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Station Victoire [OS] de M@xime1086



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Informations

» Auteur : M@xime1086 - Voir le profil
» Créé le 30/07/2016 à 11:09
» Dernière mise à jour le 30/07/2016 à 14:48

» Mots-clés :   Drame   Johto

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Station Victoire (1991 - 1999)
« Poursuivons notre visite de la station Victoire. Voici le monument central de la gare. »

Le groupe, constitué de touristes, s'arrêta un instant face à la statue que leur désignait le guide. Un silence pesant s'installa, entrecoupé de flashs provenant d'appareils photo. La partie de la gare que ces étrangers visitaient devint aussi silencieuse que lors de funérailles. Personne, pas même le guide, n'osa interrompre ce moment de recueillement.
Un petit garçon hasarda une question qui fit se retourner toutes les têtes.

« Pourquoi que tout le monde se tait ? demanda-t-il, les mains occupées par le jouet qu'il tenait. »

La maman, gênée par les regards désapprobateurs que lui adressait le groupe, gronda l'enfant. Parmi cette foule, seul le guide avait gardé son flegme professionnel. Il s'avança vers le garçon, scindant le troupeau en deux groupes.

« Ta question est pertinente. Peu de gens connaissent la véritable histoire de la station Victoire. »

Doucement, il entraîna le gamin devant la statue qui imposait silence. Les doigts menus de l'enfant agrippèrent le jouet : un train composé de trois wagons. Les yeux portés sur le monument, il attendit des explications.

« Tu aimes les trains ?
- Oh oui ! Beaucoup ! Plus tard je veux en conduire un ! »

Le guide, un jeune homme étudiant l'Histoire, posa une main sur la tête du garçon.

« Victoire aussi adorait les trains... laissa-t-il échapper avant de commencer le récit que tous les touristes attendaient. »

***
Doublonville était la ville où était née et où avait grandi Victoire. Pour cette petite fille âgée de huit ans, le monde entier se résumait aux buildings de la métropole. Elle n'avait jamais quitté les rues bondées de cette ville fréquentée par de nombreux dresseurs parcourant la région.

C'était au bras de son père et de son papy qu'elle arpentait les rues commerçantes ainsi que les parcs publics. Sous les arbres qui la protégeaient des étés trop chauds, la petite fille, des heures durant, s'amusait avec le train en bois que lui avait fabriqué son grand-père. Ce dernier construisait des trains tandis que le père de Victoire les conduisait. C'est pour cette simple raison que la petite fille était attirée par ces véhicules en métal. La maison où elle vivait était un vrai musée où se trouvaient exposés de nombreux modèle de wagons. Contrairement à ce qu'on pouvait penser, son père la laissait jouer à condition de ne pas les abîmer. Elle avait reçu à son anniversaire le train en bois avec lequel elle s'amusait tous les jours.

Un jour, son grand-père débarqua à l'improviste chez elle. Il avait amené avec lui une bouteille de champagne qu'il s'empressa d'ouvrir avant d'annoncer une grande nouvelle.

« Je suis responsable de la construction du Train Magnet reliant la région de Kanto et de Johto ! »

Un tel chantier allait amorcer de la plus belle manière la fin de la carrière de ce jeune sexagénaire. Une sorte de consécration que ce nouveau Train Magnet ! Une exclusivité mondiale !
Victoire ne comprenait pas l'enthousiasme de son grand-père.

« Tu as déjà construit des trains. Pourquoi celui-là est mieux que les autres ?
- C'est le premier moyen de transport électrique qui reliera deux régions du monde. Cela ne s'est jamais vu ! Et j'en serais le précurseur ! »

En effet, dans le monde, les trains servaient surtout à lier deux villes et non deux régions. La nuance était difficile à cerner pour Victoire qui ne voyait pas de grandes différences.

Commencèrent alors des travaux de grand envergure. Le chantier se situait à Doublonville même. Ce fut l'occasion pour la petite fille d'aller souvent après l'école rejoindre son papy sur place. Son sac posé sur l'épaule, elle s'empressait d'échapper aux devoirs pour aller constater la naissance progressive du Train Magnet. Là-bas, elle observait tout un tas de Pokémon. Ils travaillaient tous ensemble, humains et Pokémon, main dans la main.

Ce qu'elle faisait pour ne pas déranger son grand-père pendant son travail, c'était de s'asseoir sur un monticule de tonneaux en acier. Là, elle avait vue sur l'ensemble du chantier et pouvait déguster tranquillement son goûter tout en balançant ses jambes au vent.
Elle y restait des heures, dans l'attente d'être chassée par le soleil couchant. Les bruits familiers des pelleteuses la tiraient de sa rêverie dans laquelle elle s'imaginait conduire le Train Magnet. Les scies ainsi que les bruits sourds des marteaux qui cognaient le métal brut sonnaient au creux de son oreille comme une mélodie dont elle connaissait la moindre note.

