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S'avouer vaincu de Pikercy



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» Auteur : Pikercy - Voir le profil
» Créé le 12/08/2009 à 00:17
» Dernière mise à jour le 12/08/2009 à 00:18

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7 - Sous les frondaisons grasses
---I---


Elle joue dans le parc municipal d'Azuria. Elle aime se retrouver là, lorsqu'elle ne peut plus supporter ses trois sœurs. Le léger bruit de la fontaine agrémente ses moments de paix, qu'elle apprécie particulièrement. Avec ses petites jambes, elle se hisse difficilement sur le rebord de la fontaine. Elle aime sentir la fraîcheur de l'eau sur ses pieds. Un des Poissirène de la fontaine vient barboter autour d'elle. Sa nageoire dorsale, souple et gracieuse, vient lui chatouiller les mollets. Elle rit, d'un petit rire cristallin. Le jet d'eau, en retombant, éclabousse légèrement ses cheveux roux, coupés courts. Elle regarde fascinée le Poissirène qui maintenant saute hors de l'eau, pour marquer son contentement. Les Pokémon Eau sont si gentils avec elle, alors que ses grandes sœurs viennent de lui demander de les laisser jouer entre elles. Elle regarde encore une fois le Poissirène sauter hors de l'eau. Elle rit. Elle est heureuse, dans la fraîcheur de l'eau baignée des rayons du soleil d'Azuria. C'est décidé : elle sait qu'elle ne sera vraiment heureuse qu'avec des amis Pokémon aquatiques. Elle essaye d'amorcer le dialogue avec le Pokémon, même si elle ne sait pas encore bien parler.
« Poi… Poi… Poissrne ! Poissnère ! Poissirne ! »
Poissirène réagit, lui sourit, saute au-dessus de sa tête, en l'éclaboussant encore plus. Elle rit. Elle est heureuse.



***


Sacha, Pierre et Aurore marchaient d'un pas vif vers le Centre Pokémon d'Unionpolis. La tension était palpable et bon nombre de passants de retournaient en croisant ces trois jeunes gens qui étaient au bord de l'explosion.
« Tu ne savais pas, tu ne savais pas, c'est facile aussi, maintenant tu peux me dire où elle est passée ?
- Mais, Sacha, évidemment que je ne peux pas te le dire, elle a quitté l'arène alors qu'on y voyait comme à travers une pelle ! Et elle m'a dit qu'elle t'attendait à la sortie, au bout d'un moment, j'avais pas tellement de raisons de la retenir…
- Et ça t'as pas paru bizarre qu'elle décide ça alors qu'elle pouvait très bien venir me rejoindre avec vous à la fin du match non ?
- Pikachu-Pi, Pika… commenta la petite souris jaune d'un ton désabusé.
- Mais, si elle avait envie de partir, pourquoi on ne la laisserait pas tranquille ? demanda Aurore.
- Parce que je la connais mieux que toi et que ça ne lui ressemble pas, répondit-il sèchement. »
Aurore se renfrogna et suivit la marche les mains dans les poches, alors qu'ils passaient les portes du Centre, qui s'ouvrirent automatiquement sur leur passage.
« Inf… »
Pierre était entré en trombe, mais avant d'avoir pu prononcer le nom de sa bien-aimée, il fut tiré en arrière par Sacha qui lui agrippa la veste, et le projeta contre la porte d'entrée, contre laquelle il s'écrasa, avant même qu'elle ait pu se rouvrir.
« Infirmière, j'ai besoin de savoir si vous avez vu une fille aux cheveux roux il y a environ une dizaine de minutes. Elle a peut-être retenu une chambre ? Ou déposé ses Pokémon ici en attendant de les récupérer ? Elle s'appelle Ondine.
- Ondine ? Ondine d'Azuria ? La championne qui a disparue ? Elle est à Unionpolis ? Si elle avait dû s'arrêter au Centre, j'aurais au moins remarqué son nom, malheureusement, elle n'est pas venue, encore moins il y a dix minutes… Désolée… »
Les épaules de Sacha s'affaissèrent. Etait-elle définitivement partie ? Sans laisser de mot, sans aucun moyen de la contacter ? Il frappa le bureau de l'accueil du Centre du poing. Pierre le tira vers lui, autant pour lui éviter de faire une bêtise que pour protéger les beaux yeux de l'Infirmière Joëlle.
« On va la retrouver Sacha, on n'a qu'à partir à sa recherche.
- Tu m'expliques par où passer ? Elle a pu partir de n'importe quel côté, et Unionpolis est encerclée par la forêt, pas moyen d'envoyer Etourvol en reconnaissance !
- On peut peut-être se séparer ? tenta Aurore.
- Ah, je t'en prie, pas la peine d'essayer de te rattraper, Aurore ! Mais pourquoi tu t'es disputée avec elle aussi ? Tu la connais à peine et déjà tu lui parles comme si elle était une rivale personnelle pour les concours, pire encore puisque tu n'as jamais parlé comme ça à Kenny ou à un autre. Tout ça c'est de ta faute ! »
Le visage d'Aurore vira du vert au blanc avant de s'arrêter sur un teint rouge violacé du pire des effets.
« Puisque c'est comme ça, tu n'as qu'à aller la chercher tout seul ta copine ! Et puisque ça te viendra pas à l'idée de te demander où moi je suis passée, je serai dans ma chambre en attendant votre bon plaisir. »
Elle tourna les talons, excédée, et monta les étages du Centre, alors que Sacha quittait le bâtiment à toutes jambes. Pierre était seul au milieu du hall.
« Heu… Infirmière Joëlle ? »


***


Elle est sur le bord de la fontaine depuis deux heures maintenant. Le ciel venait de prendre la couleur mordorée de la tombée du jour. Elle a l'impression de vraiment pouvoir parler avec Poissirène maintenant. Depuis quelques minutes, elle est tombée dans la fontaine, et se retrouve assise à patauger sur le bord. L'eau claire s'est faufilée sous ses vêtements, qui collent à sa peau. Elle rit de cette sensation de fraîcheur. Elle aime l'eau, elle le sent. Poissirène fait maintenant des ronds autour d'elle dans l'espace restreint de la fontaine. Soudain, le poisson se met à s'agiter, à nager en des mouvements désordonnés. Elle perd son sourire, et se demande pourquoi son nouvel ami ne s'amuse plus avec elle. Un drôle de bruit lui fait lever les yeux. Deux Dardargnan survolent la fontaine, et s'apprêtent à attaquer le Poissirène. Celui-ci s'échappe dans le conduit d'alimentation. Elle est seule maintenant. Le jeu est terminé. Elle pleure.


