Le sauvetage d'un professeur ou la quête de la tueuse qui se prenait pour un écrivain de louglaciale1

Le lendemain matin à Romant-sous-bois fut maussade et tendu pour le groupe de sauveteurs. Louglaciale mangeait un bol de céréales tout en buvant un jus de baie et en ne quittant pas le cambrioleur des yeux. Lui se contentait de snober la dresseuse en se tartinant de grosses tartines avec de la confiture. Julie, elle, mangeait son petit déjeuner en silence, en observant les deux dresseurs en se demandant comment ils avaient pu bien faire pour se dire : « On va bosser ensemble ». Anthony semblait considérer sa sœur comme un monstre dangereux et sa sœur le considérait avec un mépris et une haine telle que la jeune femme crut ne pas reconnaître (encore) sa grande sœur. Louise n’avait jamais éprouvé la moindre haine pour quelqu’un. Du mépris ? Oui. De la colère ? Oui. Mais une haine profonde et viscérale ? Jamais. Ça n’appartenait pas au caractère de celle que Juliadora avait connue.

Elle allait lui demander des explications mais la sonnerie du téléphone de sa sœur retenti soudainement avant que la jeune femme ait pu ouvrir la bouche. Louise marmonna une excuse avant de décrocher.

- Allo oui ? Oui c’est moi. Ah c’est vous. Vous avez obtenu les infos que je vous avais demandé ? Merveilleux. Humm, par contre, je vais vous demander de me rejoindre pour me fournir ces informations si cela ne vous dérange pas. Pourquoi ? Par soucis de discrétion. Et, un dernier détail avant de vous fournir l’adresse : comment vous débrouillez-vous en combat Pokémon ? Je vois. Très bien. Ça ira. Ne vous en faites pas, pour le moment vous faites un boulot formidable. Il faudra juste vérifier la qualité de ce que vous aurez récolté. Très bien, je verrais après tout.

Sa sœur fournit l’adresse de Romant-sous-bois et raccrocha avant de retourner à la table. Elle prit une cuillère de céréales avant de déclarer :

- C’était mon contact. Par chance il est à Illumis. Il sera sur place d’ici demain. Il me dit avoir récupéré des informations sur l’identité de ce que nous affrontons ainsi que sur leur couverture publique. Et il possède un niveau équivalent au tien Julie en combat.

- Ce qui signifie ? Demanda l’intéressée, méfiante.

- Que tu n’es pas une débutante mais que tu vas avoir besoin d’entraînement.

- On peut au moins savoir qui est ton contact ? Soupira méchamment Anthony. Si ça se trouve tu t’es fait arnaquer comme une débutante et on plonge tête la première dans un piège.

- Il s’agit de l’homme aux milles contacts, répliqua Louglaciale avec répartie. Mais ça m’étonnerait beaucoup que tu puisses connaître. Lui au moins ne joue pas avec la loi et il essaie d’avoir un vrai boulot.

- Et moi au moins je n’essaie pas de me cacher derrière un masque de fille ordinaire. Y a rien qui peut cacher les horreurs que t’as fait.

- Parce que c’est moi qui t’ai fait du mal ? Failli s’étrangler la femme de trente ans, rouge de rage. Après ce que tu m’as fait tu OSES me faire passer pour la méchante ? Et si au moins tu tentais ne serait-ce de t’expliquer sur le pourquoi du comment on avancerait !

- Je n’ai rien à te dire, cracha Anthony.

Julie eut soudainement très peur. On aurait dit qu’ils allaient se jeter l’un sur l’autre et s’entredéchirer. Mais Louglaciale se reprit en première. Elle finit son verre de jus de baie et annonça qu’elle allait s’entraîner dans le marais avant de s’en aller, laissant Anthony fulminer en silence et Julie qui se posait de plus en plus de questions. Sur ce qui avait bien pu se passer entre ces deux-là.



6 années auparavant, à Flusselles.

