Chapitre 1 : Le prix de la liberté
Chapitre 1 : Le prix de la liberté
Depuis que le monde était monde, l'homme avait toujours cherché la liberté. Il avait voulu s'affranchir de ses maîtres, agrandir son monde, se détacher des dieux, voyager de plus en plus loin, de plus en plus vite et ne dépendre de personne. Tel a été et sera le rêve des hommes. Mais les dieux ne pouvaient laisser l'humanité continuer à agir pareillement, délaissant l'harmonie de la nature pour une cage de verre et d'acier où seul les preuves étaient véritables, cherchant à dompter les êtres pour les utiliser au combat. Ainsi commença la longue et douloureuse période de l'Evolution. Les Pokémon se changèrent et prirent une forme presque humaine tout en conservant leurs fabuleux pouvoirs. Arceus descendit des cieux et annonça à ses semblables que le prix pour préserver le monde était de le purger avec le sang des impurs.
« Lavez le sol et nourrissez-le avec le sang impur, purgez notre univers jusqu'à ce que les fleuves deviennent rouges et annihilez ces bêtes pour purifier notre air, et de cette purification viendra la terre promise, pleine de joie et de paix. » Tel furent les mots du divin avant de disparaître dans l'infini. Les flots sombres de la mort se répandirent par delà les montagnes et les océans, les abîmes et les abysses, les armes et les armées. Et pour leur donner une leçon, d'autres proposèrent de les asservir. L'humanité était sur les routes tortueuses des enfers. Les feux de la guerre consumaient le monde tout comme la haine et la rage. Les cités gigantesques furent anéanties et désertées, les routes abandonnées ainsi que les champs et les fermes. D'antiques citadelles de pierre émergèrent du sol, des villages perdus au cœur des forêts en expansion virent le jour, des bourgs entiers se creusèrent dans les montagnes. Tout ce que les hommes avaient pu construire où créer avait été remplacé. Les dieux souhaitaient effacer, oublier, rayer de la carte les hommes et leurs inventions. Mais ils ne disparurent pas complètement, certains avaient battu en retraite dans des vallées lointaines et d'autres étaient devenu nomades : ils voyageaient de village en village et pillaient ce qu'ils trouvaient. C'était un moyen pour eux de continuer à prouver qu'ils existaient et qu'ils étaient libres en roulant sur leurs fabuleuses machines.
Au cœur d'une forêt de conifères, dans une petite clairière, un homme se réveilla brusquement. Il n'avait pas mangé depuis deux jours et son fusil était à moitié déchargé. Il s'appelait Jonathan. Il enfila sa veste de cuir noir et grimpa sur sa moto, une Harley aussi sombre que lui. Il roulait vite comme si quelque chose le poursuivait.
- « Tu dois le faire, une dernière fois. Ces monstres ne te laisseront aucune chance alors saisit la, et montre à ton pauvre père qu'il ne s'est pas sacrifié pour rien.
- Alors juste cette fois. Où faut-il aller ?
- Bien. Waterwalls mais sois discret et te fais pas prendre. Jim a modifié ta bécane et a installé le nouveau générateur. Avec ça tu devrais pouvoir rouler sans t'arrêter pour les prochaines centaines d'années à venir. »
C'était les derniers mots qu'il avait entendu venant de son meilleur ami, Blake. Il avait donc roulé jusqu'à l'ancien barrage. Une cité de pierre blanche se tenait au pied du mur de béton. Cela allait être tragique mais il se disait que leur fin viendrait rapidement. Il dominait la vallée depuis le haut du barrage et plaça ses explosifs sur les systèmes d'ouverture. Il vérifia que tout était bien placé puis repartit. Il se tourna une dernière fois puis regrimpa sur sa moto mais deux gardes Chamallot se dirigèrent vers lui en le voyant. Johnny accéléra brusquement avant de sortir son fusil à canon scié. Il tira sur l'un qui ne put agir, et roula sur l'autre, avant de prendre la fuite. Et à une centaine de mètres plus loin, il actionna l'interrupteur. Dans un vacarme assourdissant, des flots grisâtres se déversèrent violement dans le ravin emportant tout sur son passage. Des cris et des hurlements résonnèrent, puis plus rien. Il avait accompli sa mission mais ne s'en réjouissait point. Il était l'heure de rentrer. Il roulait sans s'arrêter, la tête vide, un sentiment de satisfaction et de bien-être l'envahissait à chaque fois qu'il était sur les routes. Il se sentait tellement libre que le reste du monde ne comptait plus et tous ses problèmes s'évanouissaient emportés par le même vent qui soufflait dans ses cheveux châtains. Sa solitude ne le pesait pas lorsqu'il chevauchait sa machine, il était aussi léger que l'air et fendait l'éther des cieux à plus de cent cinquante kilomètres par heure. Mais à chaque fois, un moment ou à un autre, il savait qu'il devrait s'arrêter et que cette allégresse qui lui faisait tant de bien se dissiperait aussi vite qu'elle était venu. Le camp que lui et ses amis avaient construit pointait à l'horizon, au travers d'un magnifique coucher de soleil. Le retour à la maison était quelque chose d'agréable en soi mais savoir que l'on était pourchassé comme une bête gâchait un peu le plaisir. Blake attendait Johnny à l'entré du camp de fortune qu'ils avaient pu assembler quelques jours auparavant.