***


Ondine était toujours inconsciente, adossée à un arbre proche de la petite clairière où Charles et Bolly avaient décidé de s'arrêter avant de prendre la route des airs vers Kanto. Tandis qu'ils mangeaient leur maigre ration, Charles agitait les morceaux de viande de sa gamelle avec ses petites baguettes de voyage, sans pour autant les avaler. Bolly, qui avait déjà fini depuis longtemps, jeter son récipient sur le sol et regarda son partenaire.
« Alors ?
- Alors quoi ?
- Qu'est-ce qu'on fait ? On y va ou pas ?
- On attend qu'elle se réveille, peut-être. On va pas revenir la bouche en cœur à la base sans avoir les infos qui nous intéressent, si ?
- Oh, mon pauvre Charles, ce n'est pas moi qui ais la bouche en cœur ici, répliqua-t-elle dans un sarcasme satisfait.
- Je ne trouve pas ça drôle.
- Ce que je ne trouve pas drôle moi, c'est comment tu as réussi à te retrouver aussi gradé en te débrouillant pour tenter de séduire toutes tes prises féminines. Ce n'est pas toléré Charles. D'autant plus que tu te plantes une fois sur deux, je dois te rappeler comment on a foiré notre mission à Vestigion quand tu t'es fait repéré deux jours avant par Flo ?
- Ma pauvre Bolly, ce que tu n'as jamais toléré toi, c'est bien que j'ai toujours eu des meilleurs résultats que toi, et surtout que ce soit toi que je n'ai jamais tenté de séduire, non ?
- Toi ? (Elle éclata d'un rire sonore). Plutôt embrasser un Spoïnk !
- Comme tu voudras, alors tu ne verras pas d'objection à ce que j'use de la méthode douce avec notre invitée. Ce n'est pas parce que nous sommes les méchants qu'il faut forcément se comporter comme des malotrus, non ? »
Sur ces mots, il repositionna son chapeau sur son crâne lisse et tourna le dos sa partenaire qui fulminait. Il se dirigea vers la jeune fille inconsciente et lui bougea sa jambe gauche avec son pied.
« Allez ma jolie, on se réveille maintenant ! »
Ondine gémit et se repositionna, les yeux toujours clos.


***


Elle le suit depuis Jadielle. Cet imbécile a détruit son vélo, qu'elle s'est payé voilà deux semaines avec ses économies ! Ce Pikachu l'a complètement carbonisé ; mais bon, il est si mignon, qui pourrait résister ? Une chance pareille de quitter cette ville et cette vie de brimade avec ses sœurs, ça ne se manque pas, non ? Alors elle le suit. Lui ou un autre, qu'importe au fond ? Tout vaut mieux que ses sœurs.
Quoique, après cette première journée et cette première nuit, elle a quelques doutes. Il est inconscient, il ne sait pas ce qu'il fait. Il capture des Pokémon n'importe comment. Et surtout, il a capturé un Chenipan ! Un immonde Pokémon insecte. Elle le sentait se faufiler près d'elle, près de son sac de couchage. Elle dort crispée, serrant une serviette de toutes ses forces pour essayer de se calmer. Il est là, il se faufile, avec ses deux gros yeux et ses pattes gluantes. Elle hurle. Elle se relève. Il n'y a rien.
Il se redresse sur son coude, les yeux pleins de sommeil, et la regarde. Il se moque. Il n'y a pas de quoi rire. Elle a horreur des insectes, et alors ?
Voilà que le lendemain, après s'être débarrassés des deux idiots de Jadielle, il essaye de la réconcilier avec l'immonde chenille. Elle hésite, dégoûtée. Elle regarde la chenille. Elle le regarde, lui et sa casquette, et ses grands yeux qui ne veulent pas lâcher le morceau. Elle esquisse un geste pour caresser la chenille. Un contact parfaitement horrible. Et la voilà qui évolue. Il saute de joie, l'emmène danser avec lui. Elle se remet, mais il est déjà parti en courant vers Argenta. Elle en a déjà marre, et lui hurle de l'attendre, ce qu'il ne fait pas. Elle court derrière lui. Elle sait qu'il ne lui rendra pas son vélo de sitôt. Mais il est si mignon, qui pourrait résister ?



