D'autres employés prenaient un café en préparant leur plan d'attaque, ou discutaient, tout simplement. Gaël s'approcha de Jérémie qui arborait une expression maussade.

- Ah, t'es là, constata ce dernier.
- Ouais, répondit Gaël.
- Tu... tu m'en veux ? demanda prudemment Jérémie.
- Non, bien entendu. Après tout, on vient juste de perdre la moitié de notre salaire.
- Je suis désolé, je sais pas ce qui m'a pris...
- Bah, laisse tomber, je t'en veux pas. J'aurais juste dû refuser de venir t'aider. Maintenant, on est mal barré, donc on a intérêt à bosser comme des dingues.
- Je pense aussi, mais du coup, je sais pas du tout quoi choisir, comme mission. Vu que ça finit toujours en catastrophe avec moi, il faudrait que je trouve une mission spécialement adaptée à mes compétences.
- Regarde dans les missions pour débutant. C'est les moins bien payées, mais tu seras sûr de les réussir. Ah, j'ai trouvé les miennes.

Gaël tapota l'écran et les trois missions qu'il avait choisies s'agrandirent jusqu'à remplir tout le tableau tactile. Une petite fenêtre qui portait l'inscription « Entrez votre nom » s'ouvrit rapidement et le jeune homme écrivit « Gaël Magna » avec le clavier tactile qui était arrivé en même temps que la fenêtre. Puis la fenêtre demanda un mot de passe que Gaël s'empressa de taper.

« Transfert vers votre portable » annonça une voix mécanique.

- Niquel, lança le jeune homme. Essaie de trouver une mission rapidement, ajouta t-il à l'attention de Jérémie en quittant la pièce.

Celui-ci le regarda partir et porta à nouveau son attention sur le tableau. Quelle mission choisir ? Son portable émit un petit bruit.

« Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? » songea t-il en tirant son portable de sa poche.

Celui-ci indiquait « La mission que vous avez choisie a été ajoutée avec succès ». Jérémie releva la tête et regarda les alentours du tableau d'affichage. Il n'avait rien choisi du tout ! Personne n'avait bougé ni touché à l'écran, et personne ne pouvait connaître son mot de passe... D'où venait cette indication ? Et de quelle mission s'agissait-il ?
Il appuya sur le bouton de confirmation et le résumé de la mission s'afficha devant lui.

« Jérémie Collin, vous avez choisi la mission suivante :
Un Fantominus a décidé de s'installer dans l'usine désaffectée d'objets de combat Pokémon, à la sortie Est de Norande, à l'orée de la forêt qui relie Nocpure, Durapolis et notre capitale. Il ne pose pas vraiment de problèmes, mais l'usine sert actuellement de refuge pour les Pokémon de la forêt, lorsqu'il pleut par exemple, et nous craignons qu'il ne les terrorise. Votre mission consistera donc à le déloger et à le capturer. Cela ne devrait pas être trop compliqué, car il n'a pas l'air très puissant. Bonne chance. »

« Génial ! C'est exactement ce que je cherchais ! Mais qui a bien pu m'envoyer ça... ? Bah, je vais pas cracher dessus ! » pensa Jérémie.

Puis il se tourna vers les personnes présentes dans la pièce :

- Champagne les gars ! J'ai trouvé une mission parfaite pour moi ! s'écria t-il.

Il ne prêta pas attention aux ricanements de ses collègues et se dirigea ver s le hangar, où l'attendait un nouveau fourgon. Il avait peut-être de la chance, en fin de compte.

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Gaël arriva vers seize heures et alla aussitôt prendre un café dans la salle n°3. Il travaillait depuis la matinée et il avait besoin d'un petit remontant. Il constata en arrivant que la salle était bien plus vide que quand il était parti. Les autres avaient dû partir travailler. Jérémie aussi, apparemment.

- Eh, Gaël ! lança la voix d'un de ses collègues derrière lui. Y'a le patron qui te cherche, il a dit qu'il avait quelque chose d'important à te dire.

Le jeune homme fit un signe de tête en guise de remerciement et grimpa jusqu'au bureau d'Erhiam. Il frappa trois fois et ouvrit la porte en entendant le « ouvrez » caractéristique du PDG, qui avait une forte voix.

- Ah, Magna, vous tombez bien ! Je vois que vous avez reçu mon message.
- Que puis-je faire pour vous ?
- J'ai une bonne nouvelle à vous annoncer. Enfin, bonne, cela dépend de comment vous le percevrez. Le Président de la Fédération a décidé d'effacer votre dette, à une condition.
- Laquelle ? demanda Gaël, le cœur battant.
- Il demande votre mutation, à vous et Collin.

Le jeune homme crut mal entendre.

- Notre... mutation ? répéta-t-il, abasourdi. Mais où ? Et pourquoi ?
- Vous allez travailler dans notre filiale, à Nocpure. Nous manquons d'effectifs là-bas et vous n'êtes pas sans savoir que la ville est un refuge de spectres et d'esprits. Chaque endroit abandonné pullule de fantômes qui ne manquent pas de terroriser les habitants. Ghosteria a déjà démarré une procédure de capture de masse, mais nous ne sommes pas assez nombreux face à autant d'ennemis.
- Je vois. Je ne pensais pas que cela arriverait un jour, mais il semblerait que je n'aie pas le choix...
- En effet, le Président a été très clair. Soit vous allez travailler là-bas, soit vous êtes licencié. Je suis navré. Travailler avec vous était un réel plaisir, mais maintenant, vous allez devoir aider ailleurs. Et songez que votre salaire ne sera pas diminué !
- Qu'en dit Jérémie ? questionna Gaël.
- Voilà le problème. Cela fait deux heures que j'ai demandé à le voir, mais il ne répond pas. Personne ne l'a vu depuis ce matin. Peut-être a-t-il décidé de s'investir complètement dans son travail, en fin de compte ? Bref, si vous le trouvez, amenez-le moi. Il ne doit pas être bien loin... Nous discuterons de tout cela lorsque vous l'aurez retrouvé.

Gaël acquiesça et quitta le bureau pour la deuxième fois de la journée. Mais cette fois, c'était sans doute la dernière. Il décida d'appeler Jérémie et ouvrit son portable, qu'il avait laissé en mode silencieux. Il constata cependant qu'il avait reçu un message de Jérémie, et ce, dès la matinée. Il n'avait pas pensé à consulter ses messages et était curieux de voir ce que racontait son collègue. Il appuya sur le bouton de confirmation pour ouvrir le message et ouvrit des yeux ronds.

« Piège »