Louglaciale serrait le plus fort possible sa tasse de chocolat chaud pour tenter de réchauffer ses mains frigorifiées. Elle réfléchissait également aux possibilités qui s’offraient à elle. Alex avait quitté les routes et les voyages pour se consacrer à ses études. Dire qu’à peine une heure auparavant ils se faisaient un duel magistral et obtenaient leur gemme sésame auprès de Cornélia, l’héritière de Yantrheiz.

La jeune femme savait que cette quête était la dernière qu’elle aurait avec Alex mais jusqu’à ce qu’il lui dise au revoir sur la place du cadran solaire de Flusselles, la réalité ne l’avait pas vraiment frappée. Certes, Ils s’étaient perdus de vue un moment auparavant (Alex en était à sa quatrième année d’étude). Elle en avait profité pour faire les ligues de Kanto et avait enregistré un album avec des amis. Mais ce genre de carrière ne l’intéressait pas vraiment. Elle avait chanté pour dépanner, même si elle adorait ça. Pour elle c’était un loisir, pas un métier. Devenir maitre d’une ligue était tentant mais elle y renonça. C’était beaucoup de responsabilités et surtout, tu n’étais plus libre de tes mouvements. Louise aimait la liberté.

Mais que pouvait-elle bien faire ? Continuer à voyager et gagner sa vie ne faisant des duels Pokémons ? ça aussi ça la tentait moyen. Elle voulait avoir un chez-elle et ne se voyait pas être sur les routes toute sa vie.

Puis elle sortit de son sac son carnet et mit son imagination en marche. Quand elle avait besoin de réfléchir ou tout simplement de s’évader, elle écrivait ou simplement relisait ce qui constituait ce carnet. Il y avait des histoires, des mondes alternatifs, des races, des personnages, des technologies inconnues venues d’un futur certainement utopique… Elle créait sans difficulté, c’était presque naturel chez elle. C’est alors qu’elle remarqua un des personnages qu’elle avait créés : une jeune femme du moyen âge qui avait perdu son partenaire. Une idée d’histoire germa en elle.

Elle entoura le personnage, prit une nouvelle page de son carnet et se mit à écrire un synopsis à la fois simple et complet. La jeune femme venait de perdre son Rocabot et, voulant lui rendre hommage, décide de traverser sa région natale afin de lui offrir une sépulture digne de lui. Elle la trouvera au sommet du Mt Memoria de Hoenn.

Enfin satisfaite du résultat, elle referma son carnet, termina son chocolat chaud qui ne l’était plus vraiment, paya la serveuse avant de rejoindre sa chambre d’hôtel. Elle venait de s’installer dans la pièce emplie d’une chaleur douce et réconfortante quand sa Pokémontre sonna. Surprise, la jeune dresseuse décrocha et fut surprise de reconnaître une de ses meilleures amies, Claire qui vivait justement à Flusselles. Comment savait-elle que Louise se trouvait en ville ? Elle était devin il n’y avait pas d’autre explication.

- Salut Loulou, tu vas bien ? demanda-t-elle d’une voix très douce.

Claire Carpenter avait une voix apaisante, faite pour murmurer et conseiller, rassurer ceux qui en avaient le besoin. Cette jeune femme avait beau n’avoir qu’un an de plus que Louise elle avait fini ses études et était devenue assistante sociale à la grande ville de Flusselles. Sans être milliardaire elle gagnait bien sa vie et elle était heureuse. Il ne lui manquait qu’un petit ami pour pouvoir compléter la boucle de la vie tranquille bien remplie. Mais ça rappela que Louise n’en avait pas encore de petit copain.

- Ça va très bien Claire. Comment vas-tu ma chérie ? Et ton Mimantis ? Comment va-t-il ?

- Très bien, je te remercie Loulou, répondit la voix douce de Claire. J’ai appris que tu étais en ville jusqu’à au moins demain matin. Je me suis dit qu’on pouvait se voir ce soir si ça ne te dérange pas bien sûr.

- Si ça me dérange ? Tu plaisantes Claire ? Comme si passer du temps avec toi pouvait être autre chose que du plaisir. Je serais ravie de passer la soirée avec toi.

- Fantastique. Je termine mon service à 19h. On a qu’à se retrouver au restaurant juste en face de la place du cadran à 19h30.