***


Ondine grimaça et replia ses fines jambes contre elle. La bouche pâteuse, elle ouvrit les yeux et tenta de s'étirer. Elle se rendit rapidement compte qu'elle ne pouvait plus faire le moindre mouvement, ses bras étant entravés derrière son dos. Elle s'était maintenant tout à fait extirpée de ses rêves indistincts. Elle leva les yeux pour découvrir un jeune homme de haute taille, plus âgé que lui, devant sans doute avoir dans les 26 ou 27 ans. Il avait de grands yeux clairs sous un large chapeau, qu'il avait relevé sur son crâne, laissant apparaître qu'il était chauve. Une drôle d'allure, mais l'ensemble ne déparait pas, si ce n'était son uniforme sombre qu'Ondine, même si elle ne l'avait jamais vu, reconnu tout de suite à son large « R » rouge se détachant du fond violet.
« Bonjour Ondine, tu as bien dormi ? »
L'homme avait pris une voix suave et chaude. Elle ne répondit pas, intimidée par cet inconnu de la Team Rocket. Elle n'a pas eu l'habitude de fréquenter d'autres sbires que les rigolos de Jessie et James. Elle sentait d'instinct que celui-ci était expert dans son domaine. La preuve : il connaissait déjà son nom.
« N'aie pas peur, je ne te veux aucun mal, tu peux me croire, dit-il en enlevant son couvre-chef.
- Ah oui ? répondit-elle en tentant de maîtriser sa voix. Et pourquoi je suis attachée alors ?
- Simple précaution pour que tu ne t'échappes pas pendant ton sommeil. Je me trompe où tu as quelques accès de somnambulisme depuis quelques temps ? »
Ondine avait le souffle coupé. Comment pouvait-il avoir une information pareille ?
« Allons, tu vois que nous ne sommes pas en terrain inconnu toi et moi, continua l'homme avec un sourire. Tu n'as même pas besoin de te présenter. Moi, par contre, je contreviens à toutes les règles de politesse. Je m'appelle Charles, pour te servir ma jolie. La blonde derrière moi s'appelle Bolly. Si elle te cherche, ajouta-t-il en baissant d'un ton, appelle-moi et je réglerai le problème. » Il termina sa phrase avec un clin d'œil charmeur. Elle ne répondit pas, trop interloquée pour réagir.
« Tu te demandes comment je sais tout ça sur toi ? Simple précaution rassure-toi, je ne sais que ce que j'ai besoin de savoir. Et pour le somnambulisme, il m'a suffit « d'interroger » l'ordinateur de ton médecin à Azuria : et j'ai eu raison, juste avant que tu ne te réveilles, tu t'es tellement agitée que j'ai cru que tu allais te lever en emportant l'arbre avec toi. Je ne sais pas à quoi tu rêvais, mais ça devait être intense ! Peut-être notre premier rendez-vous, va savoir ! » Il partit d'un rire sonore, qu'Ondine, bien évidemment, ne suivit pas. Il se retourna vers elle.
« Trêve de plaisanterie ! Avant de te détacher, je vais juste t'expliquer ce que nous attendons de toi. Tu verras, rien de bien exceptionnel. Nous allons juste te raccompagner chez toi. Tu es loin de Kanto et un petit voyage en avion sera bien plus rapide que de retourner à Joliberges prendre le bateau, tu ne crois pas ? D'accord, ce sera moins romantique que le ferry, mais nous aurons tout notre temps pour ça plus tard ! Une fois à Azuria, nous aurons besoin de quelques renseignements qui dorment dans ton arène, je suis sûr que tu n'en as même pas eu besoin jusqu'ici. Et surtout, nous ne te volerons rien, nous te rendrons tout ça immédiatement. Cependant, nous t'amenons car cela reste assez urgent… »
Sa voix mélodieuse était douce comme une musique aux oreilles d'Ondine qui avait du mal à enregistrer toutes les menues informations que Charles voulait bien lui délivrer.
« Mais… qu'est-ce que vous me voulez ?
- Rien d'important pour toi, ne t'inquiète pas. Maintenant je suis sûr qu'une jolie fille comme toi n'aime pas vraiment être attachée. Je vais te libérer… (Il marqua une pause et la regarda attentivement). J'ai toujours mal au cœur quand je vois une aussi belle créature attachée et sans défenses. »
Il s'accroupit à ses côtés. Entravée par ses liens, elle se recula autant que possible contre l'arbre à laquelle elle était attachée. Son visage était crispé en une moue dégoûtée. Pourtant, elle ne pouvait pas nier que ce garçon avait un côté séduisant. Il n'était pas ce qu'Ondine aurait appelé « beau », et il était plus âgé qu'elle. Bon, d'un côté, elle ne trouvait pas que Sacha soit un véritable canon de beauté, et puis elle avait toujours eu un petit faible pour les aînés – ah ! le bon temps des Iles Orange. Mais elle fut vite rappelée à la réalité. Sous cet élégant chapeau et derrière ses énigmatiques yeux bleus, il y a avait un agent de la Team Rocket. Ca devait être l'uniforme qui la faisait se reculer autant que possible. Ou alors le regard inhumain de la grande blonde qui regardait la scène depuis le petit feu de camp. Si elle pouvait me tuer sur place, je suis sûr qu'elle le ferait. Ce ne sont pas des Jessie et James bis... Pourtant, elle ne leur avait rien demandé, et n'avait rien fait de particulier à cette blonde dégingandée. Enfin, si je suis encore en vie et capturée, c'est sans doute qu'ils n'ont pas l'intention de me tuer, hein ? La tuer, peut-être pas, mais il restait toujours le problème de ce jeune homme qui la dévisageait, et qui se rapprochait d'elle inexorablement. D'ici elle pouvait sentir son souffle léger et doux, se mêlant au vent qui lui faisait s'égayer une mèche rousse qui lui tombait devant les yeux. Tout à coup, il sembla hésiter. Il soupira, puis leva une main en direction du visage de la jeune fille. La lèvre inférieure d'Ondine tremblait, alors que la main du Rocket s'approchait de son front, dans un geste faisait mine de remettre sa mèche en place. A son contact, Ondine tressaillit et dans un réflexe fulgurant, elle balança de toutes ses forces sa jambe droit devant elle.
Charles étouffa un juron, et donna un grand coup de pied dans le sac rouge de la championne qui alla s'écraser sur un arbre voisin, et s'ouvrit en libérant ses affaires, et notamment ses Pokéball qui roulèrent sur le sol. Le visage rouge et contracté par la douleur, il s'éloigna, plié en deux, jusqu'à rejoindre sa partenaire, totalement hilare. Ondine, quant à elle, tenta de reprendre le contrôle de sa respiration. Les veines de son cou palpitaient, et la sueur collait ses mèches rebelles à son front.


