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Shiney de Alabama



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» Auteur : Alabama - Voir le profil
» Créé le 07/09/2012 à 18:26
» Dernière mise à jour le 07/09/2012 à 18:26

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V
Flynn se réveilla à 7h35, avec le soleil. Sa journée commençait à 11h, il resta au lit pour n'en sortir qu'à 8h.

Il prit une douche rapide, et alla dans la cuisine. Anna ne s'était pas levée : il découvrit, froides sur la table, les parts de pizza qu'il lui avait laissées la veille, et les jeta. Il se prépara un chocolat chaud, et c'était quand il versait la boisson fumante dans sa tasse qu'il entendit Anna entrer.

-Bonjour Flynn ! lança-t-elle, guillerette.

Elle ne voulait pas accabler son client dès le petit matin, et tenter d'instaurer entre eux des relations saines et mesurées.

Flynn ne voulait pas différer sa stratégie, élaborée rapidement avant de s'endormir : il commença donc dès maintenant à ignorer la jeune femme. Il ne répondit pas à son salut et fit comme s'il était le seul dans la pièce. Il s'assit devant sa tasse, devant la jeune femme, et prit soin de ne pas la regarder.

-Bonjour Flynn… répéta-t-elle, n'osant croire ce qu'elle voyait.

Cette attitude n'eut pour effet que de redoubler sa haine envers Flynn. Elle comprit très vite ce que faisait le jeune homme et cela l'irrita à un point fou. Elle sortit de la cuisine en fermant la porte.

Flynn le prit comme une victoire et s'autorisa un sourire de satisfaction triomphale.

Si Anna avait fermé la porte, c'était pour une bonne raison. Elle ne se dirigea pas vers sa chambre, mais investit celle de Flynn…

Elle revint peu après, n'accorda aucune attention à Flynn, se fit du thé avec la bouilloire de la cuisine, grilla des tartines et prit son petit déjeuner en ignorant Flynn encore mieux que celui ne le faisait ; elle s'y prit tellement bien qu'il lui jeta quelques regards furtifs, déçu d'un tel manque de réactivité. Il ne savait si son plan avait déjà payé, et était juste interloqué par la froideur de la jeune femme. Il ne savait pas qu'elle l'exécrait et se moquait de ce qu'elle pensait.

Alors qu'il s'apprêtait à quitter la cuisine après avoir rangé son petit déjeuner, Anna prit la peine de lui dire :

-Tu sais, c'est marqué dans mon contrat que j'ai le droit d'utiliser un des véhicules de ton père pour t'emmener où tu le demandes, je fais une sorte de taxi… Je veux bien t'emmener à Céladopole et t'en ramener, si tu acceptes de…

Flynn poursuivit son chemin pour aller dans sa chambre.

Ce fut au tour d'Anna de sourire : il s'était arrêté quelques secondes pour l'écouter.

Flynn resta cloîtré dans sa chambre jusqu'à 10h, l'heure de passage du car. Anna était peu tranquille, car elle craignait qu'il ne découvrît la ruse qu'elle avait ourdie pour le forcer à collaborer. Lorsque, par la fenêtre de sa chambre, elle le vit traverser la cour pour atteindre l'arrêt de car, elle eut un soupir de soulagement : il ne pouvait rien n'y faire. Elle sourit, se prépara pour rendre une visite à Antoine Vélasquez : elle était persuadée que ce soir, Flynn consentirait à capturer son premier shiney.

Aujourd'hui, Flynn avait un match important qui déterminerait sa position dans le classement des étudiants en Combat et stratégie, et ses chances de parvenir à la première place avant la fin du semestre. Il avait travaillé sur la stratégie à adopter depuis la semaine dernière, s'était renseigné sur son adversaire, avait regardé chacun de ses matches, écrit une petite fiche sur chacun de ses Pokémons, et longuement tergiversé avant de choisir les techniques qu'il devrait utiliser.