- Pas de soucis. Je serais au rendez-vous. A tout à l’heure ma chérie.

- A tout à l’heure ma Loulou.

L’appel se termina après. Toute la flemme et la fatigue de retourner dehors s’étaient envolées. Louise regarda l’heure et vit qu’il lui restait environ deux heures pour se changer et se préparer.

Deux heures plus tard, les deux jeunes femmes discutaient tranquillement devant un délicieux repas et en savourant un vin absolument exquis. Elles se racontèrent leur quotidien, ce qu’elles attendaient des années à venir, ce que devenaient leurs Pokémons…

En ce monde il était obligatoire de posséder un Pokémon mais peu l’utilisaient pour combattre. La loi stipulait qu’il s’agissait d’une façon de se défendre. Il était vrai que ces créatures permettaient de défendre la vie d’un être humain plus efficacement qu’une centaine d’armes à feu. Mais certaines personnes n’avaient pas à vocation de devenir dresseur. Claire en faisait partie. Quand elle avait pu obtenir son partenaire, elle ne l’avait pas fait évoluer et elle n’avait pas voyagé. Elle s’était concentrée sur ses études et son Mimantis était devenu un confident et une aide dans son travail. Son apparence mignonne et son tempérament calme et doux faisait que beaucoup des contrats que Claire avait à charges étaient très vites traités et les résultats étaient nettement supérieurs à ses collègues.
Mimantis ne savait pas trop se battre mais il excellait dans les soins et l’apaisement.

- Alors tu ne sais pas vraiment quoi faire maintenant que tu voyages seule ? Demanda Claire.

- Je me suis dit que je pourrais essayer d’écrire un livre. J’ai eu une excellente idée cette après-midi. Il faut que j’essaie en tout cas.

- Un livre ? Quel genre de livre exactement ? Après tu avais bien réussi avec ton album il y a deux ans. Sous quel pseudo tu t’étais présentée ?

- Louglaciale. Pour le moment je sais pas trop. Je pense que le plus raisonnable serait un recueil de nouvelles. Un roman me semble un peu compliqué pour commencer.

- Mais tu as de l’expérience dans l’écriture. Je suis sûre que tu peux t’en sortir. Ce qu’il te faut, c’est trouver une maison d’édition correcte et suffisamment
influente pour te propulser et te proposer un bon contrat. Tu veux que je me renseigne pour toi ?

- Non merci c’est gentil. Je préfère d’abord avoir du contenu avant de contacter une maison d’édition.

- Alors ? Tu penses faire quoi ? Retourner chez toi pour écrire tranquille ?

Louise secoua la tête.

- J’ai besoin de voyager. Je vais écrire sur le Mt Memoria à Hoenn. Je pense que le meilleur moyen de le décrire c’est de s’y rendre. Et je pourrais faire la quête des badges du coin.

- Tu ne te remets pas de ta défaite au tournois de Kalos et de Kanto ?

- La première fois, c’était prévisible que je perde. J’aurais juste espérée atteindre les demi-finales.

- Les quarts de finales pour une première c’est pas rien.

- Sans doute. Mais à Kanto, j’aurais dû vaincre ce dresseur. Il ne m’a eu que sur un coup de chance. Normalement je tenais son coup. Et j’aurais pu affronter le conseil des 4 et me mesurer au maître.

- Ne t’inquiète pas, sourit doucement Claire. Tu t’améliores de plus en plus. Et tu as pu maîtriser la méga évolution non ?

- Oui. C’était un moment très fort pour Nocta et moi. Tu aurais dû voir notre première méga évolution. J’avais l’impression de grandir avec lui. Que je lui insufflais toute ma confiance et toute mon énergie pour le rendre plus fort.

- C’est normal. Le lien que tu entretiens avec ton Pokémon est vraiment puissant. C’est juste un peu dommage que tu n’aies pas un garçon avec qui partager ce genre de lien.

- Oh, moi et les garçons, plaisanta la jeune femme d’un ton un poil acide. Franchement il est exceptionnel le mec qui acceptera de sortir avec moi.

