Chapitre 59 : Guillotine
..............- Mesdames et Messieurs, aujourd'hui est un grand jour, car le plus grand dresseur, le dieu du combat Pokémon, j'ai nommé le Maître Thibaut, va sortir le grand jeu ! Nous le connaissons tous, lui et son équipe de guerriers surpuissants...
Les six Pokémon constituant l'équipe du champion incontesté apparurent, dans des situations plus impressionnantes les unes que les autres. Les enchaînements de capacités créèrent l'effet d'un tsunami de puissance déferlant à l'écran. Cette démonstration se conclut par une photo du Maître et de ses compagnons, posant comme des guerriers de l'apocalypse. Thibaut était manifestement bien plus jeune que quand Vassili l'avait affronté, pourtant, il semblait déjà que le poids des années reposait sur lui comme un lourd fardeau.
..............- Nous allons maintenant vous présenter le challenger d'aujourd'hui duquel nous tiendrons bien entendu l'équipe secrète, pour votre plus grand amusement. Chers téléspectateurs, voici... Masha !
En apercevant la photo de leur sœur, occupée à discuter avec un petit Baudrive en arborant un magnifique sourire resplendissant, les deux hommes échangèrent un regard de surprise, mêlé d'une sorte de nostalgie du bon vieux temps.
..............- Masha est une jeune dresseuse de tout juste vingt ans. Elle montre un talent précoce pour le dressage des Pokémon, qu'elle commence à l'âge de onze ans, avec le cadeau d'anniversaire qu'elle reçoit de son père : Toupah le Baudrive que vous venez de voir sur cette photo si attendrissante ! Elle a réuni en deux ans seulement les huit badges nécessaires à sa participation à la Ligue Pokémon... Elle a également été remarquée par plusieurs des champions qu'elle avait affrontés et est devenue très vite favori dans les phases éliminatoires ! Très proche de son petit frère, Vassili, qui la soutient activement dans le public, elle nous a confié qu'il l'avait beaucoup aidé à tisser le lien qu'elle entretient maintenant avec ses Pokémon, lien qui est le secret de toute sa redoutable puissance, d'après elle...
La caméra s'arrêta quelques instants sur le visage d'un tout petit garçon, âgé d'au maximum une dizaine d'années, qui hurlait dans le public, tout sourire. Quand il remarqua qu'il était filmé, il adressa un signe de main pour la télévision. Il se trouvait naturellement à côté de ses parents et de son autre frère, qui lui, avait le même âge que Masha et dont on reconnaissait déjà facilement les traits. A la vue de cette image, Vassili sourit amèrement, ce qui provoqua un éclat de rire de son frère. Cette rétrospective de la vie de Masha avait tendu l'atmosphère, aussi, Dimitri ne put s'empêcher de faire redescendre la pression en lançant la première boutade qui lui passa par la tête.
..............- Quand on rétablira enfin les matches Pokémon sur nos chaînes, rappelle-moi surtout que ce n'est pas la peine d'embaucher de nouveaux commentateurs, par contre !
Les deux hommes pouffèrent comme des adolescents. Hors du contexte, on aurait pu confondre ce rire nerveux avec une réelle situation comique.
..............- Nous allons donc pouvoir aujourd'hui nous rendre compte de cette légendaire force que représente l'amitié qu'un Pokémon porte à son dresseur. Mais assez parlé, place à ce que vous attendez tous : le combat !
..............- Où as-tu trouvé cette vidéo ? demanda finalement Dimitri, étonné.
..............- J'ai rencontré Thibaut par hasard, il me l'a donné, en souvenir de Masha...
..............- Ah, c'est gentil de sa part, conclut le plus âgé sans rien ajouter de plus.
Vassili réitéra son sourire gêné. Il était à la fois reconnaissant à l'égard du Maître de lui permettre de revoir sa sœur, même virtuellement, surtout dans le domaine où elle excellait. Il avait déjà vu le match en question, mais cette vidéo ravivait en lui de bons souvenirs, des souvenirs de joie, de l'enchantement de l'enfance. Par contre, avec ce qu'il avait appris sur le Maître, alors qu'il l'avait jusqu'alors considéré comme un homme génial, il se demandait même s'il ne lui avait pas offert uniquement pour le faire souffrir à la vue du contenu de ce cadeau. Il ne fit pas part de cette idée à son frère, préférant lui laisser ses illusions sur la nature de ce dresseur d'exception.
