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Les Chroniques des Univers: [Tome 3] Le Cristal du destin de imhotep43



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Informations

» Auteur : imhotep43 - Voir le profil
» Créé le 08/04/2009 à 15:17
» Dernière mise à jour le 08/04/2009 à 15:17

» Mots-clés :   Science fiction   Sinnoh

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Chapitre 13: La voix des morts
Le PokéDevice, une fois débloqué, n'avait pas mis longtemps pour cracker le système de la balise, et indiqua à Cyrus et Jess leur destination. Sans plus chercher à comprendre ce que la montre lui annonçait, Cyrus ne tiqua même pas lorsqu'il vit que le lieu indiqué était au milieu de nulle part, au bord de la route qui reliait le Mont Couronné à Unionpolis. Il était trop occupé à se demander quel genre de personnes aidait Sorbier pour intégrer dans les PokéDevice une technologie capable de pirater celle que son père produisait. Lui qui avait toujours vu son paternel comme le barreau le plus haut de l'échelle sociale de Sinnoh, il s'apercevait qu'il existait une autre échelle à côté, un véritable système parallèle qui concurrençait sérieusement Versili et associés.

Dans le car qui les menait à UnionPolis, Cyrus se fit cette remarque sans quitter l'image du cadavre de l'homme, mort dans son labo.

"Si jamais Sorbier s'était lancé dans l'industrie, il aurait battu père à plate couture."

Et Jess de penser en réponse "Peut-être que Papounet voulait justement éviter que ça se produise, et qu'il a agi en conséquence..."

"Jamais de la vie mon père n'aurait tué pour ça, répondit Cyrus. L'industrie est un jeu pour lui, pas un... Une seconde, tu as dis quelque chose ? Tu viens de parler ?"

Jess resta interdit. Il n'avait pas ouvert la bouche, il en était sûr. Mais la réponse de Cyrus était la suite logique à sa question mentale. Il n'avait quand même pas...

"Lu dans tes pensées ? continua Cyrus... Non, je n'ai pas... C'est impossible."

Le garçon ressentait une vive excitation, et une peur sans nom en se rendant compte qu'il n'y avait qu'une explication, et loin d'être rationnelle. Il fut envahi d'images bizarres l'espace d'un instant. En temps normal, il aurait seulement supposé que l'esprit de Jess et le sien étaient liés par leur quête commune, mais il était fatigué par tout ce qui lui était tombé dessus en une journée, et son esprit céda.

"Jess, je ne me sens pas..."

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Cyrus se réveilla presque immédiatement. Dans le bus, rien n'avait changé, hormis le visage de Jess, à peine un brin plus paniqué qu'avant.

"Fausse alerte Jess, désolé."

Mais Jess ne semblait pas l'entendre. Un peu comme si...

"Comme si vous aviez échangé vos places ? fit un homme assis derrière Jess. Rassure-toi, tu n'es pas muet... Ton ami par contre, devrait l'être depuis un petit bout de temps.
-Qui... commença Cyrus en se retournant.
-Moi, répondit le vieil homme assis le rang derrière. Désolé de te prendre à parti de manière aussi violente, mais tu tardais à me recontacter. J'ai profité de ta faiblesse mentale pour tenter un nouveau contact.
-Pro... professeur Sorbier ? tenta le jeune homme.
-Gagné, et vu la manière dont tu es en train de courir après Nina, j'en déduis que tu as découvert les autres choses que j'avais laissées sur ton chemin.
-Vous parlez du PokéDevice ? J'ai débloqué la fonction Intégrale grâce au mot dans votre... enfin dans la poche de votre cad..."

Contrairement à tout ce que Cyrus aurait pu attendre de la part d'un homme mort depuis si peu de temps, le professeur se mit à rire aux éclats.

"Cadavre ? Corps ? Enveloppe charnelle ? Tu peux y aller, je suis mort, et j'en ai vu d'autres dans ma vie. Alors hormis cette tâche de sang sur mon visage que je ne peux pas essuyer, le reste, je l'ai laissé derrière moi. A ce sujet, si tu as un mouchoir..."
Jess fouilla dans sa poche, et croisa du regard l'homme qui était assis à sa place... Ou plutôt évanoui à sa place...
-Mais... c'est moi ? Que...
-Ton corps est toujours en vie, rassure-toi. Mais tu ne peux pas être en même temps dans cette dimension et dans la tienne. Et c'est encore plus bizarre quand tu vois ton cadavre sur le sol et que tu t'aperçois que ce que tu contemples, c'est la dimension dont tu viens, et que tu viens de faire un aller simple vers l'au-delà. Merci, rajouta t'il lorsque Jess lui offrit son dernier mouchoir en papier. Maintenant, discutons affaire, si tu veux bien."

