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The Kokonut Song was Koko-approved™
de Lutias'Kokopelli

                   



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[Tutoriel] Donnez vie à vos mots
Note importante : ce tutoriel ne prend en compte que le cas de la narration à la troisième personne, et reste principalement autour de la narration omnisciente. Si vous cherchez des conseils concernant d'autres types de narration, je pourrai étendre cet exposé selon les conseils et avis que je pourrais y ajouter, mais sachez que ces tutoriels supplémentaires seront probablement moins complets, faute d'expérience de ma part dans le domaine.

Bonjour, bonsoir, bonne nuit à tous selon l'heure à laquelle vous lisez. On me l'avait demandé il y a déjà un moment sur un forum PL et je me disais bien qu'il fallait que ça sorte un jour, alors le voici le voilà : une petite tentative de rassembler et d'expliquer le plus clairement possible les quelques conseils que j'aurais à donner pour apprendre à rendre vos récits accrocheurs, et pour aider à comprendre ce qui fait qu'on aimera plus une fiction qu'une autre (à ma façon, du moins, donc prenez ça avec des pincettes :v). Notez ici que ce ne sont cependant pas des conseils “basiques” traitant de l'orthographe et de la grammaire pure que je m'apprête à vous détailler ici, bien au contraire ; ce sera compliqué de rédiger ce pavé de façon à ce qu'il soit utile à tous les niveaux d'auteurs, débutants comme écrivains confirmés, mais je vais faire ce que je peux pour qu'il profite à un maximum de gens. Sur ce, bonne lecture, en espérant qu'il vous soit utile ! ;D

Ce tutoriel ne vous indiquera rien concernant la manière d'élaborer votre scénario. Pas directement. Son but principal est de vous conseiller la meilleure manière d'écrire votre histoire en fonction de ce qu'elle raconte. Dans ce topic je vous apprendrai que la meilleure manière de bien écrire est de ne pas écrire. Je démontrerai qu'un auteur n'est rien de plus qu'un caméraman, mais un caméraman omnipotent, omniscient, omniprésent. J'essaierai de vous expliquer comment un auteur peut contrôler le souffle de son lecteur juste en choisissant entre un point ou une virgule. Je tenterai de montrer qu'un auteur est la créature la plus puissante et la plus dangereuse que vous ayez jamais rencontrée si vous êtes un Lecteur. Car un auteur est un marionnettiste, et la liste de ses marionnettes ne se limite pas strictement à l'ensemble des personnages qu'il fait vivre au travers de ses mots.
Je vous apprendrai que les mots sont vivants, et que l'auteur n'est que leur dompteur. Car les mots peuvent blesser plus que n'importe quoi au monde si vous ne les utilisez pas correctement.


En raison de la longueur du "pavé" à venir, ce tutoriel sera découpé en plusieurs parties, et publié également avec des intervalles de temps plus ou moins longs (j'ai voulu tout rédiger au départ, mais je me suis rendu compte au bout d'un mois et demi de travail que ça n'aiderait pas à grand-chose en fin de compte :/). Les différentes parties seront ajoutées au fur et à mesure d'une manière similaire aux chapitres d'une fiction, à la différence près qu'ils pourront sans problème être corrigés à tout moment pour ajouter ou modifier un paragraphe ou une idée (que ce soit la mienne ou la vôtre, d'ailleurs !), de sorte à ce que ce tutoriel soit le plus complet possible. Je compte sur vos avis et conseils à tous pour m'aider aussi à faire un travail le plus "objectif" et complet possible ;D

Voici pour le moment le sommaire :

L'écriture, cas généralIntroduction — Rien ne presse.
I — Reconvertissez-vous en caméraman professionnel.
#01 ~ Oubliez que vous êtes humain (facultatif).
#02 ~ Sortez votre calepin et vos jumelles.
#03 ~ Mais ça suffit pas Koko ! :(

II — Jouez avec les mots.
III — Mettez des images subliminales dans votre texte.