***


Charles maugréait derrière le petit avion, pestant contre son entrejambes douloureux, tandis que Bolly empaquetait leurs affaires en prévision de leur départ imminent. Ondine balayait la petite clairière des yeux, constatant que l'attention de ses deux ravisseurs était occupée à autre chose pour le moment. En même temps, cela était logique, vu comme elle était attachée par terre à son arbre, elle n'avait pas vraiment besoin d'être surveillée. Le frottement de la corde sur ses poignets commençait d'ailleurs à lui faire mal, elle s'imaginait déjà la rude marque rouge qui allait lui rester pour quelques jours. Non mais c'est pas normal, d'habitude la Team Rocket ne fait jamais les liens correctement… Elle soupira, ne voyant pas bien ce qu'elle pourrait faire : hors de question de crier à l'aide, voilà un bon moyen pour accaparer l'intention des deux imbéciles… Son regard s'arrêta sur son sac qui gisait quelques mètres plus loin. Impossible de l'atteindre de là où elle était, mais elle vit qu'une Pokéball avait roulé jusqu'à elle. Elle jeta un coup d'œil à Charles, qui, assis sur un rocher, se tenait la tête entre les jambes, et ne bougeait pas. Maintenant ou jamais. Ondine se glissa autant qu'il lui était possible contre le sol pour allonger ses jambes jusqu'à la balle. La corde lui imprimait maintenant une douleur atroce. Le frottement se faisait insupportable ; elle avait l'impression que chaque fibre de corde qui passait sur sa peau était une nouvelle aiguille plantée dans ses poignets. Elle gagnait du terrain, centimètre après centimètre, brin d'herbe après brin d'herbe. En grimaçant et en donnant une ultime impulsion à sa jambe, elle arriva à atteindre du bout du pied le mécanisme central d'activation de la Pokéball.
Il restait le problème du Pokémon qui allait sortir de là. Depuis qu'elle avait commencé à avancer sa jambe, elle récitait un mantra silencieux dans sa tête. Stari, pas Léviator… Stari, pas Léviator… Stari, pas Léviator… S'il te plaît… Stari, pas Léviator… Si l'immense serpent de mer débarquait dans la forêt, finie la discrétion. Certes, vu sa force, il pourrait résister un moment aux deux Rockets, mais eux ne se priveraient certainement pas d'utiliser tous leurs Pokémon contre lui...
La moitié rouge de sa Pokéball s'ouvrit, libérant un jet de lumière blanche. Stari, pas Léviator… Charles, les yeux fixant toujours le sol, ne remarqua pas le petit manège de sa prisonnière. L'éclat lumineux ne semblait pas devoir prendre une forme de six mètres de haut. Stari, Stari, Stari ! Le Pokémon apparut enfin devant les yeux médusés de la jeune championne.
« Psy ? »
C'est pas vrai…




---II---




Sacha tournait en rond à la lisière ouest d'Unionpolis. Il n'avait aucune idée d'où pouvait bien être partie Ondine. Ca ne lui ressemblait pas de partir comme ça. Oh si, ça lui ressemble bien en fait. Et ce fameux et triste jour où elle avait dû le quitter pour rentrer à Azuria de lui revenir soudainement à l'esprit. Là aussi elle était partie en trombe du Centre Pokémon de Jadielle et les avaient plantés là, suite à une remarque déplacée de Sacha. Oui, mais là, qu'est-ce que j'ai bien pu lui dire pour qu'elle prenne la mouche ? Il avait beau repasser et repasser encore le fil des événements dans sa tête, il ne voyait pas la raison pour laquelle la rouquine leur avait faussé compagnie en plein match – un des plus beaux matchs qu'il avait pu livrer, à son humble avis ! D'accord, le courant n'avait pas eu l'air de bien passer entre sa meilleure amie et Aurore, mais bon, il n'avait aucun doute que cela se serait arrangé avec le temps. Tous ses amis se sont toujours très bien entendus les uns avec les autres, il n'y a qu'à voir comment Flora et Ondine s'adoraient depuis qu'elles s'étaient rencontrées à Hoenn. Pourquoi ce ne serait pas la même chose à Sinnoh ?
« Pika ? interrogea son compagnon de toujours.
- Je ne sais pas où elle a bien pu partir Pikachu, ni pourquoi… Mais il faut la retrouver, elle ne peut pas nous laisser comme ça.
- Pika, Pikachu ! approuva son Pokémon.
- Tu as une idée de par où on commence ?
- Pikapi, Kapi ? demanda la souris en désignant le centre-ville.
- Retrouver Aurore et Pierre ? Ca nous ferait perdre du temps. Et puis Aurore est enfermée dans sa chambre. Pierre lui se débrouille toujours pour nous retrouver.
- Kachu ! Pikachu-Pi !
- La forêt ? Tu crois qu'elle a pu partir par là ? Ah mais, ajouta le dresseur avec une lueur dans les yeux, il y a la route de retour par là, vers le Mont Couronné ! Tu as raison, elle est sans doute partie dans cette direction, allons-y. »
Il partit à toute jambe sur le sentier qui menait à la forêt, toujours en proie à ses questions et à ses doutes. Il y avait quand même une innombrable foule de choses pour lesquelles il n'avait pas plus de jugeote qu'un Etourmi. Heureusement, il lui restait l'instinct.


