Chapitre 8 : Ne te retourne pas
***** Ebenelle, Johto *****
Trois jours se sont écoulés depuis l'assaut des Sky Crawlers sur Ebenelle. Pendant ces quelques jours, Arthur, Rainy et Carch ont pu récupérer des combats. Honorant la mémoire des disparus, la ville a organisé une semaine entière de deuil. Un deuil qui a fait écho à travers le pays entier. Contraints de l'informer de la réalité, le Riolu et ses amis ont expliqué à Garim qui étaient les Pokémon qui avaient attaqué, et celui-ci a gardé le secret, même à travers les nombreuses interviews de journalistes. Pour ses actes de bravoure, le Maire l'a nommé commissaire d'Ebenelle, avant de lui même démissionner, se sentant concerné par les événements. A Rosalia aussi, il y eut beaucoup d'activité ces derniers jours.
***** Rosalia, Johto *****
Le lendemain de la fugue d'Arthur et Rainy, leurs parents avaient trouvé une petite note leur disant tout simplement : " Nous partons sauver le monde, ne vous inquiétez pas, Arthur & Rainy. ".
« Nous ne pouvons pas les laisser faire. Qui sait ce qui pourrait arriver à nos enfants, dit leur père.
Il jeta un coup d'œil à sa compagne qui avait les yeux rouges.
- Ne pas nous inquiéter ? s'exclama-t-il. Et puis quoi encore ! Je vais les retrouver et leur apprendre à faire des coups pareils !
- Peut-être qu'ils avaient une bonne raison de faire ça... dit d'une petite voix la Lucario.
- Une bonne raison ?! s'énerva l'autre. Il n'y a pas de bonne raison pour fuguer ! On doit trouver un moyen de les retrouver.
- Ils n'ont pas encore pu partir bien loin, alors en lançant un avis de recherche nous devrions les rattraper rapidement.
- Tu as raison, je vais aller voir au centre Pokémon, toi vas prévenir les autres du quartier.
Alors ils sortirent de la maison et se séparèrent. La mère Lucario partit sonner aux portes des gens dont ils étaient proches pour leur annoncer la nouvelle, tandis que le père s'en alla vers le centre Pokémon de Rosalia. Sur le chemin, il croisa un Chartor qui était un ami proche de la famille.
- Ah bonjour Ehrad ! Comment vas-tu ?
- Mal, mon ami, dit le Lucario sans s'arrêter.
Stupéfait, le Chartor le suivit.
- Que t'es-t-il arrivé ?
- Ce sont les enfants, répondit-il sèchement. Ils ont fugué.
- Ah et bien ce n'est rien !
Ehrad s'arrêta, choqué par les propos de son ami Pokémon.
- Comment ça ce n'est rien ?! Nos enfants sont perdus dans la nature, exposés au danger et toi tu me dis que ce n'est rien ? Tu ne peux pas comprendre ce que je ressens actuellement !
- Si, je le comprends. Puis tes enfants ne sont pas perdus ; puisque s'il sont partis, ils savent où aller. Ou si ce n'est pas le cas, ils savent pourquoi ils sont partis et ce qu'ils doivent faire. Leurs choix les guideront à travers le pays et les protégerons. Aussi, c'est le meilleur moyen pour eux de devenir des adultes. Je comprends que tu sois triste, mais ce sentiment doit être dépassé par la fierté. La fierté d'avoir des enfants qui font face au monde entier pour leurs convictions et leurs objectifs !
- Sais-tu au moins s'il sont partis pour une bonne raison ?
- Je ne le sais pas, mais je l'imagine. Toi-même dans ta jeunesse tu étais un casse-cou et un aventurier alors il est normal que tes enfants aient hérité de ces traits. Et comme leur mère, ils sont débrouillards. Je ne te l'ai jamais dis, mais je vous admire beaucoup, vous quatre. Toi et Luna êtes deux Lucario formidables et Arthur et Rainy sont sur le point de devenir eux aussi des Pokémon braves et dignes de leur lignée. Aie simplement confiance en eux et tout se passera bien, crois-moi.
- Tu as sûrement raison... dit le Lucario, abasourdi et démuni. Mais que dois-je faire alors à la fin ?!
- Je te l'ai dis, crois en eux ! Ils auront vite fait de t'étonner.
Perdu, le père s'assit sur une marche et se prit la tête entre les pattes.
- Je vais aller prévenir Luna, dit-il en soupirant. Je vais aussi tout de même poster un avis de recherche, au cas-où.
- Allons-y, conclut le Chartor. »
Alors ils revinrent vers la maison des Lucario, et Ehrad expliqua tout à sa compagne. Malgré sa grande tristesse, celle-ci accepta de laisser les Riolu libres.
***** Ebenelle, Johto *****
« Vous voulez déjà partir ? demanda Garim.
- Oui, lui répondit Arthur. Nous avons eu le temps de nous reposer et maintenant, nous devons continuer notre route ; ce n'est que le début.
- D'accord, comme vous voulez. Mais vous savez où aller maintenant ?
- Nous allons partir par la route 45 jusqu'à Ville Griotte, et après on verra...
