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Premières neiges (version modifiée pour le concours de l'hiver 2010) de dragibus57



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Informations

» Auteur : dragibus57 - Voir le profil
» Créé le 27/11/2009 à 13:35
» Dernière mise à jour le 07/02/2010 à 23:55

» Mots-clés :   Absence d'humains   Absence de combats   Drame   One-shot

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Première neige (deuxième version)
Écoute...

Encore...

Écoute ce silence...

Immaculé.
Dense.
Lumineux.

Il a neigé.

Il a neigé cette nuit sur la steppe immense.
Les dernières étoiles luttent avec les premières lueurs de l'aube pour faire scintiller le manteau de diamants éphémères.
Rien ne bouge.
Tout s'accorde à préparer ce moment parfait de la naissance du jour, quand le soleil pointe son premier doigt de lumière sur la terre endormie.

Tout s'accorde à préparer ce moment parfait de la naissance, quand l'œuf se fendille, libérant le petit qui cherche la chaleur de sa mère endormie.

Assis dans une anfractuosité de la roche, le féroce Maganon referme ses bras protecteurs autour du Magby nouveau-né, soufflant doucement sur lui pour sécher le pelage rose encore humide.
Poursuivi sans relâche depuis plusieurs jours, le Pokémon feu n'a eu d'autre choix que la montagne inhospitalière pour donner naissance à son petit.
Le bébé goûte l'instant délicieux de cette intimité chaude et nouvelle.
Ses yeux sont encore fermés.
Bientôt il les ouvrira sur le monde.

********************
Il a choisi une matinée ensoleillée pour commencer la merveilleuse découverte de la vie... Les premiers pas.

L'air est transparent, uniquement troublé par les petits jets de vapeur qui s'échappent des minuscules narines. La démarche est hésitante, expérimentale.

Un petit pied griffu effleure précautionneusement la surface blanche. Afflux immédiat de sensations nouvelles.
Froidure désagréable, semblable à celle de l'air qui emplit ses petits poumons.
Frisson qui remonte le long de son échine jusqu'en haut des épaules.
Humidité qui s'insinue entre les poils courts et fins du pelage peu adapté.

Nouvelle expérience. La patte pénètre profondément dans l'épaisseur ouatée. Angoisse de l'incertitude.
Il la retire précipitamment et la secoue comiquement pour en chasser les flocons duveteux.
En posant son large pied bien à plat, il se rend compte qu'il peut tenir l'équilibre sans s'enfoncer.

Courageux, il tente un deuxième pas, incertain. Puis un autre, plus ferme. Il marche !

Il découvre ébloui l'immensité blanche qui s'ouvre devant lui. Aussi loin que porte son regard, le paysage enneigé dévale mollement le coteau jusqu'à l'horizon, là où le ciel semble s'unir à la terre. Les arbres nus festonnés de givre scintillent sous le soleil hivernal, allumant la plaine de minuscules éclats d'étoiles. Le miroir d'un étang lustré par le vent reflète les filaments cotonneux d'un nuage égaré.

Il s'enhardit et trottine. Chacun de ses pas glissés laisse une légère traînée ourlée de poudreuse.
Il s'émerveille des traces fraîches qu'il dessine et des arabesques complexes qui composent sur la toile vierge le plus improbable des tableaux.

Maman Maganon n'est pas loin. Elle veille, couvant d'un regard anxieux son fils qui s'éloigne dans ce milieu hostile.

Un Cadoizo attire soudain son regard. Le nez en l'air, Magby repère d'un œil particulièrement intéressé la direction que prend l'oiseau, se tordant le cou pour le suivre jusqu'à son nid.
Un rocher affleure sous la neige. Chute brutale, tête la première dans le tapis ouaté.
Il se redresse vivement, saisi par la brutalité du froid, le museau couvert d'une fine pellicule qui lui encombre les naseaux. Tchi ! Le ridicule petit éternuement creuse un minuscule cratère devant lui.

Son bidon est maculé de neige. Il le frotte frénétiquement pour déloger les flocons importuns. Il souffle dessus pour chasser la désagréable sensation d'humidité qui s'insinue contre sa peau.
Mauvaise idée !
La minuscule flammèche jaune qui jaillit de son bec suffit à lui roussir le poil.
Première leçon

Stupéfaction.
Nouvelle tentative. Devant lui, cette fois. Il souffle légèrement plus fort et le jet de flammes atterrit à ses pieds en traçant un cercle parfait dans la neige fondue.