***


« Re-trou-ver Sa-cha. Sacha ! Avec la casquette ! Tu te souviens, dis ? »
Psykokwak se tenait là, debout, la tête dans ses pattes, en plein milieu de la clairière. Sa peau jaune et lisse reflétait le soleil déclinant de cette fin d'après-midi, autant dire qu'un simple coup d'œil dans leur direction et Ondine et son Pokémon seraient immédiatement repérés par Charles ou Bolly et adieu à la solution de secours. Solution de secours qui, en la personne de Psykokwak, s'avérait plutôt être un problème, tout bien considéré… Le canard balançait sa tête de droite à gauche, n'ayant pas l'air de comprendre les ordres de sa dresseuse – pas plus de d'habitude en fait.
« Allez, va-t-en Psykokwak, s'il te plaît, va trouver Sacha, va lui dire que la Team Rocket est là, j'ai besoin de lui ! Psykokwak… Je t'en prie…
- Psaïaïe… gémit le Pokémon en s'approchant. »
Ondine serra les dents et ferma les yeux. Sa colère bouillait devant l'incompétence de son Pokémon.
« Espèce d'abruti… marmonna-t-elle entre ses dents. »
Elle inspira une grande goulée d'air, replia sa jambe droite et décocha un fantastique coup de pied à Psykokwak qui vola dans les fourrés en battant des bras pour essayer de retrouver son équilibre – ou peut-être était-ce une tentative pour s'envoler ? Ondine ne le sut pas, car il fut rapidement dissimulé dans les buissons où il s'était écrasé la tête la première, en n'oubliant pas de crier de terreur pendant son vol plané. Charles releva alors la tête du sol, mais, de là où il était, ne constatant pas de changement puisqu'Ondine avait rapidement repris sa position, se dit qu'il avait probablement entendu des voix avec la douleur de son bas-ventre.


***


Sacha marchait au beau milieu de la forêt depuis presque une demi-heure. Il balayait des yeux les fourrés, les arbres, les petits sentiers. Mais toujours pas de trace d'Ondine. Il avait l'impression d'errer dans un labyrinthe de verdure, sans issue. Il commençait à s'impatienter. Si Ondine avait déjà pénétré dans le Mont Couronné, pas la peine d'envoyer Etourvol. Si elle était encore dans la forêt, inutile là encore. Il était coincé et avait l'impression de ne rien pouvoir faire, tout seul au milieu de la végétation. Si encore Aurore et Pierre étaient là, ils pourraient se séparer. Mais elle était encore partie, inexplicablement vexée, et visiblement lui n'avait pas jugé utile le suivre. Qu'est-ce qu'il leur fallait ! Ondine avait disparu ! Pierre la connaissait aussi bien que lui et il ne venait pas ! Aurore ne la connaissait pas, mais la rouquine était sa meilleure amie, elle pourrait venir aider. Il n'aurait pas hésité une seule seconde si Kenny avait eu un problème ; mais visiblement la réciprocité ne se vérifiait pas.
Sacha fulminait. S'il y avait bien une chose qu'il ne supportait pas, c'était de rester là, à rien faire. Mais en même temps, en tournant en rond autour de cet arbre, il se demandait ce qu'il venait réellement faire ici. Si Ondine avait décidé de repartir, elle était bien assez grande pour prendre sa décision toute seule. Il était bien fini le temps où ils n'allaient jamais quelque part sans l'autre, en se demandant où l'autre était passé, s'ils se retrouvaient séparés plus de dix minutes sans l'avoir décidé. Ondine avait sa vie ! Elle n'était pas restée enfermée dans son arène depuis un an sans en sortir ! Déjà tant de temps lui et la rouquine ne réglaient plus leurs journées ensemble. Est-ce qu'il le regrettait ? Mais enfin, à quoi est-ce que je pense ?
Lors de leurs adieux, il avait de justesse réussi ne pas montrer sa faiblesse devant elle. Et devant Pierre ; il était là lui aussi. Seul Pikachu l'avait jamais vu dévasté de cette façon. Ce n'était pas pour recommencer, là, à côté d'une des plus grandes villes du pays, où n'importe qui pourrait surgir et le voir. A cette pensée, il entendit le bruit d'une cavalcade qui venait dans sa direction. Il se ressaisit, prêt à tout. Un gros buisson s'agitait en tous sens, jusqu'à ce qu'une masse jaune en sorte à toute vitesse.
« Psaïaïaïaïaïaïaïaïaïe ! »
Un Psykokwak, les larmes aux yeux, se tenant la tête à deux mains, sortit du buisson, agitant frénétiquement ses petites pattes pour courir. Il se réceptionna au sol tant bien que mal et reprit sa course, tandis qu'une masse de poils blancs et rouges émergeait à sa suite des profondeurs de la forêt. Un Mangriff ! pensa Sacha, qui avait déjà eu à faire à ces redoutables traqueurs des bois. Celui-ci en avait vraisemblablement après le petit canard apeuré. Le sang de Sacha ne fit qu'un tour.
« Pikachu, attaque Tonnerre, vite ! »
Son compagnon de toujours sauta de son épaule pour s'interposer entre Psykokwak et Mangriff. Il se chargea en électricité et expédia un éclair dévastateur au prédateur. Secoué et affaibli par la longue course à travers les fourrés, il s'effondra, le poil hérissé par l'électricité statique qui parcourait son corps. Psykokwak, cependant, continuait de courir en tout sens. Sacha vint à sa rencontre pour essayer de le calmer.
« Hé, calme-toi, tu n'as plus rien à craindre maintenant ! »
Mais le canard continuait encore de se lamenter, tant et tant que ces cris devinrent familiers au dresseur. Mais je le connais ce Psykokwak ! Les yeux de Sacha doublèrent de volume quand il réalisa qu'il avait devant lui le plus crétin de tous les Psykokwak, mais aussi celui qu'il préférait au monde, celui de la championne d'Azuria. Il l'agrippa des deux mains et le souleva du sol.
« Psykokwak ! C'est moi, Sacha, calme-toi ! Qu'est-ce que tu fais hors de ta Pokéball ? Où est Ondine ? Psykokwak ? »
Rien à faire, le canard agitait des pattes palmées comme s'il était encore au sol. La panique irrationnelle de Psykokwak commençait à gagner Sacha qui ne cessait maintenant de lui reposer encore et encore les mêmes questions. Face au vacarme engendré par les cris du canard et les hurlements du dresseur qui tentait de passer par-dessus, les Keunotor et Fouinette sauvages s'éloignèrent des lieux de l'agitation. Soudain, entre les mains de Sacha, Psykokwak s'immobilisa, une aura bleutée flottant dans ses yeux encore plus vitreux que d'habitude. Les cris du jeune garçon avaient fait monter sa migraine au point critique, déclenchant ainsi ses pouvoirs psychiques. Sacha ne pouvait détacher ses yeux de ce regard bleutés et alors qu'il était dans une inquiète expectative, se demandant comment Psykokwak allait cette fois-ci traduire ses mystérieux pouvoirs, son esprit fut traversé d'une plainte suppliante, comme si on lui avait chuchoté dans le creux de son oreille. « Va retrouver Sacha, j'ai besoin de lui. Psykokwak, je t'en prie ! ».
Les yeux du canard jaune retrouvèrent alors leur aspect habituel, après avoir déliré cette version bien particulière de son Choc Mental. Sacha se redressa, le Pokémon sous son bras et s'enfonça dans la forêt d'Unionpolis. Ondine avait des ennuis.

