Les voyageurs des mondes de junkolusa

En ce soir de printemps, l'air était lourd et les nuages chargés d'humidité. L'orage menaçait et Alexis ne désirait pas vraiment passer sa nuit sous des trombes d'eau. Il était en train de monter sa tente à proximité de Verchamps, même si le résultat ressemblait plus à une œuvre d'art contemporaine qu'à un abri digne de ce nom pour passer la nuit au sec. Comme à son habitude, il lâcha plusieurs jurons lorsque la mise en place de son bivouac prenait trop de temps.

-Ah m**** ! Je savais que j'aurais du acheter une de ces tentes qu'il suffit de jeter pour qu'elle se déplie. Ce serait plus facile que ce fichu truc ! Je ne serais pas comme un con qui assemble un puzzle de cinq mille pièces !
Il fut interrompu par un craquement et une goutte d'eau. Après une dizaine de minutes, il réussit tant bien que mal à installer son campement.
-Et voilà il pleut ! Ah ben quand même ! J'ai enfin monté cette fichue tente. Allez, inutile de traîner dehors trois heures, je vais me coucher.

Alexis entra dans son abri de fortune et s'installa dans son sac de couchage avant de s'endormir rapidement. Pachirisu était collé à son maître, terrorisé par l'orage. Il émit un petit couinement terrifié lorsqu'un éclair zébra le ciel. Son dresseur se réveilla avec la tête d'un assassin en puissance.
-Qu'est ce qui t'arrive ? Tu as peur de l'orage ?
Pachirisu fit un petit « Oui » avec la tête.
-Je n'avais jamais vu une chose pareille. Un pokémon électrique qui à peur de la foudre. Tu n'as rien à craindre, c'est un phénomène naturel.
Il caressa le petit animal bleu et blanc avec douceur avant de s'enfonçer dans son sac de couchage.
-Il est tard, il faut se reposer car demain nous avons une longue route à faire. Ces marais gluants et puants à traverser vont bien nous prendre une douzaine d'heures. Bonne nuit.

Le lendemain, alors que le soleil pointait difficilement son nez derrière les nuages, le réveil sonna et Alexis se réveilla. Il ne se leva qu'un quart d'heure après parce que Blizzi lui avait envoyé un petit vent glacé. Le pokémon avait certes réussi à réveiller son dresseur, le faisant se mettre sur ses jambes d'un coup, mais l'attaque avait aussi eu une conséquence plus fâcheuse, celle de mettre passablement en rogne Alexis.
Toujours avec sa mauvaise humeur habituelle quand il se mettait en marche, le jeune dresseur ironisa.
-Bon, faut y aller. Dans la fatigue et la mauvaise humeur, c'est génial.

Il traversa les marais à l'ouest de Verchamps sans incident majeur. Il battit deux dresseurs, jura comme un charretier une bonne cinquantaine de fois à cause de cette immonde mélasse brune et visqueuse. En plus de devoir franchir cette vase écœurante, il se fit agresser une bonne vingtaine de fois par des Castorno et leurs enfants.
Chacune de ces rencontres impromptues le mettaient de bonne humeur. Il n'y a rien de plus amusant que de voir ces erreurs de la nature avec leurs têtes d'ahuris. Le meilleur arrive lorsqu'il s'aperçoit que les spécimens sauvages ont le Q.I. d'un Kokiyas avarié puisqu'ils n'ont pas la même expérience du combat qu'un pokémon dressé. Alexis put dont se moquer d'eux et leur lancer de la boue en pleine tête puisqu'ils restaient plantés comme des piquets avec leurs sourires niais, figés et stupides ainsi que leurs dents proéminentes leur donnant un air encore plus attardé, si seulement c'était possible.

En fin d'après midi, il croisa un dresseur blond, nerveux et hyperactif qui passait en sens inverse. Cette boule d'énergie lui fonça dessus et s'avérait être le fils d'un dresseur légendaire surnommé le « Baron ». Alors que le fils de l'illustre dresseur continuait sa course à la vitesse d'un Heledelle en chasse, Alexis s'écarta légèrement et tendit sa jambe. Pachirisu s'étonna de ce geste quand un raisonnement s'établit dans son esprit. Son maître n'oserait pas faire une telle chose ? Pourtant, ce qui devait arriver arriva.
Le blondinet hyper stressé ne ralentit pas, percuta la jambe de notre … héros et se vautra comme une bouse dans la boue.