- Je vois. Dans ce cas, je vous souhaite bon voyage, fit le commissaire. »
Les trois compagnons le remercièrent en cœur et reprirent leur route en direction du sud, quittant la ville en reconstruction. Arthur portait de nombreux bandages sur le corps et avait par moments encore du mal à avancer, alors il devait marcher lentement. Et tandis que le soleil se couchait, ils arrivaient à la moitié de la route 45. Comme c'était un chemin de montagne, la zone regorgeait de petites grottes utiles pour un abri, et les amis s'y rendirent donc.
« Au fait, dit Arthur tandis qu'ils préparaient un feu, tu es allé chercher un abri quand nous étions à Ebenelle, Carch ?
- Non, je n'ai pas eu le temps. Au moment où je suis arrivé sur un haut plateau, j'ai entendu l'écho des explosions et je suis descendu aussi vite que j'ai pu.
- Heureusement que tu étais là !
- Je n'ai pas fait grand chose, tu sais. Puis, dit Carch, un jour tu devras te débrouiller sans moi.
- Qu'est ce que tu veux dire ? fit Arthur, surpris. Nous allons continuer à voyager ensemble !
-Je ne sais pas. Peut-être un mauvais pressentiment simplement, qui me fait dire que nous serons bientôt confrontés à des dangers plus grands.
- Qu'importe ! Tant que nous restons tous ensembles, nous gagnerons !
Le Carmache le regarda sans rien répondre. Ce petit Riolu si joyeux qui s'agitait au-dessus du feu lui paraissait tout d'un coup bien naïf ; peut-être trop. Lui connaissait les dangers de cette mission et par dessus tout savait que la mort se cachait non loin. Quelque soit l'objectif des Sky Crawlers, ceux-ci n'hésiteraient pas à massacrer leurs ennemis.
- Dis moi, commença Carch, que ferais-tu si ta sœur se faisait tuer ?
Arthur releva la tête et le regarda en souriant.
- Ça n'arrivera pas, dit-il, nous sommes tous les deux là pour la protéger !
L'autre fronça les sourcils et sentit l'énervement monter doucement.
- Et si c'était toi qui mourrait ?
- Ça n'arrivera pas non plus, fit-il en souriant. Nous sommes trois alors si un est en danger, les deux autres peuvent veiller dessus ?
Prêt à éclater, le Carmache se releva.
- Parce que tu penses que Rainy pourra te protéger peut-être ?! s'écria-t-il.
Au loin, celle-ci se retourna en entendant son nom mais ne comprit pas de quoi les deux autres Pokémon parlaient.
- Je t'ai mal jugé, Arthur, dit Carch. Je pensais que tu étais plus réaliste et que tu avais conscience de ce qui t'arrivait. Être avec toi aura été une perte de temps.
- De quoi est-ce que tu parles ? demanda le Riolu, soudain paniqué.
- Disparais, Riolu.
Arthur ne comprenait rien de ce qui se passait, et avait peur de perdre son nouveau camarade. Celui-ci s'avança vers le Riolu, prêt à attaquer.
- Arrête ! s'exclama ce dernier. Qu'est ce que tu fais ?!
- Pensant que tu serais peut-être capable de combattre les Sky Crawlers, je t'ai suivi. Tu es un être particulier car l'énergie présente en toi est compatible avec toutes les autres et de ce fait, tu peux utiliser la puissance des gens qui t'entoure, voire même de l'environnement autour de toi. Tu es un réceptacle parfait et tu les intéresse, depuis le jour où tu as détruit la tour Carillon.
- Comment tu sais autant de choses ?
- Tu es si naïf, répondit Carch en riant. D'après toi ?
Arthur blêmit et sentit ses jambes trembler. Il tomba à genoux et se prit la tête entre les pattes.
- C'est impossible... dit-il. Ça ne peut pas...
- Visiblement ça ne vient pas, dit l'autre en soupirant. Alors venons-en aux faits, je suis un Sky Crawler.
- Non... Mes amis... Mes amis ne peuvent pas me trahir !
-Je ne suis pas ton ami. Je suis un Amiral Sky Crawler envoyé pour t'observer et alors que je pensais voir de grandes choses, tu t'es montré faible et naïf, et en ce moment tu te ridiculise. C'était à prévoir, mais je pensais croire au miracle ; personne ne t'a chargé de sauver le monde, ce n'est qu'une illusion.
- Si ! Ho-oh...
- Non, le coupa le Carmache. Ho-oh est l'un des nôtres, comme toutes les autres figures divines de ce monde, d'ailleurs. La vision dont tu as été témoin n'était qu'un appât. Évidemment, il aurait été plus rapide de te dire de te rendre à la Tour Carillon où de te tuer, mais c'était tellement drôle : te voir partir, croyant en une cause que tu n'aurais pas été capable de suivre, malgré ton pouvoir unique. Tu as entraîné ta sœur dans ce piège et par ta faute, elle va mourir. Tu pensais la protéger, n'est-ce-pas ? Je suis navré de te le dire Riolu, mais tu vas la tuer.