La voix du commentateur annonça les règles de l'affrontement : quatre Pokémon pour chacun, le premier dresseur dont les participants sont tous hors de combat serait déclaré défait. Il s'agissait toujours de combats simples. Pour le reste, les adversaires étaient libres d'agir comme bon leur semblait. Le Maître sortit un imposant Oniglali au regard froid et perçant, qui fit face à Modak, le Voltali survolté de Masha. Le présentateur, qui avait horreur du silence et ne laissait aucun répit aux téléspectateurs, ne trouva rien d'autre à dire que de donner quelques informations banales au sujet des deux premiers combattants.
L'Oniglali se concentra quelques secondes, l'air inexpressif. Aussitôt, le ciel s'obscurcit. Le vent, jusqu'alors absent, se leva, faisant voler les cheveux, s'immisçant dans les vêtements. Une pluie de grêle s'abattit sur le terrain. Voltali baissa la tête, recourba les oreilles. Il réduisait sa silhouette, mis mal à l'aise par le froid désagréable et la morsure de la glace sur sa peau. Il réagit pourtant au quart de tour quand sa dresseuse l'interpella. Il ne sembla plus souffrir de rien quand il s'élança contre l'inébranlable Pokémon adverse, qui se dressait devant lui tel un mur impénétrable. Il sauta entre ses deux cornes, profita du court instant où il se trouvait sur la tête pour déclencher une terrible décharge, puis, avec une vitesse incroyable, prit son impulsion pour retomber au sol.
Le Maître n'avait pas manqué de remarquer l'aversion de Modak pour les grêlons. Aussi, son Oniglali déclencha un puissant Blizzard sur son ordre. La caméra embrassa rapidement le public. Tous les spectateurs s'étaient recroquevillés comme le Voltali. Le commentateur ne manqua pas de signaler que les seuls qui ignoraient la météo étaient les deux frères de Masha, trop concentrés sur le match pour même penser à sentir le froid. Il aurait été difficile de dire qui de la dresseuse ou de son Pokémon souffrait le plus de l'attaque. Vaillant-Rescapé, de son point de vue avisé, remarqua tout de suite que ce qui provoquait la douleur chez l'humaine ne venait pas du froid. Non, les deux participaient au même titre au combat, comme si leurs esprits avaient été liés et c'était l'attaque elle-même qui semblait l'avoir frappée.
Ainsi, quand Masha plissa les yeux et se ressaisit, le Voltali lui adressa un petit regard rassuré. Il s'ébroua, éjectant de son corps quelques éclats gelés. Son regard reprit l'expression combattive qu'il arborait à la sortie de sa Pokéball. C'était comme si les sentiments de l'un prenaient le dessus sur ceux de l'autre, tour à tour. En quelques secondes, Vaillant-Rescapé s'en était aperçu : ils ne pouvaient rien ressentir indépendamment l'un de l'autre. La dresseuse observait de son œil avisé tous les mouvements, même les plus imperceptibles, de son Pokémon. Elle savait à tout instant ce que son corps pouvait ou non réaliser, quel serait sa prochaine réaction, aussi insignifiante soit elle. Aussi, quand Modak s'élança en avant de lui-même, l'humaine avait un tour d'avance, dans son esprit. D'un seul mot, elle fit se contracter la cuisse de gauche du combattant, qui évita de justesse des Eclats Glace en se laissant glisser au sol.
Alors que l'Oniglali profitait pleinement des effets de la grêle, recouvrant petit à petit ses forces, le Voltali, lui souffrait. Des égratignures de plus en plus nombreuses recouvraient son corps, provoquées par les chocs de la glace coupante sur sa peau. Il s'essoufflait. La dresseuse le voyait, le sentait ; ses muscles tremblaient. Il tenait à peine debout. Elle, malgré la température rafraîchissante, transpirait comme si elle réalisait elle-même l'effort. Vaillant-Rescapé n'avait jamais vu une telle relation ; Terreur-des-Hommes était, au même titre que les deux frères, subjuguée par une telle prouesse au combat.