Pour ne pas fatiguer ses Pokémons ou les stresser autant qu'il ne l'était, il les avait soigneusement gardés dans leurs pokéballs. Le match aurait lieu avant les cours, il se battait contre un étudiant qui habitait à Carmin-sur-Mer : Herbert, qui occupait le haut du classement depuis le début, mais contre lequel il estimait ses chances de succès réelles. Flynn était sûr de lui, car il avait gagné son dernier match contre Michel, un adversaire sacrément coriace. Deux semaines d'entraînement de haut niveau, et ses Pokémons étaient déjà récompensés de leurs efforts : une plus grande force, et surtout une maîtrise impressionnante de leurs attaques. C'était la spécialité de leur chargé de TD, qui mettait l'accent sur les attaques : il était un doctorant qui préparait sa thèse sur l'apprentissage d'attaques, en plus de relever quelques défis, comme des arènes de temps en temps. Michel l'appréciait peu, mais il avait totalement effacé la première impression négative qu'il avait faite sur Flynn.

Le jeune homme envoya un message à Eliott : « Merci pour le conseil, je crois que ça marche déjà. ».

Le car s'arrêta place du Manoir. Flynn fit le chemin jusqu'à l'arène, la peur au ventre. Il commençait à penser que l'esprit de compétition voulu par l'université était malsaine.

Michel l'accueillit devant l'arène, en l'abreuvant de conseils tactiques et de remarques peu rassurantes :

-Tu stresses, tu stresses non ? Normal, c'est une bête de combat, Herbert, mais je crois que personne ne l'aime beaucoup…

Michel avait mis peu de temps à devenir ce qu'il était déjà au lycée, l'un des élèves les plus populaires de la promotion. Ce qui n'empêchait pas Karen de toujours résister à ses avances.

Ils étaient tous les deux sur les bancs du petit parc fleuri devant l'arène.

-Je t'ai battu, Mitch, je pourrais battre n'importe qui… lui rappela Flynn, acerbe.

En temps normal, c'eût été une blague amicale, mais Flynn était tellement obnubilé par ce match qu'il en oubliait d'y mettre un ton désinvolte. Michel siffla.

-Du calme, mec, c'est qu'un match !
-Excuse-moi. Je suis un peu tendu…
-T'inquiète, on t'encouragera… T'as remarqué que plus un étudiant est classé, plus son challenger est supporté ? Tout le monde ici a l'esprit de compèt' surdéveloppé, les gens détestent ceux qui sont plus forts qu'eux. Personne ne reste jamais premier, c'est socialement difficile.
-Karen va sûrement bientôt être première, j'te signale…
-C'est différent ! rétorqua Michel. D'ailleurs…

Et sur ce simple mot, il s'éclipsa, convaincu que Karen désirait sa compagnie. Flynn se remémora sa stratégie, et entra dans le bâtiment.

-Eh, Flynn ! entendit-il.

C'était Karen. Michel ne l'avait pas trouvée, ou elle l'avait envoyée ailleurs, en tout cas il n'était pas avec elle, ce qui était assez rare pour être précisé.

Karen était incroyablement belle. Flynn ne put s'empêcher de le penser quand elle s'avança vers lui, peut-être en la détaillant trop, ce dont elle ne sembla pas s'offusquer.

-Je voulais te dire bonne chance, lui dit-elle en lui prenant les mains, et en apposant ses lèvres sensuelles sur sa joue.

Troublé par cette démonstration d'affection soudaine et inexpliquée, Flynn bredouilla un « merci » timide. Karen s'éloigna dans son plus beau sourire.

Mais Flynn ne devait se concentrer que sur une chose : le match. Il prit le chemin du terrain.

On l'attendait déjà. La plupart des étudiants présents aujourd'hui, ainsi que quelques chargés de TD, avaient pris place dans les petites tribunes, en haut du terrain ovale et blanc immaculé. Herbert lui faisait déjà face, entre deux piliers ioniques, et entre les deux adversaires, les deux chargés de TD qui arbitraient le match discutaient.

-Flynn ! crièrent quelques étudiants, sûrement soudoyés par Michel.

Un des deux chargés de TD s'avança vers Flynn.

-Tout est bon ?
-On peut commencer, confirma Flynn.

Le chargé de TD repartit au milieu du terrain, alla à côté de son collègue et cria :

-Début du match !
-FLYNN ! hurlèrent les étudiants.

Il avait reconnu la voix de Michel parmi elles, et peut-être celle de Karen ?

