D'hier à aujourd'hui
Lucille finit par trouver le courage de sortir sa tête de l’oreiller où elle était plongée depuis la veille.
Elle avait expliqué à son chef qu'elle était fatiguée, et qu'elle avait l'esprit trop embrouillée pour prendre une décision maintenant. Compréhensif Ludo ne l'avait
pas forcé et avait accepté de lui laisser un peu de temps, plutôt que de l'obliger à accepter un gros contrat qui ne lui convenait pas.
Ainsi la jeune femme était seulement sortie en vitesse acheter à manger, et avait modifié ses réservations d'avion et son séjour en chambre d’hôte (en tant
que designeuse Lucille détestait les hôtels industriels produit à l'identique qui lui donnait l'impression d'un lieu sans âme) pour rester au moins un jour de plus. Et
depuis elle tournait et retournait dans le lit avec les mots de Jeannine en tête.
Et la nuit dernière avait fait mentir l'adage selon lequel «La nuit porte conseil.».
_«Ty, Ty Ty.» piailla Tylton avec un zeste d’inquiétude, depuis le fauteuil où il s'était blotti pour la nuit.
_«Salut Tylton.» lui répondit Lucille qui prit la peine de se lever et de le caresser.
Elle réfléchit rapidement à la situation; inutile de se morfondre et de rester enfermée plus longtemps, ça ne l'aiderait pas à trouver une réponse. Autant sortir et
prendre l'air.
_«Allez une douche, et on sort.» dit-elle à voix haute, plus pour se motiver qu'autre chose.
Lucille régla l'eau à une température correcte puis entra dans la cabine. Mais même ici sa conversation avec Jeannine la suivait.
La jeune femme choisit de ne pas se battre avec ses pensées et se remémora la fin de sa conversation avec la championne.
_«Et qu'es-ce que vous voulez que j'installe à la place des murs invisibles ?»
_«C'est surtout ça le problème.» répondit Jeannine avec son naturel déconcertant. «Je n'ai pas d'idées. Je ne veut plus des murs transparents, mais je ne sais pas
quoi mettre à la place. Il faut que ce soit quelque chose de ninja, ho et en lien avec le type poison aussi.»
N'importe quel architecte d'intérieur aurait bondi sur une telle occasion, mais pas Lucille. Elle n'était douée que pour les espaces qu'elle comprenait, et les arènes
ça la dépassait. Elle n'avait aucune idée de quoi faire de la salle d'épreuve. Alors qu'il suffisait de demander à presque n’importe quel designeur une idée de salle
d'épreuve pour en recevoir au moins une par type de pokémon.
Bien sur Lucille aurait pu accepter et faire du mauvais travail, mais sa conscience professionnelle l'en empêchait formellement.
Et puis elle voulait vraiment aider Jeannine. Elle comprenait son besoin de s'approprier l'arène et d'en faire un lieu qui reflète ce qu'elle est, plutôt que de le
garder tel quel pour une génération de plus.
Mais la question était davantage comment l'aider plutôt que l'aider ou non. Le type poison était l'un, si ce n'est le plus, dur des types à représenter dans une
arène. Et en plus elle devait ajouter un style ninja à tout ça.
Lucille soupira, c'était bien au delà du challenge à ce stade.
Une fois séchée et habillée, elle et Tylton sortirent s'acheter quelques gâteaux en guise de petit-déjeuner.
Lucille avait pris une décision; elle allait chercher un concept d'arène dans les jours à venir, et si elle n'y parvenait pas elle renoncerait au contrat, et laisserait
Jeannine choisir quelqu'un d'autre pour son arène. C'était selon elle le meilleur compromis.
Elle choisit de se poser près du parc safari, l'endroit était verdoyant et calme, tout ce qu'il lui fallait pour se concentrer.
_«Tylt, Ty.» dit Joyeusement Tylton, qui manifestement approuvé ce choix de lieu.
Lucille sortit son motismart pour se renseigner sur les arènes pour champion de type poison, pour trouver un peu d'inspiration, mais il en existait très peu. Il y en
avait une à Ondes-sur-Mer à Unys, mais dû aux réglementations plus souples de la région, l'arène est une petite salle de concert.
Lucille grommela sur les normes restrictive des arènes de Kanto. Comme si elle n'avait pas assez de bâton dans les roues.
L'architecte continua de regarder des images en ligne dans l'espoir de trouver l'illumination quand un bruit lui fit tourner la tête.
C'était Jeannine, en tenue de sport, qui faisait son jogging en compagnie de deux pokémon volants que Lucille ne put identifier d'où elle était. Et par jogging on
aurait plutôt dit un sprint entrecoupé de pirouettes et d’acrobaties sur les bancs et les barrières.
En remarquant Lucille la kunoichi bondit sur un banc vide, rebondit dessus et vint se réceptionner d'une pirouette gracieuse à coté de la jeune femme.