Désormais, Arthur pleurait à chaudes larmes et ne maîtrisait plus ses émotions. Tout s'effondrait autour de lui : alors qu'il pensait avoir une bonne raison, il était parti de chez lui et avait emmené Rainy, alors sans lien avec tout ça. Il s'était dirigé dans la gueule du loup sans s'en rendre compte et aujourd'hui, tandis qu'il croyait avoir trouvé un ami, celui-ci se révélait être un ennemi.
- Tu ne réagis pas ? demanda Carch. Très bien, je vais devoir te faire bouger.
Il promena son regard tout autour, avant de l'arrêter sur Rainy, qui ne se souciait de rien. Arthur suivit son regard et sembla affolé, ce qui fit sourire le Carmache. Une aura maléfique noire l'entoura et son corps commença à changer. Il se couvrit d'abord d'un voile sombre puis grandit et enfin, prit la forme d'un Carchacrok. La créature renée se propulsa alors vers Rainy, sous les yeux du Riolu.
- Arrête ! lui cria-t-il.
C'en était trop. Carch l'avait trompé et se jouait de lui depuis le début. Il pouvait bien tourmenter Arthur comme il le voulait, mais il était hors de question qu'il s'en prenne à sa sœur ; sa lame ne la toucherait pas ! Entendant du bruit, Rainy se retourna et ne put qu'apercevoir un Pokémon filer vers elle. Elle vit une lame aiguisée tendue vers elle et comprit qu'il voulait la tuer. La Riolu sentit la lame s'enfoncer à travers son corps et le pourfendre en deux, versant des litres de sang. Mais son frère prit le coup à sa place, et c'est son sang qui fut versé. Ce geste spontané surprit Carch, qui sourit de plus belle.
- Enfin un acte courageux. Stupide mais courageux. Réfléchis, Riolu : pourquoi risquer ta vie pour cette fille ? La tienne vaut mille fois plus !
- Tu la veux ma vie ?! Alors viens la chercher !
Arthur écarta Rainy et recula, dégageant la lame sanglante de son corps.
- Je ne te laisserai pas toucher à ma sœur, tu m'entends !
- Je n'ai que faire de ta sœur, soupira Carch. La protéger de ton corps ne changera rien, alors n'essaie pas. A la limite, utilise là elle.
- Arthur, qu'est ce qui se passe ? fit Rainy.
- Pas le temps de t'expliquer... Écoute-moi, tu dois t'en aller ! Retourne à Ebenelle, vers le nord. Je sais que tu en est capable, mais tu ne dois pas t'arrêter ni m'attendre. Lorsque tu y seras, demande à ce que l'on t'emmène à Rosalia le plus vite possible.
- Mais pourquoi tu ne viens pas avec moi ?
- J'ai à faire ici, dit le Riolu en se tournant vers le Sky Crawler. Je reviendrai vite ! Maintenant vas-t-en et ne te retourne pas !
La jeune Pokémon hocha de la tête et s'en alla en courant vers Ebenelle. Lorsqu'elle fut suffisamment éloignée, Carch reprit la parole.
- Ta route semble s'achever ici Arthur. Une dernière parole ?
- Jure-moi que tu ne lui feras pas de mal, ni à mes parents.
- Comme tu veux ! ria le Carchacrok. Je n'ai que faire d'être inférieurs de leur sorte. D'ailleurs c'est étrange, tu m'as l'air plus assuré. Ou peut-être n'est-ce que du bluff ?
- Tu m'as fait comprendre beaucoup de choses, alors je peux t'en être reconnaissant. Ce monde est fourbe est un monstre peut se cacher derrière chacun.
- Toi aussi, tu deviendras un monstre un jour. Enfin, que dis-je, se reprit Carch, les chances pour que tu t'en tires sont nulles.
- J'ai cru comprendre que tu croyais aux miracles, n'est-ce-pas ? Tu risques d'être surpris !
Carch soupira encore une fois.
- Non, tu parles mais tu n'as jamais goûté à ma puissance, ni à celle d'autres Sky Crawlers. Éliminer des pions faibles ne fait pas de toi un héros.
- Par pions faibles tu parles du Dracaufeu et des autres ? Comment peux-tu les considérer comme des pions ?!
- Ce ne sont que de vulgaires Pokémon possédant notre pouvoir. Des cobayes si tu préfères. Comme ce pouvoir est illimité, nous pouvons l'utiliser comme bon nous semble pour créer une armée titanesque – ce qui est déjà le cas. Même si certains meurent, il en reste des milliers voire des millions. Tu en as tué trois, mais ce n'était qu'une la partie émergée de notre force infinie. J'en ai assez de parler avec toi, il est temps de passer aux choses sérieuses ; fais tes adieux Riolu, il est temps !
- Je ne te laisserai pas me tuer aussi facilement ! »
Les deux Pokémon s'élancèrent l'un vers l'autre mais le combat semblait déjà joué : Carch était un puissant Sky Crawler et Arthur était blessé. Le chemin du Riolu s'achève peut-être ce jour-ci, sur la route 45.