#01 ~ La ponctuation
#02 ~ Les majuscules
#03 ~ Les chiffres, codes et autres caractères spéciaux

IV — Relisez-vous.
Conclusion — La fin n'est qu'un autre mot pour “début.”
Post-scripta

#01 ~ La chasse aux idées
#02 ~ Les titres
#03 ~ La musique d'ambiance


Introduction — Rien ne presse.

Bien. Vous êtes un auteur débutant aspirant à vous améliorer autant que possible, vous êtes ouvert à toutes sortes de conseils qu'on pourrait vous prodiguer, et voilà que vous avez trouvé THE Idée du Siècle pour faire la Meilleure Fiction de tous les temps, que vous avez déjà votre logiciel de traitement de texte ouvert et les doigts au-dessus du clavier, prêts à le marteler des heures durant...
Eh bien je vous dis stop. Parce qu'avant toute chose, vous avez besoin de faire un petit débriefing de la situation avant de partir sans savoir où vous allez. Si vous avez déjà tout votre scénario du début à la fin de complètement clair dans la tête, que vous savez exactement ce qui se passe où et quand, vous pouvez zapper cette introduction et directement passer à la première partie. Mais si subsiste le moindre doute concernant ne serait-ce que la scène que vous vous apprêtez à rédiger, calmez-vous un instant et réfléchissez à votre histoire.

“Comment voulez-vous écrire ?” sera la question phare de votre fiction, la toute première que vous devez nécessairement vous poser avant d'écrire. Et pour le savoir, posez-vous la liste des questions que je vais vous proposer. Vous savez de quoi votre fiction parle donc vous trouverez en principe la réponse à ces questions plutôt évidente, mais il est nécessaire que vous vous attardiez dessus un minimum : c'est seulement en connaissant vraiment la réponse à ces questions que vous saurez comment aborder la rédaction de votre fiction, comment la commencer, la développer et la conclure. Ce qui est déjà pas mal.
Ainsi vais-je vous proposer cette petite interrogation surprise. Sortez une feuille et détaillez le plus possible la réponse à ces questions :

Quel type de fiction écrivez-vous ? Romance ? Policier ? Drame ? Un petit cocktail de tout ça ?
Quelle est l'ambiance la plus importante de votre histoire et/ou de la scène que vous vous apprêtez à coucher sur papier ? Voulez-vous instaurer une atmosphère de mystère ? de tension ? de comédie et de légèreté ? de sérénité ? de terreur voire d'horreur ? Essayez-vous d'en mêler plusieurs en même temps ? (sisi, c'est possible)
Combien de types de personnages utilisez-vous ? Avez-vous des “camps” bien définis, séparant les “protagonistes” des “antagonistes” ? Combien ? Chacun d'entre eux a-t-il des motifs particuliers et bien précis pour leurs actes ? Vont-ils évoluer dans votre fiction, et si oui, comment ? À quel rythme ?
Quelle est la chronologie et l'utilité de chacune des scènes de votre scénario ? Le comportement des personnages d'une scène en particulier est-elle bien cohérente avec le niveau de développement psychologique de chacun d'entre eux à ce moment précis ?
Voulez-vous instaurer une atmosphère particulière au sein de votre fiction dans son intégralité ? Souhaitez-vous rédiger une fiction “à thème” ? Comptez-vous utiliser un style d'écriture particulier pour mieux lier encore les chapitres entre eux par des liens plus étroits encore que la simple intrigue ? Voulez-vous essayer d'intégrer plus encore la forme au fond lui-même, dans la mesure du possible ? (exemple : roman épistolaire (inclut les mails/SMS/chatbox/post-its actuels si besoin, bien entendu), mélange de différents styles d'écriture (alternance de monologues à la première personne avec des scènes à la troisième personne...), chapitres dans le “désordre” chronologiquement dans un but bien précis...)
Le titre de votre chapitre ou de votre fiction reflète-t-il bien ce que vous voulez montrer ? Cherchez-vous un titre simple ou allez-vous plutôt dans la fabrication de jeux de mots ambigus et les plus subtils possible ? Rédigez-vous votre fiction en fonction de votre titre, ou cherchez-vous le titre qui corresponde le mieux à votre fiction ?