_«Bonjour Lucille, belle journée, pas vrai ?» elle semblait à peine essoufflée par ce qu'elle venait de faire.
_«Oui il y a du beau temps.» bredouilla t-elle, en regrettant en son for intérieur de ne pas être restée dans sa chambre. «Vous venez souvent courir par ici ?»
ajouta t-elle pour faire la conversation.
_«Tous les jours, ça fais partie de ma routine d’entraînement. Les gens n'imaginent pas à quel point il faut faire d'effort quand on veut suivre la voie du ninja.»
répondit-elle en caressant ses deux pokémons, un Nostenfer et un Aeromite.
_«J'avoue que je ne m'étais jamais posé la question.» en disant ses mots Lucille réalisa qu'elle tenait peu être une piste pour résoudre leur problème commun.
«Si vous avez le temps, es-ce que vous pourriez m'en dire plus sur la voie du ninja ? En fait c'est très abstrait pour moi. C'est sûrement pour ça que j'ai autant de
mal à m'investir dans votre projet d'arène.»
_«Ho je vois que vous y réfléchissez toujours ! Et bien je crois que j'ai juste assez de temps pour vous raconter tout ça, mais il faudra le faire en marchant, je dois
ouvrir l'arène.»
_«D'accord.»
Lucille fit signe à Tylton de la suivre, tandis Jeannine fit de même avec Aeromite et Nostenfer, puis le petit groupe se mi en route.
_«Alors tout remontes à l'ancienne Hisui.» voyant la confusion sur le visage de Lucille Jeannine s'empressa de se rectifier. «C'est l'ancien nom de la région de
Sinnoh. Lorsque les premiers colons sont arrivés la région était très dangereuse à cause des pokémons sauvages qui étaient bien plus agressifs qu'aujourd'hui.
Alors certains habitants se sont spécialisés dans la reconnaissance et la furtivité. Ils n'affrontaient pas les pokémons, ils se déplaçaient avec discrétion, et ils
faisaient du repérage pour les autres. Ils ont aussi développé des outils pour s'enfuir en cas de rencontres imprévus avec des pokémons sauvages. C'étaient les
premiers ninjas.
Ils ont été indispensable pour le développement de la région, mais plus la civilisation s’établissait à Hisui moins il était utile. Leurs nombres et leurs utilités
déclinant le clan de ninja, mes ancêtres, ont décidé de quitter Hisui pour une autre région où leurs talents seraient plus demandé.
C'était à l'époque de la guerre de Jotho, deux seigneurs se disputaient le contrôle total de la région. Mon clan choisit de s'allier au seigneur de Rosalia. Les ninjas
servirent d'espions, de saboteurs, mais aussi d’assassins...» le visage de Jeannine se voilà en prononçant ses derniers mots. «Mais malgré leur intervention le
seigneur de Rosalia perdit la guerre. Comme mon clan n'était que des mercenaires ils furent seulement banni de Jotho, alors ils émigrèrent pour la région voisine
de Kanto où ils fondirent Parmanie, et lorsque la ligue pokémon fut instauré mon clan se porta volontaire pour ouvrir une arène.
Voilà c'est l'histoire dans les grandes lignes.»
Lucille essaya de mémoriser toutes ces informations pour pouvoir les noter dans son carnet dés qu'elle pourrait écrire convenablement.
_«J'ignorais que l'histoire des ninjas était si riche et ancienne.» elle hésita un peu avant de poser sa question. «Mais aujourd'hui ça consiste en quoi exactement
?»
Jeannine répondit avec un sourire un peu triste.
_«Et bien à pas grand-chose. Il n'y a plus de guerre ou de conflit donc nos talents d'espions ne servent plus. C'est plus une forme de tradition qu'autre chose. Il y
a bien des dresseurs extérieurs au clan qui s'essayent au style ninja, mais c'est plus un hobby qu'autre chose pour eux.
C'est aussi pour ça que je veut changer la salle d'épreuve. Pour proposer quelque chose qui respecte la tradition tout en étant fidèle à l'esprit de notre temps.
Une sorte de vision contemporaine du ninjutsu, plutôt que de rester dans quelque chose de dépassé. Vous voyez où je veut en venir ?»
_«Je crois que je comprends où vous voulez en venir.» dit Lucille qui voyait désormais les choses sous un angle plus propice. La designeuse remarqua l'arène à
quelques mètres d'elle. «Merci de m'avoir raconté tout ça, c'était très instructif, et inspirant. J’espère pouvoir revenir vers vous avec de bonnes nouvelles
prochainement.»
Les deux jeunes femmes se saluèrent amicalement, et Jeannine rejoignit son arène, tandis que Lucille se dirigea vers sa chambre d'hôte.
Pour la première fois depuis qu'elle était à Parmanie elle avait le sourire. Car elle avait enfin un début d'idée.