-Oxy ! appela Herbert.

Un Magnézone imposant entra au milieu du terrain.

Flynn hocha la tête. Il savait quel Pokémon il utiliserait dans ce cas-là, c'était…

-Woland !

Un petit Pachirisu fit son apparition devant lui, étonné d'être ici.

Quelques rires s'élevèrent chez les étudiants, certains croyaient à une blague, bien qu'ils sussent qu'on ne pouvait pas juger par les apparences. Cependant la plupart des étudiants possédaient des Pokémons assez virils, et voir un Pachirisu combattre ici était plus que rare. Même certains chargés de TD, les plus décomplexés, pouffèrent un peu ; cependant la plupart d'entre eux était intriguée.

Flynn était médusé et pensait à une hallucination, alors qu'il voyait ce Pachirisu qui lui était totalement inconnu renifler le terrain et regarder autour de lui, dans l'espoir d'y voir un compagnon ou une baie.

Celui qui prit la chose la plus mal était Herbert, car lui ne s'attendait pas à voir un Arcanin sortir de la pokéball, mais il se sentait offensé que son adversaire lui opposât une telle résistance face à au Pokémon qui lui avait assuré une si bonne place dans le classement.

-Miroi-Tir !

L'attaque acier fusa vers Pachirisu, qui dans un cri de stupeur sauta pour esquiver. Le public était conquis. Herbert fulminait, les chargés de TD ne savaient que penser, et Flynn était ulcéré.

Le combat était pour lui à des années-lumière, Pachirisu tentant vainement de fuir la confrontation contre le monstre de métal taillé pour le combat lui devenait lointain, il ne percevait tout ça que comme au bout d'un long tunnel. De tous les coups bas qu'il avait subis quand on essayait de lui faire aimer la chasse au shiney, celui-là était sûrement le pire…

Pachirisu fut finalement mis KO par une offensive particulièrement meurtrière du Magnézone adverse. Dans les gradins, Michel et sa garde rapprochée s'époumonait non sans légère ironie :

-Pachi, Pachi ! Le combattant de l'extrême ouais FLYNN !
-Arrêtez le match ! s'écria Flynn en direction des deux arbitres qui écrivaient leurs impressions sur leurs calepins.

Interloqués, ils levèrent une tête surprise vers Flynn et se concertèrent quelques minutes.

-C'est un abandon, Kenny, dit l'un, vous ne gagnerez aucun point sur ce match.
-Quoi, mais… non ! ce ne sont pas mes Pokémons, je ne peux pas me battre avec !
-Il aurait fallu le dire avant, pour ajourner le match, statua l'autre. Essayez de vous battre avec ceux-ci et nous serons indulgents. J'ai trouvé intéressante cette stratégie de surprise très poussée !

Flynn ne se sentit nullement flatté par cette remarque. Il avait donc le choix : il abandonnait et chutait de trois places au moins dans le classement, ou tant bien que mal, il essayait de grappiller des points à l'aide de Pokémons qu'il ne connaissait même pas, qui ne lui obéraient sûrement pas, et qui n'étaient pas assez entraînés pour faire face à Herbert, comme ce Pachirisu venait de le prouver.

Il regarda donc les pokéballs qu'Anna avait dû substituer aux siennes ce matin. Sans conviction, il en lança une au hasard… qui révéla un Scalpion. Il ne risquait pas de faire des étincelles, mais Magnézone…

-Tonnerre ! ordonna Herbert.

Le Pokémon fut durement touché, mais Flynn était étonné de sa résistance, il s'attendait à le voir mourir de cette attaque.

-Vendetta ! lança-t-il à tout hasard.

Magnézone ne s'attendait pas à une riposte et prit l'attaque de plein fouet. Flynn tenta de conserver son mince avantage :

-Casse-Briques !

Magnézone fut mis KO, à la stupéfaction générale. Herbert était plus que surpris, il pensait la victoire certaine.

Il appela un Tignon qui enchaîna Scalpion dans un combo époustouflant. Flynn en avait mal pour le Pokémon d'Anna : il fut mis KO dès la deuxième offensive, ce qui n'empêcha nullement Herbert de continuer son enchaînement, pour laver l'affront.