Pachirisu regarda son maître d'un air accusateur qu'il maîtrisait de mieux en mieux depuis le début du voyage.
-Quoi ? Pourquoi tu fais cette tête ?
-Chiiiiii !
-Oh celui là. Je ne sais pas. Rien qu'à le voir il m'énervait … alors je me suis défoulé. C'est pas grave, ça lui fera une leçon.
Alors qu'il disait cela, il vit sa victime se relever et … épousseter sa veste du terreau noirâtre qui la recouvrait.
Il se tourna vers Alexis avec un sourire sincère et un peu navré.
-Désolé de t'avoir percuté. J'espère que je ne t'ai pas fait mal ?
-Non non, ça va.
-Bon désolé, il faut que j'y aille. Au revoir !
Le dresseur partit avec sa célérité habituelle devant un Alexis plus qu'interloqué.
-Il est bizarre. Il est vraiment flippant mais à l'air tellement … con. C'est dommage que je n'ai pas son numéro, je pourrais organiser un dîner. Ouais, j'aurais pu présenter le roi des boulets.

Le jeune homme avec ses trois badges atteignit Verchamps dans la soirée et se rendit immédiatement au centre pokémon. Il ne s'était pas donné la peine de visiter la ville, puisque les préjugés ont le vie dure. Cette ville était le reflet de ses habitants. Qui pourrait vivre dans des marais ? Il répondit à sa propre question.
-Pas une personne raffinée, sensée, cultivée et intelligente. C'est un nid à ploucs ce patelin, je prie que ce centre pokémon soit digne de la civilisation.

Il décida de prendre une chambre pour la nuit et en profita pour faire un brin de toilette. Après ce moment de détente, Alexis s'endormit rapidement avant d'être réveillé par une voix féminine qui non seulement gloussait mais qui poussa l'inconscience à allumer la lumière. Visiblement énervé, l'occupant de la chambre se mit à hurler.
-P***** t'es qui ? Qu'est ce que tu fiches dans ma piaule ?

La jeune fille, un avorton roux venant d'Azuria pour « affaires personnelles » répondit du tac au tac.
-Je viens de prendre cette chambre à l'accueil. ce serait à moi de te poser la question.
-J'ai reçu cette chambre il y a trois heures ! Que tu te trompes de porte, passe encore, mais me réveiller c'est inacceptable !
-Tu dormais ?
Il lui fit un sourire forcé.
-Oui, enfin j'essayais. C'est dur de trouver le sommeil alors que le chant mélodieux des centaines de pokémon en rut du parc voisin atteint vos oreilles et que la douce odeur exhalée par ces marécages putrides chargés de végétaux en décomposition atteint vos narines.
Il marqua quelques secondes de pause avant de continuer.
-Si nous faisons fi de ces quelques détails, ça va.

La gérante du centre, attirée par leur vacarme arriva. Avec un ton autoritaire, elle s'adressa aux deux sources troublant la quiétude et le sommeil des autres pentionnaires.
-Mais que vous prend-il de faire tant de bruit ?
A l'unisson les deux dirent les mêmes paroles.
-C'est de sa faute ! Il squatte ma chambre !
L'infirmière de garde sourit, elle les inquiétait avec cet air trop gentil pour ne pas cacher quelque tour.
-Il n'y a plus de place ailleurs alors vous allez devoir … partager. Passez une bonne nuit.

Alors qu'elle fermait la porte et qu'elle s'en allait, la rousse se présenta.
-Moi c'est Ondine, quel est ton nom ?
-Alexis. Bon maintenant et si ça ne te dérange pas, j'aimerais dormir car j'ai eu une journée infernale, alors s'il te plait, ne fais pas de bruit. Bonne nuit.
Assez étonnée, Ondine répondit avant de partir dans la salle de bain, prenant le soin de verrouiller la porte. Une fois sortie, elle vit son compagnon de chambre dormir paisiblement, alors Ondine s'allongea dans le lit.

Le lendemain, Alexis ouvrit lentement les yeux à cause des rayons du soleil qui filtraient à travers les persiennes. Il constata que Blizzi et Pachirisu ronflaient encore et que son Ecayon barbotait dans un aquarium, en compagnie d'un Staross et d'un Hypocéan. Il supposa avec raison que ces deux pokémon appartenaient à la rousse d'hier. D'ailleurs ou était elle ?
Il entendit un léger froissement des draps derrière lui ainsi qu'une main qui se posa sur son épaule. Alexis réfléchit à toute vitesse. La rousse était plus âgée que lui, s'était pointée comme une fleur et maintenant elle se trouvait derrière lui après qu'ils aient partagé le même lit.