***

Bolly avait apparemment terminé les préparatifs du départ et Charles s'était remis de l'accès de révolte de la jeune championne. Il n'avait pas eu de réaction violente à son égard, comme elle l'avait craint un moment. Mais tout était empaqueté dans le petit avion et venait sans doute le temps du départ. Charles s'approcha d'Ondine.
« Si tu recommences, j'ai prévenu Bolly de ne pas rester les bras croisés cette fois-ci. Après, c'est à toi de choisir le confort de ton voyage ma mignonne.
- Vous croyez vraiment pouvoir arriver à Kanto comme ça ?
- Oh, et qu'est-ce qui pourrait nous en empêcher, hein ? dit Bolly en s'avançant. Tes pauvres sœurs ? Elles sont bien trop occupées à essayer de sauver l'arène que tu as laissée tomber ! Ou bien ton petit copain dresseur ? Mais j'ai cru comprendre qu'il était plus intéressé par une autre demoiselle en ce moment, c'est pas ça ? »
Ondine s'efforça de paraître imperturbable.
« Remarque, je le comprends, tout vaut mieux qu'une rousse non ? »
Bolly fit volte-face avec un éclat de rire.
« Allez, grommela Charles, je te détache, mais pas de bêtise. Et, lui glissa-t-il à l'oreille, pour les rousses, je ne suis pas d'accord avec elle. »
Il se pencha derrière la jeune fille, en prenant bien garde de ne pas la frôler. Il ne risquait pas d'ailleurs, Ondine faisant un effort de contorsion pour ne pas toucher son ravisseur au détour d'un mouvement. Une fois ses liens défaits, Charles la saisit sous les bras pour l'aider à se relever, mais la jeune fille se dégagea d'un mouvement du bras.
« Je sais encore marcher !
- Comme tu voudras, murmura-t-il. »
D'un geste, il l'invita à prendre sa place à l'arrière du petit avion, lorsque des bruits de pas précipités lui firent tourner la tête.
« Attaque Charge ! »
Une masse sortie des fougères percuta Charles en plein ventre, ce qui lui fit se tordre de douleur, une nouvelle fois.
Ondine n'avait pas eu besoin de se retourner pour reconnaître sa voix.
« Sacha ! »
Le dresseur sortit de la lisière de la forêt et déboucha en trombe sur la clairière. Tortipouss vint se repositionner devant lui.
« Ondine ! Je suis là. »
Elle courut le rejoindre, laissant derrière elle le Rocket massant son ventre douloureux et ramassant son chapeau tombé à terre. Lorsqu'ils furent à la hauteur l'un de l'autre, Ondine arrêta sa course lentement. Ils semblaient tous les deux hésiter. Jamais ils ne s'étaient sautés dans les bras, pourquoi commencer aujourd'hui ? Après tout, ils ne s'étaient quittés qu'il n'y a que deux heures de ça. Ils ne sauront jamais que c'était précisément ce dont ils avaient le plus envie l'un et l'autre. Ondine sourit, leva sa main, et lui serra le bras gauche.
« Merci d'être venu… chuchota-t-elle.
- Remercie Psykokwak qui a parfaitement délivré ton message ! répondit-il avec un sourire en lui présentant le canard devant les yeux.
- Kokwak ? dit le Pokémon en inclinant la tête.
- Merci Psykokwak… »
Elle serra son Pokémon dans ses bras, si fière qu'il ait réussi enfin quelque chose. Sacha avait préféré passer sous silence l'épisode du Mangriff. Il y avait mieux à faire.
Il s'était avancé devant Ondine avec Tortipouss, prêt à se battre. La jeune fille rappela Psykokwak, frotta ses poignets endoloris, avant de saisir une Pokéball dans son sac et de faire trois pas devant elle.
« Je me bats avec toi, Sacha.
- Comme au bon vieux temps ! dit-il avec un sourire, qu'elle lui rendit. »
Charles se fendit d'un petit rire. Il était remis de l'attaque de Tortipouss
« Comme c'est touchant. En même temps ma belle, tu me brises le cœur ! Mais tu sais, j'ai souvent des histoires de cœur désespérées et même quand ça se passe mal, je n'arrive pas à en vouloir à mes Dulcinées. Je ne pourrais jamais te faire le moindre mal ! Et si tu tiens tellement à ce garçon, je ne pourrais pas lever sa main sur lui non plus ! (Il feignit un sanglot). Ca me désole de voir que vous vouliez encore vous battre, alors que je ne le pourrais pas ! Bolly, s'il te plaît, sortons-nous de ce mauvais pas en évitant le combat !
- Je suis obligée d'être d'accord avec toi ? soupira sa partenaire devant la pantomime de Charles. »
Les deux Rockets s'avancèrent face aux deux jeunes dresseurs, qui s'étaient crispés devant les allusions qui avaient parsemé le petit discours du bandit. Bolly et Charles, sourire aux lèvres, avaient une Pokéball dans leur main.