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Sorbier se leva dans le bus et s'approcha du rétroviseur du conducteur, dans lequel il regarda l'étendue des dégâts avant d'essuyer le plus gros.

"Ah mon salaud, il ne m'a pas raté.
-Ils... ne vous voient pas ? demanda Cyrus.
-Pas plus que toi, enfin que ton esprit. Tout le monde voit ton corps évanoui sur une banquette, mais personne n'ira chercher plus loin que ça. Aux yeux du monde entier, tu as fait un malaise. Pour d'autres, ça aurait été un coma. Mais ça dépend du lien que tu entretiens avec ton corps.
-Pardon ? fit le garçon interloqué.
-J'oubliais, fit Sorbier en revenant après avoir enlevé le sang séché sur son visage. C'est pour ça que je t'ai fait venir. Pour t'expliquer certaines choses."

Parmi les nombreuses personnes qui avaient toutes les cartes en main, Cyrus ne se serait jamais douté que ce serait un mort qui lui expliquerait tout.

"Comme ce qui est en train de m'arriver ?
-Non, ça je n'ai pas le droit, tu devras trouver ça tout seul. Nous n'avons pas le pouvoir d'interférer avec les vivants, même s'ils viennent faire un tour par chez nous. Seuls ceux qui arrivent sans pouvoir en repartir, c'est à dire les morts, peuvent partager tout ce qu'ils savent.
-Dans ce cas, de quoi va t'on parler ? fit Cyrus.
-Des règles de ce monde... Des règles que tu es en train de transgresser à chaque seconde que tu passes avec moi. Le fait qu'un être vivant arrive ici est rare, et bien souvent, c'est un type dans le coma qui n'en a plus pour longtemps. Mais toi, ton lien au vivant est bien tangible. Il n'y a quasiment aucune chance qu'il se coupe, à moins qu'un être mal intentionné ne le fasse pour toi.
-Ce lien, c'est ce qui fait la différence entre le vivant et le mort ?
-Exactement, ici, on l'appelle le vitae ligamen, le lien de vie. Un jeune garçon comme toi a un lien qu'on ne peut couper qu'avec l'outil approprié, le ciseau du destin."

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"Qu'est ce que cet objet ?
-Oh, c'est bien moins poétique que l'image que je viens de te donner. Ca dépend de la mort, en général, c'est le camion qui va t'écraser, ou la balle qui te traverse le crâne, fit-il en montrant le trou rouge qui ornait toujours sa tête. Pour les personnes plus âgées, le lien s'érode... Un peu comme les montagnes. Jusqu'au jour où il casse de lui-même. C'est une mort naturelle. Grosso modo, c'est ça qui rythme nos... enfin VOS vies, de votre naissance à votre mort. Après il y'a toujours des cas particuliers. Les personnes dans le coma par exemple, ont parfois un lien solide qui les relie toujours à leur corps. Mais leur âme a fait le même trajet que toi. Le ciseau du destin n'est que le nom qu'on pourrait donner à toutes ces manières de mourir dans un conte pour enfants...
-Vous voulez dire que les gens qui voient des tunnels, des lumières blanches et tout le reste, c'est vrai ?
-Evidemment, toutes les interprétations divergent, mais toutes représentent la même chose. Mais je ne t'en dirais pas plus à ce sujet, je ne suis là que depuis deux jours. J'en ai croisé un ou deux, et le plus souvent, c'est le même scénario. Il y'a les pragmatiques qui ont un lien solide, ils ne veulent pas savoir ce qu'il y'a "de notre côté" et ils se réveillent assez vite. Et puis il y'a les curieux. Ils veulent absolument voir ce qu'est la lumière au bout du tunnel, mais leur lien n'est pas indestructible. Plus ils vont loin, et plus il se fragilise jusqu'au "crac" final. Voilà pour le principe qui régit tout. Après, il y'a certaines "exceptions". Mais je ne peux pas t'en dire plus, même si je dois t'avouer que là, je suis estomaqué par ce que je vois.
-Vous parlez de quoi ?
-Ton lien est différent des autres, mais tu t'en doutes, tu es aussi très différent. Il ne s'érode pas.
-Ce qui veut dire que ?
-C'est à toi de le deviner. Il y'a des règles ici, je te l'ai dit. Enfin ce n'est que le problème mineur. Je peux t'accompagner sur le chemin de la vérité, mais je ne peux rien te dire. Il faut que tu le trouves toi-même."