Alexis hurla avant de se lever d'un bond en caleçon. La furie d'hier était bel et bien dans son lit et avait dormi en sous vêtements avec lui !
-Qu'est ce que tu foutais dans ce lit ?
Ondine, réveillé en sursaut se montra plus désagréable que d'habitude. Si, c'est bien possible.
-Quoi ? Tu ne voulais pas que je dorme à terre ? Elle a dit de partager alors voilà, je partage.
-Mais, j'espère que tu n'as rien, enfin je veux dire que, euh, on n'a pas fait …
Ondine ricana devant le jeune qui bafouillait, totalement déstabilisé.
-Ne crains rien, il y a déjà une personne dans ma vie.
-Ah ! Qui est-ce ?

Elle se renfrogna et le regarda d'un regard noir, chargé de mauvaises intentions. Alexis regretta vraiment d'avoir ouvert son clapet une fois de trop.
-Tu crois que je vais te le dire ? Va voir si il y a des Farfuret à Litorella ! C'est juste un ami qui doit me rembourser mon vélo, car ce petit crétin l'a démoli !
Elle semblait furieuse à l'évocation de ce souvenir. Alexis n'insista pas et essaya de la calmer.
-Bon, je suis désolé. Je n'aurais pas du m'occuper de ce qui ne me regarde pas. Je vais y aller car je dois essayer d'avoir ce badge. Passe une bonne journée.

Ondine se calma. Elle lui fit un sourire, un vrai, chargé de sincérité.
-Ce n'est pas grave. J'espère que tu vas avoir ce badge.
-Merci, tu es une fille sympa et délicate … quand tu veux.
-Et toi tu es un gueulard immature mais je t'aime bien, tu as un bon fond.
Alexis releva le compliment subtil.
-Merci mais dis moi sans indiscrétion, ou vas tu ?
-Unionpolis, tu suis le même chemin ?
-Non, j'en viens et je ne vais pas me retaper ces marais.
-Bon, alors bonne chance. Peut être que nos chemins se croiseront à nouveau.
Alexis prit ses affaires avant de sortir du centre pokémon et de laisser la rousse occuper la salle de bains.

Un peu plus tard, la championne rousse partit en direction des marais quand elle entendit un bourdonnement. Elle pâlit avant de stresser puis de s'avancer en camouflant la terreur qui courrait dans son coeur. Des nuées d'insectes étaient abritées par ces marais. Pendant qu'elle affrontait des créatures féroces, assoiffées de sève, avec leurs corps mous, leurs fines antennes, leurs membres allongés et leurs ailes vrombissantes, Alexis se dirigea vers l'arène.

Après avoir galéré à activer des mécanismes, Alexis réussit à fuir le labyrinthe de tuyaux. En se retournant, il regretta de ne pas avoir pris de maillot de bain car il ne pouvait pas décemment mouiller ses vêtements sans une excellente raison. Dire que si il avait nagé, ce ne serait pas après des heures d'efforts à errer autour de canalisations et de valves qu'il se serait retrouvé face au champion Lovis. L'ancien catcheur surnommé « le Teigneux » se tenait devant lui.
Lovis avait fait une brillante carrière comme en témoignait ses puissants muscles et les nombreux trophées situés sur une estrade mise en évidence. Il avait toujours conservé ce sens de l'honneur le caractérisant, puisqu'il portait toujours son masque qu'il ne retirait que si un dresseur le battait. Ce fait n'arrivait d'ailleurs pas très souvent, la dernière personne à l'avoir battu était une jolie blonde qui avait mal fini.

Le champion de Verchamps faisait partie de ceux qui impressionnent par leur force et leur valeur et qui se montrent protecteurs, un dur avec un cœur d'or. Il s'adressa à celui qui le défiait. Il parlait d'une voix forte, après tout, déstabiliser l'adversaire n'est qu'un moyen de faire pencher la balance en sa faveur.
-Bonjour challenger ! j'espère que tu es en forme, car moi je me donnerai à fond.
Alexis ne montra pas que la rudesse du champion l'avait mis mal à l'aise. Il essaya de ne pas montrer son trouble.
-Quelles sont vos règles, champion ?
-Un combat simple, deux pokémon chacun.
-Je suis prêt !