La fin approchait. Il fallait donc frapper vite et fort. L'électricité parcourut la fourrure hérissée, tandis que le Voltali sauta sans peur sur son adversaire de glace. Celui-ci ne laissait rien paraître, ni de sa douleur, ni de sa satisfaction des capacités réussies. Pourtant, le dresseur le connaissait aussi comme sa poche, il lui donnait des ordres précis et concis, correspondant parfaitement à ses qualités et faiblesses. Au dernier moment, alors que Modak écartait la mâchoire pour planter ses crocs, une barrière invisible le jeta au sol : un Abri.
..............- Que c'est bien joué ! Voltali avait misé ses dernières forces sur cette attaque, et voilà qu'il est contré sans effort ! Que le Maître est puissant !
Les deux frères échangèrent un regard amusé. Ils avaient déjà assisté une première fois au combat. Ils savaient donc parfaitement ce qu'il allait arriver : Voltali se releva péniblement. La voix de sa dresseuse cachait un tremblement, cependant, elle restait déterminée. L'Oniglali grésillait étrangement, devant lui. Alors qu'il préparait des Eclats Glace qui devaient achever toute résistance, il s'arrêta, paralysé par une force invisible.
..............- Oh, là, là ! C'était risqué, il a feinté pour placer une Cage-Eclair. Notre challenger n'a pas froid aux yeux – quel jeu de mot ! – sa stratégie était extrêmement téméraire... Elle a mis son Pokémon dans l'embarras en le faisant utiliser ses dernières forces, mais cela a payé. Mais je suis sûr que le Maître n'a pas dit son dernier mot !
La force de la grêle diminuait peu à peu : l'effet de la capacité s'atténuait, pour bientôt se stopper. Sûre de son coup, Masha fit exécuter un Double-Pied à son Pokémon. L'Oniglali céda, s'effondra au sol. Même hors de combat, il gardait son air détaché, intouchable. Pourtant, il ne pouvait plus rien faire ! Voltali revint vers sa dresseuse, au petit trot, en boitillant. Aussi essoufflés l'un que l'autre, ils semblèrent échanger un flux de sentiments de joie. Lors du gros plan sur le visage exténué du quadrupède électrique, Vaillant-Rescapé décrypta une expression de confiance qu'il n'avait jamais eu le loisir de voir avant. Malgré sa fatigue, il semblait serein à l'idée de rester au combat, juste parce qu'il s'y savait accompagné. L'Insécateur se demanda si ce lien était naturel, ou forcé par l'homme, même s'il savait, au fond de lui, que poussé à un tel niveau, rien ne pouvait être entièrement artificiel.
Un Noadkoko agité fit son apparition sur le terrain. Il dansait sans cesse d'un pied à l'autre, tournant sur lui-même. Ses têtes faisant face tour à tour à l'adversaire. Elles prenaient toutes des expressions différentes, allant de la haine à la compassion. Cependant, une valeur commune les reliait sans aucun doute : la détermination, la rage de vaincre. Voltali ne fut pas déstabilisé pour autant. Il attendit l'ordre de sa dresseuse pour asséner un coup de crocs électriques au palmier déchaîné. Toutes les paires d'yeux de celui-ci prirent une teinte d'un violet envoûtant. Quelques secondes plus tard, Modak était projeté aux pieds de sa dresseuse. Il tenta de se relever, dans un effort inconsidéré de sa volonté. Mais la douleur de son corps était plus forte : elle eut raison de sa motivation.
Une carapace rouge ornée de nombreux trous fit son apparition. Une patte sortit timidement, puis une autre. Enfin, un cou, qui n'avait de différence avec les membres apparus précédemment que la présence de deux petits à son sommet. Noadkoko se sentit progressivement vidé d'une partie de ses forces, alors que le Caratroc arborait un sourire sournois. Il partageait sa faible force avec celle, bien plus considérable, de son adversaire. Investi de cette nouvelle puissance volée, la tortue se dirigea vers son adversaire avec la plus remarquable des tranquillités. Une patte s'étirait lentement, se posait un peu plus loin. Elle tractait ensuite patiemment tout le corps, qui frottait le sol sablonneux. Le palmier agité fut quelques instants décontenancé par ce calme apparent.