Ce sont les questions les plus basiques ; si d'autres vous viennent en tête, n'hésitez pas à vous en servir également, votre idée n'en sera que plus précise.
Ainsi donc, vous vous sentez cette fois bien prêt(e) à écrire et vous savez parfaitement ce qui se passe, où, quand, comment et pourquoi, du petit clin d'œil d'untel à la crispation infime et invisible des doigts de pied d'un autre ? Très bien. Nous pouvons alors commencer à vraiment nous amuser.

I — Reconvertissez-vous en caméraman professionnel.

Oubliez votre nature d'être humain, car un auteur qui écrit n'est plus un être humain. C'est un être qui sait tout, qui voit tout, passé comme avenir, et qui est là pour raconter à qui veut bien l'entendre (ou le lire, plutôt) ce qu'il se passe, tout en rendant son récit tellement vivant qu'il donnera l'illusion que ses personnages existent vraiment et sont juste là, sous le regard de son lecteur, à rejouer devant lui la scène qu'il décrit.
En gros, oui, je vous demande de tourner un film. :/

Mais pour atteindre un tel niveau et pour réussir à retransmettre avec autant de précision une telle scène, il faut tout d'abord que vous, vous l'auteur, vous l'ayez déjà vue vous-même : c'est un peu dur de tourner un film si les acteurs et les décors ne sont pas là devant votre caméra à jouer la scène, et ce n'est pas la qualité de votre caméra ou votre talent de caméraman qui vont y changer grand-chose.
Aussi bonne votre plume soit-elle, vous n'irez nulle part si vous n'avez pas dans votre tête le “story-board” complet de la scène que vous désirez écrire. Vous avez déjà fondé les bases avec les questions que je vous ai proposées dans l'introduction, mais ce n'est pas encore suffisant. Il est temps d'aller au fond des choses et d'aller dans les moindres détails. De même que les artistes trouvent toujours un moyen de donner la petite touche finale à leur tableau qui les rend si “vivants”, il est temps de voir comment arranger les choses de sorte à faire ressortir ce petit éclat si spécial qui, malgré son apparente insignifiance, peut tout changer.

#01 ~ Oubliez que vous êtes humain (facultatif).

Ce paragraphe, qu'on se le dise, risque de choquer certaines personnes par les questions existentielles que je suis sur le point de vous poser. Si vous ne vous sentez pas prêt(e), ne serait-ce que pour le moment, à titiller ce qui est pour vous un sujet sensible voire tabou, passez directement au point #02, il n'y aura aucun souci à cela. Cette section est quasiment indépendante de toutes les autres en soi, il n'est absolument pas indispensable de l'avoir lue pour pouvoir comprendre les autres.
Certes, il semble difficile de savoir si cela sera susceptible de vous déstabiliser si vous ne savez même pas de quoi je m'apprête à parler, alors je vais essayer de vous éclairer un peu à ce sujet. Déjà, si vous vous considérez comme un fan particulièrement assidu du fandom sur lequel vous comptez écrire (ou pire si, justement, vous n'écrivez pas sur un fandom mais plutôt que vous vous lancez dans votre propre univers complètement nouveau et qui vous tient tout particulièrement à cœur) et que votre âme est du genre sensible, ce que je vais vous dire peut vous bouleverser de questions et de doutes en tous genres, et qui sait pendant combien de temps ça va vous torturer (personnellement, ça a dû me prendre deux ou trois mois avant de m'en sortir, donc bon).
Vous reviendrez ici lorsque vous vous sentirez prêt(e) à passer à la vitesse supérieure, sachant que ce que j'entends par-là est, de plus, un sujet purement personnel et complètement subjectif ; c'est juste que c'est le fait que je me rende compte de tout ça qui a produit chez moi ce qu'on pourrait appeler un déclic, à l'origine de mon style d'écriture et mon analyse des personnages actuels. Ceci n'est donc rien de plus que le fruit d'une unique réflexion et d'un seul point de vue.