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Cyrus resta assis un long moment avant qu'il ne retrouve l'usage de la parole. Sorbier, presque exaspéré de tant de lenteur, lui passa la main devant les yeux, espérant capter son attention.

"Je ne veux pas te presser, mais les coordonnées qu'indiquent le PDi ne sont plus très loin. Et si tu ne te réveilles pas vite, tu risques de faire un petit détour par l'hôpital."

Cyrus quitta sa transe pour regarder son corps, autour duquel la moitié du bus était désormais regroupée. Il n'entendait pas ce qu'ils disaient, mais il pouvait bien voir leur inquiétude.

"En parlant de ne pas entendre, fit Cyrus, comment ai-je entendu...
-Jess ? Je ne peux pas t'en dire plus à son sujet. Il y'a quelques jours de cela, je t'aurais dit de le fuir comme la peste, mais vu ce qu'il a fait récemment, je te dirais juste de faire attention à toi. En tout cas, tu n'y es pour rien dans cette télépathie.
-Vous le connaissez ?
-Dans une autre vie, autant pour lui que pour moi, on s'est en effet connus, mais je ne peux pas...
-Je sais, professeur, merci pour tout ce que vous avez fait.
-Je te dirais juste que c'est lui le "problème majeur" qui me laisse sur les rotules. Ne t'attends pas à un accueil avec tapis rouge si tu te présentes avec lui devant... rah, je ne peux pas m'aventurer plus loin, se retint Sorbier en se mordant le poignet de frustration. Fais attention à toi, c'est tout ce que je peux te dire. Tu es bien plus exceptionnel que ce que je pensais.
-Merci du compliment.
-Tu me remercieras moins quand tu verras ce que ça implique... Mais ça, c'est pour plus tard. Tu embrasseras Nina de ma part, enfin dès que tu lui auras dit qui tu es vraiment. Heureux de t'avoir revu."

Un dernier signe de tête, et tout disparut dans un flash. A nouveau, Cyrus se sentait emporté...

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Mais pas par un malaise. Il se réveillait, pour de vrai, cette fois-ci. Il prit une grand bouffée d'air pur, non pas par réel besoin, mais plus par souci d'impressionner tout le monde autour de lui.

"Ca va mon garçon, fit l'un des badauds présents autour de lui après cette "résurrection" spontanée.
-Ca... ça va, haleta Cyrus en saccadant sa respiration volontairement. J'ai... je me suis senti mal.
-Vous voulez qu'on appelle un docteur ? qu'on aille à l'hôpital, demanda le chauffeur, regardant Cyrus par le rétroviseur, le même rétroviseur devant lequel Sorbier avait contemplé sa blessure mortelle auparavant.
-Merci, ça ira, refusa poliment le jeune homme. On descend là de toute façon.
-Très bien, comme il vous plaira. Le client est roi après tout..."

Ainsi, les deux compères, toujours talonnés par Evoli, sortirent du bus à quelques dizaines de mètres de l'endroit que le PDi avait repéré. Cyrus retint un éternuement et chercha un mouchoir dans sa poche. Il n'en trouva aucun. Ca voulait dire qu'il n'avait pas rêvé sa rencontre avec Sorbier.

"Rassure-moi, tu n'y as pas cru une seconde, demanda Cyrus, un peu pour voir si son compagnon avait toujours l'instinct aussi aiguisé, et un peu aussi pour savoir s'il allait lui parler en pensée comme tout à l'heure."

Mais Jess ne put satisfaire que la première demande en répondant non de la tête. Il avait semble t'il une foule de questions dans la tête.

"Pose-les-moi, si tu y tiens tant, je sais que tu peux le faire, l'incita Cyrus."

Son ami le regarda d'un air bizarre, comme s'il cherchait un sens à cette phrase.