Un des chargés de TD arrêta le combat et demanda à Herbert de se calmer.

Flynn s'en moquait éperdument, ce n'était pas ses Pokémons. Il rappela l'infortuné Scalpion et se dirigea vers les chargés de TD sous les quolibets de ses camarades.

-Ce n'étaient pas mes Pokémons, j'ai été victime d'un coup monté ! Ce match était truqué !
-Désolé, il fallait nous le dire avant.
-Je ne l'ai découvert qu'à l'instant !
-Ce n'est pas notre problème.

Le chargé de TD restait catégorique, ce qui ne fit qu'augmenter la colère noire de Flynn.

-La garce… soupira-t-il pour lui-même.

Abattu, il alla dans les tribunes où il était censé regarder le prochain match. Michel l'y attendait.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé, mec ?

Flynn s'était retenu de faire un scandale en bas et afficha une expression peu amène.

-On m'a volé mes Pokémons… on me les a remplacés !

Michel, devant l'aplomb et la mauvaise humeur de son ami, n'osa faire part des plaisanteries qu'il avait composées à son sujet : il sentait que l'heure était grave.

Marc Valmont arriva entre les deux étudiants.

-Un problème, Kenny ?
-Oui ! On a remplacé mes pokéballs, ce matin sûrement ! Je ne m'en suis rendu compte que pendant le match ! Quelqu'un…
-Du calme, l'interrompit l'instructeur. Pourquoi on aurait remplacé vos pokéballs ?

Le faux air investigateur et rationnel de Valmont porta l'agacement de Flynn à un point extrême. Cette question laissait entendre que le chargé de TD doutait de la véracité des dires du jeune homme.

-Mais vous ne me croyez pas ! Ces Pokémons ne m'appartiennent pas ! cria Flynn. Je n'en sais rien, pourquoi on les substitués aux miens, c'est sûrement un coup de ma… coloc' !

Michel haussa les sourcils et articula silencieusement : « coloc' ? ». Marc Valmont était dépassé par la colère du garçon, qui lui semblait excessive.

-Appelez votre colloc'… pour éclaircir l'affaire… suggéra-t-il.

Flynn bouillit : il n'avait, bien sûr, pas son numéro. Il ne pouvait l'avouer à Valmont, c'eût éveillé des soupçons déplacés.

-Je vais le faire, dit-il. Mais tant que je n'ai pas mes Pokémons, je ne pourrai pas prendre part aux travaux dirigés !

Il s'éloigna alors de Valmont, suivi par Michel. Quelques étudiants, dont Karen, s'étaient rassemblés autour des trois hommes et avaient observé la scène, très étonnés. Une rumeur de commentaires et de questionnement accompagna Flynn jusqu'au bas des escaliers.

-C'est quoi cette histoire de colocataire ? le pressa-t-il.

Michel, sachant que Flynn habitait chez ses parents, sans toutefois connaître la situation étrange de la famille Kenny, avait été le plus troublé par cette mystérieuse histoire de vol sans queue ni tête.

-Mon père veut m'obliger à devenir shiney hunter, expliqua Flynn succinctement. Je pensais qu'il allait abandonner ce projet, mais hier il a installé chez nous une… femme, censée me guider dans mes premières captures. J'avais convenu de l'ignorer pour qu'elle parte, mais il semble qu'elle ait quelques ressources pour me plier à sa volonté…

Michel accueillit cette explication, encore plus intrigué. Flynn sortit de l'arène, et son ami le laissa là, ne sachant que penser de ce problème de guide de capture. Il haussa les épaules, et réinvestit le bâtiment pour aller y retrouver Karen.

Flynn marchait d'un pas lourd et rapide.

Anna, qui avait anticipé une crise similaire à celle à laquelle il lui avait été donné d'assister la veille, était déjà à Céladopole.

C'était bien elle qui avait échangé ses Pokémons avec ceux de Flynn. Ses soupçons ne l'avaient pas trompé, pas plus qu'elle ne l'avait été par son pressentiment : Flynn quitterait l'arène et tenterait de la retrouver.