Il se ressaisit pourtant rapidement. Sans hésiter, malgré sa déficience de force, il frappa la carapace qui avançait vers lui. Celle-ci décolla, pour atterrir plus loin et rouler sur le sol. L'habitant du projectile ressortit pour reprendre son approche, comme si de rien n'était. Seulement, le Pokémon plante ressentit soudainement des picotements dans les extrémités de ses feuilles. Il se sentait de plus en plus faible, mais cette fois-ci, ses forces ne le quittaient pas simplement... Ses muscles devenaient douloureux, chaque battement même de son cœur semblait diffuser dans ses veines un liquide enflammé. Une des têtes commença à s'énerver, s'en prenant à l'autre, la soupçonnant responsable du dysfonctionnement, signe que le Pokémon était mal en point : ce genre de dispute n'arrivait normalement jamais !
Alors que Noadkoko entamait un conflit avec lui-même, se désintéressant de manière ostentatoire des quelques faibles Piqûres de son assaillant, le Maître hurla. Aussitôt, les têtes firent silence, d'un seul coup réconciliées, parfaitement en accord entre elles. Ainsi rappelées à l'ordre, elles se focalisèrent toutes sur le Caratroc dont, elles l'avaient enfin compris, provenait l'attaque Toxik. La danse folle reprit, avec quelques faux pas. Les membres ne répondaient pas tout à fait aux sollicitations. La force mentale était quant à elle de retour. Les yeux s'illuminèrent. Les membres jaunes se réfugièrent dans leur abri, en vain. Les ondes psychiques lacéraient littéralement la volonté du petit Pokémon. La douleur lui provoquait des convulsions ; la carapace se mit à trembler sous leur effet.
Masha le savait, elle ne pourrait pas faire remporter la victoire à son Caratroc. Elle prit alors une décision qui lui couta énormément, même si elle savait que son ami le ferait de bon cœur. N'écoutant que son courage, le combattant utilisa sa capacité Astuce Force, juste avant d'asséner la plus puissante Piqûre qu'il aurait pu utiliser. Noadkoko fut surpris de la violence de l'attaque, mais cela ne suffit pas à le mettre au tapis. Son adversaire, devenu soudainement très vulnérable, ne tiendrait pas face à une seule de ses attaques. Aussi arrogant que son dresseur, le Pokémon plante décocha un coup de pied nonchalant dans la carapace, qui vola jusqu'à son humaine. Celle-ci accepta difficilement le traitement que son ami venait de subir, cependant, elle devait se concentrer entièrement sur le combat. Comme la petite tête jaune ne ressortait pas, elle le rappela dans sa balle, les traits tirés.
Un Gallame apparut dans une traînée de lumière blanche. Au souvenir de Nédavra, une grimace étira le visage de Vassili. Ce Pokémon, bien que très attaché à l'honneur, à l'allure très noble en apparence, était très particulier. Sa relation avec sa dresseuse l'était encore plus ; le petit frère en avait été toujours étonné et avait même eu peur de lui, durant sa jeunesse. Quand le combattant aux bras tranchants se retourna vers sa dresseuse pour lui adresser un sourire qui avait tout de diabolique, accompagné d'un regard de prédateur, un frisson parcourut l'échine du plus jeune des deux spectateurs. Dimitri, connaissant le malaise de son frère envers cet être étonnant, ne put s'empêcher de sourire en le voyant, en quelque sorte, replonger dans ses souvenirs d'enfance. Quant à Vaillant-Rescapé, l'expression de ce Gallame l'intriguait : il avait plus que hâte de le voir combattre, se doutant qu'il serait un redoutable adversaire. Même la voix du présentateur était légèrement différente quand il annonça le changement, comme si lui aussi ressentait la particularité de cet être.
La mine concentrée, sans pour autant cesser d'arborer un sourire sadique, le Gallame se mit à exécuter des mouvements qui paraissaient, aux vues des néophytes, désordonnés. Vaillant-Rescapé, lui, ne s'y trompa pas : il s'agissait d'une Danse-Lames. Celle-ci l'intriguait, car elle paraissait en effet dénuée de sens au premier abord. Pourtant, rien qu'à travers l'image, il sentait que la puissance se répandait dans le corps du combattant. A chaque mouvement, les appuis se posaient avec plus d'assurance, les muscles se ne contractaient bientôt plus que quand cela était nécessaire. Mais ce qui attira encore plus l'attention de tous les spectateurs, ce fut le regard du Pokémon. Lui aussi changeait avec le temps, se muant de plus en plus en une détermination à la fois folle et froide. Cette étincelle de démence se retrouvait même chez la dresseuse qui affichait un air qui n'avait plus rien d'humain (ni de Pokémon, d'ailleurs).