"Ne me demandes pas de t'expliquer tout ce qui m'arrive, mais juste avant de m'évanouir, j'ai capté une de tes pensées. Je ne suis pas le seul à penser ça, mais ce serait trop compliqué de t'expliquer. Toujours est-il que je sais, de source sûre, que ça ne vient pas de moi, alors s'il s'est passé quelque chose, c'est toi qui l'as provoqué."

Jess resta cependant silencieux, en paroles comme en pensées.

"Très bien, dans ce cas, finissons ce que nous avons commencé. C'est par-là, indiqua Cyrus."

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Le bus les avait déposés à la sortie du tunnel qui passait sous le Mont Couronné. Le point signalé par le PDi devait être soit dans les bois, soit dans une des innombrables grottes du secteur. Cyrus restait sceptique quant à la fiabilité des données de l'appareil, mais il ne voyait pas pourquoi il leur mentirait.

"S'ils sont encore là, il vaut mieux qu'ils ne nous voient pas. Surtout pas toi, expliqua Cyrus. Tu peux demander à Morph d'aller jeter un coup d'oeil ? Ils ne se méfieront pas d'un Pokémon sauvage, même s'ils le croisent de très près.
-Comment tu sais qu'il s'appelle Morph ? l'interpella Jess.
-De la même manière que je sais que tu as pensé à l'instant, répondit Cyrus avec un sourire. Tu vois, quand tu n'y fais pas attention, tu déclenches ta télépathie. La première fois, j'ai eu accès à des images "parasites", à certaines parties de ta mémoire, Morph, ton amnésie, la forêt de Vestigion... Je ne sais pas ce qui s'est passé là bas, mais c'est dans toutes tes pensées alors je n'ai pas pu faire autrement que le voir. Cette fois-ci, je n'ai capté que ta pensée. Tu commences à maîtriser ton don.
-Un... don ? hésita Jess.
-Appelles ça comme tu veux, mais c'est pas l'attribut des gens ordinaires.
-Il a raison, c'est comme ça que tu dois communiquer avec moi, s'immisça Evoli.
-Hey, je t'entends aussi quand tu penses ! s'étonna Cyrus, je parle avec un Pokémon !
-Jess doit servir de relais, expliqua Morph. Sinon tu aurais parlé depuis longtemps avec Silver."

Cette fois-ci, ce fut Cyrus qui perdit son sourire.

"Comment tu connais son nom ? Je n'ai pas pensé à lui pourtant.
-C'est moi, j'ai voulu fouiller un peu plus profond dans ta tête, pour tester...
-Si tu veux bien, Jess, évites de triturer ma tête, j'ai déjà du mal comme ça et j'aime bien la notion d'intimité, fit remarquer Cyrus en songeant à tout ce que son ami pourrait trouver dans sa tête.
-Pardon, s'excusa le télépathe.
-Pas grave, c'est pas tous les jours qu'on se découvre des talents. Bon, on envoie Morph ou non ?"

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Le Pokémon acquiesça lui-même. On convint d'un signal de détresse qui, si Morph venait à l'envoyer, ne voulait dire qu'une seule chose... "Magnez-vous de vous ramener ici !"

Maintenant, Jess comprenait d'où venait son lien si particulier avec Morph, et sa capacité à reconnaître comme une aura qui entourait chaque personne, le renseignant sur ses intentions, ou son état d'esprit. Ca n'expliquait pas sa connaissance pointue de nombreux domaines que le commun des mortels ignorait, mais ça commençait à l'ouvrir un peu plus à lui-même. Avec Cyrus, peut-être qu'il découvrirait bien plus qu'avec le professeur ou sa filleule après laquelle il courait depuis maintenant presque une bonne demi-journée.

