Bienvenue à Lavanville de Xabab

Peter donna les directives pour l'installation de la grande chasse aux œufs qui devait avoir lieu dans l'après-midi puis se prépara à rentrer à l'hôtel. Il fallait qu'il voit son fils au moins une fois dans la matinée afin de s'assurer qu'il aille bien et que celle qu'il craignait ne soit pas entrée dans sa tête comme elle menaçait de le faire.
L'homme le plus riche de la ville avait quitté sa suite tôt dans la matinée afin de s'assurer que tout soit en place pour le spectacle de ce soir. Il ne pouvait se permettre de décevoir son patron.

Il retrouva comme prévu sa voiture garée à la sortie du parc par son chauffeur et y monta. Peter avait congédié ce dernier pour le reste de la matinée, lui demandant de le laisser rentrer seul après la réunion.
Peter démarra le moteur et se mit en route pour la deuxième réunion de la matinée, un rendez-vous qu'il ne pouvait manquer malgré l'envie qu'il ressentait de revoir son fils.

Comme d'habitude lorsqu'il était pressé Peter ne respecta aucunement le code de la route, passant au feu rouge quand il le pouvait et n'attendant pas aux stops. De toute manière il ne craignait rien et la police était à ses pieds, tout comme le reste de cette misérable ville en vérité. Et c'était un avantage que Peter n'oubliait pas souvent.
Au bout d'une dizaine de minutes le gérant de l'hôtel gara sa voiture devant la porte d'une vieille ferme située à l'extérieur de la ville.

C'était ici qu'il avait rendez-vous avec l'un de ceux qui donnaient les ordres. Il ne savait pas encore la raison pour laquelle celui-ci l'avait contacté et n'avait pas envie de l'apprendre. Ce type n'était pas des plus agréables et chacune de leur rencontre provoquait des frissons dans tout son corps.
Néanmoins il hâta le pas afin d'être débarrassé au plus vite de cette tâche et rentrer voir son fils au plus vite.

La ferme dans laquelle il se rendait était désert depuis des années, depuis que la famille qui y vivait ait mystérieusement disparu. Bien entendu cela n'avait rien d'un mystère aux yeux de Peter mais il préférait rentrer dans le jeu des habitants de sa ville et leur laisser croire à une histoire de fantômes des plus classiques.
Cette vieille bâtisse se situait entre les bois et la ville, ne semblant appartenir à aucun des deux mondes.

En avançant en direction de la porte en bois qui pendait lamentablement sur ses gonds, Peter ne put s'empêcher d'admirer cet endroit avec une certaine nostalgie.
Il se rappelait de ces fenêtres quand celles-ci avaient encore des vitres et des volets peints d'une agréable couleur violette. Le toit en ruine faisait remonter en lui de multiples souvenirs dont celui du jour où il avait été posé ; Peter s'en souvenait plus que possible. Il laissa son regard aller à la fontaine de pierre dont une partie avait été arrachée, à la balançoire dont le siège trônait dans la boue ou encore vers une fenêtre de l'étage qu'il imaginait encore éclairé.

Sa rêverie aurait pu durer encore longtemps, comme toutes les fois où il venait en cet endroit, si une voix n'était venue l'interrompre.
« Nous avons à parler et vous n'êtes pas ici pour admirer cette relique. »

Elle n'avait rien d'humain. Cette voix possédait un ton grave et un timbre qui semblaient surgir tout droit d'un gouffre sans fond avant d'atteindre les oreilles de son interlocuteur. Chacune de ses syllabes vibraient dans la gorge de celui qui les prononçait et la fin des mots sonnaient telle une attaque sonore dans l'esprit de Peter, claquante et tranchante à la fois.

Le gérant de l'hôtel garda son calme comme il le faisait à chaque rencontre et se retourna. Il fit alors face à la plus grande peur des êtres humains qui, étrangement, n'avait presque aucun effet sur lui.
Enveloppé d'une cape qui recouvrait tout son corps jusqu'au bout de ses doigts, ce dernier le fixait de deux yeux rouges qui se démarquaient dans les ténèbres de la cagoule qui dissimulait son visage. Il tenait une faux sur son épaule qui aurait fait trembler n'importe quel homme excepté celui qui se trouvait justement en face de lui.

Peter s'inclina et essaya de ne faire passer aucune émotion sur son visage.
« Je vous écoute, annonça-t-il ensuite sans perdre de temps.
– Je veux que vous fassiez en sorte que celle qui vous hante revienne dans le monde qui lui appartient et cesse de brouiller les cartes du jeu. Le maître n'apprécie pas du tout de la savoir en liberté en train de jouer avec nous.
– Ce serait un plaisir mais comprenez que je l'aurais déjà fait si cela avait été en mon pouvoir. »

Son interlocuteur se mit à rire, ce qui ne surprit pas Peter qui connaissait ce genre de réaction de sa part. Il n'ajouta donc rien de plus et attendit qu'il lui révèle la suite des opérations qui commençaient à l'intéresser vivement, le départ de son ancienne femme ne pouvant lui faire que du bien.
« Je suis Thanatos, dieu Pokemon de la mort et serviteur de celui dont les mortels évitent de parler jusque dans leurs pires cauchemars. Penses-tu réellement que je n'ai pas les moyens de te conférer le pouvoir de renvoyer cette idiote dans son monde ? »

Peter ne répondit rien mais lui fit signe qu'il avait compris et attendait la suite de ses ordres. Le pokemon tendit vers lui une main osseuse et dépourvue de chair dans sa direction sans ajouter le moindre mot. Le gérant de l'hôtel tendit la sienne dans sa direction et reçu une simple dague de la part de son employeur.
« Je peux la tuer avec ça ? demanda-t-il tout en sachant parfaitement la réponse.
– Mieux, répondit Thanatos. Tu peux la tuer mais me rendre un autre service.
– Lequel ? »

Le dieu fit quelques pas avant de répondre, marquant un silence pesant entre eux.
« Il y a un gêneur dont je voudrais me débarrasser, le spectre d'un pokemon qui est venu avec la gamine dont nous avons déjà parlé. J'ai eu assez de souci en tuant le gros lard contre l'avis du maître, il ne me pardonnera pas de laisser en vie le spectre de ce pokemon.
– Mais il ne peut pas parler ? rétorqua Peter. Les spectres ne peuvent rien révéler aux humains sur ce qu'ils entendant dans l'autre monde.
– C'est vrai ? lui demanda ironiquement l'image de la mort. Dans ce cas pourquoi ton fils sait comment sa mère est morte ? »

Le sang de Peter se glaça dans ses veines et il crut voir un sourire se dessiner sous la cagoule de son interlocuteur.
« Les temps ont changés, continua celui-ci. Les morts parviennent à fuir le royaume dans lequel nous les enfermons, ils rejoignent les mortels et quittent parfois la ville. Sa puissance faiblit et le processus doit avoir lieu au plus vite. Je n'ose imaginer ce qui arrivera si nous ne faisons rien. »

Sur ce Thanatos recula de quelques pas et fit une révérence, sa faux entre les doigts.
« Fais ton choix Peter mais fais le bon. Nous ne t'avons pas donné autant pour que tu en viennes à faiblir. »
Un nuage de fumée apparut au pied de la mort et celle-ci s'évanouit aux yeux de l'humain qu'elle était venu voir. Celui-ci se dirigea rapidement vers sa voiture dès qu'elle fut partie et démarra le moteur.
Son cœur battait de plus en plus vite à l'idée que son fils soit au courant de tout.