Ainsi, au risque de passer pour un monstre insensible, voici donc la question si cruelle que je vais vous poser et qui vous torturera l'esprit pendant des mois, hantera vos nuits dans des cauchemars traumatisants où vos personnages vous traiteront d'assassin avec un sarcasme d'un mordant sans pareil, et vous fera douter de tout, jusqu'à vous pousser à vous questionner sur votre humanité et/ou votre talent d'auteur (#ÇaNeSentPasDuToutLeVécuVousConstaterez). Cette question semble inoffensive à première vue, mais si vous y réfléchissez en profondeur... Ça pourrait déjà faire un peu beaucoup à avaler.

Que sont vos personnages pour vous ?
Des personnes humaines méritant respect et droits, comme n'importe qui.
Des outils/marionnettes/cobayes d'expérience sans réels sentiments.

Si vous avez coché la première réponse sans hésiter et que vous vous êtes indigné(e) que j'osasse vous poser une question aussi stupide, alors passez cette section. Vos oreilles ne sont pas encore prêtes à supporter ce qui va suivre. Je vous aurai prévenu(e)s.

Vous le savez tous (ou pas), je suis avant tout une future scientifique, fille de scientifiques, et tout le tralala. Donc je vais aller droit au but en vous apportant une vision de scientifique.
Un des premiers principes de la science est qu'on ne peut étudier efficacement un objet que si l'on se trouve hors de cet objet ; raison pour laquelle il est particulièrement difficile d'expérimenter (ou même d'observer) notre univers, puisqu'on ne peut par définition pas en sortir. Cependant, bien que ce soit particulièrement dur pour votre mental et votre conscience, il est possible de sortir de l'humain pour mieux étudier l'humain. Et c'est ce que je vais vous demander de faire, si vous comptez avoir une maîtrise la plus totale de votre univers. Et plus particulièrement encore, de la psychologie de vos personnages dans sa plus grande complexité. Quel paradoxe tout de même ! C'est en considérant vos personnages comme des machines sans aucune émotion réelle que vous allez cependant le mieux comprendre et maîtriser leur psychologie. Difficile à croire, mais véridique.
Je ne pourrais que difficilement avoir une approche qui marche pour tous, puisqu'une telle démarche est avant tout personnelle et personnalisée. Je vais donc essayer de vous guider dans ce chemin de réflexion avec le pavé qui va suivre, même si je ne vous promets rien.
Enfin, j'ai dit “pavé”, mais forcément, ça va être un second questionnaire.

Qu'est-ce qu'un auteur ? Quelqu'un qui raconte une histoire ? Oui, certes. Mais plus que cela, s'il compte rendre vivant son récit, il se doit de connaître au mieux son univers dans les moindres détails, de se montrer cohérent tout en présentant avec le plus de subtilité possible jusqu'aux sentiments les plus profonds de ses personnages, allant jusqu'à donner l'indice des sentiments et pensées dont les personnages en question ne seraient même pas conscients eux-mêmes.
Comme j'aime à le dire, un auteur est avant tout un marionnettiste, voire un illusionniste : il montre un spectacle à une audience, et plonge son public dans un univers imaginaire qu'il contrôle parfaitement... mais d'un autre côté, il doit à tout prix rester le seul à rester hors de cet univers, s'il veut éviter de perdre le contrôle de son spectacle. Après tout, à quoi sert un illusionniste qui se perd lui-même dans sa propre illusion ?
Vous ne vous en rendez peut-être pas compte tout de suite, mais sortir de cette “illusion” nécessite un grand effort et, pire encore, ce sera un grand coup pour votre conscience à cause des conséquences que cela apporte. Si vous considérez que vous êtes sorti(e) de l'illusion de votre histoire et que vous avez toujours eu la conscience parfaitement tranquille, c'est soit que vous êtes un insensible fini, soit que vous n'avez strictement rien compris. M'enfin, tant mieux pour vous, ça veut dire que vous dormirez bien cette nuit.
Pour résumer tout ça en une simple citation, voici une petite phrase qui est devenue récurrente durant mes rêves/cauchemars/whatever pendant ma “phase de réflexion” :