"Je ne sais pas d'où je tiens certaines informations qui courent dans ma tête, mais apparemment tu en sais pas mal de ton côté non plus. Tu peux me dire d'où ça te vient ?
-Je ne peux pas, désolé. Enfin, je ne veux pas, et je défie ton don d'arriver à trouver toi-même.
-Tu sais que je peux fouiller, pourquoi tu penses que tu arriveras à m'arrêter ?
-Parce que mes souvenirs ne sont pas de ce côté du vitae ligamen.
-Pardon ?
-Tu comprendras quand je voudrais t'expliquer. C'est à dire quand moi-même je comprendrais.
-On forme un sacré duo, tu ne trouves pas ?
-On n'en sait pas plus l'un que l'autre apparemment. Tu sais où en est Morph ?
-Mieux que ça, je vois ce qu'il voit. Il en est à sa cinquième grotte dans le secteur. La roche est un vrai gruyère ici. Depuis que tu m'as fait voir l'évidence, ça se développe de manière exponentielle. Je sens que c'est le premier pas vers ma mémoire. Je crois que j'aurais une sacré dette envers toi.
-J'en suis ravi pour toi. Contente-toi de m'aider à sauver Nina et on sera quitte.
-Elle est très belle, tu as bien de la chance.
-Ce n'est qu'une amie, et je doute que tu aies pu la voir vu la lumière qu'il y'avait à trois heures du matin à Féli-Cité.
-Il y'a nettement plus de lumière dans cette grotte avec tous les projecteurs qu'ils ont mis. Et je peux te dire qu'elle est très belle, même avec ce bâillon sur la bouche."

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Cyrus tiqua.

"Tu pouvais pas le dire plus tôt que tu l'avais repérée ? Dis à Morph de s'approcher d'elle s'il peut. Elle comprendra qu'il se passe quelque chose, même si elle risque d'être surprise en nous voyant.
-A vos ordres patron. Mais je m'occupe des ravisseurs. Sans vouloir te vexer...
-A tes ordres chef, répondit Cyrus sur le même ton. Je crois que tu as une revanche à prendre, et j'aime pas trop le corps à corps. En cas de pépins, j'aurai l'effet de surprise, alors je reste à l'entrée.
-Ca me plaît.
-Fais attention aux balles perdues, j'aimerais bien récupérer Nina en un morceau, et vivante de préférence.
-Tu vas pas m'apprendre mon boulot non plus ?
-Oh, ça va..."

Cyrus et Jess se dirigèrent vers la grotte qu'Evoli avait désignée. De l'extérieur, on entendait au moins trois personnes.

"Quatre, expliqua Jess en envoyant à Cyrus les souvenirs du sauvetage raté de ce matin. J'y vais."

Cyrus se cacha comme il put derrière un buisson non loin de l'entrée. De tous les côtés, il était invisible. Il ne restait plus qu'à espérer que Jess se débrouillerait de lui-même.
De son côté, le télépathe avait quelques comptes à régler. Entrant dans la grotte, il reçut un accueil désespérément lent. Le temps que les quatre ravisseurs comprennent ce qui s'était passé, l'un d'eux était déjà étendu à terre.

"Ne me dites pas que c'est encore lui, comprit l'un des trois ravisseurs encore debout, dans un sentiment à mi-chemin entre peur et énervement."

"Et si !" lança mentalement Jess sans que personne ne l'entende cette fois-ci.

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Une première volée de dards électrifiés alla se ficher dans un mur. Jess se retourna pour voir le tireur, qui jeta son arme paralysante et décida de passer à un calibre plus gros. Il n'eut cependant pas le temps de dégainer son pistolet que le garçon lui avait déjà saisi et tordu le bras.

"Mais il sort d'où ce démon ? fit l'un des deux encore en état de combattre. Tu feras moins le malin face à ça."

Il avait eu le temps de dégainer son pistolet et était bien trop loin de Jess pour que ce dernier ne puisse le toucher. Il vida son chargeur sur le garçon, qui courut se protéger derrière le seul bouclier qu'il avait, à savoir l'homme dont il tenait le bras dans sa main. Nina hurla derrière son bâillon lorsqu'elle vit le sang gicler de la poitrine de l'homme. Pour son premier meurtre, elle n'était pas dans les meilleures conditions.

"Désolé, ma jolie, pensa Jess, je te présente toutes mes excuses pour la gêne occasionnée, mais je pense à ma vie."

A la poche de son bouclier humain, Jess dégaina le pistolet et visa le tireur qui le tenait en joue. Un instant, il songea à viser la tête, et crut se rappeler que dans le passé, c'est ce qu'il aurait fait, mais il n'était pas (plus ?) comme ça. Il ajusta son tir vers la main du malfrat et l'arme vola. Désarmé, sa paume le brûlant, le kidnappeur se roula à terre de douleur. Jess fit ses comptes, il en manquait un. Il ne se ferait pas avoir cette fois.

"Tu es doué en calcul, mais tu ne sais toujours pas compter jusqu'à quatre, fit la voix du dernier malfaiteur.
-Et toi, tu ne vas pas plus loin que deux, fit une voix familière de Jess.
-Fyruff, exulta Nina derrière son bâillon !"