Peu après le départ de Flynn pour la fac, elle avait pris la camionnette dont la secrétaire lui avait remis les clefs, et avait pris la route de Céladopole. Elle connaissait bien l'université et savait que la plupart des étudiants du parcours Combat et stratégie était à l'arène. Elle s'était garée en centre-ville, était allée dans le petit parc devant l'arène et attendu.

Ca n'avait pas tardé : furieux, Flynn avait quitté le bâtiment avec un de ses amis, un beau jeune homme en grand manteau noir. Anna ne s'était pas révélée à lui, car elle craignait une intervention d'une tierce personne. Dès le départ de Michel, elle quitta l'ombre du chêne qui la voilait aux regards et marcha droit vers Flynn, qui approchait de la sortie du parc.

-Flynn ! cria-t-elle.

Lui se retourna, n'osant croire ce qu'il voyait.

-Vous ! s'exclama-t-il le souffle court. Vous vous rendez compte de ce que vous avez fait ?

Anna vit s'approcher l'homme, un peu inquiète car il semblait bien plus en colère qu'elle ne l'avait prévu.

-Calmez-vous… laissa-t-elle échapper involontairement, en sachant pertinemment que ces simples paroles n'arrangeraient rien, bien au contraire.

-QUOI ? J'avais besoin de mes Pokémons ! fulmina-t-il.

Anna fit quelques pas en arrière, elle avait peur de recevoir une gifle.

-Ce que vous avez fait s'apparente à du vol ! gronda-t-il. Je pourrais aller au commissariat !
-Vous en profiteriez pour détailler les activités illégales de votre père ? glissa Anna.

Flynn eut le souffle coupé par cette remarque et se rendit soudain compte de sa position : d'habitude, c'est lui qui opposait son ironie insolente à son père ou son frère. Les insinuations sur la légalité des activités familiales étaient son apanage…

-J'y ai souvent pensé ! avoua-t-il.
-Mais vous ne l'avez jamais fait. Vous ne prendriez pas le risque de perdre votre confort bourgeois…
-Mon confort bourgeois…

Elle avait le même discours que son frère. Les narines de Flynn commençait à frémir, une veine battait dangereusement à sa tempe.

-Vous savez que mon père est un truand et vous travaillez pour lui !

Anna haussa les épaules.

-Je ne pense pas qu'on puisse prouver quoi que ce soit sur votre père. Et il n'y a rien de mal dans ce qu'il fait, si ce n'est sa façon de s'enrichir sur le dos de tout le monde.
-Mon père trempe dans le trafic éhonté ! Il exploite des Pokémons qui ne lui ont rien demandé, juste pour leur couleur de peau ! Vous savez ce qu'il fait dans sa ferme ? Vous…
-Je travaille dans sa ferme. Vous n'y avez jamais mis les pieds, dit Anna d'un ton ferme.

Acculé, réduit au silence par la justesse de cette affirmation, Flynn se tut, l'œil mauvais, les poings serrés.

-Je travaille dans la ferme, et je me contente de surveiller des œufs. Je n'ai jamais tué, battu ou sous-alimenté un Pokémon. (Elle se garda bien d'ajouter qu'elle n'avait aucune idée de ce qui faisait autrement dans l'exploitation.) Vous faîtes de l'opposition de principe, parce que vous êtes trop paresseux pour capturer un shiney ! Ou parce que vous ne voulez pas subir la concurrence de votre frère, parce que vous traversez une crise d'adolescence tardive, mais vous ne refusez pas d'exécuter les ordres de votre père pour des raisons éthiques ! Ce serait trop ridicule !

Flynn fut douché par cette démonstration de la scientifique.

-Rendez-moi mes Pokémons ! exigea-t-il après un silence savouré par Anna.
-Non ! répondit-elle du tac au tac.
-Je vais au commissariat, menaça-t-il.
-Faîtes-le, et vous aurez vos Pokémons, dit-elle.

L'ombre d'un sourire éclaira le visage hargneux de Flynn, mais se dissipa vite aux mots d'Anna :

-Tant que vous n'aurez pas capturé de shiney, l'électricité dans l'annexe que vous occupez sera coupée.
-Quoi ? s'égosilla Flynn, les yeux écarquillés.
-Ca fait partie de mes prérogatives, dit simplement Anna. Le contrait que j'ai signe spécifie que l'annexe entier est mon logement de fonction, je vous le sous-loue gratuitement, en quelque sorte. C'est donc moi qui me charge de l'électricité.