Il lui arrivait d'être rejoint par un Machopeur qu'elle avait baptisé Colosse. Il prenait sa pause aux côtés de cette petite fille curieuse. Elle partageait son goûter ainsi que son enthousiasme de voir très vite terminé ce train révolutionnaire.
Le Pokémon combat lui servait également de guide quand, lasse d'être assise dans une posture de contemplation, elle s'aventurait discrètement dans le chantier. Bien sûr, une gamine de son âge se verrait interdire l'accès à cet endroit dangereux. Victoire réussissait à échapper à la vigilance des ouvriers et de son grand-père pour découvrir les moindres recoins de cet endroit. A chacune de ses escapades, elle découvrait de nouveaux lieux à explorer en compagnie de son ami. Elle restait sérieuse et rentrait systématiquement à la maison quand le soleil chutait entre les buildings de la cité. Colosse l'accompagnait jusque chez elle si bien que papy Louis découvrit l'amitié naissante entre un de ses ouvriers Pokémon et sa petite-fille. Il appréciait de la savoir entre les mains protecteurs de ce Machopeur. Une gamine de son âge devait se familiariser avec les Pokémon. Le plus tôt était le mieux.

La veille de l'inauguration de la gare et de son nouveau train, Victoire fit entorse à la règle qu'elle s'était toujours assidûment appliquée à elle-même. Elle donna rendez-vous à son fidèle Colosse devant le chantier. Ils y restèrent toute la nuit, emmitouflés dans des couvertures en laine de Wattouat. Le soleil qui vint les surprendre rendit des couleurs aux outils laissés sur place par les ouvriers. Le chantier prenait l'apparence d'un champ de bataille abandonné par les soldats en déroute. Pourtant la débâcle qui y régnait attendrit Victoire. Elle sauta sur le sol sablonneux et inspecta ce qui restait de la création du Train Magnet. Il lui revint en mémoire certains moments précis de l'éclosion de cette machine tout de fer fabriquée. Ses yeux se posaient sur certains outils qu'elle redécouvrait sous la lumière délivrée par l'astre solaire. Quand elle posa ses doigts fins sur le manche d'un marteau, elle crut sentir la sueur des ouvriers qui l'avaient manié pour faire naître cet ensemble de wagons.

Colosse lui fit remarquer par de mélodieux rugissements qu'il était temps de rentrer avant que sa famille ne s'inquiète de son absence. Victoire saisit la main de son ami et tous deux quittèrent ce qui fut pour la fillette un véritable sanctuaire à préserver.
Heureusement, personne n'était levé quand elle revint chez elle. Elle dût feindre de se réveiller dans son lit, quand sa mère vint l'avertir qu'il fallait se lever.

Dehors, le temps était digne des plus beaux étés. Victoire avait décidé de mettre une longue robe rouge carmin. Elle avait demandé à sa mère de relever ses cheveux en une queue de cheval, ce qu'elle ne faisait jamais. Son enthousiasme était comparable à celui de son papy lors de sa visite quelques mois plus tôt, au moment de l'annonce du projet.

Colosse lui offrit son bras pour la guider jusqu'à la gare de Doublonville. Le trajet fut des plus agréables, rythmé par les sourires incessants de Victoire, entourée par sa mère et par son grand-père.

La gare se dessinait parmi la multitude de gratte-ciels. Sa toiture en verre projetait sur le sol des éclats de diamants. Sa physionomie tout en pylônes d'acier et de pierre faisait penser à un temple ancien, comme on en trouve aux ruines Alpha.
Un monde fou était venu assister à l'inauguration de la gare ainsi qu'au premier trajet du Train Magnet une fois entré en gare. Heureusement, Victoire n'eut pas le temps de sentir son cœur s'emballer devant cette foule de touristes. Grâce au travail qu'avait fourni son grand-père, les quatre visiteurs étaient des invités de marque.

Sur le quai qui n'accueillait que des figures de marques, Louis entama un bref discours, remerciant les deux villes qui hébergeaient les gares, Doublonville et Safrania. Il remercia sa famille, sa petite-fille Victoire qui l'avait inspiré. Il lui fit un clin d’œil complice en quittant l'estrade.
Le père de Victoire n'était pas présent à cette cérémonie puisqu'il était l'acteur majeur de l'inauguration du train. C'était lui qui le conduisait de Safrania à Doublonville. Il était parti quelques jours avant pour prendre son poste et devait arriver dans quelques minutes.