Le dernier survivant de cette hécatombe se retourna pour voir qui était la menace. En réalité Cyrus n'était rien. Mais Jess profita de sa distraction pour lancer un coup de pied sauté qui cueillit la main, et fit lâcher l'arme à l'homme. Continuant dans sa lancée, son autre pied décolla et atterrit pour sa part dans la figure de l'homme qui y laissa une ou deux dents. Ses techniques de combat étaient proprement impressionnantes. Jess avait enfin fini le travail qu'il avait commencé plusieurs heures plus tôt.

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"Ca c'est pour ce matin !" lâcha Jess, presque comme un exutoire alors que le dernier kidnappeur s'effondrait, inconscient.

Il fut soudain envahi d'une envie de vengeance incontrôlable et commença à frapper violemment l'homme à terre, avant que Cyrus ne l'arrête, tant bien que mal d'une injonction mentale après avoir tenté sans succès de l'arracher à sa victime.

"Jess ! Arrête, c'est bon, il ne fera plus rien dans cet état.
-Cet homme m'a fait vivre un enfer depuis ce matin, tu permets ?
-Jess ! répéta une autre voix."

L'intéressé arrêta ses poings vengeurs le temps de voir de qui venait l'ordre. Morph se tenait aux pieds d'une Nina effrayée et tremblante.

"Tu lui fais peur. Arrête, ca va mal finir."

Jess hésita un moment, regardant le visage plein de sang de l'homme défiguré, et renonça finalement. Lorsqu'il se releva, on eut cru voir la mort elle-même, avec son masque de sadisme.
Cyrus s'empressa de détacher Nina, qui ne pouvait plus détacher son regard de l'homme mort et de son compagnon, certainement dans le coma après tout ce qu'il avait pris par la figure.

"Nina, Nina ? Regarde-moi, fit Cyrus sans réponse.
-Il l'a... tué ? demanda la fille
-Légitime défense, répondit Jess sans que Nina ne le sache.
-Il n'a fait que se protéger, il n'a pas appuyé sur la détente. On est là pour toi. Pour te sortir de là. Tu le reconnais ? C'est lui qui t'a aidé ce matin."

Nina mit un moment avant de reconnaître le clochard qui avait tenté de l'aider tôt dans la matinée. Elle voulut esquisser un "merci" mais elle ne pouvait ôter l'image du mort qui hantait son esprit.

"C'est... fini, fit Cyrus exténué."

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Dans la grotte, l'ambiance retombait tout à coup. Sur les quatre hommes présents, un était mort, deux encore inconscients pour quelques heures et le dernier se tordait de douleur dans son coin. Jess s'occupa de le faire taire en lui offrant gracieusement le bâillon et les liens qu'avait du porter Nina pendant un long moment.

"On est tranquille pour le moment, expliqua Jess.
-Très bien, répondit Cyrus, on essaie d'en savoir plus sur eux ou on file ?
-Tous les projecteurs ont pris au moins une balle perdue, et l'ordi aussi quand ce fou a vidé son chargeur. On ne pourra rien en tirer. Il vaut mieux partir, en effet.
-Ok, on s'en va.
-Il... ne parle pas ? demanda Nina, il est muet ?
-En quelque sorte, expliqua Cyrus. Je t'expliquerai tout quand on sera à l'abri.
-Et tu le comprends ?
-Il est très facile à déchiffrer quand on connaît ses mimiques, mentit le jeune homme. On y va maintenant.
-Désolé, mais c'est hors de question, fit une voix inconnue."

Les trois adolescents se retournèrent vers l'entrée de la grotte. Deux hommes les tenaient en joue et le troisième semblait être déterminé à avoir ce qu'il voulait.

"Rendez-nous la fille et ne vous mêlez pas de ça.
-N'espérez même pas qu'on vous obéisse, et d'abord qui êtes vous ?
-Si je te le disais, mon garçon, je serais obligé de te tuer, et j'aimerai bien ne pas verser plus de sang qu'il n'y en a déjà dans cette grotte. Amenez-moi la fille !"

Jess était sur le point de se jeter sur les hommes armés, mais Cyrus le retint, lui conseillant mentalement d'éviter. Il s'en était fallu de quelques cheveux pour qu'il réussissent.