Flynn était une fois de plus en bute à la détermination froide et farouche d'Anna.

-Qui êtes-vous au juste ? demanda-t-il. D'où est-ce que vous sortez, pourquoi cela vous importe autant que je capture un shiney ?

Anna eut un maigre sourire.

-Je vais vous le dire, puisque vous vous êtes calmé. Au départ, j'ai signé un nouveau contrat avec votre père pour vous obliger à ramener un shiney à la ferme. Cela me donnait un salaire très élevé, aucune charge, et énormément de temps libre, avec l'assurance d'être engagé au moins six mois…

Flynn écoutait, presque gêné.

-Au début, je me disais que je vous laisserais tranquille, parce que je n'avais pas vraiment besoin d'obtenir des résultats pour être payée, et que je me moquais bien de l'état de vos relations avec votre père. Mais… après avoir vu votre cinéma hier, quand vous êtes entré dans ma chambre, que votre Arcanin m'a menacée, que vous êtes parti vous plaindre à vos parents, sans obtenir gain de cause apparemment, vous m'avez semblé tellement énervant, tellement immature, que je me suis juré de vous redresser et de vous prouver que votre refus n'est qu'une attitude.

Flynn baissa la tête à l'écoute d'un portrait si peu flatteur de sa personne. Le visage dur et le regard droit, Anna proférait son discours, impassible. Non loin d'eux, cachée derrière le même arbre qu'Anna peu avant, une personne les écoutait avec beaucoup d'intérêt. A l'une des fenêtres de l'arène, Michel observait les deux jeunes adultes se faire face, ne pouvant les entendre. Il reconnut alors une troisième silhouette, celle qui semblait épier l'entrevue, derrière l'arbre…

Flynn leva la tête, les yeux animés d'une étincelle nouvelle.

-Je veux bien partir capturer un shiney… dit-il. Si vous acceptez de me faire visiter la ferme de mon père. Toute la ferme.
-Vous n'êtes pas vraiment en position de négocier… fit observer Anna.
-Oh que si. Je veux juste m'assurer que ce que vous dîtes sur mon père est vrai. Je capture un shiney de toute façon, et je le cède à la ferme à la seule condition que ce soit bien le havre de paix que vous me décrivez. Car vous n'êtes jamais allée ailleurs qu'à la couveuse, je me trompe ?

Anna ne sut que répondre. Flynn le prit comme une confirmation tacite.

-C'est bien cela… vous n'en savez rien, pas plus que moi en fait. Rendez-moi mon Pokémon et dès la fin des cours je vous accompagnerai !
-Je ne suis pas sûre d'avoir le droit de vous emmener dans la ferme, avoua-t-elle.
-Ce n'est pas dans votre contrat ? fit-il mine de s'étonner. Vous présentez mon père comme un ange, sans être capable de le prouver ? Vous me prenez pour un gamin capricieux mais aussi pour un idiot !
-C'est bon ! s'énerva Anna. Je vous ferais visiter la ferme, même en cachette. Mais il vous faut capturer un shiney avant.

Flynn poussa un long soupir.

-C'est d'accord. Rendez-moi mes Pokémons.
-Je ne les ai pas… dit Anna. Je les ai laissés chez vous…
-Alors ramenez-moi à la maison, pour que je puisse les prendre ! Et vous me ramènerez aussi à Céladopole !

Anna grommela quelque chose comme : « très bien ! ».

-Attendez-moi quelques instants, je vais prévenir la fac de mon absence.

Il se dirigea vers l'arène, et aperçut alors, plongés dans une discussion assez importante, Michel et Karen. Il se rapprocha d'eux, bien qu'il eût le sentiment de les aborder alors qu'ils concluaient, et les pria de prévenir les chargés de TD qu'il serait absent les deux prochaines heures, à cause d'un problème lié au match de ce matin.

-Tu as réglé cette histoire de vol ? demanda Michel. Il avait l'air sérieusement préoccupé.

Flynn lui répondit évasivement :

-On peut dire ça…