Sa mère esquisse un sourire. Elle le laisse mener ses propres expériences. C'est ainsi qu'il apprendra le mieux.

Nouvelle découverte, nouveau jeu. Il crachote à intervalles réguliers, à gauche, à droite, se créant un chemin sur lequel il sautille joyeusement.
Chaque pastille dessinée par son souffle devient un îlot de terre salvateur dans cette mer blanche infestée de féroces Carvanha. Lui, digne héros de cette aventure imaginaire, les repousse courageusement à coups de pieds, les assomme à coups de poings, les réduit en cendres à coups de son puissant lance-flammes !

Il parvient tout haletant devant un arbuste gelé. Pause. Un petit tas de braises fumantes tout droit sorties de ses naseaux s'accumule bientôt au pied du drôle de petit arbre.
Qui se met soudain à gigoter en tous sens pour déloger de ses racines les débris brûlants ! Le Blizzi n'apprécie pas vraiment le cadeau et lui envoie en retour une rafale de poudreuse qui le gèle de la tête aux pieds.
Deuxième leçon.

Prisonnier !
Enveloppé d'une mince gangue de glace, Magby ne peut plus effectuer le moindre mouvement. Sa silhouette cristallisée en une posture inconfortable rappelle celle d'un épouvantail à Etourmi. Seuls deux petits nuages de fumée noire s'échappent des narines de la statue bleuie par le froid.
Mais peu à peu, de fines gouttelettes commencent à suinter le long de son corps et se rejoignent pour former un entrelacs complexe qui dégouline de plus en plus vite vers le sol. La chaleur naturellement élevée de son organisme le libère de sa prison de glace.

Mouillé !
Il a piètre allure. Sa volumineuse touffe de cheveux pendouille lamentablement en mèches filasses devant ses yeux. De minuscules stalactites de glace font de la résistance et s'accrochent encore à sa queue. Son poil est trempé, agglutiné en paquets disgracieux collés à ses flancs, lui donnant l'air d'un Miaouss mouillé.

Froid !
Il grelotte si violemment qu'il ne peut contrôler les claquements convulsifs de son bec.
La désagréable sensation s'insinue insidieusement en lui et se répand tel un poison dans les moindres recoins de son corps. Secoué par une série d'éternuements irrépressibles, il expulse de minables petits jets de suie poisseuse qui dégoulinent le long de son menton.
Son feu intérieur s'éteint. Angoisse.

Deux grosses larmes perlent au bord de ses grands yeux implorants et roulent interminablement sur ses joues.
Maman !

Plus haut, un grondement impressionnant secoue le plateau silencieux. Il tourne la tête, inquiet, et sa petite figure pitoyable s'éclaire d'un sourire d'espoir. Maman !

Les deux bras en avant, fendant le manteau neigeux tel un bulldozer, la femelle Maganon dévale la pente. Elle s'ouvre un large boulevard à coups de canon puissants dont l'écho se répercute de loin en loin dans toute la vallée. Elle projette sans interruption d'énormes boules de feu qui vaporisent la neige et volatilisent les obstacles devant elle.
Elle court. Aussi vite que le lui permettent ses courtes pattes.
Derrière elle, tout n'est que chaos. La large cicatrice laissée par son passage est jalonnée d'éclats de rochers noircis, d'arbres tordus et calcinés.

Enfin elle est là.
Elle soulève dans ses bras encore fumants la petite chose mouillée et grelottante et l'étreint contre sa puissante poitrine.
Tout en remontant à pas lents la piste dévastée, elle le berce dans un murmure de paroles douces et réconfortantes et regagne son refuge à flanc de montagne.

Le petit, niché confortablement contre le corps maternel, se réchauffe progressivement au contact du pelage chaud et doux. Au bout d'un moment, il réussit à crachoter une petite flammèche dont la couleur jaune le rassure définitivement. Ses paupières papillonnent de fatigue. Avant de se laisser couler dans le sommeil, il a encore le temps d'apercevoir le nid du Cadoizo en haut de l'escarpement. Il ira peut-être l'explorer demain.
Demain...

Sur la steppe immense, le soleil décline et sa lumière rasante allonge peu à peu l'ombre des rochers et des sapins. Quand il plonge enfin derrière l'horizon en un flamboiement ultime, le ciel se met à égrener lentement quelques flocons blancs et duveteux qui tourbillonnent un instant dans le vent du soir avant de se poser délicatement sur le sol gelé.

Il va neiger cette nuit.

De l'autre côté du versant, une femelle Mammochon chemine tranquillement, son petit sur le dos.