« Un écrivain, un magicien, un artiste, c'est toujours la même chose. Ils plongent leur audience dans un spectacle qui les fait rêver, et ils aiment ça. Mais un illusionniste qui se perd lui-même dans sa propre illusion ne fait qu'en perdre le contrôle, et ne fait que détruire sa propre création de l'intérieur. »

Pour ceux qui sont curieux d'en savoir plus mais qui n'ont pas compris (je l'avoue, j'ai beaucoup de mal à trouver mes mots pour expliquer ça clairement :v), il n'est pas impossible que je parle un jour de ma propre expérience, de ces fameux rêves, questions, doutes, et tout le tralala. On sait jamais.

Pourquoi écrivez-vous ?
Vous êtes juste en train de vous faire plaisir parce que c'est une passion et que vous voulez raconter une histoire sans aucune ambition ? Voulez-vous faire passer un “message” ? Aimez-vous votre histoire et voulez-vous la faire partager tout simplement pour l'histoire elle-même ? Toutes les raisons sont bonnes pour écrire, mais il faut que vous ayez la vôtre. Écrire est un art difficile (surtout si vous voulez bien écrire), il vous faut donc de la motivation à revendre.

Quel sort réservez-vous à vos personnages ? De manière plus spécifique plutôt, vous arrive-t-il de rechigner à faire subir certaines choses à vos personnages par égard pour eux, et ce parfois au risque de la cohérence même de votre scénario ?
On a déjà dû vous le dire et c'est bien connu, la plupart des auteurs, en particulier les auteurs de romans policiers, affirment écrire leur scénario “en partant de la fin” ; ce n'est certes pas littéral, mais c'est l'idée et c'est le processus que j'utilise moi-même pour mes propres fictions : à partir de l'ensemble des “révélations de la fin” qui constituent le cœur de l'intrigue, je construis le scénario. Plus précisément, étant donné que je sais tout des personnages, de ce qu'il s'est passé avant l'intrigue, que je sais exactement quelle est la situation initiale, alors mon scénario se construit brique par brique en calculant ce qui va arriver en fonction de ce qu'il s'est passé et de ce qui est en train de se passer. Puisque je suis à l'extérieur de l'humain et que je sais tout de chaque personnage, de leurs pensées comme de leurs intentions et de leurs relations avec les autres, je déduis tout simplement ce qu'ils vont faire, et les conséquences de leurs actions sur l'intrigue. En soi, oui, en fait je n'ai plus que peu de contrôle sur ce qui se passe réellement, puisque mon “contrôle” se base sur les conditions de départ et les quelques événements purement fortuits que j'introduis ici et là pour guider un peu l'intrigue dans le sens que j'ai envie qu'elle prenne.
Ce que je fais pour m'assurer un minimum de contrôle est tout de même que je fais une liste de ce que j'aimerais qu'il se produise dans mon intrigue, et qu'ensuite je tente de répondre à la question “Que faut-il qu'il se passe auparavant pour que cela puisse se produire ?” Travail qui est plus ou moins ardu en fonction des cas, et qui parfois m'amènent à découvrir de toutes nouvelles idées et des révélations bien plus profondes.
Ainsi que des événements que je n'aurais jamais osé ne serait-ce qu'imaginer, par égard pour mes personnages, si j'avais laissé mes sentiments me guider plutôt qu'une froide raison sans pitié et sans remords.