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"Il s'en est fallu de quelques cheveux pour que vous réussissiez, entendit Cyrus."

Mais cette boutade n'était pas faite pour les narguer... Les adolescents relevèrent la tête, pour voir dans l'embrasure de la grotte deux silhouettes supplémentaires, qui tenaient leurs adversaires en joue avec un pistolet.

"Les armes, fit l'un des deux en tapant du pied. A terre, je vous prie. Pas de gestes brusques, sinon, vous connaissez la chanson."

Les deux gorilles s'exécutèrent sur l'ordre de celui du milieu, qui semblait être leur supérieur.

Ce dernier se retourna vers les nouveaux venus, les mains derrière la tête et demanda:
"A qui ai-je l'honneur ?
-A quelqu'un qui veut bien t'épargner pour le moment, alors fais pas le malin et avance. Ca va les gosses ?"

Nina acquiesça d'un hochement de tête, Cyrus fit de même et Jess resta dans l'ombre, trop occupé à ne pas rater la moindre occasion de sauter sur leurs agresseurs s'ils tentaient quoi que ce soit.

"Dites à votre patron qu'il a fait une erreur en s'attaquant aux Sorbier. Maintenant disparaissez.
-Mon "patron", comme vous dites, ne se laissera certainement pas intimider par les premiers chasseurs de primes venus.
-T'as raison, et vue ta sale gueule, le monde se portera nettement mieux sans toi."

Sans plus d'explications que cette phrase assassine, celui des deux qui portait le pistolet tira une balle dans la tête du chef et répéta aux deux autres.

"Vous direz donc à son patron qu'il a fait une erreur en s'attaquant aux Sorbier. Maintenant, disparaissez, à moins que vous ne vouliez subir le même sort. Et vos joujoux restent à terre."

Sans demander leur reste, ceux qui n'étaient certainement que des mercenaires à la solde d'un commanditaire dont ils ne connaissaient peut-être qu'un numéro de téléphone s'enfuirent, laissant bien volontiers leurs armes à terre pour peu qu'on leur laisse la vie.

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L'homme rengaina son arme et son compagnon constata seulement:
"Tu vois que tu as bien fait de venir. Même si apparemment on a déjà fait le ménage avant que je passe.
-Oui, et pas forcément de manière très propre, constata le premier. Ca va Cyrus ? Nina ?
-Comment connaissez-vous nos noms ?
-On s'est déjà rencontrés, fit l'homme en s'avançant vers eux. Vous me remettez ? "

A vrai dire, il était vrai que cette voix n'était pas inconnue de Cyrus. On aurait dit...

"Vous êtes le faux inspecteur... se souvint Nina, au bord des larmes, en voyant le visage, que voulez-vous encore ?
-Du calme ma jolie, effectivement, je ne suis pas l'inspecteur Dovi, mais c'est ma couverture, on était venu te donner un coup de main, mais ton copain avait déjà fait une bonne partie du boulot.
-J'ai rien fait, c'est Jess qui s'est débrouillé tout le long, indiqua Cyrus.
-Et bien, Jess, permets-moi de te dire que tu es..."

L'inspecteur s'arrêta. Son compagnon resta lui aussi interdit.

"Tu... tu es sensé être mort... et tu aurais mieux fait de l'être encore."

Son ami dégaina un pistolet bizarre qu'il pointa sur Jess. Le temps que Cyrus comprenne, il était déjà trop tard.

"Non, ne le..."

Un "pschitt" retentit, alors que Jess s'écroulait sans rien comprendre.

"Qu'est ce qu'il foutait là ! fit Yann comme s'il avait vu un mort.
-Qu'est ce que vous avez fait ! Il voulait nous aider ! hurla Nina.
-Vous l'avez... tué ? demanda Cyrus, effaré.
-Non, c'est un anesthésique spécial, expliqua Yann, encore sous le choc. Et le fait que ça ait marché sur lui prouve que c'est bien celui auquel on pense.
-Mais je l'ai vu mourir tout comme toi, fit l'homme qui accompagnait Yann. Je l'ai senti mourir dans ma tête.
-Je sais. Et l'Ombre risque de ne pas durer aussi longtemps sur lui, vu la facilité avec laquelle il la maniait dans mon souvenir. Appelle la présidence, on a un code Noir. Noir foncé même. On rentre d'urgence avec lui et Fleur Sauvage."