---III---



Tortipouss lâcha un petit cri, signifiant à son dresseur qu'il était prêt au combat qui s'annonçait. Qu'importaient les discours des deux bandits, ils avaient chacun une Pokéball en main, c'est donc que le combat allait s'engager. Avant que l'un des deux esquisse un mouvement, Sacha eut le temps de les étudier un peu et se rendit vite compte qu'il ne les avait jamais vus ces deux-là.
« On peut savoir qui vous êtes tous les deux ?
- Oh, nous ne nous sommes pas présentés au nouvel arrivant, quel manque de tact, dit Charles avec une mimique outragée. Hé bien, voici Bolly et moi je suis Charles, simple agent itinérant et le cœur prêt à être emporté par toute jolie jeune fille qui aurait la bonté de le ramasser, continua-t-il en faisant une révérence avec son chapeau, destinée visiblement à Ondine. »
Sacha jeta un coup d'œil interloqué son amie, qui fit un geste de dénégation.
« Il est complètement marteau ! dit-elle à Sacha, sentant une barre rouge lui monter au visage.
- Oh, j'aurais au moins réussi à provoquer une once de jalousie. Une timide éclaircie sur mon humble carrière. »
Sacha fit volte-face, furieux et lui aussi ronge de honte.
« Je n'aime pas tes grands airs. Tu es de la Team Rocket !
- Hé oui que veux-tu, je l'admets, concéda-t-il avec un large mouvement du chapeau, en s'inclinant et présentant son crâne chauve. Il faut bien vivre !
- Comment se fait-il que vous n'ayez pas de ritournelle comme vos copains ?
- Mais de qui parles-tu donc ? Jessica et James ? Voyons, nous sommes un peu plus distingués que ces Rocket de troisième zone ! Voilà des années que les agents n'ont plus à se présenter par une chansonnette stupide. Nous préférons faire ça dans la simplicité, c'est bien mieux, non ?
- Bien mieux en effet, ajouta Bolly d'un air mauvais en faisant un pas dans la direction de Sacha et d'Ondine. »
Tortipouss grogna et serra les dents.
« Maintenant, ma chère, ma tendre Ondine, reprit Charles. Nous pouvons éviter tous les ennuis si tu avais la gentillesse de m'accompagner. Oh, j'en serais tellement ravi. Allons, je te promets de te ramener à Sinnoh si tu souhaites le retrouver. Ne vous fiez pas à cet uniforme, après tout, je suis comme vous, un défenseur de l'amour et de la vérité ! J'admets que je n'ai pas la moindre chance contre ce jeune homme, je m'en voudrais tellement que vous ne soyez pas réunis tous les deux…
- Mais vas-tu te taire au bout d'un moment ? hurla la championne. Tu m'énerves, et quand on m'énerve, ça se passe mal ! Corayon, à l'attaque ! »
Ondine jeta sa Pokéball qui libéra un de ses combattants favoris. Le Pokémon Corail se positionna à côté de Tortipouss, qui lui fit un signe de tête en guise de présentation, tandis que Charles éclatait de rire.
« Quel teint ! Quel teint ! Ondine, tu es encore plus belle lorsque tu te mets en colère ! Dis-moi, ça lui arrive souvent ? demanda-t-il à Sacha.
- Heu, hé bien… (Sacha mit sa main derrière la tête et rit d'un air gêné)
- Fais attention à ce que tu vas dire si tu veux pas y passer toi aussi !! se déchaîna la rouquine. »
Charles regarda Bolly d'un air satisfait.
« Qu'est-ce que vous attendez pour sortir votre Pokémon, espèce de lâche ? cracha Ondine, furieuse. »
Charles obéit et lança la Pokéball qu'il avait à la main. Celle-ci heurta le sol et libéra son Tartard, qui banda ses muscles devant Tortipouss et Corayon. Son dresseur avait un large sourire. Sacha et Ondine se regardèrent. Ils se demandaient ce qu'attendait Bolly pour intervenir. Charles retira son chapeau et le présenta à nouveau aux deux jeunes dresseurs.
« Si vous désirez forcément en passer par là, honneur aux demoiselles ! »
Il n'en fallait pas plus pour décider Ondine, et Sacha qui fut bien obligé de suivre, pour lancer l'attaque.
« Corayon, utilise Picanon !
- Tortipouss, attaque Tranch'Herbes ! »
Les deux Pokémon ne se connaissaient pas. Mais toutes les recherches du Professeur Chen avaient montré depuis longtemps que l'entente des Pokémon lors des matchs en double dépendait pour l'essentiel à l'entente qui régnait entre les deux dresseurs. Tortipouss et Corayon semblaient se connaître par cœur. Les deux attaques se combinèrent et les feuilles tranchantes comme les éclats de corail se précipitaient vers Tartard qui n'avait pas l'air décidé à esquiver. Ce fut à cet instant que Bolly décida d'intervenir en lançant sa Pokéball juste devant le Pokémon aquatique.
« Xatu ! Utilise Abri ! »
La Pokéball, posée au sol, s'ouvrit. L'éclair blanc prit la forme d'un étrange oiseau, tourné de profil, aux couleurs noire et verte. Il écarta les ailes ; ses yeux, autour de son fin bec jaune, brillèrent d'une aura rose. Un large bouclier réflecteur aux tons bleus-verts apparut devant lui, bloquant facilement les deux attaques combinées. Une fine poussière se dégagea. Ni Tartard, ni Xatu, n'étaient touchés.
« Lâches ! C'est bien ce que je disais, dit Ondine.