Bref. Pour résumer, oui, je suis en train de vous dire que l'auteur qui va au bout des choses est purement et simplement un salopard insensible, du moins lorsqu'il écrit :/
Sachez juste que cela n'empêche nullement de redevenir le fan que l'on a toujours été au plus profond de notre cœur depuis le départ ! Il s'agit juste de mettre ça de côté au moment où on “travaille” à réfléchir au scénario et à écrire, afin d'avoir une réelle liberté d'imagination dans la réalisation ; rien n'empêche d'apprécier à leur juste valeur les œuvres des autres (et de faire des crises de fangirlisme, sisi c'est possible), et au contraire, je pense que vous n'en verriez que plus de détails encore plus profonds et fascinants.

#02 ~ Sortez votre calepin et vos jumelles.

Je retrouve donc ici les âmes sensibles comme ceux qui ont eu le courage de lire le paragraphe précédent et de continuer tout de même à lire après ça. Cool.
Dans ce paragraphe donc, je ne vais pas vous apprendre à écrire, mais à visualiser et à prendre des notes, tout simplement.

Je disais dans l'introduction de cette partie que l'auteur était tout simplement une sorte de caméraman. Alors je vais vous poser une question très simple : qu'est-ce qui, à votre goût, distingue les bons films (voire les excellents films) des autres ?
Bien sûr il y a plusieurs réponses possibles à cette question, au moins au niveau de l'histoire et des idées ; mais ceci mis à part, ce qui fait qu'un film à l'histoire stupide pourrait être presque meilleur qu'un film possédant une intrigue intéressante est tout simplement la manière selon laquelle ces deux films auront été tournés. Et en particulier, dans le cas d'un film, on va parler des prises de vue.

Si vous avez fait de l'audiovisuel, on vous aura appris les différentes prises de vue possible (en plongée, les gros plans, et autres joyeusetés). Eh bien croyez-moi ou pas, l'écriture, c'est pareil : aussi étrange cela puisse-t-il paraître, il existe en effet des prises de vue. Ou pour être plus précise, il existe des moyens de simuler les prises de vue.

Je vais vous faire un exemple très simple : allez tout simplement regarder les cinématiques de Professeur Layton, tant qu'à faire. Et jouez aux jeux si c'est pas déjà fait, vous le regretterez pas (#MomentPub).
Du sourire à peine perceptible de Vladimir lorsqu'il est intrigué par la venue de ses deux visiteurs aux mains du professeur qui tremblent en spasmes si discrets à la fin de PL3, une des raisons qui font de PL un bon jeu est qu'ils n'ont pas été avares en détails, encore moins au niveau des détails qui rendaient leurs personnages vivants. Et ce sont ces petits détails qui, aussi anodins puissent-ils paraître parfois, font toute la différence : car en effet, plus encore que de montrer les émotions des personnages sur le moment, ils présentent leur véritable personnalité sous un nouveau jour, et trahissent même parfois une petite faiblesse de leur part (d'où qu'un gentleman parfait tremble comme ça ?), voire... des sentiments dont les personnages eux-mêmes ne sont pas forcément conscients. Et ça, franchement, si vous arrivez à montrer au lecteur des trucs sur l'inconscient de vos personnages sans pour autant les faire passer pour des schizophrènes ou que sais-je, ça c'est la classe. Mettre un point tout simple ou des points de suspension à la fin d'une question pour montrer un ton étrange dans la voix peut être bien plus révélateur qu'une dizaine de lignes de description qui vont endormir le lecteur sans qu'il n'ait parfois rien compris : le but de l'écriture n'est pas d'en écrire des tartines pour se faire bien voir, mais de bien les écrire de la manière qui fera le mieux passer le message, de la manière la plus fidèle possible à ce que l'auteur avait initialement en tête. Avoir des idées en tête et du non-dit c'est bien, mais si on ne sait pas comment bien le mettre en avant, ça passe moins.