- Tu te surestimes beaucoup trop, répliqua Claire. Bon, je te propose un bar avant qu’on se sépare. A cette heure-ci, il y a toujours des beaux gentlemen qui profitent de la nuit pour trouver l’âme sœur.

- Ou un coup pour s’amuser, marmonna la dresseuse.

Non, elle n’avait jamais eu de bonnes relations avec des garçons. Soit ils étaient des amis, soient ils étaient tellement stupides ou cruels qu’envisager de sortir avec eux était totalement exclu.

- En plus, ajouta Claire en souriant. Tu as chanté dans un album qui a encore aujourd’hui un petit succès. Tu avais une voix magnifique.

- Mais je préfère de loin garder ma voix pour moi.

Claire haussa les épaules l’air de dire « tu es seul maître de tes décisions ». Le bar était en effet un endroit plutôt tranquille et sympathique. Les gens étaient polis, respectueux de l’intimité des gens et ne dérangeaient en aucun cas la tranquillité et hurlant ou en faisant les fous. La règle d’or était de faire sortir un des Pokémons hors de eur Pokéball. Pour montrer ce que l’on possédait aux dresseurs débutants qui voulaient remplir leur Pokédex.

Elles se commandèrent un cocktail avec alcool pour Claire et sans alcool pour Louise et continuèrent à discuter mais sur un tout autre sujet : les garçons.
Au bout de vingt minutes passées à comparer tel ou tel garçon qui consommait dans le bar, Claire du s’absenter un peu pour aller aux toilettes, suivie par son Mimantis tout mignon. La dresseuse restée à table sirota son cocktail un petit moment tandis que Nocta somnolait. Son pendentif aux motifs égyptiens contenant sa gemme ne semblait pas le déranger ou le gêner dans ses mouvements. Elle était tellement fière d’avoir pu maîtriser cette nouvelle forme d’évolution. Ils allaient devenir tellement forts, les ligues du monde n’allaient pas en revenir.

- Excusez-moi mademoiselle ?

Louise releva la tête et croisa le regard d’un garçon qui détourna aussitôt les yeux, le visage tout rouge.

- Puis-je vous aider ? Demanda poliment la jeune dresseuse.

Le garçon était accompagné d’un Pokémon qu’elle n’avait jamais vu auparavant. Il ressemblait à un mélange entre un Ninjask et un Scarabrute. Il bourdonnait mollement et une décharge d’électricité statique s’installait petit à petit.

- Euh, en fait, je voulais savoir d’où venait votre Pokémon, demanda d’un air penaud le garçon en désignant Nocta.

- Vous n’êtes pas de Kalos ? S’étonna Louise.

- Non, je viens d’arriver d’Alola et je ne connais pas encore les espèces qui vivent ici.

- Alors votre Pokémon est originaire d’Alola ?

- Oui. C’est un Lucanon, un Pokémon insecte/électrique.

- Un double type intéressant, murmura la jeune femme. Mon partenaire est un Noctali, une des évolutions possibles d’Evoli.

- Vraiment ? Il existe un Pokémon capable d’évoluer de plusieurs façons ici ? Oh euh, puis-je ? Demanda-t-il en désignant une des chaises.

- Mais faites donc, sourit Louise.

Elle ne l’avait remarquée qu’à peine mais il était pas laid sans être un sex symbol non plus. Juste ce qu’il fallait en fait. Son visage était bien proportionné et ses cheveux bruns se mariaient plutôt bien avec son teint bronzé. Ils discutèrent un moment seul à seule sans plus faire attention à ce qu’il se passait autour d’eux. Ils semblaient se connaître depuis si longtemps et les mots venaient facilement. Ils durent se résoudre à se séparer quand le bar ferma ses portes. Avant de partir chacun de leurs côtés, Louise tint à connaître le nom de ce garçon si gentil.

Ce dernier, surpris, lui répondit en souriant de façon charmante.

- Moi c’est Anthony Ghetiard. Enchanté euh…

- Louise Harris. Ravie de faire ta connaissance Anthony. On pourra se revoir ?

Le sourire d’Anthony s’élargit.

- J’en serais ravi ma chère Louise…