- Oh, non ! répondit un Charles dépité. Ce n'est pas très fair-play de traiter ses adversaires de lâches. Une championne comme toi devrait le savoir ! C'est ainsi que tu traites des challengers à l'arène d'Azuria ? Et toi, mon jeune ami, avec tes trois Ligues différentes, tu n'as pas appris le savoir-vivre à ta copine ?
- Comment vous…
- Ne lui réponds pas ! jeta Ondine.
- Lâches, lâches… reprit Charles. Non, vraiment, je ne me reconnais pas dans cette accusation. Nous décidons juste de changer quelque peu les règles ! »
Il termina sa phrase d'un sourire et jeta un regard entendu à Bolly qui inclina la tête. Sans dire un mot, elle claqua des doigts. A ce signal, Xatu s'envola en silence et se percha sur un arbre.
« Attention ! cria Sacha à leurs deux Pokémon. »
Cette étrange manœuvre d'esquive était pour le moins inattendue.
« Amusons-nous un peu maintenant, déclara Charles. Tartard, attaque Brume ! »
Le Pokémon aquatique ferma les yeux, banda ses muscles, les poings serrés. La spirale au centre de son corps commençait à rayonner. Concentré, il libéra son énergie et réchauffa son corps froid, ce qui eut pour effet immédiat de faire s'évaporer les fines gouttelettes d'eau qui le recouvraient. Par ses étranges pouvoirs, la vapeur se densifia et sembla se multiplier en un épais manteau de brouillard qui envahissait la forêt.
« Tortipouss ! Arrête-le avec Tranch'Herbes !
- Xatu, utilise Protection ! »
Perché en haut de son arbre et grâce à ses pouvoirs psychiques, Xatu fit apparaître un nouveau mur invisible devant Tartard qui arrêta l'attaque Tranch'Herbes, lui permettant finir son attaque Brume. Désormais, Sacha et Ondine, pourtant l'un à côté de l'autre, ne se voyaient plus que difficilement.
« Sacha, prends ma main ! cria Ondine. »
Leurs paumes se cherchèrent dans le brouillard et se trouvèrent. Ondine ne put s'empêcher de tressaillir à ce contact, lorsqu'elle entendit un nouvel ordre de Bolly.
« Attaque Tornade ! »
Xatu s'envola une nouvelle fois et ne battit vigoureusement des ailes que trois fois. La densité de la brume provoquée par Tartard était telle que la Tornade ne dégagea pas la vue. Cependant, l'oiseau avait visé exactement le couple de dresseurs et la précision redoutable de son attaque eut pour effet de les arracher l'un à l'autre, la pression étant trop forte pour que Sacha puisse garder la main d'Ondine dans la sienne. Désormais ils ne se voyaient plus à travers le rideau de brume.
« Ondine !
- Je suis là Sacha, je t'entends. »
Tortipouss s'était reculé aux pieds de son dresseur, Corayon avait rejoint Ondine. Ils ne se voyaient plus, mais ne voyaient plus non plus leurs adversaires ; les arbres entourant la clairière où ils se trouvaient emprisonnaient le manteau de brume qui persistait. A nouveau, la voix tranchante de Bolly retentit à leurs oreilles.
« Xatu, attaque Distorsion ! »
Ondine crut que ses yeux lui jouaient des tours. Derrière elle, les arbres semblaient se tordre, les feuilles se renverser ; la brume dansait devant ses yeux. Là où il n'y avait qu'un chemin qui s'enfonçait dans la forêt, il lui semblait y en avoir trois.
« Sacha ! cria-t-elle, apeurée.
- Je suis là ! lui répondit-il. »
Ondine perdait décidément la tête. Elle savait que Sacha était à sa droite depuis le début de l'affrontement. Mais elle avait la certitude d'avoir entendu sa voix à sa gauche et derrière elle qui plus est. Elle ne s'était jamais trompée, elle aurait pu reconnaître sa voix entre mille. Pourquoi avait-il changé de position ? Elle se retourna et vit, à travers les volutes de brouillard, l'oiseau Psy volait tranquillement au-dessus d'elle, la perçant de son regard vif.
« Corayon, Picanon sur Xatu, vite ! »
Le petit Pokémon se retourna, resserra ses cornes et envoya une flopée d'éclats de corail sur l'oiseau. Ondine suivit les projectiles des yeux mais vit que l'attaque de son Pokémon bifurqua juste avant d'atteindre sa cible pour se perdre dans les arbres proches. Impossible ! Corayon a une précision à toute épreuve !
« Xatu, utilise Reflet ! »
Cette fois, Ondine ne put absolument pas déterminer d'où venait la voix de Bolly. A gauche ? Derrière elle ? Devant elle ? A droite ? L'écho de sa voix semblait être répercuté par les buissons qui s'entêtaient dans un mouvement de va-et-vient qui finit par lui faire tourner la tête. Elle ferma les yeux quelques secondes pour éviter de perdre l'équilibre. Lorsqu'elle les rouvrit, Xatu avait disparu, mais pas ses yeux perçant, d'un jaune d'or. Mais ils n'étaient pas seuls. Sous les branches des vieux chênes, des dizaines de paires d'yeux, tous identiques, semblaient la fixer, la sonder.
« Ondine ! »
La voix de Sacha, encore, mais cette fois beaucoup plus loin.
« Sacha… murmura-t-elle. Corayon, revient ! »
Le rayon rouge de la Pokéball fut une des seules lumières qui perça le rideau de brouillard. Elle rangea sa balle à sa ceinture, avant de se précipiter dans les fourrés, là où Sacha criait son nom.
Quelque part dans la forêt d'Unionpolis, Charles releva son chapeau, un sourire carnassier lui barrant le visage.
« Que la partie commence. »