Ainsi donc, je vais vous demander de faire comme si votre histoire, ou du moins le passage que vous voulez écrire, était un (extrait de) film. Analysez bien les prises de vue les plus intéressantes, et prenez des notes au fur et à mesure des détails que vous voulez faire ressortir. Cet exercice peut être plus facile à faire pour certains que pour d'autres (pour ma part, vous le savez peut-être déjà mais la majorité de mes fictions sont nées dans des rêves, où je voyais justement déjà plus ou moins le film, donc j'avoue que ça facilite déjà les choses), mais avec un peu d'entrainement ça devient de plus en plus simple et précis.
Je vais donc vous demander, pour finir, de prendre un papier et un crayon, ou tout simplement un logiciel de traitement de texte, et de noter au fil du développement de la scène tous les petits détails sur lesquels vous voulez vous concentrer à chaque fois. Faites la liste des petits détails qui font la différence, puis écrivez comme vous le sentez, sans vous préoccuper de la qualité de votre petit pavé. Vous le reprendrez plus tard si besoin.

#03 ~ Mais ça suffit pas Koko !

Eh non. Ce que vous venez d'écrire, là, au brouillon, est loin d'être votre résultat final. Ou alors, vous avez soit beaucoup de talent, soit beaucoup de chance. Alors il est temps de passer à une petite explication de la suite :

De la même manière qu'il aurait été difficile pour vous, auteur, de vous représenter la scène de votre intrigue sans vous la représenter en image dans votre tête, il est impossible pour le lecteur (créature incommensurablement fainéante et stupide, vous le savez bien puisque nous le devenons tous à notre tour chaque fois qu'il s'agit de lire les fictions de nos camarades, moi la première :/) de comprendre et suivre votre récit si lui-même n'a pas de quoi imaginer la scène avec les moyens du bord. Soit, bah, un texte.
La plus grande difficulté dans l'art de l'écriture, vous le savez bien, consiste à montrer au lecteur des images, voire plus encore des images animées et à l'aspect le plus vivant possible, au travers de caractères noirs sur fond blanc. Vous devez donc vous débrouiller avec vos propres mots pour donner à votre lecteur une image bien précise de ce que vous avez vu, sans pour autant perdre le rythme de votre action (parce que vous le savez bien, si vous faites des descriptions trop longues et trop précises et qu'à chaque fois qu'un personnage bouge d'un centimètre vous allez lui refaire toute une autopsie, on va tous s'endormir).
Donc bon courage, maintenant vous savez que le boulot d'un auteur, c'est de faire passer à ses lecteurs uniquement la bande son du film qu'il vient de réaliser, et de quand même réussir à leur faire aimer son boulot. Tiens, essayez donc un jour de regarder votre film préféré avec un bandeau autour des yeux, pour voir.

Le paragraphe précédent consistait à se concentrer, à chaque fois, sur le détail qui importe le plus. Plus votre action est rapide, plus votre description devra être concise, mais tout en restant aussi significative que les autres : en un minimum de lignes, vous devrez dire ce que dans d'autres situations vous auriez plutôt préféré dire en un bon gros pavé, et inversement il vous faudra parfois vous étaler le plus possible pour faire durer “cet instant magique qui dure une éternité”, par exemple. Contrairement à ce qu'on peut croire, il est bien plus simple de fournir un gros pavé bien gras et bien indigeste que trois lignes tout aussi parlantes, puisqu'il faut apprendre à synthétiser sa pensée en un minimum de place et de temps. Et ça, ça demande un travail de réflexion au préalable pour choisir le bon mot... Travail qui fait l'objet de la prochaine partie.
Article ajouté le Lundi 09 Novembre 2015 à 20h19 | |

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