Noadkoko, par instinct, fit un pas en arrière. Il s'étonnait de ne pas arriver à cerner ce nouveau personnage, malgré ses capacités psychiques. Il se ressaisit bien vite, mais un fond d'inquiétude demeurait dans les regards de toutes ses têtes. Même le Maître paraissait dérouté, il sentait bien que le combattant qu'il avait en face de lui n'était pas courant, d'autant plus qu'il ne comprenait pas totalement le choix de ce Pokémon en particulier contre le sien. Sans attendre plus longtemps, Gallame s'élança avec grâce. Il exécuta un saut spectaculaire, avant de retomber sur le sol en libérant une vague de froid. Le public fut parcouru d'un frisson et même le présentateur ne commenta pas l'attaque. La caméra s'arrêta un instant sur le visage blême du petit Vassili, dont l'expression ressemblait à celle qu'il affichait actuellement à la rediffusion. Noadkoko s'effondra sous la puissance du Vibrobscur. Nédavra le Gallame se tenait au centre de son cercle sombre, un grand sourire dément étirant son visage, alors que sa dresseuse arborait le même air inquiétant.
La Pokéball suivante du Maître s'ouvrit, mais rien ne sembla en sortir. Masha frissonna, par réflexe, cependant, elle ne sembla pas affectée par le froid qui envahissait peu à peu le terrain. Deux grands yeux rouges apparurent enfin, rieurs. Enfin, un sourire se matérialisa et fut peu à peu entouré d'une matière violette volatile.
..............- Voyons lequel de nos deux Pokémon est le plus impressionnant, nargua le Maître en forçant un sourire quand la caméra fit un gros plan sur son visage.
S'ensuivit un combat absolument effrayant. Les deux Pokémon s'élançaient l'un contre l'autre avec un entrain malsain. Nédavra incarnait l'élégance dans ses coups, pourtant, on sentait en lui comme un côté obscur qui donnait une force démonique à ses bras. Sa dresseuse et lui semblaient possédés par le même démon. Au contraire, l'Ectoplasma gardait une mine enjouée malgré chaque attaque qu'il subissait. Il semblait au comble d'une joie tout à fait opposée à celle que ressentait son adversaire : une joie innocente. Rapidement, le Gallame prit le dessus, s'enfonçant progressivement dans une sorte de cruauté non dissimulée. Il enfonçait ses lames avec un plaisir incroyable dans la forme spectrale, si bien que son comportement réussit même à arracher une expression de d'inquiétude, voire de dégoût au Maître. Quant au commentateur, il était perdu et n'osait que parler par groupes nominaux réduits.
Enfin, Nédavra retint prisonnier son adversaire, coincé entre le sol, une lame et son pied. Un sourire encore plus large se dessina sur sa bouche. Il tourna lentement la tête vers sa dresseuse. Au moment où il fut de face sur la caméra, tous ceux qui virent l'écran géant bloquèrent leur respiration. Il n'était plus question de combat Pokémon, l'expression de ce Gallame était bien celle d'un assassin sanguinaire ! Ses yeux croisèrent ceux de sa dresseuse. L'accord se réalisa immédiatement entre les deux sourires aussi dénaturés l'un que l'autre. A ce moment, ils étaient identiques, semblables à des Trioxhydre en furie. Le bras libre se leva lentement. Nédavra profitait manifestement de cet instant, alors que Masha regardait le coude tranchant avec un intérêt et une impatience non feints.
La caméra se braqua alors sur le petit garçon qui descendait les marches des gradins quatre à quatre, courant vers sa sœur les yeux mouillés. Il hurla, de toute sa voix d'enfant, pour rappeler Masha à la réalité, à son humanité. Il savait que c'était maintenant ou jamais, que s'il ne réussissait pas, les conséquences seraient terribles et la conclusion horrible. Naturellement, seul le K.O. était autorisé en match Pokémon...