Duel au sommet de olyn

Ce bonus-là concerne la parade nuptiale entre Maraude et Grignotte alors que toute l'équipe se relaxe à la Source Braise (chapitre 22). Posté avec un peu de retard car j'étais malade, désolée !

Immobile au milieu d'un océan de mouvements, le Sablaireau méditait.

Les bruits environnants s'étaient estompés au fur et à mesure qu'il s'enfonçait dans son état de transe, et même les grognements de la Colossinge avaient fini par ne plus parvenir à ses oreilles. Un exploit s'il en est. La tranquillité qui l'enveloppait tel un cocon était plus que bienvenue après cette matinée passée à combattre pour sa dresseuse.

Il n'aimait pas vraiment ça, toute cette violence physique, et il ne voyait aucun intérêt à utiliser la force. L'esprit lui était largement supérieur, et les seuls duels qu'il appréciaient étaient ceux où il devait réfléchir pour déjouer les pièges de l'adversaire. Ceux qu'il avait affrontés sur les chemins caillouteux avaient été des Pokémon de type combat, habitués à foncer sur l'ennemi sans se poser de questions. Tout cela était indigne de lui et de ses capacités.

Il songea distraitement à l'Alakazam, qui lui faisait un formidable adversaire, et se demanda s'il aurait l'occasion de l'affronter à nouveau. Il espérait que oui. Puis il fit le calme dans son esprit pour atteindre la sérénité.

Il y était presque parvenu, lorsque tout à coup une giclée d'eau le frappa en plein visage.

Mais... qui avait osé faire ça ? Tout le monde savait qu'il ne goûtait guère les plaisanteries de ce genre, et si les autres Pokémon le surpassaient tous en puissance brute, ils savaient pourtant que lui, le petit Sablaireau au tempérament calme, pouvait devenir particulièrement féroce lorsqu'il s'agissait de défendre sa dignité. Ils ne se seraient donc jamais risqués à le provoquer de façon aussi grossière. Il n'y avait donc qu'une solution à cette énigme des plus simples.

- Quelle réaction espères-tu donc obtenir avec une telle action ? interrogea le Sablaireau en ouvrant les yeux pour dévisager la coupable.

La Goupix lui renvoya un regard de défi.

- Je voulais vérifier que tu connaissais encore le sens du mot "s'amuser".

Grignotte fronça le nez.

- S'amuser, c'est résoudre un casse-tête, discuter entre amis ou bien encore tenter de comprendre pourquoi notre dresseuse murmure le nom de son rival humain lorsqu'elle dort. Ce n'est pas se jeter de l'eau à la figure, et ce n'est certainement pas choisir délibérément de déranger quelqu'un qui était visiblement occupé à tout autre chose.

Pour toute réponse, la Goupix plongea la patte dans le bassin le plus proche et l'aspergea à nouveau. Puis elle claqua des mâchoires malicieusement et s'enfuit en courant. L'envie de la poursuivre fleurit telle une Rafflesia dans la poitrine de Grignotte. C'était un vieil instinct, celui de la chasse. Même chez une espèce comme les Sablaireau qui se situait plutôt du côté des proies sur l'échelle de la sélection naturelle, il imposait sa loi. Mais c'était sans compter sur le puissant intellect de Grignotte ; il s'était entraîné à résister à de telles pulsions primaires indignes de lui.

Il demeura donc de marbre. La Goupix fit demi-tour et revint vers lui d'une démarche sinueuse pour lui fourrer sa queue sous le nez en passant. Les longs poils roux lui chatouillèrent les narines.

- Un autre de tes jeux ? s'enquit-il alors que la Goupix lui adressait un regard rieur.

- En quelque sorte. Allez, essaie au moins, l'encouragea-t-elle. Comment tu peux savoir que t'aimes pas ça si t'as jamais testé ?

Force était d'admettre qu'on ne pouvait pas réfuter cette logique-là. Le Sablaireau s'avança, se pencha pour touiller l'eau du bout de ses griffes et en projeta quelques gouttelettes sur la Goupix. Elles arrosèrent son museau en une fine pluie.

- C'était nul, commenta-t-elle. Il faut que tu y mettes du cœur. Comme ça !

Elle entra dans les quelques centimètres d'eau du bord du bassin, tourna le dos au Sablaireau et effectua une ruade qui éjecta sur lui l'équivalent d'un grand verre d'eau. Il grogna, mi-contrarié mi-intrigué. Cette fois, lorsque Maraude s'éloigna en trottant, il la suivit. Ils se pourchassèrent un temps durant, s'aspergeant tour à tour. L'eau picotait les écailles de Grignotte et il supposait que l'élément liquide devait avoir le même effet sur un Pokémon de type feu. Ce jeu pouvait effectivement se révéler distrayant, constata-t-il. Ses capacités stratégiques étaient mises à rude épreuve : il lui fallait tenir compte des dalles glissantes, jauger la force de ses virages, trouver un équilibre entre vitesse et sécurité...

Il avait le regard fixé sur l'arrière-train de Maraude alors qu'il la poursuivait, quand il percuta soudain une masse de poils mouillés. Ah. Il avait oublié de prendre en compte une variable dans son équation : les autres Pokémon. Terrible erreur.

- Tu peux regarder où tu vas ? lui lança la Colossinge avec un grondement qui suintait le meurtre.

- Je m'excuse, répondit Grignotte posément. La Goupix et moi sommes engagés dans un jeu et j'ai cessé de prêter attention à mon environnement direct durant quelques secondes. Ça ne se reproduira plus.

La Colossinge renifla, l'examinant d'un drôle d'air.

- Je vois franchement pas ce qu'elle te trouve. Gaffe aux brûlures ! ajouta-t-elle avant de sauter dans le bassin en provoquant plein d'éclaboussures.

Ce qu'elle lui trouvait ? Qu'est-ce que la Colossinge avait bien voulu dire par là ?...

Oh.

Oh.

Hum. Bon. Il pouvait gérer ça. Oui, il en était entièrement capable, indubitablement.

La Goupix revenait vers lui, prédatrice jusqu'au bout des griffes. Il affronta son regard sauvage avec la satisfaction d'avoir enfin compris. Et dire que c'était grâce à cette Colossinge bornée... Elle n'en finirait jamais de se moquer de lui si elle l'apprenait. Elle ne le saura jamais, décida-t-il. Puis il se secoua et s'élança sur la Goupix qui s'éloigna gracieusement en sautillant.

Le jeu reprenait...