« - T'es enfin de retour mon frère. Tu as réussi ? Fantastique, les autres frères et moi allons fêter ton retour comme il se doit. Cette nuit est tienne. La liberté est notre seule raison de vivre et d'agir ne l'oubli jamais, mon frère. »
Un sourire réconfortant vint illuminer le visage de Johnny après cette épreuve difficile. La fête dura jusqu'au coucher de la belle et pâle Lune derrière les montagnes. Les gens dansaient autour d'un feu, buvaient et chantaient. Ils étaient heureux. D'autres s'embrassaient et d'autres faisaient l'amour dans leur petit abri. C'était un moment unique de joie et de paix entre tous les membres du clan. De la musique interrompait le silence de la nuit, pouvant attirer la garde mais tous le monde profitaient comme si c'était la dernière fois qu'ils se voyaient. Johnny était en train de dévorait un bon repas chaud quand Blake le rejoint.
« - Mon frère, demain on lève le camp et on roule tous vers cette fosse que tu viens de créer. On récupère tous ce qu'on veut. D'ici là, profite bien de la nuit.
- Ouais, bonne nuit à toi aussi mon frère. »
A peine les lueurs de l'aube avaient percé les nuages que la place était déserte. Seuls les vrombissements des moteurs se faisaient entendre au travers des bois. L'El Dorado les attendait sur les berges de la rivière qui avaient repris ses droits sur la nature. Des matériaux et des pièces d'or s'étaient échoués depuis la veille. Dans ce nouveau monde, les règles restaient identiques : œil pour œil, dent pour dent. La survie des uns dépendait de la disparition d'autres, ce n'était pas agréable ni plaisant mais le destin ne leur avait pas laissé le choix. Chacun se remplissait les poches en prenant soin de ne rien oublier ne prêtant aucune attention à l'environnement luxuriant autour d'eux.
-« John, mon frère, t'as bien travaillé, on va pouvoir se remettre en route d'ici dix minutes. Je sais que tu ne supportes pas de faire ça mais merci. »
Sortit de nulle part, des gardes musclés à la peau mauve arrivèrent en hurlant comme des bêtes. Blake arma son fusil et appela les autres à le rejoindre. Des coups de feu fusèrent en tous sens, du sang coula.
- Blake !! Fais gaffe ! Derrière toi !
Johnny tira sur le Machopeur, qui s'écroula dans un râle de douleur. Son ami le salua d'un signe de tête avant de repartir combattre. Les bêtes ne cessaient de tomber en émettant un son sourd en touchant le sol. Plusieurs hommes du clan eux aussi perdirent la vie dans ce rude combat. Mais lorsque la dernière créature tomba au sol, d'autres armés de lames à la place de leurs avant-bras débarquèrent sans un bruit, dirigé par un autre, plus grand, enveloppé d'une armure de métal rouge. Les survivants foncèrent vers ces insectes géants, sans une once de peur coulant dans leurs veines. Ils savaient qu'ils ne s'en sortiraient pas mais leur choix était fait. Ensemble ils se mirent à crier :
- « La liberté sera écrite dans le sang ! »
Et ils résistèrent aussi longtemps qu'ils le purent. John et Blake décidèrent de s'occuper du Cisayox. Ils tirèrent à répétition, mais leurs balles rebondissaient sur sa peau. Il se mit à rire, puis avec une accélération incroyable, il se dirigea vers Blake. Johnny s'interposa sans réfléchir.
- « Jonathan ! Non ! Pourquoi as-tu fait cela !? Je jure de te venger mon frère !
- Tous les humains sont pareils, prêt à mourir pour soutenir des idées qui ne sont que des chimères !
Le Cisayox éclata en rire et recommença son attaque en direction de Blake, fonçant lui aussi, déchargeant son arme par la même occasion. L'insecte l'attrapa entre ses pinces et lui annonça :
- "Une fois que je t'aurai enfin tué, je me fabriquerai un trophée avec ta peau et je me ferai la joie d'anéantir toute ta « famille » ainsi que toute vos machines infernales ! Pourquoi ris-tu créature inférieure ?
- Parce que tu vas crever avec moi, pourriture !"
L'homme lâcha la goupille de sa grenade, une explosion brûlante s'en suivit, détruisant tout autour d'elle. Lorsque le calme revint, la clairière n'était plus qu'un champ de guerre dévasté, couverte des corps des deux camps. Un silence de mort régnait désormais en ces lieux. Mais parmi ce silence assourdissant, seul le battement d'un cœur élu par le destin peut-être rendait espoir au monde humain.