La main de Colosse serra celle de Victoire. L'émotion d'assister à cet instant historique avec cette petite fille le rendait tout patraque. Tous les invités avaient le visage tourné dans la direction où devait entrer en gare le train. Il y eut un long silence, le même que ceux qui précèdent les explosions de joie.

« Il arrive, murmura alors Louis en distinguant le bruit régulier des roues qui se mouvaient sur les bandes formées par les rails. »

Le roulement devint plus fort à mesure que le train s'approchait. Victoire serra plus fort la main de Colosse. Le son qui grandissait, qui se répercutait entre les murs froids et vides de la gare, sonnait tel un glas.

Colosse ne comprit pas pourquoi la petite fille lui avait lâché soudain la main. Elle s'était mise à courir, pour arriver tout au bout de la gare et accueillir son père lorsqu'il quitterait la cabine. Le serpent de fer stoppa progressivement sa course quoique gardant une bonne vitesse.
La petite Victoire, en se retournant, aperçut le visage figé de son père aux commandes, à travers la vitre, à l'avant du train. Elle se mit à courir encore plus vite ; se rapprocha de plus en plus près de la bordure.

Courir à reculons n'était pas dans ses habitudes et elle trébucha en faisant signe à son père. Un signe de bon retour.
La marque d'affection s'évanouit à l'instant où ses pieds se mêlèrent au bas de sa robe. Son corps pivota brusquement à sa gauche ; au même moment la tête du train la percuta alors qu'il n'avait pas encore terminé sa course.

D'urgence, la machine s'arrêta. Colosse courut aussi vite que le lui permettaient ses jambes musclées. La mère de Victoire ainsi que son grand-père étaient à ses talons, répétant le prénom de la petite fille entre sanglots et terreur.

Le père, qui n'avait pas levé la tête des commandes, réagit trop tard. Il sortit de la cabine, tentant de comprendre ce qui n'allait pas. Lorsqu'il découvrit le corps de son enfant enveloppé dans une robe aussi rouge que le sang qui s'échappait de ses graves blessures, il tomba à genoux. Incapable de détourner son regard du spectacle d'horreur dont il était l'unique responsable, il fallut l'éloigner.

Les secours arrivèrent, hélas trop tard. L'impact fut violent, la petite fille avait perdu trop de sang.

***
Les touristes qui n'écoutaient plus l'histoire, prenaient des photos de plus belle. L'anecdote leur plaisait. Ils souriaient. Le petit garçon pleurait, étreignant le petit train dans ses bras. La mère regardait toutes ces personnes qui entouraient la statue avec dégoût et mépris. Ils n'avaient que faire de cette tragédie ; ce qu'ils voulaient c'était une histoire à raconter à leurs amis une fois de retour chez eux. Une anecdote au cours d'un repas, au milieu des rires.

Le guide avait fermé les yeux pendant son récit, comme pour mieux se souvenir des lieux, des protagonistes de cette histoire vraie. Comme si lui aussi avait été acteur de la scène finale.

« Ensuite, conclut-il, le père de Victoire refusa de conduire à nouveau. Il sentait sur ses mains posées sur les commandes le sang de sa fille qu'il avait tué. Il quitta la région avec sa femme. Il apprit que le maire avait surnommé la gare et y avait construit une statue pour rendre hommage à sa fille disparue, mais aussi au grand-père Louis sans qui le projet n'aurait jamais vu le jour. Ce dernier, qui avait tant attendu que le Train Magnet fusse la consécration de sa carrière, se mit à la retraite, se sentant lui aussi responsable de la mort de la petite-fille qu'il n'aurait jamais l'occasion de voir grandir. »

Le jeune guide posa sa main au pied de la statue, là où une inscription y était gravée.

« Machopeur, en souvenir d'elle, s'accrocha à ce qu'il croyait être la solution pour lui rendre hommage. Il devint conducteur de train, quitta lui aussi la région. La petite Victoire lui avait transmis la passion des wagons et de son univers. Pour ne pas éteindre le souvenir et la passion, le Pokémon voulut croire que sa mort n'avait pas été vaine. »

Les touristes s'amassèrent dans la boutique de souvenirs, n'écoutant plus la fin du récit. Seuls devant l'immense statue restaient la mère et son enfant, serrés dans une étreinte puissante. La statue sévère jetait sur eux un regard que la femme interpréta comme une protection pour son enfant qui adorait les trains.

Cette statue symbolise la naissance du progrès
Pour rendre hommage à son amour des trains
Nous avons baptisé cette gare STATION VICTOIRE
(1991 - 1999)